Un douanier témoigne sur les massacres de Winniza et de Brailoff

«Quand les Juifs ont vu à quel point c'était facile de se faire fusiller…»

Assassinat de Juifs, un spectacle public


Extrait de

Pour eux «c’était le bon temps», la vie ordinaire
des bourreaux nazis

, ,


Traduit de l’allemand par Métais-Bührendt. Éditions Plon, 1989.
© Éditions Plon 1989
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Document original en allemand / Deutsches Original


En avril 1940, j’ai été mobilisé dans un régiment d’infanterie à Kassel. Après la période d’instruction, j’ai été affecté dans les douanes. Mon unité a été formée à Kassel. Nous sommes partis pour la Pologne, puis plus tard en Russie. Je suis arrivé à Winniza avec mon unité, en passant par Kamenez Podolsk. Nos effectifs étaient d’environ 120 hommes, nous sommes arrivés tout de suite derrière les troupes combattantes […].

J’ai d’abord passé 4 semaines à Winniza. Des exécutions en masse ont eu lieu pendant cette période. C’était des Juifs qu’on fusillait, sans aucun doute. Il s’agissait d’hommes, de femmes et d’enfants. En somme, tout ce qui était juif était exécuté. J’ai aussi assisté à ces exécutions. C’était horrible. Les exécutions avaient lieu en dehors de Winniza, mais pas très loin, dans des fosses que les Juifs avaient dû creuser eux mêmes. Mais ils avaient eu de bons outils, des pelles et des pioches.

Puis les exécutions se déroulaient de sorte que les «délinquants» se plaçaient sur le bord de la fosse, le dos tourné vers les tireurs, et étaient abattus par derrière d’un coup de pistolet mitrailleur dans la nuque. Celui qui ne tombait pas dans la fosse recevait un coup de botte. En ce qui concerne les tireurs, il s’agissait en tout cas de policiers. Ils portaient l’uniforme vert, ils étaient donc bien reconnaissables. Il n’y avait que deux tireurs qui procédaient aux exécutions […].

Sur le bord de la fosse, c’était comme ça: il fallait que 15 à 20 personnes environ s’alignent. Puis les deux policiers les abattaient les uns après les autres. Des scènes abominables se sont déroulées. Mais quand les Juifs ont vu à quel point c’était facile de se faire fusiller, ils se sont mis à courir d’eux mêmes vers les lieux d’exécution. Ils se sont même bousculés. Il faut aussi que j’ajoute que les Juifs, quand on les exécutait, étaient déjà à moitié morts de faim. Ils n’avaient sans doute rien mangé depuis déjà des semaines. Je peux dire que, pendant les 4 premières semaines que j’ai passées à Winniza, on a procédé à des exécutions tous les jours. Il se peut que pendant tout ce temps, on en ait fusillé quelques milliers […].

Au bout de 4 semaines environ, j’ai été affecté à la frontière roumaine, à Brailoff. Jusqu’à ce moment, les exécutions ont eu lieu sans interruption. Là bas, notre tâche était de confisquer les biens de ceux qui passaient la frontière. Mais peu de temps après, j’ai de nouveau été muté au poste de Winniza. C’était juste avant Noël 1941. J’y ai été stationné jusque vers 1944.

Puis j’ai été affecté comme palefrenier et chef de l’harnachement au poste de douane. J’avais à m’occuper d’environ 50 véhicules et devais, en plus, faire des tournées d’inspection auprès des commissariats de districts pour y vérifier les voitures. Lors d’une de ces tournées, j’ai été bloqué par la neige, c’était à Brailoff. J’y suis resté coincé pendant plusieurs semaines. A cette époque, à Brailoff, les Juifs creusaient de grandes fosses juste avant la ville. Il ne faisait pas encore trop froid, car on pouvait encore retourner la terre. Puis, un soir, je suis allé voir la fosse avec quelques collègues; ils étaient absolument révoltés. Jusqu’alors, on s’était contenté de faire creuser la fosse. Les Juifs, on les laissait vivre. On voulait sans doute les faire mourir de faim.

Au bout de quelques jours, les exécutions ont commencé. C’est à dire qu’on rassemblait tous les Juifs sur la place du marché. Certains membres de nos services ont aussi été affectés à la surveillance de ces Juifs. Je pense qu’on avait rassemblé plus de 500 Juifs sur le marché. Ici aussi, il y avait des hommes, des femmes et des enfants. J’ai vu qu’on abattait les enfants comme des lapins quand ils essayaient de s’échapper. Il est arrivé qu’on retrouve plusieurs corps d’enfants ensanglantés autour de cette foule. Puis ils ont été conduits sous surveillance jusqu’aux fosses déjà creusées. La route qui y menait était couverte de billets de banque déchirés. Les Juifs avaient sans doute déchiré leur argent pour qu’il ne tombe pas entre les mains de leurs bourreaux.

Arrivés à proximité des lieux d’exécution, les Juifs devaient se déshabiller complètement. Puis ils devaient jeter leurs vêtements sur un tas. La milice a ensuite trié ces vêtements. Puis les Juifs ont dû descendre nus dans la fosse et s’y allonger, le visage tourné vers la terre. D’en haut, un seul policier leur tirait dessus avec un pistolet mitrailleur. C’était comme ça: le policier est lui aussi descendu dans la fosse. Il se tenait directement derrière les «délinquants». Quand il avait tiré tous ses coups de feu, il fallait que les suivants arrivent. Ils devaient s’allonger sur ceux qu’on venait de fusiller. Si le tas de corps empilés était trop haut, le policier reculait un peu, et les «délinquants» suivants devaient se coucher sur la terre, juste derrière ceux qu’on venait de fusiller. Et ainsi de suite […].

Je ne peux pas dire exactement si ce policier a procédé seul à toutes les exécutions ou s’il a été relevé par la suite. Le seul souvenir que j’ai encore, c’est qu’au bout d’un moment, il a fait une pause et s’est allumé une cigarette. Je me suis adressé à lui et lui ai demandé si ce n’était pas trop dur pour lui de faire une chose pareille. Il m’a dit que lui aussi, il avait deux enfants, mais qu’il s’était habitué à ce travail. Il semblait tout à fait satisfait de le faire.

Source/QuelleAuss. des Zollbeamten Tappe vom 2.10.62: 11 204 AR-Z 15/60, Bd.lIl, BI. 51 ff.


Document original en allemand / Deutsches Original

»Hinrichtung in der Art einer Volksbelustigung«
Judenmord als öffentliches Schaustück

»Als die Juden sahen, wie einfach es war, erschossen zu werden ...«

Ein Zollbeamter über Morde in Winnica und Brailoff

Im April 1940 wurde ich zur Infanterie nach Kassel eingezogen. Nach der Ausbildung wurde ich zum Zoll abgestellt. In Kassel erfolgte die Zusammenstellung dieser Einheit, und wir kamen zum Einsatz nach Polen und später nach Rußland. Ich kam mit der Einheit über Kamenez Podolsk nach Winniza. Unsere Einheit, sie war etwa 120 Mann stark, kam unmittelbar hinter der kämpfenden Truppe in Winniza an. […]

Ich war zunächst etwa 4 Wochen in Winniza. In dieser Zeit fanden Massenexekutionen statt. Es waren zweifellos Juden, die man dort erschoß. Es handelte sich um Männer, Frauen und Kinder. Eben alles, was Jude war, wurde exekutiert. Solchen Exekutionen habe ich auch beigewohnt. Es war furchtbar. Die Exekutionen fanden außerhalb Winnizas, aber nicht sehr weit, an Gräben statt, die die Juden vorher selbst auswerfen mußten. Sie hatten aber hierfür ordentliches Gerät wie Schaufeln und Hacken.

Die Exekution spielte sich dann so ab, daß die Delinquenten sich mit dem Rücken zum Schützen an den Grabenrand stellten und von hinten mit der MPi durch Genickschuß erledigt wurden. Wer nicht in den Graben fiel, bekam einen Tritt. Bei den Schützen handelte es sich in allen Fällen um Polizeibeamte. Sie trugen eine grüne Uniform und waren eben als Polizeibeamte zu erkennen. Es waren auch nur zwei Schützen, die die Exekution durchführten. […]

An der Grube war es so, daß so etwa 15 bis 20 Personen sich an den Grubenrand aufstellen mußten. Die beiden Schützen schossen sie dann einzeln ab. Es spielten sich schauerliche Szenen ab. Als die Juden aber sahen, wie einfach es war, erschossen zu werden, rannten sie selbständig zur Exekution. Sie drängten sich sogar vor. Hinzufügen muß ich noch, daß die Juden so, wie sie erschossen wurden, schon halb verhungert waren. Sie hatten wohl schon seit Wochen nichts mehr zu essen bekommen. Ich kann sagen, daß in den 4 Wochen, die ich zunächst in Winniza war, täglich Exekutionen durchgeführt wurden. In der gesamten Zeit können schon einige Tausend erschossen worden sein. […]

Nach etwa 4 Wochen, die Exekutionen waren bis zu diesem Zeitpunkt keinesfalls eingestellt, wurde ich an die Grenze Rumäniens, und zwar nach Brailoff, abkommandiert. Unsere Aufgabe dort war, den Grenzgängern alles abzunehmen. Nach kurzer Zeit wurde ich aber wieder zur Befehlsstelle nach Winniza zurückversetzt. Dieses war noch vor Weihnachten 1941. Ich habe dann bis etwa 1944 dort gelegen.

Ich war nunmehr als Schirrmeister bei der Zollbefehlsstelle eingesetzt. Ich hatte ca. 50 Fahrzeuge zu betreuen, hatte ferner Inspektionsfahrten zu unternehmen, um die Fahrzeuge bei den Bezirkskommissariaten zu überprüfen Bei einer dieser Fahrten schneite ich ein, dieses war in Brailoff. Ich saß dann dort für einige Wochen fest. Zu diesem Zeitpunkt waren in Brailoff Juden damit beschäftigt, vor dem Ort große Gruben auszuheben. Es war wohl noch nicht so sehr kalt, denn es war möglich, die Erde auszuwerfen. Ich habe dann an einem Abend mit mehreren Kollegen, die voller Empörung waren, die Gruben besichtigt. Man hatte bis zu dieser Zeit lediglich die Gruben auswerfen lassen. Die Juden ließ man zunächst leben. Man wollte sie wohl ganz aushungern

Nach einigen Tagen setzten dann aber die Exekutionen ein. Es hieß, daß man die Juden auf dem Marktplatz zusammengetrieben hatte. Auch waren Angehörige unserer Dienststelle zur Bewachung dieser Juden mit eingesetzt. Ich möchte sagen, daß man mehr als 500 Juden auf dem Markt zusammengetrieben hatte. Es waren auch hier wieder Männer, Frauen und Kinder. Ich habe gesehen, daß man Kinder, die auszubrechen versuchten, wie die Hasen abschoß. So kam es, daß man um diese Menschenmenge mehrere blutige Kinderleiber liegen sah. Unter Bewachung wurden sie dann zu den bereits ausgeschaufelten Gräbern geführt. Auf dem Wege bis zum Grab war die Straße mit zerrissenen Geldscheinen belegt. Die Juden hatten wohl das Geld zerrissen, um es nicht ihren Schergen in die Hand fallen zu lassen.

In unmittelbarer Nähe der Exekutionsstätte angekommen, mußten sich die Juden vollständig entkleiden. Ihre Kleidung mußten sie dann auf einen Haufen werfen. Von der Miliz wurde dann die Kleidung sortiert. Die Juden mußten dann nackend in die Grube steigen und sich mit dem Gesicht nach unten auf die Erde legen. Ein einzelner Polizist gab hier die Schüsse von oben mit der MPi ab. Es war so, daß auch der Polizist in die Grube stieg. Er stand also unmittelbar hinter den Delinquenten. Wenn er so seine Schüsse verteilt hatte, mußten die nächsten folgen. Sie mußten sich auf die bereits Erschossenen legen. Wenn die sich so stapelnden Leichen zu hoch waren, ging der Polizist etwas zurück, und die folgenden Delinquenten mußten sich jetzt wieder auf die Erde legen, und zwar hinter den bereits Erschossenen. So ging es weiter. […]

Ich kann nicht sagen, ob dieser einzelne Polizist die Exekution alleine durchgeführt hat oder ob er sich später ablösen ließ. Ich habe nur noch in Erinnerung, daß er nach einer kurzen Zeit eine Pause machte und sich eine Zigarette anzündete. Ich sprach diesen Polizisten noch an und fragte ihn, ob es ihm nicht schwer würde, so etwas auszuführen. Er sagte mir, daß er auch zwei Kinder hätte, aber er hätte sich an diese Arbeit gewöhnt. Er schien diese auch mit äußerster Befriedigung zu tun.

Source/QuelleAuss. des Zollbeamten Tappe vom 2.10.62: 11 204 AR-Z 15/60, Bd.lIl, BI. 51 ff.

Ernst Klee / Willi Dreßen / Volker Rieß, »Schöne Zeiten«Judenmord aus der Sicht der Täter und Gaffer, S. Fischer Verlag GmbH, Frankfurt am Main, 1988.