Introduction historique générale sur le massacre d’Oradour
Nicolas Bernard
Oradour, 10 juin 1944, un massacre nazi et sa négation
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- Le printemps 1944 en France occupée: une répression grandissante
La France dans l’Europe nazie: un trophée de choix — Premier semestre 1944: dans l’attente du débarquement, aggravation de la répression — Premières grandes opérations et villages brûlés — La 2e division blindée SS «Das Reich» transférée en France — Le général Heinrich Lammerding: criminel de guerre bien avant Oradour — Printemps 1944: la «Das Reich» part en guerre contre «les bandes» — A la veille du débarquement allié: un constat d’échec dans la lutte contre «les bandes»- A la suite du Débarquement: la terreur nazie à l’ordre du jour
Dans la foulée du débarquement en Normandie: terreur dans le Sud-Ouest — Une «guerre-éclair» lourde d’atrocités — 9 juin 1944: Lammerding applique ses recommandations du 5 juin précédent — 8-9 juin 1944: mécomptes isolés pour l’occupant — 9-10 juin: des réunions préparatoires entre SS et «collabos» — Pourquoi Oradour? — Une cible parfaite- 10 juin 1944: meurtre de masse dans l’après-midi
Le village envahi — Une extermination conduite en quelques heures — Premiers constats le jour même du massacre: les passagers du tramway du soir — Dimanche: découverte des cadavres- Un retentissement énorme
Vichy réagit — Le malaise des généraux allemands — Premières interventions dans le village — Premières enquêtes, dans les ruines même — Protestations officielles — La Résistance dénonce le crime- La Libération et l’immédiat après-guerre: premières élaborations des récits du massacre
Une phraséologie de la Libération — De la Libération à l’après-guerre: divisions et simplismes mémoriels — Dans le Limousin: Oradour, enjeu de mémoire… et de politique locale — Le «bourg martyr» — Conserver les ruines en l’état — Une «nécropole nationale»- Une survivance mémorielle entravée par des échecs judiciaires
Premières instrumentalisations mémorielles franco-françaises — 1944-1945: de Limoges à Nuremberg, des enquêtes initialement menées au pas de charge — Un enlisement judiciaire, pour cause de Guerre Froide… — … et de «malgré nous» — Un procès tardif et inachevé — Le long chemin vers l’apaisement mémoriel
Préambule (par PHDN)
L’étude de la négation du massacre d’Oradour-sur-Glane nécessite avant-tout une connaissance très fine des circonstances et des modalités d’accomplissement de ce massacre, mais aussi de ses conséquences historiographiques, mémorielles et judiciaires. Nicolas Bernard, co-animateur de PHDN, a publié en 2024 un ouvrage très important (Oradour-sur-Glane, 10 juin 1944. Histoire d’un massacre dans l’Europe nazie, Tallandier, 2024) qui étudie de façon renouvelée l’ensemble de ces aspects. Nous encourageons vivement sa lecture qui offre le meilleur contexte historique à la présente section. Toutefois, afin de permettre aux lecteurs qui n’auraient pas (pas encore!) acquis et lu cet ouvrage, la présente page offre une synthèse suffisamment détaillée qui permettra de saisir tous les enjeux du massacre et de sa négation, et sur laquelle s’appuieront les autres pages de cet ensemble, celle présentant l’histoire des négations du massacre et celles réfutant les principaux mensonges. A défaut d’avoir lu l’ouvrage de Nicolas Bernard, il est donc nécessaire de lire la présente page pour appuyer la compréhension des autres pages mentionnées.
Introduction
Le 10 juin 1944, Oradour-sur-Glane, bourgade située près de Limoges, est rayé de la carte par une autre division de Waffen SS, la 2e division blindée SS «Das Reich». Les hommes sont conduits dans des granges et des garages, où ils sont exécutés en masse, à la mitrailleuse, au fusil, au pistolet; les corps sont ensuite livrés aux flammes, et ceux qui ont survécu aux balles périssent brûlés vifs. Femmes et enfants, eux, sont massacrés dans l’église, par balles et par lancers de grenades. Les SS tentent sans succès de faire exploser le lieu saint, mais parviennent à l’incendier. Le village est livré au pillage, et entièrement brûlé. On dénombrera 643 victimes, dont 222 femmes et plus de 200 enfants de moins de 14 ans.
La matérialité du massacre d’Oradour-sur-Glane est parfaitement établie. Des rescapés ont témoigné à plusieurs reprises depuis 1944. Des anciens officiers et soldats de la division «Das Reich» ont également décrit le massacre, non sans chercher à minimiser leurs responsabilités. Dans les jours qui ont suivi l’atrocité, aussi bien l’administration de Vichy que la Résistance en ont dressé les premiers constats. Des généraux allemands l’ont même condamnée. Après la guerre, plusieurs enquêtes françaises, de la police judiciaire, de la Justice militaire, des acteurs mémoriels locaux aussi, jusqu’au procès de Bordeaux en 1953, en ont précisé le déroulement. Et depuis huit décennies, l’historiographie a connu de nombreuses avancées clarifiant le contexte du crime.
Certes, des incertitudes demeurent. D’abord, les nazis ont pris soin de camoufler leur culpabilité, ce qui s’est répercuté sur leurs propres archives, très peu loquaces sur l’atrocité. En conséquence, le processus décisionnel ayant conduit au massacre reste sujet à hypothèses, mais celle désignant les plus hautes autorités du Troisième Reich reste, à ce jour, la plus plausible. De même, établir une chronologie horaire précise de la tuerie demeure malaisé: le drame se situe en 1944, en France, pays occupé et victime de pénurie: tous les Français sont loin de posséder une montre, et entre l’heure allemande et l’heure solaire, les témoins peineront parfois à s’y retrouver. Mais il n’y a là rien qui remette en cause la matérialité des faits.
Les négationnistes allèguent cependant que le massacre n’en serait pas un, et qu’un vaste complot serait à l’œuvre depuis 1944 pour imposer une «histoire officielle» et accabler les SS. Cette rhétorique conspirationniste ne résiste pas à la réalité. Certes, la mémoire du massacre, comme celle de n’importe quel événement, a pu être instrumentalisée par différents courants politiques, en France comme à l’étranger – notamment l’Allemagne de l’Est. Mais elle a également donné lieu à de nombreuses polémiques: entre Vichy et la Résistance, puis entre le Limousin et l’Alsace, entre les victimes du 10 juin 1944 et ces autres victimes du Reich que sont les «Malgré nous», entre communistes et autres courants, entre l’Association nationale des Familles des Martyrs d’Oradour-sur-Glane (l’ANFMOG), la municipalité et les pouvoirs publics, entre historiens scientifiques et ces mêmes acteurs locaux, entre la France et l’Allemagne fédérale. Pareilles divisions mémorielles sont manifestement incompatibles avec le fantasme imbécile, mais typiquement négationniste, d’un vaste complot international.
Pour réfuter pareille allégation, où la paranoïa le dispute à la mauvaise foi, il est donc indispensable de revenir dans le détail du massacre lui-même, de son contexte à son déroulement, de ses suites judiciaires à sa survivance mémorielle – bref, à l’Histoire.
I. Le printemps 1944 en France occupée: une répression grandissante
La France dans l’Europe nazie: un trophée de choix
Printemps 1944. La France est occupée depuis quatre ans. Dépecée, aussi: l’Alsace-Moselle est incorporée au Reich; les départements du Nord sont assujettis à l’administration militaire qui régente la Belgique; une zone interdite, qui court du nord du pays à la frontière suisse, fait office de tampon entre ces territoires et le reste du pays; lequel est scindé en deux zones, une qui couvre la moitié nord et l’ouest, occupée par l’armée allemande, et une autre confiée au régime collaborateur de Vichy, dite «libre» jusqu’en novembre 1942, date à laquelle elle sera, à son tour, occupée par l’Allemagne, à la suite du débarquement allié en Afrique du Nord; en septembre 1943, après la chute de Mussolini et l’armistice italo-allié, les Allemands s’empareront aussi de la zone d’occupation italienne dans le Sud-Est.
L’Hexagone est bel et bien la vache à lait du Troisième Reich. puisque, selon l’historien Alexander Dallin, en termes de pillage des ressources, «l’apport des territoires de l’Est représente seulement le septième de ce que le Reich se procura en France»1. L’économie française est intégrée à l’effort de guerre allemand, tandis que le pays est copieusement pillé. Mais il n’est pas dans l’intention des Allemands d’exterminer ce pays pour le coloniser, ni de l’exploiter directement; faute d’effectifs conséquents des forces militaires et policières allemandes, la collaboration autochtone est, ici, essentielle, de sorte que le régime de Vichy se révèle, pour Berlin, mieux qu’un paravent – un bouclier2. Impossible de se passer d’un laquais aussi zélé, qu’il faut compromettre le plus possible dans la collaboration sans pour autant lui ôter tout crédit auprès des Français3. D’autant que Vichy collabore avec zèle dans les persécutions, rafles et déportations antisémites qui s’inscrivent dans la «Solution finale».
En conséquence, l’occupant instrumentalise «l’Etat français» dans sa mise au pas de la France, notamment dans le maintien de l’ordre. Compte tenu de ces ambitions (assujettir la France) et de ces contraintes (exploiter Vichy sans trop le froisser), l’administration militaire allemande (Militärbefehlshaber in Frankreich, ci-après MBF) insiste sur une «répression à visage légal», faisant intervenir des tribunaux militaires allemands, répression qui se révèlera, démontre l’historienne Gaël Eismann, plus marquée que dans le Bénélux4. Vichy anticipe les attentes de l’occupant en instituant, par loi d’exception du 14 août 1941 à caractère rétroactif, des sections spéciales rattachées aux Cours d’Appel5, faisant intervenir ses services de police, notamment les Renseignements Généraux, dans la traque des Résistants6. En 1942, les SS de Heinrich Himmler, en l’occurrence la police politique Sipo-SD (plus connue sous le terme de Gestapo), acquièrent le monopole des tâches de police en zone occupée, sachant que le MBF conserve sa compétence pour la sécurité des troupes7. Ce faisant, l’appareil répressif allemand se complexifie, les zones de compétences entre Haut-Commandement à l’Ouest, MBF et SS (plus précisément la Sipo-SD). Le flou favorise la montée en puissance de la Sipo-SD, mais n’interdit nullement la coopération entre ces différentes instances8.
Mais la situation se détériore d’année en année. En 1942, le régime de Vichy perd en légitimité auprès de la population, victime de pénuries causées par l’exploitation allemande, scandalisée par les rafles ciblant les Juifs au cours de l’été, en attendant l’occupation de la «zone libre» en novembre. L’année suivante, la Résistance est unifiée, notamment grâce à l’action de Jean Moulin, tandis que l’instauration du «travail obligatoire» par les Allemands, qui implique l’envoi en Allemagne, et sous contrainte, d’une main d’œuvre de plus d’un million de personnes9, pousse de nombreux Français à «prendre le maquis». Plus préoccupant encore, l’Allemagne essuie de nombreux revers, voire des désastres, sur tous les fronts (Stalingrad sur le front de l’Est, El Alamein en Afrique du Nord, en attendant le débarquement allié en Italie et la chute de Mussolini); acculée à la défensive, elle s’attend, à partir de 1943, à un débarquement allié sur les côtes françaises.
Ces différents facteurs amènent l’occupant, au premier semestre 1944, à aggraver la répression en France, non sans s’inspirer, en partie, de méthodes appliquées à l’Est, c’est-à-dire dans les territoires soviétiques et balkaniques occupés.
Premier semestre 1944: dans l’attente du débarquement, aggravation de la répression
L’Allemagne s’emploie d’abord à discréditer la Résistance. Comme «à l’Est», elle prétend que derrière le maquisard se cacherait le judéo-bolchevique, aidé d’éléments étrangers, forcément criminels, comme l’allègue10. La propagande vichyste en rajoute, notamment par la voix de son porte-parole, Philippe Henriot, dont les allocutions radiophoniques accablent les «bandes qui, pendant des mois, ont terrorisé le pays et en qui les naïfs et les canailles prétendent incarner le patriotisme français», ces «Français et étrangers mêlés, armée secrète et FTP confondus.»11 Citons l’exemple de «l’Affiche Rouge», ce placard qui, à partir du mois de février 1944, stigmatise «l’armée du crime», que dirigeraient des bandits juifs et étrangers…
A cette propagande, xénophobe et antisémite, s’ajoutent, sur le terrain, des contre-mesures d’une violence grandissante. Les enquêtes policières, tant françaises qu’allemandes, aux fin de démanteler des réseaux ne suffisent plus face au monde mouvant des maquis. Tout d’abord, Vichy mène, dès l’automne 1943, des opérations de ratissage dans les campagnes. Il mise sur des unités de police paramilitaire, les Groupes mobiles de réserve (GMR), davantage que sur la gendarmerie, désormais de fiabilité douteuse. De même, la Milice, organisation paramilitaire fasciste, est-elle portée au pouvoir12, puisque son chef, Joseph Darnand, prend la tête, au mois de janvier 1944, de l’ensemble des forces de l’ordre de l’Etat français13.
Les Allemands ne sont pas en reste. Tandis que les tribunaux militaires de la Wehrmacht prononcent des condamnations à mort par centaines14, la Sipo-SD conduit les premières opérations contre les maquis à l’automne 1943, sous l’autorité du MBF, employant détachements de Feldgendarmerie (police militaire), de rampants de la Luftwaffe, d’auxiliaires de l’Est15. Les prisonniers sont parfois exécutés sommairement, leurs refuges incendiés16. En pure perte, car ces atrocités scandalisent la population plutôt qu’elles ne la réduisent au silence, d’autant que Darnand lui-même avoue l’impuissance des forces de l’ordre contre la Résistance17.
Or le gros des forces allemandes campe sur les côtes, attendant l’inévitable débarquement anglo-saxon18: difficile d’y prélever le moindre soldat pour écraser la guérilla. C’est pourquoi l’Allemagne amorce en France – mais amorce seulement – une transposition de la politique appliquée «à l’Est», à savoir compenser la faiblesse des effectifs d’occupation de l’arrière-pays par une férocité accrue.
Début février, le Haut-Commandement à l’Ouest autorise ainsi, en cas d’attaque de la Résistance:
«a) une riposte immédiate. Si des innocents sont touchés, c’est regrettable mais entièrement la faute des terroristes;
b) le bouclage immédiat de la scène de crime et de ses alentours ainsi que la mise en détention de tous les civils à proximité, quels que soient leur statut et leur personne;
c) l’incendie des maisons d’où les coups de feu ont été tirés»,
sachant que
«seul le commandant de troupe lâche et indécis mérite d’être sévèrement puni car il met en danger la vie des troupes qu’il commande, et suscite un manque de respect pour les forces armées allemandes. Au vu de la situation actuelle, des mesures trop sévères ne sauraient justifier une sanction»19.
Le mois suivant, le maréchal Keitel, chef de l’état-major suprême de la Wehrmacht, ordonne «d’éliminer les francs-tireurs au cours des combats»; seul sera déféré devant les juridictions militaires «le coupable découvert ou capturé plus tard», auquel est d’ailleurs promis la peine de mort20.
Sans y correspondre tout à fait, de telles consignes se rapprochent de la répression menée «à l’Est» et dans les Balkans. Il ne s’agit certes pas encore de déplacer le curseur de la barbarie jusqu’à de telles horreurs, ne serait-ce que pour éviter de saper l’autorité du régime de Vichy. Toutefois, pareilles instructions induisent le relâchement de la discipline, ainsi qu’une plus grande tolérance à la souffrance des civils.
Premières grandes opérations et villages brûlés
En liaison avec ce durcissement des consignes, le MBF, en partenariat avec la Sipo-SD, conduit quatre grandes opérations contre les maquis de février à avril 194421. «Korporal» dans l’Ain (février): soixante personnes tuées (dont les deux tiers de civils), 340 arrêtées et, sur ce dernier nombre, 290 déportées en Allemagne, sans oublier une centaine de maisons incendiées22; «Hoch-Savoyen» contre le plateau des Glières (mars): 105 maquisards tués, ainsi qu’une vingtaine de civils fusillés ou déportés23; «Brehmer» dans le Limousin (fin mars – début avril): 196 personnes fusillées, ainsi qu’un village, Rouffignac, totalement incendié à l’exception de l’église et de trois maisons attenantes24. «Frühling» dans l’Ain et le Jura (avril): 120 partisans et civils tués, 199 personnes arrêtées dans l’Ain (149 déportées), 404 personnes arrêtées dans le Jura (dont 338 dans un seul village, celui de Saint-Claude), plusieurs centaines de maisons incendiées25. Mais les maquis parviennent à se replier et se disperser, pour se reformer ailleurs.
Les opérations allemandes s’attaquent surtout aux civils, selon la stratégie résumée par l’historien Fabrice Grenard, et qui se trouve en usage à l’Est: «tactique du cordon militaire destiné à encercler le maquis, déploiement de Jagdkommandos [«commandos de chasse», petites unités mobiles], chargés des actions de «nettoyage», occupation des petites communes sises à proximité de l’emplacement des camps, et volonté de terroriser la population en détruisant et en incendiant des habitations, mais aussi en fusillant pour l’exemple des personnes soupçonnées d’avoir apporté une aide aux maquisards»26. Comme «à l’Est», ces «actions de masse» visent surtout à prévenir toute éventualité d’insurrection, à dissuader toute forme de résistance – y compris passive – et à intimider les civils. Et comme «à l’Est», certaines de ces opérations s’en prennent également aux Juifs, visés en tant que tels27.
Pourtant, la Résistance persiste et signe, détruisant même, en avril 1944, 137 locomotives et 845 wagons28. A ce constat d’échec s’ajoute un certain mécontentement de l’Etat français, qui proteste en diverses occasions. C’est ainsi qu’Ascq (département du Nord), dans la nuit du 1er au 2 avril 1944, la Résistance fait dérailler un train transportant un bataillon de la 12e division blindée SS Hitlerjugend. Quoique le sabotage soit de faible portée (personne n’est blessé, seuls trois wagons sont sortis des rails, des véhicules allemands n’ont que des dégâts minimes), les Waffen SS exécutent 86 civils, âgés de 15 à 74 ans. La population en est outrée, Vichy se plaint le 4 avril auprès des autorités d’occupation29.
Le 17 avril 1944, le Haut-Commandement à l’Ouest tente de mieux encadrer la répression, rappelle que si «les troupes interviennent, en cas d’attaques, immédiatement et de façon énergique et rapide», ce ne doit être que dans l’hypothèse d’une «légitime défense»30. Au début du mois suivant, cette même autorité réclame des troupes qu’elles demeurent «correctes» lors des arrestations et des perquisitions. Une directive du MBF du 4 mai 1944 redonne à l’officier désigné par un commandant de secteur pour conduire une opération anti-partisans le seul pouvoir de décider «si, le cas échéant, des terroristes pris l’arme à la main sont à fusiller sur place et si des maisons isolées sont à détruire et à incendier. L’incendie de localités entières ne pourra avoir lieu qu’avec l’autorisation du MBF.» La Sipo-SD est désormais réduite à un rôle purement consultatif en ces matières. Toutefois, «les terroristes ou civils suspects arrêtés» lui sont remis, et c’est elle «qui décide sous sa propre responsabilité de leur sort ultérieur.»31
Plus surprenant encore: par une directive du 6 mai 1944, applicable à l’ensemble des territoires occupés, l’OKW donne à son tour l’impression d’assouplir ses exigences. Les précédentes instructions, particulièrement meurtrières, du 11 novembre 1942 cessent d’être effectives; l’incendie des villages ne doit intervenir que de manière exceptionnelle, ne peut être ordonné que par les commandants de division ou les chefs de la Police et des SS; les partisans capturés sont – enfin – considérés comme prisonniers de guerre, qu’ils combattent en uniforme ou en civil32. En pratique, toutefois, une telle directive reste lettre morte en Italie, où le maréchal Kesselring n’en tient pas compte33, tandis qu’en France, à la fin du mois de mai, l’OKW refuse finalement de suivre le Haut-Commandement à l’Ouest et le MBF lorsqu’ils envisagent de ne plus traiter les résistants capturés comme des francs-tireurs34. Au fond, on régule la répression davantage qu’on la tempère, d’autant que les vagues appels à la modération ne sont pas passibles de sanctions.
C’est dans ce contexte qu’une division blindée des Waffen SS, la 2. SS. Panzer-Division «Das Reich» du général Lammerding, est transférée en France.
La 2e division blindée SS «Das Reich» transférée en France
Créée en 1939, transformée en division blindée en 1943, la 2e division de Panzer SS «Das Reich» est déjà coupable d’innombrables atrocités. Ainsi, au mois d’avril 1941, un juge de cette division avait présidé une cour martiale qui avait fait exécuter 31 hommes et une femme de la ville serbe de Pančevo, après la mort par balles d’un soldat SS (un autre ayant été grièvement blessé): les auteurs n’ayant pu être identifiés, le tribunal militaire avait frappé au hasard, parmi une centaine de personnes arrêtées35. La division prend ensuite part à la «Shoah par balles»: le 9 septembre 1941, en compagnie de l’Einsatzkommando 9, un détachement volontaire de Waffen SS abat 920 Juifs en Biélorussie36; un mois plus tard, du 8 au 10 octobre 1941, la «Das Reich» prête main forte à ce même Einsatzkommando pour exécuter entre quatre et huit mille Juifs du ghetto de Vitebsk dans le ravin d’Ilovskii37. Et quand elle ne s’attaque pas aux Juifs, elle n’hésite nullement à massacrer ses prisonniers et incendier les villages soviétiques38.
Laminée par l’Armée rouge, réduite à près de 4 500 hommes, un cinquième de l’effectif théorique39, la division est transférée dans le Sud-Ouest de la France à partir du mois de février 1944, sur recommandation du chef du bureau des opérations de l’OKW, le général Jodl40. La reconstitution des effectifs s’effectue en incorporant des «Allemands de souche» (Volksdeutsche) provenant d’une douzaine de nationalités différentes41. Les services de recrutement de la Waffen SS puisent également dans le vivier de l’Alsace-Moselle, annexée de facto par l’Allemagne en 1940, laquelle y prélève 130 000 hommes pour ses forces armées, incorporés de force qui se verront appelés les «Malgré nous»: de fait, sur 2 353 remplaçants versés dans le régiment «Der Führer» en février 1944, 455 se trouvent être des Alsaciens42.
Cependant, ces incorporations, doublées d’un entraînement intensif, ne suffisent pas à pallier une pénurie croissante d’officiers et, surtout, de sous-officiers, de matériel et d’essence, difficultés qui affectent alors la Wehrmacht dans son ensemble43. Pour y pallier, la formation des recrues répond, plus que jamais, aux canons de la Waffen SS: à un entraînement militaire harassant se greffe un bourrage de crâne idéologique: «L’objectif est de faire en sorte que ces hommes ne soient pas seulement d’excellents soldats, mais aussi des nationaux-socialistes enthousiastes et fanatiques, des SS fiers d’être membres de notre glorieuse division.»44 Sont diffusés à l’attention des divisionnaires des extraits de Mein Kampf, des récits «historiques» sur l’Ordre SS ou le passé allemand revus et corrigés par la propagande hitlérienne45… Les «aperçus politiques hebdomadaires» informent également la troupe des développements de la guerre, vue sous un prisme hitlérien; ainsi, le 5 mai 1944, l’une de ces notes stigmatise le plan de la «sous-humanité juive» tendant à réduire l’Allemagne en esclavage46. La troupe n’apprend pas seulement à se battre, mais à tuer, y compris à coup de pelle sur le crâne, cette dernière mort étant réservée aux Noirs, «car ils ne valent pas une balle. Vous leur prenez la tête sous le bras et vous leur fendez le crâne avec la pelle.»47
Dans l’attente de «l’invasion» anglo-saxonne, l’occupant entend bien utiliser cette formation contre la Résistance, aux fins de ramener l’ordre dans une région où la situation semble lui échapper. Le commandant de la division, le SS-Brigadeführer und Generalmajor der Waffen-SS Heinrich («Heinz») Lammerding, semble le candidat idéal à ce type de mission.
Le général Heinrich Lammerding: criminel de guerre bien avant Oradour
Né le 27 août 1905 à Dortmund, Lammerding a gravi un à un les échelons de l’ordre nazi, se signalant par un dévouement sans bornes à l’idéologie hitlérienne, à tel point que lui ont été attribuées des fonctions «enseignantes», en sus de postes à responsabilités48: membre de la SA en 1931, puis de la SS en 1935, il devient commandant-instructeur à l’école des cadets SS à Brunswick avant de diriger un bataillon des Waffen SS en 1939; affecté à l’état-major d’une division de Waffen SS en 1940, il commande un régiment de Waffen SS en Russie en 1942, avant de prendre le commandement de la division «Das Reich» en décembre 1943.
Lammerding ajoute à ce pédigrée une expérience considérable dans la «lutte contre les bandes», selon le vocable nazi décrivant les opérations anti-partisans. Du 28 juillet au 9 décembre 1943, en effet, il a exercé les fonctions de chef d’état-major du général SS Erich von dem Bach-Zelewski, à qui Himmler venait de confier la responsabilité des opérations anti-partisans en Europe, principalement dans les territoires «de l’Est». Précédemment, Bach-Zelewski avait été l’une des chevilles ouvrières de l’extermination des Juifs «à l’Est», et avait également dirigé de sanguinaires actions de quadrillage et de nettoyage à l’arrière du front russe. Sous son autorité, Lammerding a été impliqué dans l’extermination des dernières communautés de Juifs «de l’Est», ainsi que la liquidation ou le déplacement forcé de populations entières49. Un général allemand affirmera, lors du procès de Nuremberg, qu’il se serait opposé à une proposition de Lammerding de «liquider» des partisans capturés et des civils évacués lors d’une opération de cette sorte50.
Cette étape de carrière est d’autant plus importante pour Lammerding – et la suite des événements – qu’à cette époque, notre homme a directement accès à Himmler: l’agenda de ce dernier ne révèle pas moins de vingt entretiens entre ces deux hiérarques, incluant déjeuners et dîners, parfois en tête à tête, au second semestre 194351. Lammerding n’est donc pas un banal divisionnaire, mais un homme de confiance, qui a fait ses preuves à tous les niveaux, et à qui Himmler n’hésite pas à confier des missions difficiles – telle que commander une formation de Waffen SS prise en étau entre l’Armée rouge et les partisans soviétiques, en pleine retraite de l’armée allemande sur le front russe, et au milieu de l’hiver! A ce poste, Lammerding diffuse des instructions dignes de son cursus professionnel, notamment le 21 février 1944:
«La brigade SS Langemarck lève dans la matinée du 22.2 l’occupation des localités de Waskovy, Mytkovzy et Klembovka et détruit ces localités après évacuation. […] Ces lieux doivent être évacués rapidement après l’anéantissement de la résistance et sont à incendier. Il est prévu de raser les ruines plus tard à l’aide de blindés.»52A la suite de quoi, le 22 février 1944, le 1er officier d’état-major (Ia) de la division, Albert Stückler, rapporte:
«Les localités de Klembovka, Mytkovzy, Waskovy, ont été épurées le 22.2 de toute présence ennemie, les villages furent évacués et incendiés. Les mouvements de fuite au nord de Myssljatin ont été combattus avec succès et anéantis à l’aide de grenades et de canons anti-chars [….]. Notre objectif: clarification de la percée à Isjasslavl et épuration de Sintjutki et Gulevzy de toute présence de bandits […] 115 ennemis morts (comptés), 4 prisonniers.»53Le même jour, Lammerding émet les recommandations suivantes à la division, aux fins de lutter «contre les bandes»:
«Des bandes assez importantes essayent de diviser notre front entre le secteur de Goryn et celui de Wilija. Il faut supposer que ces bandes ont mission d’établir une liaison continue, bien protégée sur ses flancs, avec la vaste région occupée par les bandes dans la vallée de Goryn au sud-ouest de Lanovce. […] La valeur combative des bandes en campagne ouverte est minime. Par contre, elles sont habiles à établir des embuscades dans des terrains escarpés et à se défendre avec ténacité. De manière générale, il faut présupposer une attitude sympathisante de la population civile vis-à-vis des bandes. [….] Le groupe de combat blindé SS Das Reich anéantit d’abord toutes les bandes se trouvant au sud de Goryn, établit des têtes de pont au-delà du fleuve et clarifie le territoire ennemi jusqu’à la ligne. […] La brigade SS Langemarck sera avant tout engagée pour éliminer des nids de bandes gênants et pour exécuter des missions de reconnaissance de grande étendue. […] Des commandos de reconnaissance sont à déployer avec des effectifs maximaux. […] Toute ruse doit être employée (avant-postes déguisés en convois de charrettes inoffensifs, déguisement en femmes). Il faut emmener de chaque localité au moins une personne civile, par principe. Le comportement de ces personnes est, dans la poursuite de l’avance, un révélateur excellent pour l’éventuelle occupation du terrain par l’ennemi dans des régions non investiguées. […] Les bandes et la population civile doivent sentir en toute situation notre supériorité.»54L’expérience acquise à l’Est se communique également des vétérans aux nouvelles recrues, au printemps 1944: «Les SS se comportaient en bêtes fauves et se vantaient des massacres commis dans la région de Kharkov, expliquera le «Malgré nous» Armand Durlewanger. Ils nous racontaient avoir parfois été ennuyés par les maquis russes et avoir en réponse brûlé des villages et massacré la population. L’un d’entre eux expliquait que les femmes russes enceintes étaient automatiquement éventrées pour éviter que la vermine renaisse de la Russie vaincue.»55
Mépris de la guérilla. Méfiance envers la population. Prises d’otages. Anéantissement de villages, par l’explosif et par le feu. Absence de prisonniers. En Russie, Lammerding, indéniablement, est un «expert» du combat contre «les bandes».
Printemps 1944: la «Das Reich» part en guerre contre «les bandes»
Le printemps 1944 voit le Haut-Commandement allemand en France s’inspirer en partie des méthodes de combat anti-partisans en usage «à l’Est», et de l’idéologie antisémite qui l’anime. La division «Das Reich» participe activement à cette «transposition». La Milice se joint à cette campagne.
Le 2 mai 1944, un bataillon du 2e régiment blindé de la «Das Reich» ouvre les hostilités. Suspectant – à raison – la présence d’un campement de maquisards, à qui est imputé un sabotage de la voie ferrée Paris-Toulouse, les Waffen SS échouent de peu à se saisir des Résistants à proximité du bourg de Frayssinet-le-Gelat. En représailles, ils incendient seize maisons, non sans piller la bourgade. Un maquisard est tué, vingt-deux civils sont arrêtés et déportés (cinq ne reviendront pas des camps), quatre civils sont éliminés, dont un vannier assigné à résidence dans la commune, Charles Rathbeger, et sa petite-fille âgée de 2 ans, Lucette Barthe, tous deux jetés – vivants – dans un brasier56.
Une semaine plus tard, le 10 mai, la «Das Reich» conduit sa première opération de ratissage, dans le département du Lot, sous la direction de la Sipo-SD, et avec le concours d’indicateurs français. Vingt localités sont «visitées» selon la méthode suivante, décrite par Jacques Delarue: «encerclement du village, neutralisation des bâtiments administratifs, la Gendarmerie, la Mairie, parfois la Poste, puis rassemblement des hommes sur la place publique, parfois après appel du tambour de ville, après quoi commencent les exactions qui vont jusqu’au meurtre et à l’incendie»57. Peu de maquisards sont appréhendés, mais 800 personnes sont arrêtées (et, parmi elles: certaines fusillées, d’autre maltraitées, d’autres déportées, d’autres relâchées). Pillages systématiques se doublent de maisons brûlées et, en certains endroits, de meurtres gratuits, et un viol a même été recensé. Le comble de l’horreur est atteint au village de Saint-Félix, le 12 mai: en sus de fusiller deux hommes et une femme, les SS anéantissent toute une famille (deux parents et leurs trois enfants) en faisant exploser un obus58.
Une nouvelle opération, le 21 mai et les jours suivants, cible huit localités selon le même modus operandi: encerclements, rassemblements, pillages et incendies. A Frayssinet-le-Gelat, un coup de feu est tiré sur les envahisseurs depuis une maison. En représailles, les SS pendent trois vieilles femmes (dont une de 75 ans) qui habitaient ledit immeuble, fusillent dix hommes, en abattent un autre, et abattent une autre femme. Précisons que la 3e compagnie du 1er bataillon du régiment «Der Führer» est coupable de cette dernière atrocité; or, c’est cette unité qui commettra le massacre d’Oradour59.
Ces horreurs vont trop loin même pour l’administration militaire allemande, qui les critique. Cependant, le général Krüger, chef du 58e corps blindé dont relève théoriquement la division SS, couvre cette dernière60. Laquelle n’en a pas fini avec son parcours sanglant: le 2 juin 1944, à la suite d’un attentat contre un militaire allemand à Toulouse, la Milice livre quinze otages juifs à «Das Reich», qui les exécute sommairement à Miremont, après leur avoir fait creuser une fosse61. Ce massacre antisémite s’inscrit dans la politique du régime nazi d’occupation, consistant à exterminer les Juifs sous couvert de lutte contre les partisans.
A la veille du débarquement allié: un constat d’échec dans la lutte contre «les bandes»
Mais pour meurtrières et violentes qu’elles soient, les opérations anti-partisans ne donnent rien. Bien au contraire, les Allemands constatent que, dans le sud de la France, les activités de la Résistance, non seulement perdurent, mais s’intensifient au début du mois de juin62! Le 27 mai 1944, Lammerding affirme lui-même que «le mouvement de résistance est actuellement en état de mobilisation totale, et que tous les groupes (armés ou non) ont reçu leurs ordres d’opération» 63. Le 3 juin, il renchérit, sans doute sur la base d’informations délivrées par la Sipo-SD et le MBF: les partisans se regroupent, ils s’arment, leurs officiers les rejoignent, la police est infiltrée, des sabotages de préparent, et des formations paramilitaires ont même confectionné un brassard uniforme, bleu-blanc-rouge64.
Après avoir défini le problème, et souligné sa persistance autant que sa gravité, Lammerding s’emploie à lui trouver une solution, à savoir séparer les «bandes» de la population, pour leur couper tout appui, grâce à une dynamique mêlant répression accrue et propagande. Le 5 juin, il communique une batterie de propositions à sa hiérarchie65:
«Le changement dans la situation des bandes de l’espace Cahors-Aurillac-Tulle représente un danger qui en cas d’invasion peut avoir des conséquences sur les opérations. La masse des terroristes a des visées communistes et destructrices. C’est pourquoi ils ne reçoivent le soutien de la population (en particulier de la part des possédants et des fonctionnaires) que par la contrainte. Les contre-mesures à leur encontre sont restées sans grand succès, car les terroristes ont pu suivre les troupes quittant leurs cantonnements sans être gênées. En fait, la population souhaite la destruction des bandes communistes. Une poursuite des contre-mesures sous forme de patrouilles renforcées provenant du quartier actuel ne constitue pas une approche correcte de l’objectif. En outre, ces opérations coûtent un temps précieux de formation de base et des pneumatiques allemands.»Et Lammerding d’énumérer les recommandations suivantes, où le (gros) bâton côtoie la carotte (rachitique):
- «Contre-propagande» destinée à «monter la population contre les terroristes» en «dénonçant les terroristes comme fauteurs de troubles communistes»;
- Occupation des localités de Cahors, Figeac et Brive par des unités mobiles renforcées, luttant contre «les bandes» avec la Sipo-SD, quitte à tenir en réserve le peloton de chars subordonné à un bataillon;
- «Arrestation de 5 000 hommes suspects dans l’espace Cahors-Aurillac-Brive jusqu’au 15-6-44 et procéder à leur expédition dans le Reich. Les terroristes, selon les données fournies par la population civile, lèvent actuellement les classes 1925 et 1926. Par l’évacuation de ce nombre d’hommes l’organisation terroriste se voit retirer ses moyens d’action.»
- Réquisition («mise en sécurité» écrit Lammerding…) de 200 véhicules de transport et de 400 véhicules personnels du secteur Cahors-Aurillac-Brive, de manière à en priver l’ennemi, ce qui porterait atteinte à sa mobilité.
- «Mise en liberté d’un membre de famille ou d’une connaissance, prisonnier de guerre, en compensation pour ces données, qui auront permis la mise en sécurité de grands dépôts d’armes ou l’arrestation de chefs terroristes ou de plus de 10 terroristes. La promesse de primes n’est pas recommandée étant donné le sens de l’honneur des Français, et ne ferait se manifester que de vils dénonciateurs, qui la plupart du temps, s’acoquinent avec les deux côtés. La division s’assurera qu’à la place des prisonniers de guerre libérés 10 hommes capables de travailler seront expédiés dans le Reich.»
- «Annonce et exécution de la disposition que pour chaque Allemand blessé trois, et pour chaque Allemand tombé dix terroristes seront pendus (et non fusillés). L’exécution par pendaison n’est pas usuelle dans la justice française. Par son application aux terroristes, ceux-ci seront discriminés et exclus de la communauté du peuple français.»
- «Surveillance renforcée de la circulation par tous les services locaux dans la zone et sur son périmètre.»
Par de telles propositions, que le 58e corps blindé s’empresse de répercuter à la hiérarchie de la Wehrmacht66, Lammerding souhaite sortir de l’actuel cadre répressif allemand «à l’Ouest» et le fait savoir, non sans arrogance. Mais, au fond, il n’invente pas grand-chose67; et si un tel document illustre, chez Lammerding, une transposition en France des méthodes anti-partisans appliquées à l’Est, elle est encore loin d’y correspondre dans leur ampleur: on y lit les pendaisons de Tulle, mais nullement le carnage d’Oradour68.
II. A la suite du Débarquement: la terreur nazie à l’ordre du jour
Dans la foulée du débarquement en Normandie: terreur dans le Sud-Ouest
Le lendemain de l’émission des recommandations de Lammerding, 6 juin 1944, les Alliés débarquent en Normandie – et, surtout, s’y accrochent. Maints Français, encouragés par cette libération qui s’annonce, rejoignent le maquis, spontanément ou conformément à de précédents mots d’ordre. En résultent de très nombreuses actions contre l’occupant, notamment des sabotages et, dans le sud de la France, des tentatives de libération de villes, conduites aussi bien par les maquis des Francs-Tireurs-Partisans (FTP, communistes) que ceux de l’Armée Secrète (AS, gaullistes) et de l’Organisation de la Résistance de l’Armée (ORA, anciens militaires initialement hostiles aux deux premiers), unifiés le 1er juin sous le titre de Forces françaises de l’intérieur (FFI)69. Hautes-Alpes: libération (temporaire) de la sous-préfecture de Barcelonette le 7 juin 1944 par des FFI issus de l’AS et de l’ORA; Ardèche: libération (là encore temporaire) par les FTP et l’AS d’Annonay le 6 juin 1944; Vaucluse: libération (encore temporaire) de Valréas par les FTP et l’AS; Dordogne: tentative de libération (manquée) de Mussidan le 11 juin 1944 par les FTP; Cher: libération (temporaire) de Saint-Amand-Montrond, le 6 juin 1944, par l’AS et les FTP; Creuse: libération (temporaire) de Guéret par l’AS et les FTP, le 7 juin 1944; Indre: libération (temporaire) d’Argenton par l’AS et les FTP, le 9 juin 194470; Corrèze: tentative de libération de la ville de Tulle par les FTP les 7-8 juin 1944…
Du côté de l’occupant, plus question de tolérer un jour de plus la présence de maquis à l’arrière du front. Sans prendre la mesure de la campagne de sabotages menée par la Résistance71, le Haut-Commandement allemand à l’Ouest observe, le 7 juin, plusieurs insurrections dans le Sud, surtout dans le Limousin – à la différence des autres régions, qui semblent se tenir calmes72… Mais comme les Alliés n’ont pas été rejetés à la mer, il faut frapper vite, fort, préventivement. L’OKW pousse aux mesures les plus extrêmes, souhaitant une «pacification totale», ce que le MBF juge impossible73, alors que la Sipo-SD propose de faire bombarder Saint-Amand-Montrond par la Luftwaffe, mais le Haut-Commandement à l’Ouest s’y oppose74.
Dans l’immédiat, le MBF ne songe à lancer contre les maquis du Sud-Ouest que des forces embryonnaires, notamment une unité de reconnaissance de la «Das Reich»75. Au fur et à mesure que les coups de force maquisards se précisent, c’est le Haut-Commandement à l’Ouest qui semble se résoudre, en début de soirée, à engager la totalité de la «Das Reich» dans le secteur Tulle-Limoges, car «seul un grand coup présente une utilité», sachant que la formation SS est la seule unité mécanisée digne de ce nom à cantonner en France méridionale76. Alors qu’il avait décidé de rameuter le maximum de Panzer en Normandie, incluant la «Das Reich»77, ordre est donné, dans la nuit, de consacrer cette division à la répression dans le Limousin, sous l’autorité du MBF78. Ainsi, contrairement à une légende tenace, la 2e division blindée SS n’est pas directement retardée dans sa marche vers la Normandie par des coups que lui auraient déjà portés la Résistance, mais est clouée sur place par le Haut-Commandement à l’Ouest pour écraser, précisément, celle-ci. Une décision avalisée par l’OKW, c’est-à-dire l’état-major militaire de Hitler.
Or l’OKW brutalise les décisions prises. Le 8 juin, vers midi, le général Jodl, son chef d’état-major, exige par téléphone du Haut-Commandement à l’Ouest que l’opération dans le Massif Central soit conduite «avec les moyens les plus extrêmes et les plus sanglants. Depuis des semaines, les rapports du MBF relatent: 1 terroriste abattu, 35 capturés. Ce devrait être l’inverse: 35 terroristes abattus, 1 capturé.». L’état-major du Haut-Commandement à l’Ouest mesure immédiatement la portée de cet ordre, et préfère qu’il soit couché par écrit79. Puis il diffuse la consigne:
«L’état-major de commandement de la Wehrmacht a exprimé le vœu qu’il soit procédé avec une plus extrême dureté et sans indulgence lors de la grande opération contre les bandes dans le sud de la France. Le foyer de trouble permanent dans ce territoire doit être définitivement éteint. L’issue de l’opération est déterminante pour le développement ultérieur à l’Ouest. Les demi-succès de telles actions ne servent à rien. Les forces de résistance doivent être écrasées dans de rapides et vastes opérations de bouclage. Les mesures les plus sévères doivent être prises pour le rétablissement de l’ordre et de la sécurité, pour effrayer les habitants de ces régions continuellement infestées auxquels on doit définitivement faire passer l’envie d’accueillir les groupes de résistance et de se laisser gouverner par eux, et en guise d’avertissement pour l’ensemble de la population. En ces moments critiques, il est indispensable de faire preuve d’une dureté sans égards, afin supprimer tout danger à l’arrière des troupes combattantes et d’éviter aux troupes et à la population civile des pertes encore plus lourdes à l’avenir.»80Bref, la 2e division blindée SS devra faire régner la terreur dans le Sud-Ouest.
Une «guerre-éclair» lourde d’atrocités
Le théâtre d’intervention de la «Das Reich» correspond à l’une des régions les plus actives de la Résistance, baptisée, selon l’organisation administrative de cette dernière, «R5», et s’étalant sur les départements de la Creuse, de la Corrèze, de la Haute‐Vienne, de la Dordogne et de l’Indre81. Les maquis FTP sont majoritaires, mais ceux de l’AS et de l’ORA sont également nombreux. Le printemps a vu un accroissement considérable des actions de la Résistance, qui ne passe pas inaperçu de l’administration de Vichy82, en attendant les libérations de villes.
Pour les Allemands, l’affaire est grave. La garnison de Tulle lance des appels désespérés, on est sans nouvelles de Guéret, les transmissions sont très dérangées83, on soupçonne d’autres actions du maquis, notamment à Aurillac (Cantal)84, et on constate que la Résistance a fait main basse sur quantité de véhicules à moteur85. Lammerding, le 5 juin 1944, a certes fait savoir qu’il était prêt à l’action – pourvu qu’on lui donne les coudées franches. Dès le 7 juin, avant même de recevoir son ordre de mission pour le Limousin, sa division rend compte de ses premières représailles autour de Montauban (maquisards tués et capturés, maisons brûlées, personnes arrêtées et remises à la Sipo-SD)86.
Mais la «Das Reich», loin d’être un monstre cuirassé surarmé et surentraîné, est surprise alors qu’elle n’a pas reconstitué son parc de véhicules. Comme elle manque de carburant, elle réquisitionne tout ce qu’elle peut trouver sur place87. En conséquence, seule une partie de la division, le 8 juin 1944, débute la marche vers le nord, à savoir un groupe de combat réunissant moins de 10 000 hommes, dont le régiment «Der Führer» 88. Cette formation se déploie sur deux axes, vers Limoges (branche ouest) et vers Tulle (branche est)89. Quelques accrochages l’opposent à des maquisards, mais, pour l’essentiel, ce parcours est émaillé d’exécutions sommaires, de massacres, d’incendies et de pillages, recensés comme suit90:
- 8 juin 1944:
- Gourdon: 2 personnes abattues, 2 blessées.
- Payrignac: deux personnes abattues, pillages.
- Grolejac: plusieurs maquisards tués, un civil de 77 ans abattu, incendies, pillages.
- Carsac: neuf personnes abattues, quatre Résistants exécutés sommairement, quatre personnes blessées, pillages.
- Calviac (lieu dit Rouffignac): neuf personnes abattues ou brûlées vives dans un restaurant incendié à cette fin, dont deux petites filles de 11 ans et une de 9 ans, pillages.
- Carlux: trois personnes abattues, deux blessées, incendies et pillages.
- Peyrilhac: une personne abattue, pillages.
- Noailles: maquisards tués, incendies, pillages.
- 9 juin 1944:
- Sadroc: les SS lancent des grenades et tirent à la mitraillette sur une famille réfugiée dans une cave au prétexte de coups de feu tirés depuis un champ voisin – un mort (le père), deux blessés (la mère, le fils), incendie de la maison.
- Perpezat-le-Noir: pillages.
- Salon-la-Tour: un maquisard exécuté sommairement (une civile abattue le lendemain).
9 juin 1944: Lammerding applique ses recommandations du 5 juin précédent
Ces violences, qui vont jusqu’au meurtre d’enfants, s’amplifient, et dans leur nature, et dans leur ampleur, le 9 juin 1944, dans la mesure où cette journée voit la 2e division blindée SS appliquer les recommandations de Lammerding émises quatre jours auparavant91. La ville de Tulle, que reconquiert la «Das Reich» le 9 juin au prix de treize tués dans ses rangs, en paie le prix fort: les SS raflent cinq mille personnes, en pendent 99, en déportent 141 autres (101 n’en reviendront pas); s’y ajoutent dix-huit garde-voies massacrés le 7 juin, 18 habitants tués dans les combats des 7-8 juin, 10 habitants tués par les Waffen SS le 8 juin92.
Le même jour, la «Das Reich» assiste la Wehrmacht dans sa reconquête de la ville de Guéret, bombardée par l’aviation. Quoique neuf Allemands aient été tués dans les combats pour cette ville, neuf autres blessés, dix-neuf étant portés disparus93, la Wehrmacht ne fait pas toutefois subir à Guéret le sort de Tulle, car les Résistants ont correctement traité leurs prisonniers après la reddition de la petite garnison allemande – notamment, les blessés allemands ont été soignés94. Atrocités il y a, mais elles sont le fait des Waffen SS: non loin de là, le 3e bataillon du régiment «Der Führer», commandé par le SS-Sturmbannführer Helmut Kämpfe, croise par accident de petits groupements de maquisards et les anéantit; 29 Résistants sont tués ou exécutés sommairement à Janaillat, lieu-dit «Le Poteau de Combeauvert»95. Et deux localités environnantes font l’objet de pillages96.
Autre massacre, celui d’Argenton-sur-Creuse, perpétré le 9 juin 1944 par la 15e compagnie autonome du 4e régiment «Der Führer». La ville, qui venait à peine d’être libérée par les FTP et l’AS, retombe aux mains des Waffen SS en fin d’après-midi. Les maquisards ont préféré décrocher à la vue des blindés de la «Das Reich», à l’exception d’un d’entre eux, retranché dans une cabane de pierres sèches construite dans une vigne et armé d’un pistolet-mitrailleur; les SS essuient plusieurs blessés, et font finalement sauter la maisonnette à l’aide d’un canon antichar. A la suite de cet accrochage, les SS libèrent les Allemands prisonniers, qui ont été bien traités par les Résistants. Puis sombrent dans une orgie de violences: pillages, brutalités envers les civils, assassinats de trente-trois personnes (la victime la plus jeune est une jeune fille de 13 ans), enlèvement de quatorze otages, dont les cadavres seront retrouvés le 11 juin97.
Pour Lammerding, il n’y a pas lieu de s’arrêter en si bon chemin. Le 9 juin, à 12 h 15, alors qu’il a établi son poste de commandement à Tulle, où se préparent les pendaisons massives de l’après-midi, il ordonne que «la division procède au nettoyage et rapide de la région de ces bandes, en vue d’être rapidement rendue libre pour la poursuite du complément des effectifs ou pour la montée en ligne contre l’invasion»98. Mais la veille au soir, le Haut-Commandement à l’Ouest a ordonné de faire remonter la «Das Reich» vers la Normandie à compter du 11 juin99, une directive reçue par Lammerding le 9 juin dans l’après-midi100. Pourtant, à l’en croire, «le territoire est entièrement entre les mains des terroristes»101! Comment pacifier le «Sud-Ouest» dans un délai aussi court?
8-9 juin 1944: mécomptes isolés pour l’occupant
La Résistance, en effet, et sans s’engager à fond, marque des points. Le 8 juin, un camion de la Wehrmacht tombe dans une embuscade des FTP au lieu-dit La Betoulle, à la limite des communes de Breuilaufa et de Berneuil: quatre ou cinq soldats allemands sont tués (ainsi qu’un Français qu’ils avaient réquisitionné), cinq ou six autres capturés, emmenés dans les bois avant d’être fusillés par les maquisards102. Le 9 juin, des Résistants s’emparent inopinément d’une automitrailleuse en panne aux abords de Sainte-Anne-Saint-Priest: deux soldats allemands prennent la fuite, un autre est tué, le quatrième, capturé mais blessé, est confié au médecin du maquis103. Le même jour, des maquisards – vraisemblablement de l’AS – font prisonniers un sous-lieutenant SS, Karl Gerlach, et son chauffeur, près de Nieul, là encore par hasard; les deux SS sont confiés à deux GMR ralliés à la Résistance, puis emmenés, de planque en planque, au «Bois du Roi»; alors que ces GMR s’apprêtent à l’exécuter, Gerlach s’évade, mais son chauffeur est tué104.
Ce n’est pas fini car, dans la soirée, un groupe de FTP capture le SS-Sturmbannführer Helmut Kämpfe, lequel vient de quitter Janaillat après les exécutions de maquisards, et se rend seul en voiture vers le quartier-général de la «Das Reich», à Limoges. Kämpfe est aussitôt remis au maquis de Georges Guingouin105. Cette capture est un coup dur pour la «Das Reich»: Kämpfe, officier SS, chef de bataillon, vétéran de la campagne de Russie, était titulaire de la Croix de Fer de 2e puis de 1ère classe, et de la Croix de Chevalier, donc renseigné sur les opérations en cours106. Dans l’immédiat, aux abords du lieu où l’on retrouve sa voiture vide, les SS abattent deux cultivateurs107. Le soir même, l’état-major de la «Das Reich», pour compléter ses recherches, va jusqu’à libérer un Résistant, Fernand Laudoueineix, pour qu’il leur serve d’intermédiaire avec «le chef des “terroristes”»: cinquante Résistants seront relâchés en échange de Kämpfe libéré sain et sauf108.
Parallèlement à cette mésaventure, une autre opération est en cours, impliquant le régiment «Der Führer» de la «Das Reich», des collaborateurs français (notamment miliciens), et semble-t-il la Sipo-SD. Mais cette opération, confiée au régiment «Der Führer», n’est pas mentionnée dans l’ordre du jour pour le 10 juin précité, lequel prévoit, entre autres déploiements, que cette unité effectuera des missions d’ordre militaire à l’est de Limoges, et ajoute, à l’attention de cette seule formation: «La situation des bandes, dans la région de Limoges, doit être rapportée à la division jusqu’au 10-6-44, 13 heures»109.
Cette précision horaire ne manque pas de surprendre. Car le lendemain, 10 juin 1944, c’est vers 13 h 30 que le 1er bataillon de ce régiment, va entreprendre, non pas à l’est, mais à l’ouest de Limoges, cette opération que taisent les papiers de la «Das Reich». Cantonné en partie à Saint-Junien, le 1er bataillon, commandé par Adolf Diekmann, expédie alors deux colonnes, l’une vers le village de Saillat, l’autre, bien plus importante, vers celui d’Oradour-sur-Glane110. A Saillat se trouve une usine de fabrication de papier, laquelle recrute des travailleurs étrangers. Selon des dépositions d’après-guerre, le directeur aurait été signalé comme ravitaillant le maquis111, ou alors la moitié de son personnel se serait constitué de maquisards112… Les ouvriers sont maltraités, l’un d’eux est tué, un pillage est commis – mais la troupe ne va pas plus loin, et repart113. Deux collaborateurs français indiqueront aux enquêteurs, après la Libération, avoir participé à l’expédition de Saillat – et leurs déclarations lèvent un coin du voile sur le processus ayant conduit au massacre d’Oradour-sur-Glane114.
9-10 juin: des réunions préparatoires entre SS et «collabos»
Le premier de ces témoins, Camille Davoine, né en 1918, est Milicien, proche de Darnand, et après lui avoir servi d’ordonnance, a été affecté à Limoges en qualité d’inspecteur de la police aux Questions juives115. Arrêté à la Libération, il déclarera à la police avoir assisté à une réunion, à Limoges, «vendredi soir 9 juin à 21 h», au cours de laquelle lui et d’autres Miliciens auraient été avisés par leur supérieur que, le lendemain, «il y aura[it] une opération faite par une division allemande, dans la région. Nous allons faire quatre groupes – autant que mes souvenirs sont exacts – ayant pour mission d’empêcher les excès des troupes allemandes.»
Le lendemain, Davoine et d’autres Miliciens auraient retrouvé un officier de la Sipo-SD, accompagné d’un interprète français, Eugène Patry, et l’auraient suivi jusqu’à Saint-Junien, à une trentaine kilomètres à l’ouest de Limoges, où cantonne une partie du 4e régiment «Der Führer», à savoir le 1er bataillon du SS-Sturmbannführer Diekmann. Sur place, Davoine observe que «la troupe était en tenue de campagne, manches retroussées, munie d’équipements divers, revêtue d’imperméables mouchetés». Davoine accompagne les SS à Saillat, puis revient à Saint-Junien vers 18 h. Il précise ne pas d’être rendu à Oradour-sur-Glane, mais son emploi du temps en fin d’après-midi et en soirée reste évasif116.
Son témoignage est, en partie, corroboré par un autre collaborateur, Eugène Patry, interprète au service de la Sipo-SD Il est vrai que l’homme s’est souvent contredit. Selon plusieurs témoins, Patry leur aurait indiqué avoir assisté au massacre d’Oradour, et avoir tenté de sauver une fillette d’un «copain»117. Patry a nié118, puis, confronté à un de ces témoins119, a admis avoir tenu ces propos, non sans contester sa présence à Oradour, au motif qu’il se serait alors trouvé en congé120. Cependant, un collaborateur travaillant pour la Sipo-SD, René Ohl, a confirmé que Patry avait accompagné des SS à Oradour121.
Patry est ensuite revenu sur ses déclarations: certes, il n’était pas en congé, mais il a participé à une expédition à Saint-Junien le 8 juin 1944, à la suite d’un attentat, avant de revenir à Limoges le 9, puis de repartir le 10 pour Saint-Junien, accompagné d’un officier de la Sipo-SD appelé Kleist et de supplétifs français. Là, il aurait appris que la «Das Reich» prévoyait de se rendre à Oradour-sur-Glane, où auraient été pendus onze prisonniers allemands, et où les SS comptaient se saisir de quarante otages. Le groupe de Patry devait initialement s’y rendre, mais Kleist aurait finalement changé d’avis, et ce petit monde aurait accompagné une autre colonne SS au village de Saillat, où il était prévu de fusiller des ouvriers – mais malgré certaines brutalités, personne n’aurait été tué, ce qui est mensonger122.
Toujours est-il qu’en recoupant ces deux témoignages, une image se dessine: celle d’une division «Das Reich» qui prévoit une opération répressive d’envergure, dès le 9 juin. Comme de précédentes manœuvres de ratissage déjà décrites, les Waffen SS sont assistés de la Sipo-SD et de collaborateurs français. Pourtant, l’ordre du jour pour le 10 juin n’en fait aucune mention, ce qui suggère, d’emblée, une dissimulation – et que dissimuler, sinon un crime en préparation? D’autant que cette instruction prévoit, pour le régiment «Der Führer», des interventions militaires à l’est de Limoges (libérer telle voie de communication, rétablir la liaison avec d’autres unités): c’est donc qu’il n’en est pas de même à l’ouest, à Saillat et Oradour.
Au demeurant, solliciter des informations sur la situation «des bandes» jusqu’au 10 juin 13 h suggère que les Waffen SS prennent leurs précautions, et ne tiennent pas à ce que leur besogne, à l’ouest de Limoges, soit entravée d’une quelconque manière par lesdites «bandes». Ce qui suggère également que le choix de Saillat et d’Oradour comme cibles de cette descente a pu se cristalliser dans la matinée du 10 juin, conformément aux informations recueillies à propos de l’activité maquisarde autour de Limoges. Et donc, qu’il ne s’agissait pas de s’attaquer à des campements maquisards.
Et, de fait, l’autre colonne allemande qui part pour Oradour-sur-Glane, est plus étoffée que celle envoyée à Saillat. Elle regroupe la 3e compagnie du 1er bataillon, laquelle est directement commandée par le chef du bataillon lui-même, Diekmann, accompagné de leurs propres subordonnés123. L’ensemble regroupe, au minimum, cent-vingt hommes, voire cent-cinquante, peut-être deux-cents, armés de fusils, de pistolets-mitrailleurs, de mitrailleuses légères, de mitrailleuses lourdes et de lance-grenades, transportés en véhicules blindés – mais sans armement lourd (ni artillerie, ni chars)124. Le détachement inclut de vingt à trente Alsaciens incorporés de force. S’y ajoutent probablement, à l’instant ou plus tard, une poignée de collaborateurs français, miliciens ou autre, et/ou d’agents de la Gestapo125.
La présence de Diekmann, chef de bataillon au milieu d’une seule compagnie, établit que la mission est plus importante que pour Saillat. «Lorsque nous avons quitté Saint-Junien, racontera un SS alsacien enrôlé de force, l’Untersturmführer [Heinz] Barth en longeant le convoi nous a dit: “Aujourd’hui vous verrez couler du sang”.»126 Et pour cause: Diekmann a informé le commandant de la compagnie, le SS-Obersturmführer Otto Kahn, «qu’il avait reçu l’ordre d’incendier et d’exterminer le village d’Oradour»127.
Pourquoi Oradour?
Nous ne reviendrons pas ici sur le détail de notre démonstration désignant le probable commanditaire du massacre, et invitons le lecteur à se reporter à notre ouvrage, Oradour-sur-Glane 10 juin 1944, paru en 2024 chez Tallandier128. Résumons-nous: la décision de massacrer un village français dans son entier n’a pu être prise par le chef de bataillon de Diekmann, ni même par le seul général Lammerding, ni par le Haut-Commandement à l’Ouest ou le MBF, mais vraisemblablement par Adolf Hitler lui-même, soit qu’il en ait eu l’idée, soit qu’il ait approuvé une proposition de Heinrich Himmler ou, moins probable, de Lammerding. Pour le Führer et le Reichsführer SS, il s’agit d’exercer une frappe chirurgicale, alors que le Reich est confronté à une crise d’ampleur grandissante.
Le massacre d’Oradour, en effet, intervient quatre jours après que les Alliés ont pris pied en Normandie. L’appareil militaire allemand ne peut espérer les rejeter à la mer si la France entre en insurrection. Or, la Résistance multiplie ses coups, surtout dans la moitié sud du territoire français. Pour les hautes autorités nazies, pas question de laisser l’incendie se répandre. Pas question non plus, dans cette logique, de discréditer le régime de Vichy, qui leur est si utile pour maintenir l’ordre dans l’Hexagone. D’où le choix d’une opération sanguinaire mais unique, effroyable mais limitée, imitant une tactique qui, à l’Est, fait partie du quotidien répressif mais, à l’Ouest, est utilisée avec parcimonie: l’anéantissement d’un village. De la sorte, l’occupant terrorise, mais s’emploie à crédibiliser les menaces adressées par le Maréchal Pétain et Pierre Laval à la population: Français, ne vous insurgez pas, rester tranquilles, sinon «d’innocentes populations françaises» en paieront le prix… C’est pourquoi, dès le 10 juin 1944, le village d’Oradour est maquillé, par la propagande nazie, en «village partisan», qui aurait mérité son sort.
Hitler et Himmler n’ont sans doute pas désigné Oradour-sur-Glane eux-mêmes, sauf à être particulièrement versés en géographie française. A tout le moins, dans notre hypothèse, ont-ils ordonné de détruire une localité de plusieurs centaines d’habitants dans le Sud-Ouest de la France, parce que c’était sur ce théâtre que s’étaient multipliées les actions les plus spectaculaires de la Résistance, à savoir les libérations de ville. Une telle mission ne pouvait être attribué qu’à une division idéologiquement fiable, la «Das Reich», dirigée par un général expérimenté, Heinrich Lammerding. Et c’est très probablement cette division qui, dans le cadre des directives reçues, a elle-même choisi la cible.
Une cible parfaite
Qu’est-ce qui a déterminé la «Das Reich» à viser Oradour? Passons vite sur certaines «hypothèses». Les nazis, a-t-on dit dans les jours suivant l’atrocité, auraient confondu Oradour-sur-Glane avec Oradour-sur-Vayres, où se situait un maquis, au sud-ouest de Limoges: il n’en est rien, une telle allégation n’étant qu’une désinformation émise par un censeur allemand et une erreur de plume d’un officier allemand mal informé, d’autant que les SS, qui visaient bel et bien Oradour-sur-Glane, savaient tout de même lire une carte et des panneaux indicateurs129. Plus inepte encore, un autre auteur, Robin Mackness, a également prétendu, quarante ans après le drame, que la «Das Reich» aurait envahi Oradour pour retrouver 600 kilos d’or qu’une poignée de maquisards auraient dérobé à un détachement allemand: une «explication» introuvable dans la documentation allemande, réfutée par les rescapés et les Résistants, sachant que ledit Mackness a cité, en guise de preuve, les déclarations posthumes d’un Résistant anonyme130!
De même est-il exclu que ce village ait été ciblé à cause de la capture et de la mort de l’officier SS Helmut Kämpfe: la «Das Reich» ignorait alors tout de son sort et, parallèlement à ses investigations, avait amorcé des négociations avec la Résistance pour le libérer. Au demeurant, la circonstance que les SS anéantissent Oradour avant même d’en apprendre davantage sur leur précieux «héros» tendrait à conforter l’hypothèse d’un ordre de massacre émis, non pas localement, mais par Hitler et Himmler: on voit mal Lammerding et son état-major prendre d’eux-mêmes une telle initiative en sachant qu’elle vaudrait probablement pour Kämpfe une condamnation à mort…
Oradour-sur-Glane n’a pas davantage été visé parce que des Allemands y auraient été maltraités ou même assassinés par «les bandes»: une telle version ne sera élaborée qu’après le massacre, et raffinée après la guerre par le sous-officier SS Karl Gerlach, qui prétendra avoir été emmené dans ce village, ce qui est impossible – sauf à prêter à Gerlach des facultés d’invisibilité, puisqu’aucun rescapé du massacre ne l’a aperçu.
Toutes ces fables partagent le même postulat, ce qui facilite leur réfutation: les Allemands auraient cru s’attaquer à un nid de Résistants à Oradour. Or, il n’en est rien. Les documents de la division «Das Reich» qui ont survécu à la guerre, notamment l’ordre du jour pour le 10 juin précité, planifient expressément des interventions militaires du régiment «Der Führer» à l’est de Limoges: Oradour se situant à l’ouest, c’est donc qu’il ne s’agissait pas d’y éliminer des «terroristes». En outre, les SS se limitent à y expédier une compagnie plafonnant à cent-cinquante, peut-être deux-cents hommes, sans matériel lourd, ce qui est bien peu si son intention est d’écraser des «terroristes».
Il y a plutôt lieu d’en déduire que la «Das Reich» s’est rendue Oradour précisément parce qu’il n’y avait pas de maquis. Cette absence d’activité maquisarde, bien connue de l’administration de Vichy, a pu être indiquée aux SS par la Milice lors des réunions préparatoires des 9 et 10 juin. Par ailleurs, Oradour était notoirement connu pour être une bourgade relativement prospère, ce qui rendait son pillage plus que tentant. Et, comme l’a pertinemment analysé un enquêteur, Pascal Maysounave, la «Das Reich» devait regagner la Normandie au plus vite, ce qui la contraignait à exploiter le réseau routier et ferroviaire à l’ouest de Limoges: il était donc essentiel, pour elle, de «pacifier» ce secteur, où se trouvait Oradour, afin de dissuader tout sabotage131. En outre, il n’est pas impossible que la Milice ait envisagé, avant l’arrivée de la «Das Reich», de rafler à Oradour-sur-Glane des réfractaires du STO, ce qui l’aurait amenée à désigner l’endroit à l’attention des Waffen SS – mais les preuves manquent132.
D’autres localités ont-elles échappé au pire? La présence des SS à Saillat le 10 juin ne manque pas d’intriguer: se réservaient-ils une option en cas de difficultés à Oradour? De même, les recherches de Michel Baury laissent supposer que les Allemands avaient initialement prévu de mettre à feu et à sang la ville où cantonnait le bataillon SS d’Adolf Diekmann, à savoir Saint-Junien133. Au vrai, la localité n’avait rien pour plaire à l’occupant: municipalité communiste avant la guerre, elle avait été investie par le maquis le 8 juin, outre que, d’après les Renseignements Généraux, un soldat allemand y aurait été tué, et un autre blessé, dans une escarmouche avec des Résistants134. Mais la ville comprenait 10 000 à 12 000 habitants et réfugiés, ce qui dépassait sans doute les capacités d’un bataillon de Waffen SS. Plus étonnant, cette unité n’exercera pas de représailles sur place, peut-être parce que le Maire aurait convaincu la Sipo-SD de n’en rien faire, plus probablement parce que le massacre total d’une bourgade plus petite était déjà envisagé.
Sur ce dernier point, un détail souvent négligé apparaît révélateur. On le doit au sous-officier SS Karl Gerlach qui, à force de chercher à justifier le massacre par sa propre capture, a peut-être scié la branche sur laquelle il s’est assis. A en croire l’un de ses témoignages énoncés en 1951, en effet, «le 9 juin, au début de la matinée, le colonel Stadler [chef du régiment “Der Führer ”] me chargea de préparer des cantonnements, dans la région de Nieul, pour le détachement d’artillerie sur chenilles. En me montrant la carte [son supérieur, chef de régiment, Sylvester Stadler] m’avertit que la Résistance était très active dans ce secteur.»135
Or un cantonnement sera effectivement établi à Nieul le 10 juin au soir, non point pour ces artilleurs, mais pour la compagnie revenant des ruines d’Oradour. Les préparatifs de ce cantonnement ont débuté la veille vers midi, heure à laquelle un petit détachement d’une douzaine de soldats a réquisitionné, sur place, deux classes de l’école ainsi que le logement du directeur de l’établissement, aux fins d’accueillir des troupes devant arriver «le lendemain [10 juin] 10 h», en vérité le 10 juin à 22 h136. Sauf à ce que Stadler ait entre-temps changé d’avis, ces faits, combinés aux déclarations de Gerlach, suggèrent qu’une atrocité était imaginée, voire projetée, à l’ouest de Limoges au plus tard le matin du 9 juin 1944.
En toute hypothèse, Oradour-sur-Glane a été choisi pour ce qu’il paraissait être: un petit village tranquille. Petit, donc facile à éliminer. Tranquille, donc sans danger pour les tueurs.
III. 10 juin 1944: meurtre de masse dans l’après-midi
Le village envahi
Il ressort des témoignages que la 3e compagnie du 1er bataillon du régiment «Der Führer» arrive à Oradour-sur-Glane vers 14 h137. Les survivants relateront, plus tard, leur surprise devant l’arrivée de ces militaires en véhicules chenillés et camions, revêtus de leur uniforme de camouflage bariolé. Le village est bien rempli: nous sommes samedi, jour de distribution de tabac, ce qui attire du monde138; les enfants, à cette époque, ont cours ce jour-là, et l’une des écoles fait l’objet d’une visite médicale139.
Les envahisseurs procèdent en quatre phases: investir, encercler, boucler, rassembler. Investir: franchissant le pont de la Glane, une colonne entre dans la localité par la route du sud-est, celle du tramway, et s’arrête à la sortie ouest. Encercler: à partir de ces points d’entrée et de sortie, les SS se déploient en arc-de-cercle autour du village. Boucler: des barrages sont installés sur les routes et chemins, tandis que des groupes de SS se déploient en tirailleurs et cernent le village. Rassembler: une fois ce cordon établi, les soldats s’attaquent aux maisons, tant du bourg que des hameaux avoisinants, et en font sortir les habitants – direction: la place du champ de foire.
D’emblée, le rassemblement révèle des brutalités – jusqu’au meurtre pur et simple. «En cas de tentative d’évasion, il fallait faire usage de son arme», admettra Heinz Barth140. A peine arrivé dans le village, le commandant de la compagnie SS, Otto Kahn, déclare à ses hommes: «Préparez-vous à faire la guerre.»141 Les SS cognent les portes à coups de crosse en criant aux habitants de sortir, et n’hésitent pas à molester ou frapper ces derniers – dont une mère portant son enfant au cou –, et même à tirer des coups de feu, voire, déjà, à abattre des civils hors du centre-bourg142. Parfois, les nazis commencent à détrousser les villageois143. Un SS alsacien enrôlé de force affirmera avoir reçu l’ordre de refouler tout passant vers le champ de foire, et de les exécuter en cas de refus; quant aux personnes hors d’état de se déplacer du fait de leur état de santé, elles devaient être abattues sur place144.
«Les gens avaient peur, se souviendra Heinz Barth; on leur a ordonné de quitter leurs maisons en les poussant et en les insultant; on en faisait de petits groupes qui étaient acheminés vers le champ de foire.»145 Toutefois, Un soldat SS, probablement alsacien enrôlé de force, convainc une passante se rendant à Oradour de rebrousser chemin: «Si vous continuez, on va vous tuer.»146
Une poignée d’habitants, plus méfiants ou plus chanceux que d’autres, parvient à se dissimuler ou échappe aux patrouilles qui rabattent la campagne ou perquisitionnent les habitations. Généralement, il s’agit de villageois susceptibles d’être en délicatesse avec l’occupant, qui prisonnier de guerre évadé, qui réfractaires au STO, qui juifs147. La crainte d’être raflé par les Allemands et/ou la Milice s’amplifie en cette époque où le débarquement suscite autant de réjouissance que d’inquiétude148. Combien sont-ils à fuir? Impossible à dire. Tous erreront de cachette en cachette, plusieurs heures durant, et perdront la majeure partie de leurs familles et de leurs proches. Quantité d’habitants seront également éliminés alors qu’ils étaient en quête d’une planque, abattus ou brûlés vifs dans l’incendie des logements149.
La majorité des habitants, cependant, est emmenée par les SS vers le centre du bourg, enfants inclus — seul un petit garçon de 7 ans originaire de Lorraine, Roger Godfrin, aura le réflexe de fuir, non sans mal150. D’autres Résistants, tels Mathieu Borie ou Albert Mirablon, sont arrêtés — non point comme tels, mais au même titre que les autres habitants.
Une extermination conduite en quelques heures
L’opération de bouclage et de concentration de la population dure, d’après les témoins, entre une demi-heure et une heure. Plusieurs centaines d’hommes, de femmes, d’enfants se retrouvent, cernés de SS armés, sur le Champ de Foire. Lesdits SS séparent ensuite la foule en deux groupes, le premier constitué des hommes, le second des femmes et des enfants, lequel groupe est emmené à l’intérieur de l’église151. Les hommes restent dehors. Un officier SS, aidé d’un interprète, exige alors des otages (cinq? trente? cinquante?); le Maire, Paul Desourteaux, quitte la foule et s’entretient avec lui dans la Mairie, avant de revenir sans dire un mot; l’officier SS renouvèle sa demande de cinquante otages, et le Maire s’y refuse, s’offrant lui-même comme otage, lui et ses proches parents152.
L’interprète explique aux hommes rassemblés les motifs de la venue des Allemands: il y a un dépôt de munitions dans le bourg, quelqu’un saurait il où il se trouve? Nulle réponse, et pour cause. Est-ce que quelqu’un possèderait des armes individuelles? Un habitant répond qu’il possède une carabine, ce qui n’intéresse nullement les Allemands153. Ces derniers prétendent ensuite perquisitionner le village. Pures fariboles154: en vérité, ils pillent et détruisent – déjà155.
Puis ils scindent la masse des villageois en plusieurs groupes, et les parquent dans six garages et granges alentours: le garage Poutaraud, la grange Beaulieu, le garage Desourteaux, la grange Laudy, la grange Milord, le garage Bouchoule. De nouveau, plusieurs minutes s’écoulent. Des civils brandissent leurs papiers d’identité156, l’un d’eux exhibe un document révélant qu’il travaille pour les autorités allemandes, mais le SS-Obersturmführer Kahn refuse de le laisser partir: il est trop tard, il en a trop vu157. Un sous-officier nazi, Hans Steger, assène: «Nous allons voir ce que ces Français d’Alsaciens sont capables de faire»158
Alors, sur un coup de revolver ou une rafale de mitraillette tirée par le SS-Obersturmführer Otto Kahn159, peut-être amplifié par un haut-parleur160, les SS ouvrent le feu sur les hommes, à la mitrailleuse, au pistolet-mitrailleur, au fusil. Ils tirent dans le tas, le cas échéant en visant bas, fauchant les jambes161. Puis ils achèvent leurs victimes, à l’arme à feu, à la fourche, puis en les incinérant – sans s’assurer que toutes sont bel et bien mortes. Le tout en allumant un poste de TSF, pour écouter de la musique162.
De ce massacre, seuls cinq hommes en réchapperont, tous de la «grange Laudy»: Robert Hébras163, Marcel Darthout164, Mathieu Borie165, Yvon Roby166, Clément Broussaudier167. Leur chance, en effet, tient au mauvais état d’un mur de la grange: «Il y a là un trou qu’un de nos camarades agrandit.»168 C’est Mathieu Borie, maçon de son état, qui s’en occupe, d’autant que des balles perdues ont fragilisé les alentours de l’orifice169. Plus ou moins blessés, ces rescapés parviendront miraculeusement à se cacher puis à s’enfuir. Mais un autre rescapé de la même grange, Henri Poutaraud, garagiste, sera, lui, abattu170.
Le pillage s’intensifie, suivi de l’incendie systématique des habitations171. Des habitants demeurés dans leur logement, incapables de se déplacer, périssent dans les flammes, tel M. Giroux, paralytique de 75 ans172. Et on tue, encore et toujours, de sorte que les cadavres s’accumulent: un groupe d’hommes, semble-t-il étrangers à la commune, certains en bicyclette, sont amenés sur le champ-de-foire et exécutés, un par un, par un Allemand173; quand une voiture-motrice (à l’essai) du tramway de Limoges arrive à Oradour vers 15 h 30 – 15 h 45, les SS abattent également l’un des trois passagers, un employé de la compagnie du tram, Marcelin Chalard, sans autre forme de procès174. On retrouvera des corps partout: dans une buvette du hameau de Puy Gaillard, «dans la cave, sous un escalier en pierre, [des] ossements calcinés, vraisemblablement de femme et de nourrisson»; dans la boulangerie de Léopold Bouchoule, trois corps, dont un dans un étouffoir à braises; à la ferme de Martial Picat, dans le puits, «cadavre d’une femme et autres débris humains»; «dans une petite maison à côté de l’église: restes calcinés d’une femme, reconnue par M. Ledot père, Mme Devoyon»175…
Les femmes et les enfants parqués dans l’église sont voués au même sort. Une seule en réchappera, une cultivatrice de 44 ans, Marguerite Rouffanche, laquelle livrera un précieux témoignage176. Les SS amènent d’abord dans le lieu saint une boîte garnie d’une ou plusieurs ficelles blanches embrouillées, puis se retirent. Une détonation retentit de cette caisse, de laquelle s’échappe une fumée étouffante. Les nazis ont-ils cherché à asphyxier leurs victimes, ou à déclencher une explosion? On ne sait. Toujours est-il que les SS reviennent et ouvrent le feu. Marguerite Rouffanche, après avoir trouvé refuge dans la sacristie, puis s’enfuit derrière le maître-autel, grimpe sur un escabeau, et se lance à l’extérieur de l’église à travers un vitrail, une chute de trois mètres, mais sans dommage, amortie par un amas de ronces177.
C’est alors qu’une jeune femme de vingt-deux ans, Henriette Joyeux (née Hyvernaud), la hèle du haut du vitrail, lui tend son bébé, René, sept mois. Las, les Allemands tirent sur la malheureuse alors qu’elle franchit la fenêtre178, et/ou peu après sa chute179. «Le bébé a dû se tuer ou se blesser très grièvement en tombant, n’ayant moi-même pu le rattraper», indiquera Marguerite Rouffanche180. Un soldat SS du nom de Pakowski se vantera d’avoir achevé l’enfant et sa mère à coups de crosse181.
Entre-temps, Marguerite Rouffanche se réfugie dans le jardin du presbytère, se cache au milieu des petits pois. Dans sa course, elle est blessée de cinq balles aux jambes et à l’épaule. Miraculeusement, elle survit. «Pendant des heures, je grattais la terre avec mes doigts, cherchant à m’enfoncer et à m’en recouvrir les vêtements pour ne pas être découverte. Mes blessures me faisaient bien souffrir, mais, pendant toute la nuit, j’avais surtout très soif et je suçais sans cesse les petits pois et les cosses pour me désaltérer.»182
Dans l’église, les SS jettent bancs, chaises, paille et fagots sur les corps des femmes et des enfants, qu’ils soient morts ou blessés, pour y mettre le feu. Ils s’emploient également, comme dans d’autres villages anéantis, tels que Lidice le 10 juin 1942, à détruire le lieu saint lui-même. D’abord, ils tentent de faire exploser le bâtiment, notamment le clocher, mais l’opération est échec, l’édifice tient bon, un artificier du nom de Gnug est même blessé à cette occasion183. Ils se résolvent à brûler le clocher avec des engins incendiaires, ce qui embrase la toiture et fait très rapidement fondre les cloches par le cerveau, goutte à goutte, à une vitesse telle que les bords s’en détachent avant de pouvoir se liquéfier184.
Les meurtres se poursuivent. Plusieurs personnes des hameaux alentours, en effet, se rendent au village pour venir aux nouvelles, récupérer leur progéniture, ou simplement rentrer chez eux, et sont abattues: Marie Ducharlet185, Mélanie Brun (épouse Milord)186, André Foussat187… On retrouvera parfois leurs cadavres188. Un Waffen SS alsacien, Georges-René Boos (engagé volontaire celui-là), assassine deux femmes qui viennent chercher leurs enfants enfermés dans l’église189.
Premiers constats le jour même du massacre: les passagers du tramway du soir
Le 10 juin 1944, vers 18 h, alors que le village se consume dans les flammes, un tramway part de Limoges en direction du village. Son départ a été retardé, un employé a même indiqué qu’il pourrait être annulé, car «les Allemands sont à Oradour depuis le début de l’après-midi. On ne sait pas ce qui se passe. Nous avons essayé de les appeler plusieurs fois, mais Oradour ne répond pas.»190 Finalement, le personnel du tram décide de faire partir l’engin191.
A bord, l’inquiétude règne. «En partant de Limoges, nous savions déjà qu’il se passait quelque chose à Oradour, racontera une des passagères, Camille Senon, lors de son audition par le Tribunal militaire de Bordeaux le 27 janvier 1953. A partir de Vergneul sur Vernes, on apercevait déjà un épais nuage de fumée qui se déployait. A chaque station du tramway, nous demandions aux gens de la localité qui se trouvaient là s’ils savaient quelque chose, car nous étions excessivement inquiets et angoissés. Mais personne ne savait rien, on nous disait: “C’est à Oradour… A Oradour il se passe quelque chose. Les Allemands y sont depuis le début de l’après-midi, mais nous ne voyons personne venir d’Oradour”.»192
A quelques kilomètres du village, à la station de Vayrac, un jeune homme paraissant fuir en bicyclette avertit les passagers que le village brûle, mais le conducteur décide de continuer son chemin193. Le tramway est stoppé par les SS peu avant l’entrée d’Oradour. «Pendant tout le temps de notre stationnement, relate un témoin, nous entendîmes des rafales de mitraillette, ainsi que le crépitement de l’incendie, mais aucun son humain ne nous parvint.»194 Un autre indique: «J’ai eu l’impression que des grenades incendiaires avaient été jetées à l’intérieur des bâtiments. J’ai vu arriver les Allemands près de quelques immeubles et presqu’aussitôt le bâtiment flambait. Je ferai remarquer qu’il ne devait plus y avoir aucun habitant, car je n’ai vu personne sortir des immeubles. Je n’ai pas vu, à cette occasion, que les Allemands aient tiré des coups de feu. Cela m’a fait supposer que les habitants avaient tous été rassemblés auparavant.»195 Une autre ajoute: «Les militaires qui nous gardaient et surveillaient le tramway n’avaient pas l’air nerveux.»196
Après une attente de près d’une heure, les Allemands ordonnent aux passagers se rendant à Oradour de descendre. Si certains se gardent bien de se faire connaître197, d’autres, une vingtaine au total, obtempèrent198. Un ingénieur, Jean Pallier, de passage pour voir son épouse et ses enfants à Oradour en attendant de repartir pour Paris, est pareillement appréhendé alors qu’il circule en voiture. Tandis qu’il constate que «le bourg n’était plus qu’un immense brasier», il est emmené avec les passagers du tramway à un poste de commandement provisoire, installé dans la ferme du boulanger Thomas, au lieu-dit du Masset. Sur le chemin, l’ingénieur note qu’un «cordon de troupe en armes cernait complètement le bourg» 199. Mais l’ambiance semble tranquille: «Ici, il y avait des Allemands qui mangeaient, les autres tuaient des poulets. Quelques-uns creusaient une tranchée.»200 Laquelle tranchée devait servir à enterrer une victime de l’extermination201.
Sur place, l’attente reprend. Les civils redoutent d’être exécutés. Les SS «faisaient les cent pas autour de nous, avec des mines, d’ailleurs, de fauves, mais qui n’avaient rien de triste ou de repentant; au contraire, ils avaient des éclats de rire, mettaient en évidence leurs armes pour essayer de nous impressionner.»202 Selon une passagère, «plusieurs Allemands que nous avons questionnés nous ont dit que les habitants d’Oradour avaient tous été fusillés»203. D’après Camille Senon, un des civils a «entendu chuchoter que les femmes et les enfants venaient d’être brûlés à l’église»204.
Les Allemands procèdent de nouveau à une vérification des papiers d’identité. Jean Pallier poursuit: «Nous étions tous des hommes qui venions voir leur famille, et aucun d’entre nous domicilié à Oradour. Est-ce pour cette raison? Est-ce plutôt parce qu’il était tard et que l’officier avait hâte de rentrer? Toujours est-il que nous fûmes invités à nous éloigner rapidement du village. Au moment de notre départ, le sous-officier qui avait procédé à la dernière vérification d’identité, et qui parlait correctement le français, nous dit: “Vous pouvez dire que vous avez de la chance”.»205
Cette mansuétude est-elle attribuable à une initiative du même sous-officier, qui servait d’interprète206? Ou s’inscrit-elle plutôt dans la stratégie terroriste de la division «Das Reich»: ne tuer que les résidents d’Oradour, au nom du principe de culpabilité collective, et laisser à d’autres civils le soin de répandre la rumeur du massacre? Difficile de trancher, d’autant que, dans la journée, on l’a vu, d’autres civils se rendant à Oradour-sur-Glane ont eu moins de chance…
Dimanche: découverte des cadavres
Si une partie des SS quitte le village au soir, un groupement demeure sur place toute la nuit. Certains s’établissent dans la maison d’un négociant en tissus, Jean Dupic, où l’on retrouvera plusieurs bouteilles vides, vins vieux, liqueurs, champagne207. Commettent-ils des viols? Rien ne le confirme avec certitude, rien ne l’exclut non plus208.
Dimanche matin, des patrouilles allemandes continuent de circuler, refoulent des passants qui se dirigent vers le bourg209. «Comme nous pensions partir à Oradour, vers 6 heures, témoignera Camille Senon, réfugiée au village des Bordes, de nouveau des camions SS sont passés et sont revenus vers Oradour. De nouveau, nous avons entendu des rafales, des coups de feu et, de nouveau, nous avons vu des flammes.» 210 Et pour cause: à cet instant, les SS tentent de «nettoyer» les lieux, c’est-à-dire de brûler les derniers édifices – telle la «maison Dupic» – et, surtout, d’enterrer le plus de cadavres possibles. L’opération se séquence en plusieurs phases, répartie entre plusieurs équipes: aux uns, les victimes des granges et des garages; aux autres, plus tard, celles de l’église.
Entre ces passages, ceux qui se cachaient se relèvent, parcourent les décombres. Des habitants des hameaux voisins les rejoignent. Hubert Desourteaux, prisonnier de guerre évadé qui s’était caché à l’arrivée des Allemands, retourne au bourg en fin de matinée: «Alors nous sommes rentrés dans l’église… je suis rentré dans l’église. J’ai vu un monceau de cendres, de cadavres, de tout ce qu’on voudra, de pierres. Dans le coin du confessionnal, il y avait des corps d’enfants bien reconnaissables. […] Des enfants qui étaient recroquevillés… Un qui saignait au bord de la bouche.» Jean Pallier: «Il n’est pas de mots pour décrire pareille abomination. Bien que la charpente supérieure de l’église et le clocher soient entièrement brûlés, les voûtes de la nef avaient résisté à l’incendie. La plupart des corps étaient carbonisés. Mais certains, quoique cuits au point d’être réduits en cendre, avaient conservé figure humaine. Dans la sacristie, deux petits garçons de douze ou treize ans se tenaient enlacés, unis dans un dernier sursaut d’horreur. Dans le confessionnal, un garçonnet était assis, la tête penchée en avant. Dans une voiture d’enfant reposaient les restes d’un bébé de huit ou dix mois.»211 Hubert Desourteaux: «Après, nous sommes rentrés dans le bourg. J’ai trouvé, dans la grange Laudy, des cadavres. […] Certains n’étaient pas reconnaissables; mais il y avait des cadavres encore entiers. […] Nous avons vu aussi deux cadavres devant la boulangerie Bouchoule.»212
Des rescapés sont retrouvés, mis à l’abri, tels Marguerite Rouffanche ou Marcel Darthout, qui sont hospitalisés – ce dernier avec l’aide d’un officiel du régime de Vichy, le sous-préfet de Rochechouart, Belloc de Chamboran213. Ce dernier, sur place, indique n’avoir trouvé, «lorsque j’y suis parvenu vers 19 heures, que des décombres fumants, et me suis rendu compte qu’il n’y avait pas de secours immédiats à apporter.»214
Les Allemands, cependant, reviennent le soir215, ainsi que le lendemain matin. Le soldat SS Auguste L., incorporé de force, indiquera: «En effet, le lundi 12 juin, nous sommes retournés à Oradour vers 4 heures également, cette fois pour nettoyer l’église. J’ai alors été placé comme sentinelle près des camions.» 216 Si bien que, déclarera Hubert Desourteaux, «j’ai été surpris, le lendemain, en revenant dans l’église, de ne plus trouver de corps. Le monceau de cadavres qui était là n’y était plus: il y avait encore les cendres, mais plus de cadavres.»217 On retrouvera, ainsi, sous l’appentis du presbytère, dix cadavres (huit enfants et deux femmes); de même sera mis à jour un charnier à côté de la petite porte de l’église, avec dix cadavres et des débris humains correspondant à quinze personnes218.
Les SS partent dans la matinée du 12 juin 1944, ce qui va faciliter les premières investigations.
IV. Un retentissement énorme
Vichy réagit
Le 10 juin, l’incendie, visible à des kilomètres, ne manque pas d’inquiéter les riverains. Dès le lendemain, le journaliste Pierre Limagne, qui, depuis 1940, consigne jour par jour, à Limoges, les informations officielles et non-officielles sur la guerre et l’Occupation, relate que, «pour faire un exemple», les nazis «ont brûlé hier, près d’ici, le gros village d’Oradour-sur-Glane.»219 Apprenant la nouvelle le même jour, le journaliste et résistant Pierre Poitevin220, s’y précipite à bicyclette, inspecte les lieux mais, par prudence, n’interroge personne. De retour le 12 juin, il questionne des témoins, lesquels lui répondent, unanimes, que personne n’a attaqué les Allemands221.
C’est également le 11 que le Préfet régional de Vichy, Marc Freund-Valade, apprend la nouvelle du massacre222. Il demande, le soir même, un laissez-passer aux autorités allemandes, ce qui lui est refusé. Le lendemain, il se rend au siège de l’Etat-major principal de liaison no 586, à Limoges et, devant le chef de cette unité, le général Gleiniger, émet «une protestation solennelle contre de telles méthodes de répression, contraires à toutes les lois de la guerre, et dont l’atrocité soulève l’indignation de toute la région»223. Gleiniger rapporte:
«Le Préfet de Région était profondément bouleversé par les événements de Tulle et d’Oradour. Il insiste sur le fait qu’il comprend que l’on combatte les terroristes par tous les moyens et sans ménagement. Il faudrait cependant éviter, pense-t-il, que des gens totalement innocents aient à souffrir des mesures prises par la troupe ou même soient tués. Un grand nombre de fonctionnaires supérieurs de l’Etat défendraient par conviction toutes les mesures prises par le gouvernement français légitime de Vichy et soutiendraient la politique promue par Vichy, visant à la collaboration avec le Reich dans l’intérêt de l’Europe, en prenant des mesures relevant de leur compétence personnelle. A cause de procédés comme ceux évoqués plus haut la position des préfets et sous-préfets par rapport à la population, alors que leur position par suite des exigences causées par la situation de guerre n’est déjà pas facile en soi, est rendue plus difficile encore.»224Faute de laissez-passer, écrit Freund-Valade à Vichy, «j’ai dû donc me résoudre à alerter le sous-préfet de Rochechouart qui, ayant conservé la possibilité de circuler dans son arrondissement, s’est rendu aussitôt à Oradour/Glane. Le lendemain lundi 12 juin, il me rendit compte des résultats de sa visite et du spectacle d’horreur qu’il avait eu en arrivant. Le village qui comptait 85 maisons n’était plus qu’un spectacle de ruines et la population tout entière, y compris les femmes et les enfants, avait été massacrée par les troupes allemandes.»225
Les nouvelles, désormais, vont vite. A Oradour, note Pierre Limagne le 12 juin, «les Allemands ont brulé tous ses habitants. Les femmes et les enfants auraient trouvé la mort dans l’église, pendant que les hommes étaient massacrés dans ses granges, auxquelles on a mis le feu ensuite. Plusieurs centaines de tués, dit-on, et moins d’une dizaine de rescapés.»226 Le 13, le Préfet Freund-Valade peut – enfin – se rendre sur place, en compagnie de Mgr. Rastouil, évêque du diocèse:
«Dans l’église en partie en ruines, se trouvaient des débris humains calcinés provenant de cadavres d’enfants (tel un pied d’enfant dans une pantoufle), des ossements étaient mêlés aux cendres des boiseries. Le sol était jonché de douilles portant la marque STKAM et les murs de l’église portaient de nombreuses traces de balles à hauteur d’hommes. Il est à noter que si le toit de l’église s’est effondré, le plafond qui est en maçonnerie est à peu près intact ainsi que les murs. Le feu n’a donc pu prendre à l’intérieur de l’église que s’il a été mis intentionnellement. A l’extérieur de l’abside, le sol était fraîchement remué: les restes des femmes et des enfants avaient été enterrés là par les troupes allemandes. A côté, des vêtements d’enfants à moitié calcinés avaient été rassemblés. Sur l’emplacement de ce qui avait été des granges, des corps humains entièrement calcinés entassés les uns sur les autres et partiellement recouverts de matériaux divers offraient le spectacle du plus atroce charnier.»227Le malaise des généraux allemands
Le 15 juin, Freund-Valade reçoit le général Gleiniger, à la demande de ce dernier. L’officier allemand, les larmes aux yeux et «en proie à l’émotion la plus violente que puisse manifester l’être humain», admet que le massacre d’Oradour déshonore l’armée allemande: «Oui, je ressens ce déshonneur car le forfait est un crime contre le peuple allemand et je n’aurais point de cesse que je n’aie réussi à lui faire appliquer selon la loi des hommes, le châtiment le plus sévère.»228
Les jours suivants, tout en laissant la propagande allemande diffuser ses fausses nouvelles, Gleiniger tente d’obtenir des informations de la «Das Reich» sur les raisons de la tuerie, sans succès. «En résumé, affirme-t-il à sa hiérarchie le 20 juin 1944, il faut dire que les événements d’Oradour ont porté tort à la cause allemande de manière incommensurable.»229 Le 24, toutefois, Gleiniger se voit enjoindre de «ne plus rien faire.»230 L’avenir ne lui laissera pas le temps d’aller plus loin: le 22 août 1944, le général périra dans une embuscade tendue par la Résistance231.
Il n’est pas seul à déplorer le crime. Comme le constate Pierre Limagne dès le 14 juin, «nombre d’Allemands sont tout à fait honteux de l’affaire d’Oradour-sur-Glane. Les autorités d’occupation se renvoient la responsabilité les unes aux autres.»232 Plusieurs généraux de la Wehrmacht prennent leurs distances avec les agissements de la division «Das Reich»: le 17 juin, Johannes Blaskowitz, commandant en chef du groupe d’armées G, chargé de repousser un débarquement dans le sud de la France, interdit les représailles aveugles, demande d’épargner les femmes et les enfants ainsi que les hommes qui n’ont «rien à voir avec les terroristes» et prohibe l’incendie systématique des maisons233; par ordre du 30 juin 1944, le général Lucht, chef du 66e corps de réserve, énonce des directives similaires, au motif que «des comportements aussi honteux salissent la bonne réputation dont jouit de longue date l’honorable soldat allemand, qui combat proprement»234; le 16 juillet, le 58e corps lui-même indique que «se venger contre des femmes et des enfants est dégradant»235.
Premières interventions dans le village
Dans l’intervalle, les barrages et couvre-feu imposés par les autorités allemandes retardent l’intervention des services sanitaires français. Le 14 juin le général Gleiniger autorise, jusqu’au 22 juin, l’envoi d’équipes en charge des secours, ainsi que de l’inhumation des victimes, du déblaiement des ruines et des mesures sanitaires indispensables236.
Le Préfet Freund-Valade ne perd pas de temps237: sous la direction du Dr. Bapt, chef du service de santé du département de la Haute-Vienne, et de son adjoint le Dr. Benech, des groupements composés de séminaristes, d’étudiants, de membres de la Croix-Rouge, près de cent-cinquante personnes au total, s’acheminent vers Oradour à partir des 14 et 15 juin238. Les accompagnent un commissaire de police, André Petit239, ainsi que le journaliste et Résistant Pierre Poitevin, d’ailleurs muni d’un appareil photo – non sans réticence du Dr. Bapt, visiblement peu désireux de s’encombrer d’un reporter, surtout si ce dernier est identifié comme tel par les Allemands240.
Ce sont plusieurs charniers qui attendent secouristes et enquêteurs, sous une chaleur écrasante. «On avait apporté des cercueils de Limoges, qui se sont révélés insuffisants», précisera le commissaire Petit241. L’état des cadavres est tel qu’ils ne sont généralement identifiés que grâce aux papiers d’identité dénichés sur eux242. On retrouve le corps du Maire, Paul Desourteaux, dans une fosse derrière le chais Denis: «Dans la poche de son veston, note un rapport des Renseignements Généraux le 4 juillet 1944, son portefeuille qui fut préservé des flammes était troué en deux endroits par des balles.»243
L’intérieur de l’église offre un spectacle épouvantable. La partie gauche du bâtiment, en entrant, est «à peu près intacte», témoignera Pierre Poitevin: «Le confessionnal, une chapelle, les objets du culte étaient renversés, mais pas de morts. Mais un petit peu plus loin à droite alors j’ai vu des mains d’enfants, des petits crânes d’enfants avec des cervelles jaunes qui étaient là.»244
«Après le dégagement de l’église, ajoutera Petit, nous avons trouvé des tas de cendres humaines. Ce tas était important puisque, dans certains coins, en particulier quand on entrait dans l’église, vers le fond, vers la petite porte, il atteignait presque la hauteur de la table [environ 80 centimètres de haut]. Il y avait d’ailleurs, à cet endroit-là, beaucoup de points d’impacts qui se situent les uns sur la plaque qui était apposée dans l’église, sur un pilier qui se trouve plus à droite. Il y avait quelque chose de remarquable dans ces cendres: c’est que, dans leur épaisseur, on retrouvait, par exemple, des petites mains d’enfants, des débris, des doigts, un peu comme si cela s’était consumé lentement, mais alors, à très haute température […].»245«A l’intérieur même de l’église il y avait toute une série de cadavres que les Allemands n’ont pas enlevés parce qu’ils étaient restés collés par terre un peu comme de la viande au fond d’une casserole, indiquera l’abbé René Tousch. Nous les avons relevés avec des pelles et des morceaux de tôle.»246 «Les équipes de travail avaient pour mission de déterrer les premiers cadavres qui étaient sur les routes, précisera le Dr. Bapt au procès de Bordeaux. Les autres équipes, de creuser des fosses au cimetière; une troisième était chargée de repérer les fosses creusées par les Allemands en donnant des indices d’orientation (débris de vêtements, etc.). Pendant que ces équipes étaient au travail, je me suis astreint à visiter les maisons l’une après l’autre, les garages. Je dois dire que nous avons trouvé beaucoup de cadavres de vieillards et d’infirmes qui n’avaient pu évacuer les maisons et qui avaient péri dans l’incendie.» On retrouve des morts partout, y compris celui d’une femme dans un puits.
Après l’ouverture des fosses, les corps sont placés le long d’un mur, pour identification, avant d’être «chargés sur de petits chariots, pêle-mêle… C’était le seul moyen de transport dont nous disposions. On transportait les corps au cimetière dans un vulgaire tombeau. Sur chaque cadavre, il y avait une couche de fleurs. Le plus pathétique fut l’instant où tous ces hommes qui m’accompagnaient, de toutes conditions sociales, se tenant par la main, dans le silence d’Oradour dévastée, chantèrent: «Ce n’est qu’un au-revoir, mes frères, ce n’est qu’un au-revoir!»247
«Enfin, poursuit Pierre Poitevin, au milieu de toutes ces ruines, dans la puanteur des cadavres, c’est un concert lugubre d’animaux divaguant, apeurés et troublés dans leurs habitudes. Des bœufs et des veaux beuglent, des moutons bêlent, des chiens aboient et hurlent, des chats miaulent, attendant vainement leur nourriture. Tiraillées par la faim, toutes ces bêtes appellent désespérément leurs maîtres.»248 «Il restait à détruire les cadavres d’animaux, indiquera le Dr. Bapt. Nous avons fait un brasier. Il y avait des vaches asphyxiées dont le ventre avait éclaté sous la pression des gaz. C’était effroyable. Nous avons porté des branches et des fagots pour les faire brûler.»249
Ces travaux sont parfois dérangés par des Miliciens, au prétexte de service d’ordre250. Le 19 juin, des soldats allemands font irruption au village, s’emparent de voitures en état de marche, ainsi que de bicyclettes appartenant aux équipes du Dr. Bapt (lui-même sera mis en joue par un Allemand)251. Ils vont jusqu’à tirer sur des volailles252. Pierre Poitevin est même abordé par des Allemands, qui le laissent finalement partir253.
Premières enquêtes, dans les ruines même
Parallèlement s’amorcent les premières investigations, dans lesquelles se confondent parfois l’administration vichyste et la Résistance. Le Dr. Bapt, notamment, n’est pas seulement directeur sanitaire départementale, il est aussi agent de l’AS: il rend compte à Vichy, mais s’attache à diffuser le contenu de son rapport254. De même Guy Pauchou, secrétaire en chef de la sous-préfecture de Rochechouart, et qui commence à enquêter, est-il agent du réseau résistant «Gallia»255. En outre, l’ingénieur Jean Pallier rédige un rigoureux témoignage qui sera communiqué à Vichy, mais publié par la Résistance256.
Le 12 juin, des représentants de la Résistance sont sur place, incluant Pierre Poitevin, ainsi que le chef régional des Mouvements unis de la Résistance du Limousin, Gaston Hyllaire, qui établit un rapport sur les événements257. Dans les jours qui suivent, Pierre Poitevin parvient également à s’entretenir avec la rescapée de l’église258. Les Renseignements généraux sont également présents, mais ils ont moins d’avance que la Résistance, si bien que leur premier rapport, en date du 15 juin 1944, fourmille d’erreurs259. Il faudra attendre l’interrogatoire d’une dizaine de témoins, dont Marguerite Rouffanche, hospitalisée, pour que les Renseignements généraux produisent un rapport plus circonstancié, plus conforme à la réalité également, le 4 juillet 1944260. Et ce n’est qu’après la Libération, en septembre 1944, que sera ouverte une information judiciaire par le Parquet261.
«J’ai éprouvé de grosses difficultés, au début, pour interroger les habitants d’Oradour qui avaient pu échapper au massacre, indiquera Guy Pauchou lors du procès de Bordeaux. Ces rescapés vivaient dans l’angoisse permanente, dans la peur d’en dire trop, parce qu’ils avaient été menacés par les SS. Ils avaient été prévenus que s’ils faisaient quoi que ce soit à pour aider à les rattraper, ils seraient fusillés eux aussi. L’atmosphère était à ce point tendue et vous verrez quelles étaient les difficultés pour pouvoir obtenir des renseignements que, le 29 juin 1944, 19 jours exactement après le drame d’Oradour, des camions de miliciens de Limoges venaient, transformés en maquisards, à Saint-Victurnien, localité située à 6 kilomètres d’Oradour, dont certains habitants avaient aidé à retirer des cadavres des décombres; ils se sont fait désigner par la population les résistants de cette commune. Quand ils ont pu en avoir huit, ils les ont fusillés le long du cimetière. Alors, dans une atmosphère semblable, il était difficile d’obtenir des renseignements.»262Le dénombrement des morts prend également du temps. Le 13, Pierre Limagne consigne ce premier bilan mortuaire: «594 tués sur 600 habitants»263. Il ne lui faut pas deux jours pour réaliser que ce bilan doit être majoré, voire doublé264. Le 18 juin, Limagne rapporte que, d’après les séminaristes employés à trier les ossements, le massacre aurait fait 800 victimes265, chiffre que Jean d’Albis, industriel de Limoges, communiquait trois jours auparavant à l’ambassadeur suisse auprès de Vichy, Walter Stucki266, et que reprendront les Renseignements généraux dans leur rapport à Vichy du 4 juillet 1944267. Le même jour, le juge de paix fait état de 377 morts et disparus parmi les Radounauds, mais il reste à compter les cadavres des personnes étrangères à la commune268.
Les enquêteurs, qu’ils soient de Vichy ou de la Résistance, collectent des indices, notamment une sacoche en toile verte, des cartes postales, une carte routière269, de même que des inscriptions murales à Nieul270, qui établissent que la 3e compagnie d’une division SS a frappé Oradour. Mais quelle division? La confusion règne encore: on croit que cette compagnie appartient, soit à la division «Das Reich», soit à une division «Der Führer», laquelle n’est en fait qu’un régiment de la «Das Reich»271. Toujours est-il que la «Das Reich» est suspectée dès le 14 juin272.
Protestations officielles
«L’émotion parmi nos compatriotes est considérable, note Limagne le 16 juin, même dans les milieux où l’on avait «collaboré», sans comprendre que collaborer, c’était collaborer avec de telles gens, et devenir solidaire des auteurs de pareilles besognes.»273 Le 19 juin, sa description du massacre est plus précise que jamais:
«Impossible de mettre le drame sur le compte de l’ivresse des soldats: tout a été exécuté méthodiquement. Au début de l’après-midi, on a cerné le pays et commencé à rassembler les hommes dans les granges et le reste de la population dans l’église. Les arrivants – notamment les voyageurs d’un tram venu de Limoges – furent autorisés à entrer dans l’agglomération quand leur carte d’identité portait «Oradour-sur-Glane» et refoulés quand elle portait le nom d’une autre commune. Vers 3 heures seulement, on commença à mitrailler les groupes, puis à achever les blessés en jetant des engins incendiaires dans l’église et dans les granges où se trouvaient les hommes. Du côté où ont péri ces derniers, ont été retrouvées les traces de trois soutanes, celle du curé d’Oradour, celle du curé lorrain de la paroisse qui y était repliée, celle, sans doute, d’un autre ecclésiastique venu en visite. Dans l’église, le tabernacle était ouvert et une moitié du ciboire brisé subsistait. Grosse émotion, même à Vichy.»274«Même à Vichy», effectivement, puisque, le 17 juin, la Légion française des Combattants, section de Limoges, témoigne de son indignation, sans aller trop loin dans la critique de l’occupant275. De même le Délégué régional à la Famille indique à Freund-Valade que «rien ne justifie cette sanction collective contre les personnes et les propriétés privées», et souligne qu’il «sera désormais impossible de faire admettre à toute personne qui aura perdu un membre de sa famille dans cette affaire que le régime bolcheviste, si inhumain soit-il, puisse conduire à de pires excès», puis va jusqu’à réclamer la création d’une commission d’enquête «composée de ressortissans neutres»276.
Les églises protestent, elles aussi, à commencer par Mgr. Rastouil, dans la soirée du 16 juin 1944:
«Le bourg d’Oradour-sur-Glane, en Haute-Vienne, a été, samedi dernier, 10 juin 1944, le théâtre d’atrocités qui n’ont jamais eu leurs pareilles sur la terre de France, soit en 14-18, soit en 1939-1944, et qui sont condamnées au nom de la simple morale naturelle, proclamant qu’il n’est jamais permis de tuer des innocents, parce qu’ils sont incapables d’injures. J’ai le devoir de faire connaître à mes diocésains que j’ai exprimé à M. le Général Commandant les forces d’occupation à Limoges ma douloureuse indignation, du fait que l’église d’Oradour-sur-Glane a été souillée par l’exécution dans ses murs de centaines de femmes, de jeunes filles et d’enfants, et profanée par la destruction du tabernacle et l’enlèvement de la Sainte Eucharistie, et j’ai demandé qu’une enquête soit menée et conclue dans le sens de la justice et de l’honneur.»277Le 18, c’est au tour du pasteur protestant Albert Chaudier de proclamer son horreur:
«L’Épouvante est partout», dit l’Éternel». Oui, partout au milieu de nous, habitants de cette région et de ce département. Comment donc en serait-il autrement? Il y a huit jours, un petit bourg paisible, l’un des plus irréprochables par sa tenue depuis deux ans dans l’épreuve générale qui meurtrit la France, a été supprimé en quelques heures, entièrement incendié, ses habitants et tous ceux qui s’y trouvaient en plus ou moins long séjour ont péri dans des conditions dont l’horreur dépasse les ressources normales du langage, sans excepter les vieillards, les femmes, les jeunes gens, les jeunes filles et les enfants, même les nouveau-nés. En moins d’une demi-journée, ce calme village est devenu un immense tombeau, ce qui est encore une manière bien approximative de s’exprimer… Les détails vous sont plus ou moins exactement connus. Ils sont trop affligeants pour qu’on y insiste. Nous soulignerons seulement, ce qui ne saurait être indifférent, même à des incrédules, qu’un sanctuaire chrétien, lui aussi détruit, a servi de lieu principal d’exécution réservé à la population féminine et enfantine, qu’une église est devenue à la lettre la dernière demeure qui a abrité l’atroce agonie de quelques centaines de créatures innocentes.»278Le 21 juin 1944, Limoges porte le deuil. Lors d’une messe qui se tient à la cathédrale, le Préfet Freund-Valade condamne publiquement le massacre:
«Français, qui avez fait, comme moi-même, ce pélérinage d’indicible douleur, dans cette enceinte sacrée où dorment les morts, aucune parole de haine ne saurait être prononcée sans offense à Celui dont les croix qui nous environnent rappellent le sublime sacrifice. Qu’il soit cependant permis au représentant du Chef de l’Etat et du Gouvernement légal de la France d’élever la voix pour renouveler ici la protestation solennelle qui a été faite auprès de la puissance occupante. Quelles que soient les raisons invoquées, rien ne peut justifier le caractère effroyable de ce drame, contraire à la Convention de la Haye, contraire aux lois françaises et aux lois allemandes. Le sac d’Oradour-sur-Glane et le massacre de ses habitants révoltent la conscience qui demeure saisie d’épouvante. La langue française ne connait pas de mot assez fort pour qualifier cet acte, mais celui qui s’y est livré a commis un crime, même contre sa propre patrie. Adieu, habitants d’Oradour-sur-Glane, morts d’un supplice sans nom! Nous jurons, sur vos tombes, que nous ne reculerons devant aucun effort pour empêcher qu’à l’avenir d’autres subissent votre sort. Ce sera là toute notre raison d’être: que votre martyre serve à sauver les vivants. Mais que ceux-ci nous aident, par leur calme et leur discipline: les grandes douleurs sont silencieuses. Et qu’ils s’unissent, enfin, dans l’immense pitié de la France.»279Pareil discours, pour courageux soit-il, se nourrit de la phraséologie vichyste, qui appelle à subir stoïquement le malheur qu’à prendre les armes. Il s’inscrit même dans le sillage des allocutions contemporaines du Maréchal Pétain et de Pierre Laval, qui appelaient les Français à ne pas s’engager contre l’occupant, à conserver leur discipline, sous peine d’attirer de «tragiques représailles» contre des innocents. L’allocution n’en frappe pas moins les esprits, au point même que, lorsqu’elle est distribuée par tracts, ses destinataires remettent parfois en cause son authenticité280. Mais Freund-Valade ne va guère plus loin, et l’appareil judiciaire de Vichy ne bouge pas281.
La Résistance dénonce le crime
La Résistance, de son côté, ne reste pas inactive. Un compte-rendu du massacre daté du 15 juin, qui pourrait s’inspirer de Gaston Hyllaire, fait l’objet de tracts282. Le 20 juin, on trouve dans les boîtes aux lettres de Limoges un tract des FTP intitulé Le crime horrible des hitlériens à Oradour-sur-Glane283. Les Mouvements unis de la Résistance (ci-après M.U.R., mouvements résistants unifiés depuis 1943, non-communistes) diffusent à la même époque leur propre tract, sous le titre Un éditorial que Philippe Henriot ne fera pas. Les Huns sont passés par là284. De même circule un tract, semble-t-il d’inspiration communiste, assimilant Oradour au massacre de Katyn (en réalité commis par les Soviétiques contre des officiers polonais en 1940, et que l’URSS tente d’attribuer aux nazis depuis la découverte du charnier en 1943)285. Le 25 juin, un autre rapport, émanant d’un «réseau Goelette» tente de décrire le massacre, mentionnant que l’église a été la cible d’une «explosion» ayant conduit à son incendie286.
Mais l’époque ne connaît ni transistor, ni internet, d’autant que, selon les endroits et les jours, l’électricité est coupée. Les informations circulent à pied ou par le bouche-à-oreille, sans être toujours exactes. Ainsi, il faut deux semaines pour que la rumeur des atrocités de la «Das Reich» parvienne à Paris. «On commence d’avoir quelques renseignements plus précis sur ce qui s’est passé et se passe dans le Centre, écrit le Résistant Jean Guéhenno le 22 juin. La résistance est partie trop tôt et la répression est effroyable. Oradour-sur-Glane. Ce joli nom était celui d’un petit village aux environs de Limoges. Un officier allemand a été tué, il y a une quinzaine de jours. Ils ont rasé le village, mitraillé la population rassemblée, jusqu’à ce que plus rien ne souffle ni ne crie.»287
Radio-Londres n’évoque Oradour que le 26 juin, mais, déplore Pierre Limagne, «d’après la presse suisse; or, celle-ci a emprunté certainement ses informations à des sources vichyssoises peu sûres; d’où nombre d’erreurs»288. De fait, ce message radiophonique prétend que «les Allemands comprenaient peut-être des Ukrainiens, des gens de Vlassov [général soviétique collaborant avec le Reich] ou tels autres mercenaires.»289 Deux jours plus tard, c’est au tour de Radio-Alger d’évoquer le massacre290. La confusion règne: le 2 juillet 1944, Alexandre Varenne, politicien influent de la Troisième République et fondateur du journal La Montagne (diffusé en Auvergne et dans le Limousin), évoque dans ses carnets «cette commune d’Oradour-sur-Glane […] désignée, prétend-on, par tirage au sort […], soumise à un effroyable massacre, les hommes fusillés (plus de 700), le reste de la population enfermé dans l’église et brûlée. Dans le nombre, 250 petits Parisiens réfugiés.»291 Et onze jours plus tard, un quotidien suisse indique que, d’après un officiel allemand, les Allemands auraient frappé Oradour-sur-Glane par erreur, en lieu et place d’un autre village, Oradour-sur-Vayres292.
Mais l’information se répand comme une traînée de poudre293. «Cette nouvelle abomination, le préfet horrifié en informe Georges Duhamel, qui en informe Eluard, qui m’en informe, écrira l’écrivain résistant Jean Bruller, alias Vercors, et nous exhalons notre horreur dans une diatribe pleine de colère, qui donne à Paul [Eluard] l’idée d’un pamphlet périodique qu’il appellera l’Eternelle Revue.»294 La presse clandestine s’en émeut, reproduit plusieurs témoignages, dont celui de Jean Pallier, à la fois par Témoignage Chrétien (juillet) et Les Lettres françaises (août)295. La Résistance, en août, va même jusqu’à éditer de véritables brochures, reprenant des témoignages de rescapés296.
V. La Libération et l’immédiat après-guerre: premières élaborations des récits du massacre
Une phraséologie de la Libération
Vient la Libération. Le massacre d’Oradour gagne en notoriété. Avant même la fin de la guerre, plusieurs auteurs tentent d’en décrire le déroulement, d’en établir la matérialité, à l’aide de témoignages et de photographies, à l’instar du journaliste Pierre Poitevin297 et d’un agrégé de l’Université, Franck Delage298. D’autres récits se révèlent cependant infiniment plus fantaisistes, tels que la brochure du journaliste Léon Groc299. Ces publications s’inspirent des récits d’atrocités allemandes établis pendant la Première Guerre mondiale. Elles rejoignent, en 1945, en 1946, d’autres brochures détaillant les tueries allemandes en France, telles que celles de la division «Das Reich», à Tulle300 et ailleurs301. Pareils récits ne visent pas seulement à étancher une «soif de savoir» qui s’exacerbe à la Libération après quatre années de censure302, mais cherchent aussi à mobiliser l’opinion publique contre l’Allemagne, et à fonder des poursuites judiciaires pour crimes de guerre.
Dans le cas d’Oradour, leur structure tient presque de la fable: un lieu «tranquille», «paisible», paysage de carte postale, bouleversé par une troupe venue de nulle part, surarmée et vêtue de vert-de-gris; un déchaînement de cruauté imputable à l’âme – ou plutôt à la Kultur – allemande; et une moralité, résumée comme suit par une célèbre bande dessinée parue à la Libération, La bête est morte!, d’Edmond Calvo, qui raconte la Seconde Guerre mondiale par le prisme du récit animalier pour enfants (et où le «Grand Méchant Loup» est allemand):
«Mes chers petits enfants, n’oubliez jamais ceci: ces Loups qui ont accompli ces horreurs, étaient des Loups normaux, je veux dire des Loups comme les autres. Ils n’étaient pas dans l’action d’une bataille, excités par l’odeur de la poudre. La faim ne les tenaillait pas. Ils n’avaient pas à se défendre, ni à venger l’un des leurs. Ils avaient simplement reçu l’ordre de tuer. Ne croyez pas ceux qui vous diront que c’étaient des Loups d’une secte spéciale. C’est faux! Croyez-moi, mes enfants, je vous le répéterai jusqu’à mon dernier soupir, il n’y a pas de bons et de mauvais Loups; il y a la Barbarie qui est un tout, ne comporte qu’une seule race, celle des monstres, des bourreaux, des sadiques, des tueurs.»303Ce vocabulaire est celui de l’engagement contre l’ennemi abhorré, les Allemands dans leur entier. «Nos cœurs ne s’apaiseront que par la pire vengeance, Haine et honte pour toujours», promettait Jean Tardieu dans Les Lettres françaises. C’est l’Allemagne qui est ici visée, non pas seulement le nazisme, vu comme le dernier avatar de la malfaisance qui s’épanouit et prolifère outre-Rhin. De Gaulle avait donné le ton en 1941: «La guerre contre l’Allemagne a commencé en 1914. Le traité de Versailles n’avait en fait rien terminé. […] En réalité, le monde fait la guerre de trente ans, pour ou contre la domination universelle du germanisme.»304 Bref, des atrocités en Belgique à Oradour, de l’été 14 à l’été 44, c’est la même pathologie «teutonne» qui est à l’œuvre305.
Pareille phraséologie n’a rien d’original à l’époque. On la retrouve dans plusieurs témoignages sur l’univers concentrationnaire306, mais aussi à l’étranger. Un récit grec contemporain du massacre de Distomo assimile également les Allemands à des «âmes puantes», «des loups», «des chacals enragés», «des bêtes enragées avides de chair humaine et assoiffées de sang», des «pervers sexuels», moins virils que des cannibales, se livrant à la nécrophilie307. Comme le constate le philosophe Karl Jaspers en introduction de ses conférences à l’Université de Heidelberg en 1945, «le monde entier accuse l’Allemagne et les Allemands. Notre culpabilité est affirmée avec indignation, avec horreur, avec mépris.»308
Dans ce contexte, des rescapés s’expriment. C’est que «l’après-guerre fut bien le théâtre d’un désir d’attestation dont on n’a pas assez rendu compte», écrira l’universitaire Jean-Louis Jeannelle309. En France, les déportés politiques, les Résistants racontent leur histoire, témoignent de leur expérience de la souffrance concentrationnaire ou de la lutte armée – en attendant que les dirigeants de Vichy prennent le relais pour se justifier, à la fin des années quarante310. Parmi ceux d’Oradour, Marcel Darthout livre son témoignage au journal France-Soir du 30 janvier au 1er février 1945311. De son côté, Mathieu Borie rédige, en 1944, sur un cahier d’écolier, un long récit de la journée du 10 juin 1944, dont quelques extraits paraîtront en 1945 dans la brochure du Mouvement de Libération nationale, Les Huns à Oradour. Toutefois, cette dernière publication expurge toute allusion à son activité de Résistant, peut-être car elle est perçue comme entachant le dessin d’un village «paisible»312.
De la Libération à l’après-guerre: divisions et simplismes mémoriels
Le «village paisible» s’inscrit dans un paysage mémoriel à la fois unitaire et divisé. La France libérée, Vichy chassé, la République de retour (une Quatrième République verra le jour en 1946, par référendum), les nouvelles forces politiques se scindent entre communistes, socialistes, démocrates-chrétiens, soutiens à de Gaulle (chef du Gouvernement provisoire au pouvoir de 1944 à 1946). Les élections municipales du printemps 1945 traduisent un premier «retour à la normale», confirmant l’élimination des anciens partis de droite et «radicaux», le retour en force des socialistes, et la percée des communistes. Nouvelle configuration en 1946: de Gaulle démissionne le 20 avril, en attendant de créer un nouveau mouvement l’année suivante, le Rassemblement du Peuple français (RPF); dans l’intervalle, les Français approuvent par référendum leurs nouvelles institutions parlementaires, sous le nom de «IVe République».
La Résistance devient un brevet de légitimité à gouverner l’après-guerre. Tous les courants politiques en sont conscients. Le général de Gaulle et le Parti communiste révèlent même, dans leur antagonisme, une certaine connivence mémorielle. Chacun se réclame de la France, «éternelle» ou «prolétaire»; dans leurs discours, le peuple français, s’il n’a pas unanimement pris les armes contre l’ennemi, n’en était pas moins soudé contre l’occupant, contre Vichy, et a bel et bien subi l’Occupation du début à sa fin; quant à la Résistance, elle est vue comme une élite, «âme de la France» ou avant-garde du Prolétariat313.
Ladite Résistance est portée aux nues, non sans simplification: restent surtout en mémoire les maquisards et les saboteurs, «soldats de l’intérieur» sans autre uniforme que leur éventuel brassard314. C’est en cette qualité qu’ils sont célébrés comme des héros, qui possèdent leur ordre de chevalerie, les «Compagnons de la Libération», distinction accordée à 1 036 personnes à peine. L’espace public expose la lutte clandestine: les rues, les stations de métro se voient rebaptisées «général de Gaulle», «général Leclerc», «Gabriel Péri», «Colonel Fabien», mais aussi «martyrs de la Résistance»315.
Les morts, les torturés, ceux qui reviennent des camps acquièrent, eux aussi, une valeur politique. Ainsi, les Français exécutés par l’occupant deviennent autant de titres de gloire pour ceux qui s’en prévalent: si les socialistes se refusent à les instrumentaliser, il n’en est pas de même du PCF, qui se présente comme «le Parti des 75 000 fusillés» (sachant que quatre mille Français ont été effectivement fusillés de 1940 à 1944)316. Pour les désigner, le terme «martyr» s’impose naturellement. Sa polysémie s’y prête. Initialement, dans la religion chrétienne, le «martyr» n’est autre qu’un «imitateur du Christ», qui pousse sa foi jusqu’à sa plus parfaite extrémité, c’est-à-dire que, comme Jésus, il préfère mourir supplicié plutôt que d’abjurer. Si le terme, de siècle en siècle, a fini par désigner les victimes innocentes de la cruauté des hommes, il n’a pas perdu sa connotation religieuse, ni son allusion héroïque317.
La mémoire nationale construite par le Gouvernement provisoire et les communistes sur les ruines de l’Occupation en use à profusion: à côté des «martyrs de la déportation», le PCF rend hommage aux «martyrs de Chateaubriant»318, tandis que la ville de Tulle se dote d’un «comité des martyrs». «Le groupe des martyrs comprend ainsi les résistants suppliciés, les otages fusillés, les civils victimes de la répression, les morts en déportation», note Luc Capdevila319. «Les mémoires inclusives de la persécution en France et en Belgique intégrèrent toutes les victimes à l’exception des droits communs, ajoute Pieter Lagrou, mais identifièrent leur expérience à celle de martyrs d’une noble cause, que ce soit la Résistance, le Patriotisme ou l’Antifascisme.»320 Et il n’est point de martyrs sans lieux de martyre, qui varient selon les autorités concernées: si De Gaulle célèbre le Mont-Valérien comme lieu emblématique des exécutions de Français sous l’Occupation, les communistes, pour leur part, retiennent d’autres endroits où ont été fusillés plusieurs des leurs, tels que Châteaubriant et Ivry321.
Cette mémoire nationale présente le mérite de la simplicité. Elle vise à asseoir la France à la table des grandes puissances, et à rassurer une nation pressurée depuis quatre ans, comme l’écrivait l’historien Pierre Laborie:
«Avec la conscience d’appartenir à une communauté de destin, sentiment renforcé par la violence des représailles dont les populations civiles sont victimes en 1944, les Français se reconnaissent dans les martyrs de la Résistance, dans son idéal unitaire, dans sa vision du futur et ses promesses. Si l’immense majorité d’entre eux ne s’est pas directement engagée dans la lutte clandestine, ils associent des souffrances, inégalement véccues, à celles d’une Résistance perçue comme l’incarnation de l’honneur retrouvé et porteuse de nouvelles espérances. Il s’agit évidemment d’une identification symbolique à l’idée de Résistance, à travers une large méconnaissance de son histoire et une appréhension sélective de sa réalité.
Ce phénomène, souvent mal interprété, se nourrit aussi d’une dimension légendaire, consubstantielle à l’événement et contemporaine des faits, dès les premiers jours. Contrairement à ce qui est trop facilement répété à son sujet, la notion de légendaire ne peut pas être associée à la pratique du mensonge et de l’affabulation. Le légendaire naît de faits avérés, qu’il interprète et transforme en s’éloignant peu à peu de la réalité originelle. Il se caractérise par l’immédiateté et répond au besoin de donner sens à une expérience jugée révélatrice, qu’elle soit directement vécue ou plus simplement perçue et reçue. Selon les lieux, les moments et les habitudes culturelles, le légendaire fabrique sans cesse une mémoire multiforme et changeante de l’expérience de la Résistance. Des actions, des faits d’armes, des coups de main ou des manifestations de solidarité sont métamorphosés en récits exemplaires, déformés par la proximité, l’éloignement ou le silence, propagés par la rumeur et le mystère. C’est en partie sur cette perception idéalisée que se forge à la Libération l’adhésion des Français à l’idée de Résistance.»322
Pourtant, à trop uniformiser les Français, cette nouvelle geste gomme les complexités de la période, et créé des confusions entre victimes (rescapés juifs des camps d’extermination, déportés politiques, requis du STO, prisonniers de guerre…), voire entre Résistants (qui ne sauraient se réduire à la figure du maquisard). Dès cette époque, il semble que d’aucuns s’en soient agacés, à l’instar d’un célèbre ténor du Barreau de Paris, Me Maurice Garçon:
«Légende! Légende!
Les journaux célèbrent chaque jour davantage la résistance. La caractéristique des écrivains et des journalites de ce temps est qu’ils savent si bien leur métier qu’ils ont l’art de transformer les choses immédiatement pour les raconter telles qu’elles devraient être.
Il est incontestable que, depuis quatre ans, le fond du pays a été résistant, c’est-à-dire qu’il a franchement détesté les Allemands. Il est vrai qu’obscurément des hommes ont mené un combat tortueux et dangereux, mais ceux-là ont été une faible minorité. Le jeu était trop dangereux. C’est la passivité qui était la règle, et rien de plus. Aujourd’hui, cette passivité est présentée comme une activité courageuse et héroïque.»323
C’est sur ce terreau, et dans ce contexte de conflits politiques, que plusieurs associations se fondent pour défendre les droits des anciens combattants et victimes de la période, non sans peser dans l’opinion publique, à l’instar des mouvements d’anciens prisonniers de guerre. Les pouvoirs publics s’empressent de les courtiser, pour des motifs certes politiciens, mais aussi parce que l’unité nationale prime. Ces assemblages mémoriels, élaborés et consolidés aussi bien par les forces politiques du moment que par des associations nationales ou locales, configurent le souvenir du massacre d’Oradour. Le Sud-Ouest de la France, en effet, se révèle un microcosme de ces discours unitaires et des premières polémiques, sur fond de querelles électorales – avant même la fin de la guerre.
Dans le Limousin: Oradour, enjeu de mémoire… et de politique locale
Le Limousin n’échappe pas aux tensions. Le territoire, de longue date, est marqué à gauche, une réalité accentuée par la Résistance. Mais communistes et socialistes ne parviennent pas à s’unir, d’autant que l’Eglise catholique, incarnée par Mgr. Rastouil, s’oppose viscéralement aux premiers324. Or les blessures de l’Occupation sont encore vives – et ces autorités le savent. Leur commémoration devient un enjeu politique. Les ruines d’Oradour y occupent une place de choix. S’y implanter et en rédiger le récit est affaire de légitimité.
Les communistes paraissent tout d’abord les mieux placés. Forts de leur gloire acquise dans la Résistance, ils remportent les élections municipales à Limoges et Oradour en 1945 – sous le nom de «liste d’union républicaine antifasciste»325. Toutefois, ils ne détiennent pas le monopole des commémorations, car entre-temps, des associations locales voient le jour, auxquelles les socialistes ne sont pas étrangers.
A l’automne 1944, en effet, trois associations émergent – ou tentent d’émerger. Tout d’abord se crée un «Comité actif de conservation des ruines et de création d’un sanctuaire à Oradour-sur-Glane», sous la direction du sous-préfet de Rochechouart, Guy Pauchou, et du Dr. Pierre Masfrand, un notable nommé Conservateur des ruines de la commune d’Oradour-sur-Glane par arrêté préfectoral du 12 septembre 1944326. Soutenu par l’Etat, ce Comité, chargé de prendre en charge les ruines du bourg, comprend aussi le Maire d’Oradour, Louis Moreau, ainsi qu’Hubert Desourteaux et Martial Machefer (outre de recruter Marcel Darthout en qualité de secrétaire). Hubert Desourteaux se retrouve également à présider une autre association, celle «des sinistrés et des rescapés», pour venir en aide aux familles des victimes, tandis qu’un «Comité du Souvenir» tente de voir le jour, patronné par Georges Frugier-Lavérine, un notable dont plusieurs membres de la famille ont péri dans le massacre327.
Ces groupements, qui se disputent quelque peu la mémoire du massacre, comprennent peu de rescapés – et pour cause: ces derniers sont accaparés par le deuil et la nécessité de subvenir à leurs besoins dans un après-guerre de privations. A l’initiative du Commissaire de la République Pierre Boursicot, socialiste, le Comité de conservation des ruines et l’association des «sinistrés et des rescapés» se réunissent, en 1945, en une Association nationale des familles des martyrs d’Oradour-sur-Glane (ci-après ANFMOG), ce qui semble avoir paré une démarche similaire des communistes328.
Certes, la nouvelle municipalité «rouge» appuie les démarches de l’ANFMOG. Mais des rivalités se font jour. A la fin de l’année 1944, le Parti communiste lance une «souscription pour l’érection du monument commémoratif des martyrs d’Oradour-sur-Glane» et édite, à cet effet, une brochure sur le drame329. La sculpture, commandée à l’artiste catalan en exil Apel.les Fenosa, représente, selon la revue Arts, «une femme nue, torturée, léchée et brûlée par les flammes, mais qui porte en elle les promesses d’une vie nouvelle. Œuvre surprenante, déroutante, opposée à notre sentiment actuel de la sculpture, mais d’un pathétique certain, où se trouve évoquée l’horreur de l’inexpiable drame.»330 Mais le Mouvement de Libération nationale, hostile au PCF, réplique par son propre fascicule, en janvier 1945331, tandis que Mgr. Rastouil, lui, prend publiquement position contre le monument lui-même.332 Cette protestation paie, si bien que la statue de Fenosa ne sera installée à Oradour, entre les ruines du village et le Centre de la Mémoire, qu’en 1999. Il est vrai qu’aux yeux de Mgr. Rastouil, la statue de Fenosa est inacceptable à deux titres: elle est d’origine communiste et, surtout, contrevient à l’imagerie qui, alors, s’impose dans l’espace public, celui du «village martyr».
Le «bourg martyr»
Oradour personnifie une France mythique en miniature, une communauté paisible mais hors de Vichy, tranquille mais unie, martyr du fait qu’elle a été massacrée. Les associations locales s’emploient à cultiver son souvenir. Emmené par Guy Pauchou et Pierre Masfrand, le «Comité actif de conservation des ruines et de création d’un sanctuaire à Oradour-sur-Glane» s’inscrit totalement dans cette sémantique. Dès sa première réunion, le 21 octobre 1944, il expose les grandes lignes de sa démarche: assurer la conservation des ruines «afin qu’elles puissent servir d’enseignement aux générations de l’avenir», de sorte qu’il sollicite «leur classement comme monuments historiques»; bâtir un «nouvel Oradour, à proximité des ruines de l’ancien»; ériger un «Musée du Souvenir où seront pieusement conservés et exposés les objets recueillis dans les ruines de la ville, objets qui évoqueront à l’esprit des visiteurs les péripéties les plus marquantes de ce drame monstrueux»; organiser «pieusement» l’espace des ruines pour émouvoir les visiteurs, ce qui suppose également de les empêcher de dégrader les immeubles, de «déjeuner ou deviser sur les marches qui constituent les seuils des maisons, lesquelles doivent être considérées avec le même respect que des tombeaux»333. De même le Comité institue-t-il une «Commission de Censurequi aurait pour mission d’éviter les abus et de veiller notamment à ce que les récits publiés sur Oradour-sur-Glane ne tournent pas au roman», car «la vérité est souvent travestie et les buts poursuivis ne sont pas toujours désintéressés»334.
Guy Pauchou et Pierre Masfrand mènent leurs propres investigations, recueillent plusieurs témoignages et publient, en 1945, un rapport qui sera produit par le Ministère public au procès de Nuremberg335. Ils y ajoutent un «ouvrage officiel» publié au nom et pour le compte du Comité et de l’ANFMOG, et préfacé par le Commissaire de la République Pierre Boursicot (socialiste) ainsi que le Préfet de la Haute-Vienne Jean Chaintron (communiste)336. Le livre, rigoureux et précis, adopte lui aussi un langage martyrologique, décrivant une communauté «atrocement crucifiée par la barbarie allemande»337, victime de la «Kultur allemande: la Kultur splendide, supérieure, féconde, éclatante, éternelle avec sa plus belle fleur le Nazisme et ses plus beaux fruits les SS.»338
Conserver les ruines en l’état
Parallèlement, le Comité milite pour la conservation des décombres. Si les architectes se récrient, l’idée séduit le Gouvernement provisoire, d’autant que l’administration de Vichy l’avait elle-même envisagé en juillet 1944339. Après tout, depuis le XVIIIe siècle et la redécouverte des ruines antiques, notamment celles de Pompéi, on se pique de sauvegarder, selon les lieux, les vestiges du passé. Parfois, des bâtiments endommagés par des catastrophes naturelles ou des affrontements humains ont été laissés en l’état, à titre d’avertissement pour les générations à venir, à l’instar du Couvent des Carmes de Lisbonne à la suite du séisme de 1755. Certes, le plus souvent, que ce soit après la Guerre de Sécession américaine, la Commune de Paris, la Première Guerre mondiale on a préféré reconstruire340. Mais aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale, en certains endroits, les vestiges subsistent, et sont entretenus tels quels: la cathédrale britannique de Coventry à la suite du bombardement allemand de 1940 ou le dôme de Genbaku à Hiroshima après le largage de la bombe atomique en 1945, mais aussi, et surtout, les camps de concentration nazis, tels qu’Auschwitz en Pologne ou Breendonk en Belgique.
La conservation des ruines d’Oradour relève d’une même logique, à savoir inscrire le principe du «plus jamais ça» dans le paysage mondial, comme l’approuve alors la journaliste américaine Janet Flanner: «Un général nazi, plus fou que d’autres car il prétendait être la réincarnation de Frédéric II, a brûlé vifs trois cent cinquante femmes et enfants dans l’église gothique où il leur avait proposé d’aller se faire photographier. […] Après la guerre mondiale du Kaiser, que la photographie moderne n’a pu documenter, l’incrédulité a permis aux atrocités allemandes de disparaître pour devenir apocryphes. La guerre mondiale de Hitler a été plus photogénique; les images des horreurs allemandes ne souffriront ni déni ni oubli.»341
Mais pas seulement. Comme le Gouvernement provisoire s’acharne à prétendre que la France n’a jamais cessé de lutter contre l’Allemagne nazie, et qu’il n’est de guerre sans victime, ni de combat sans souffrance, ni de résistance sans martyr, Oradour devient, selon le général de Gaulle, «le symbole des malheurs de la patrie», mot qu’il prononce sur les lieux mêmes du massacre, le 5 mars 1945, en présence du Maire, du sous-préfet Pauchou et de rescapés. Et d’ajouter: «Il faut qu’un lieu comme celui-là reste pour tous les Français un souvenir commun, un engagement, afin que jamais plus rien de tel ne puisse se produire en France.»342 Sa visite des ruines, qui tient littéralement du pèlerinage, s’achève par la dépose d’une plaque de bronze: «A Oradour, témoin de la barbarie allemande. Le gouvernement de la République.» Pareil déplacement sert bien entendu sa propre légitimité de dirigeant, mais, comme l’observe l’historienne Sarah Farmer, il consacre surtout «la vision d’une communauté paisible, innocente victime de la barbarie nazie»343.
D’autres endroits auraient pu être choisis par l’Etat pour incarner les calamités du nazisme en France, tels que le village de Maillé. Mais Oradour est la seule communauté villageoise à avoir été anéantie, outre qu’aucune habitation n’a été épargnée par l’incendie: tel n’étant pas le cas de Maillé, la reconstruction intégrale de cette dernière localité ne fait pas débat344. Dès lors, en 1946, la nouvelle Assemblée nationale vote, à l’unanimité, une loi spéciale prévoyant le transfert de propriété des ruines d’Oradour à l’Etat, leur classement comme monuments historiques (ce qui implique leur conservation), ainsi que la reconstruction d’un nouveau bourg à proximité345.
Une «nécropole nationale»
Deux «Oradour» vont ainsi coexister: le village anéanti, et un village en devenir, incarnant la continuité de la vie – et de la nation.
A côté du «nouveau village» en travaux, le bourg martyr est transformé, selon un rapport de la commission de l’Education nationale et des Beaux-Arts, de la Jeunesse, des Sports et des Loisirs, en «nécropole nationale où règneront la décence, l’austérité, le respect, le silence», conformément aux préconisations du «Comité actif de conservation des ruines». «Ces restes» deviendront «les témoins de l’une des plus grandes tragédies de l’histoire, le symbole de ceux qui ont disparu dans les camps d’extermination et de souffrance»346. Dès lors, le lieu appelle le pèlerinage, préservé autant qu’il peut l’être des intempéries. L’Etat n’est pas seul à y veiller. Des guides issus de l’ANFM, ayant «l’autorité de porte-parole officiels et le pathos d’habitants du bourg», décrivent aux touristes les circonstances du drame 347.
«“Souviens-toi – Remember”: des écriteaux posés à même le sol accueillent les visiteurs des ruines avec ces mots, ajoute l’historien Jean-Jacques Fouché. Le texte est peint sur des panneaux de bois longtemps accrochés à la signalétique routière de l’entrée du bourg. Un autre, tout proche, invite au silence. Les écriteaux font partie du site. Ils ne sont pas un héritage de la muséographie des ruines mise en place par le Comité du souvenir qui installa sur l’église et les emplacements du massacre des plaques gravées dans la pierre. Ils ne proviennent pas non plus de l’administration chargée de la conservation qui apposa des plaques sérigraphiées sur une matière plastique. Il s’agit d’une signalétique autonome, explicitement tolérée par l’administration, qui ne se serait pas autorisé une intervention aussi «pauvre» et surtout posée de cette façon: par terre. Les écriteaux sont anciens et ils paraissent avoir toujours été là.»348Des restaurations interviennent parfois, et parfois se révèlent-elles critiquables, comme l’observe Jean-Jacques Fouché:
«Les ruines sont un décor propice aux vagabondages de l’imagination; elles rendent les espaces transparents, suppriment les frontières visuelles, troublent. Elles appartiennent à l’univers poétique et pictural du romantisme. Celles d’Oradour donnent à voir les stigmates d’un drame sans rien dire de son déroulement. J’effectuais une visite de professionnel de la muséographie, repérant des restaurations abusives: portes obstruées pour des raisons de sécurité avec des murets en moellons récupérés sur place à hauteur des appuis de fenêtres; strates de graphismes de diverses époques additionnant des signalétiques sans cohérence entre elles. Ces interventions brouillent la lecture des informations et la compréhension des espaces. Des ardoises d’écoliers, apposées à la fin des années quatre-vingt, indiquent les métiers disparus exercés par les anciens occupants. Les ruines deviendraient-elles un écomusée de la vie rurale limousine? L’épave calcinée d’un véhicule, placée en évidence sur le champ de foire, a été restaurée; elle est présentée par les agents du ministère de la Culture comme «la voiture du docteur Desourteaux». Recrutés à Oradour, ils savent l’information inexacte. Il s’agit d’un véhicule ayant appartenu à un courtier en vins. Pourquoi surcharger le récit d’anecdotes douteuses?»349Pareilles erreurs n’ont rien d’original, et se retrouvent chez d’autres lieux de mémoire des meurtres de masse nazis, tels qu’Auschwitz, où les Polonais ont reconstitué à la va-vite une chambre à gaz, celle du crématoire du site «Auschwitz I», en accumulant les erreurs350. Pourtant, écrit Alain Lercher, «j’ai compris qu’on avait bien fait de conserver ces ruines, comme on a bien fait de conserver Auschwitz, non dans un but pédagogique vain ou pour une ridicule commémoration, mais simplement parce que nos morts sont là.»351 Ce que confirmera un survivant, André Desourteaux, à l’historienne Sarah Farmer:
«Pour moi, quand je rentre dans les ruines, tout n’est pas mort. En vieillissant, je revois ma jeunesse et toutes les bêtises qu’on a faites dans ce bourg. Bon… et je suis chez moi. Bien que ce soit… un vide réel… en moi-même, ce n’est pas vide. Les gens sont là. A chaque porte, à chaque fenêtre, il y a un visage. Ce n’est pas forcément triste.»352VI. Une survivance mémorielle entravée par des échecs judiciaires
Premières instrumentalisations mémorielles franco-françaises
La mémoire du massacre est désormais bien ancrée. Elle possède ses récits, ses commémorations. Mais ses promoteurs se divisent. La Guerre Froide, en effet, s’invite en France, les communistes sont chassés du gouvernement en 1947. Ce qui se répercute à Oradour, dont les décombres donnent lieu à un véritable «ping-pong» politique en 1948: le 10 juin, tandis que le gouvernement (dit de «Troisième Force», en rupture avec les gaullistes et les communistes) décerne au «bourg martyr» la Croix de Guerre353, le PCF exploite les hommages du même jour pour s’en prendre au «relèvement de l’Allemagne» (celle de l’Ouest), et exige «qu’Oradour passe avant les usines de guerre allemandes»354!
Ce n’est qu’un prélude. L’année suivante, les couteaux sont tirés: Paris souhaite décorer les martyrs de la croix de chevalier de la Légion d’honneur355; la municipalité communiste, cette fois, désapprouve356, amenant le Préfet de la Haute-Vienne à dénoncer, chez elle, «certaines intrigues»357; l’ANFMOG, présidée par un sympathisant socialiste358, accepte, pour sa part, de recevoir cette décoration et fustige la Mairie, car «la Légion d’honneur est décernée aux morts d’Oradour-sur-Glane. Elle leur est due, comme leur était due, l’an dernier, la Croix de Guerre.»359
En réaction, la municipalité tient sa propre cérémonie le même jour360, avant que, 12 juin, le PCF n’organise une «contre-manifestation» où est conviée «la France qui n’oublie pas»361: près de dix mille personnes s’y retrouvent, dont des personnalités telles que Frédéric Joliot-Curie (prix Nobel de physique) et Louis Aragon, pour remettre un «Livre d’or» où figurent, entre autres, des dessins de Pablo Picasso, de Fernand Léger, de Marcel Gromaire, de Boris Taslizki, d’André Fougeron, de Paul Colin, ou encore des poèmes d’Aragon et de Tristan Tzara362. Et en octobre 1949, le Parti communiste parraine un message des «femmes, mères d’Oradour» célébrant le 70e anniversaire du «généralissime Staline»363.
L’atmosphère se tend. On en vient même aux mains le 11 juin 1950, lors d’un «pèlerinage de la paix» organisé dans le «bourg martyr» par les communistes: devant l’église en ruines, des manifestants frappent et traitent de «provocateur» un participant, mutilé à 100 %, au motif qu’il a indiqué avoir vu en Allemagne des villes et des villages entièrement détruits364…
Un an plus tard, le maire «rouge» d’Oradour dénonce ces «divisions étrangères, des divisions américaines [qui] débarquent en France»365, tandis que Mgr. Rastouil assène que les martyrs d’Oradour «sont tombés pour nous, pour nos libertés communes, pour notre salut commun […], pour nous apprendre à bannir la haine de nos rapports entre nous et à lui substituer l’amour! Ils sont tombés pour nous rappeler qu’il n’y a pas d’autre voie de salut que celle qui conduit au Christ […]»366. Nouvel incident en 1952, lorsque l’ANFMOG invite le Président du Conseil, Antoine Pinay, à la commémoration du 10 juin 1944, à quoi s’oppose le conseil municipal d’Oradour367.
Or ces polémiques rejaillissent sur l’instruction judiciaire du massacre.
1944-1945: de Limoges à Nuremberg, des enquêtes initialement menées au pas de charge
Après l’intermède de la Libération, la Justice s’attaque au massacre d’Oradour avec sérieux et célérité. Dès le mois de septembre 1944, le juge d’instruction de la Cour de Justice de Limoges adresse une commission rogatoire à la police judiciaire de Limoges, désormais chargée de l’enquête368. Le commissaire Arnet, missionné à cet effet, effectue 94 auditions en trois mois, et rend son rapport le 23 décembre 1944369. En février 1945, une liste de 635 victimes est établie370 — elle sera ultérieurement portée à 642 noms371.
Les auditions se tiennent à un rythme effréné, dans une ambiance semble-t-il peu propice à la cordialité, comme s’en souviendra Robert Hébras:
«Etant militaire depuis la libération de la ville [Limoges], et affecté au 63e régiment d’infanterie, suite à mon engagement “pour la durée de la guerre”, je fus convoqué par mes supérieurs dans le bureau du commandant. Deux officiers de police m’attendaient pour me conduire dans les locaux de la police judiciaire. Grande fut ma surprise car j’ignorais les raisons de cette convocation. En quittant le bureau, l’un des deux hommes m’informa que l’on m’avait demandé au sujet du drame d’Oradour; il ne m’en dit pas plus. Durant le trajet, encadré par deux policiers, j’éprouvais un sentiment étrange, comme si j’étais coupable.
Lorsque nous fûmes arrivés, on me fit asseoir devant plusieurs personnes, je déclinai mon identité. Puis commença un interrogatoire que j’eus beaucoup de mal à cerner, me demandant parfois si on ne me considérait pas comme complice des tortionnaires. Je ressentis de nouveau un certain malaise, leurs propos laissant clairement entendre qu’il était étrange que je fusse sorti vivant de cette grange où tant d’hommes avaient péri sous les tirs des mitrailleuses. Ma suspicion était sans doute due à mon jeune âge – j’avais 19 ans – et aux mêmes questions qui m’étaient plusieurs fois posées, pensant que je leur mentais. Me retrouver là, en présence de plusieurs inconnus qui ne me laissaient guère de répit entre deux questions accentua d’autant plus mon malaise.
Après trois heures d’interrogatoire, on me reconduisit à la caserne sans m’avoir proposé à boire, ni à manger. Devant la porte de la caserne, je ne réalisais toujours pas ce qui m’était arrivé.»372
D’autres investigations sont conduites en parallèles – qui jamais ne se croisent, c’est-à-dire que les chercheurs ne communiquent pas entre eux. Tout d’abord, un militaire américain, Ecto Munn, établit un rapport au mois d’octobre 1944 à l’attention du SHAEF, le «quartier général des forces alliées en Europe nord-occidentale», après avoir rencontré plusieurs témoins tels que Mathieu Borie, Armand Senon, Marguerite Rouffanche, Martial Machefer, mais son rapport restera inconnu des services judiciaires français373. De même Guy Pauchou et Pierre Masfrand, on s’en souvient, se livrent-ils à leur propre enquête, interrogeant les témoins pour le compte du Service de recherche des crimes de guerre ennemis (SRCGE, qui relève du Ministère de la Justice et doit superviser les autorités judicaires et policières pour traduire en justice les criminels allemands374).: leurs auditions établissent la trame du dossier qui sera produit au procès de Nuremberg (et de l’ouvrage «officiel» publié pour l’ANFMOG), mais ne sont pas communiquées à la police judiciaire375.
Toujours est-il qu’une abondante documentation, essentiellement testimoniale, est recueillie dans les mois qui suivent le massacre. Elle figure en bonne place dans le dossier du Ministère public français à Nuremberg376, au point qu’interrogés sur le sujet, les accusés et témoins allemands, soit condamnent ce crime de guerre377, soit affirment n’en avoir jamais entendu parler378. Le 30 septembre 1946, le Tribunal militaire international déclare ainsi les SS «organisation criminelle», entre autres motifs parce que «les divisions de Waffen SS portent la responsabilité d’un grand nombre de massacres et d’atrocités tels que les massacres d’Oradour et de Lidice, dans les territoires occupés»379.
Le verdict de Nuremberg assure à Oradour une notoriété mondiale. Mais, en France, la Justice ne tarde pas à s’embourber.
Un enlisement judiciaire, pour cause de Guerre Froide…
Dans les dix ans qui suivent la Libération, près de dix-neuf mille criminels de guerre font l’objet, de la part de la Justice française, d’une citation directe ou d’un ordre d’informer380. Mais sur la même période, les tribunaux militaires français, seuls compétents pour statuer sur les crimes de guerre, rendent à peine 2 345 verdicts381: c’est bien plus que dans les autres pays de l’Ouest382, mais ben peu en comparaison des dizaines de milliers de procès de «l’épuration». Et encore plus de la moitié de ces décisions judiciaires sont-elles prononcées par contumace, c’est-à-dire en l’absence des accusés383… De même certains procès ne brillent guère par leur qualité historique, à l’instar de celui des chefs SS Oberg et Knochen en 1954, ainsi résumé par le chroniqueur judiciaire du Monde, Jean-Marc Théolleyre:
«Conduit sans passion, il n’a pas non plus passionné une opinion publique sollicitée par d’autres problèmes plus actuels. Il est apparu à certains moments comme une formalité indispensable, comme une sorte de liquidation d’un mal déjà oublié. Situé sur le plan de la responsabilité des bureaux, mettant en cause deux hommes dont on ne connaissait à peu près rien, si ce n’est par réputation, il n’a en fin de compte rien révélé. Il faut dire aussi qu’à part quelques points de droit judicieusement, puis abusivement, exploités par la défense cette affaire ne soulevait sur le fond aucune interrogation ni aucun doute. Seul demeurait l’espoir de découvrir le fond de la pensée et le véritable caractère de deux anciens potentats nazis. Là encore il a fallu rapidement déchanter. Knochen, dès le début, n’a cessé d’être paralysé par une inquiétude qui chaque jour creusait un peu plus son visage. Quant à Oberg, il s’est visiblement efforcé de rester «en dedans» de son personnage, appliqué à chercher la riposte utile et à contenir son mépris ou ses accès de hargne passagère derrière une politesse glacée.»384A cet échec, plusieurs causes. Structurelles, tout d’abord: le SRCGE, victime de rivalités interservices, manque continuellement de personnels compétents et de moyens financiers – jusqu’à sa dissolution en 1948385. Diplomatiques, ensuite: la «dénazification» patine, puis s’interrompt, car à Londres, à Washington, mais aussi à Paris, les gouvernants misent sur une réconciliation avec l’Allemagne de l’Ouest pour faire face à l’Union soviétique, et rebâtir une Europe qui cesserait d’être divisée. Ainsi, à compter de 1949, la Quatrième République cherche à s’inscrire dans l’Alliance Atlantique et se démarquer des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne. En conséquence, elle mise sur une réconciliation franco-allemande: une «Communauté européenne du charbon et de l’acier» regroupant la France, la République fédérale allemande, l’Italie, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas voit le jour en 1951, tandis qu’émerge un projet de «Communauté européenne de défense» (CED), à savoir une armée européenne supervisée par des instances supranationales, ce qui implique d’autoriser l’Allemagne de l’Ouest à réarmer – et scandalise, en France, aussi bien le PCF que le «Rassemblement du peuple français», le parti gaulliste fondé en 1947.
Quant aux criminels de guerre, les Anglo-Saxons refusent de livrer à la France ceux qui résident dans leurs propres zones d’occupation (ce qui explique les verdicts rendus in abstentia), et cette même France se montre indulgente au nom de sa nouvelle diplomatie germanophile. A partir des années cinquante, Paris multiplie les mesures de grâce, à l’égard, entre autres, de l’ex-ambassadeur Otto Abetz, libéré en 1954 après avoir été condamné à vingt ans de travaux forcés en 1949, ainsi que d’Oberg et Knochen, également remis en liberté en 1962. Au final, près de 800 Allemands seront condamnés à mort, mais 47 peines seront effectivement exécutées386.
… et de «malgré nous»
Dès 1944, les enquêteurs judiciaires savent que la compagnie SS ayant massacré Oradour comprenait des Alsaciens, enrôlés de force dans leur écrasante majorité. Certains sont retrouvés, interrogés et même inculpés en 1944 et 1945387. Un autre, Georges-René Boos, engagé volontaire celui-là, est retrouvé dans un camp de prisonniers en Grande-Bretagne en 1947388. Or, leur entrée en scène enraye la mécanique judiciaire.
D’abord pour des motifs historiques. Et pour cause: eux-mêmes, à l’exception de Boos, sont victimes du nazisme! L’Alsace-Moselle, après tout, avait été annexée par l’Allemagne hitlérienne. En conséquence, du mois de septembre 1942 à la Libération, cent mille Alsaciens (un habitant sur dix) et trente mille Mosellans ont été versés dans la Wehrmacht et les Waffen SS, auxquels il faut ajouter un peu moins de 2 500 Alsaciens engagés volontaires. Plus de trente mille d’entre eux ont été tués sous uniforme allemand, la majorité sur le Front de l’Est389. Pire encore, près de quinze mille Alsaciens-Mosellans ont été internés par les Soviétiques au sinistre camp de Tambov: deux mille n’en sont jamais revenus390.
Les «Malgré nous», comme on les appelle, détonnent sans doute dans l’après-guerre français. L’épuration, en Alsace, n’a pas été moins sévère qu’ailleurs, mais ne les a pas visés391. Des associations prennent leur défense, telles que l’Association des Déserteurs, Evadés et Incorporés de Force (ci-après ADEIF) dans le Haut-Rhin et le Bas-Rhin, et l’Association des Combattants «Malgré-nous» et Réfractaires de la Moselle (ci-après ACMNR). Elles ne ménagent pas leurs efforts, et remportent plusieurs succès: en 1947, les «Malgré nous» emprisonnés peuvent percevoir une allocation équivalente à celle des prisonniers de guerre français détenus dans les camps allemands; en 1948, ils ont droit à la carte de combattant, ce qui leur permet de porter la croix du combattant, de percevoir une pension de l’Etat et même de faire voiler leur cercueil du drapeau français; les Alsaciens-Mosellans ayant échappé à la conscription ou ayant déserté la Wehrmacht, exclus de ces avantages, se voient reconnaître en 1951 la qualité de «réfractaire», leur ouvrant droit, notamment, à une pension392.
A cette tragédie historique et ces statuts législatifs se greffent d’autres obstacles juridiques. La poursuite des criminels de guerre est réglementée par l’ordonnance du 28 août 1944, laquelle ne s’applique qu’aux étrangers, notamment allemands – ce qui, d’emblée, exclut les Alsaciens. Quant aux juridictions judiciaires, non seulement n’ont elle aucune compétence en matière de crimes de guerre (matière attribuée aux tribunaux militaires), mais encore ne peuvent-elles juger des Alsaciens enrôlés de force, puisque, par définition, leur cas ne répond nullement à la définition d’«intelligence avec l’ennemi»…
La Justice française ne sait que faire de ces «Malgré nous». En témoigne l’instruction, pour le moins chaotique, du dossier d’un de ces Français d’Alsace, Paul G. Présent à Oradour le 10 juin 1944, il avoue, l’année suivante, y avoir tué une femme et avoir apporté des fagots dans l’église; arrêté le 12 septembre 1945, il est mis en accusation devant la Cour de Justice de Limoges, qui le condamne à la peine capitale le 12 mars 1946; laquelle sentence est infirmée le 22 mars 1946 par la Cour d’appel de Limoges car l’intéressé, né le 31 juillet 1926, était mineur au moment des faits et, en toute hypothèse relèverait de la justice militaire; le 16 mars 1947, le Tribunal militaire de Bordeaux se déclare, à son tour, incompétent, pour cause de minorité de Paul G. lors du massacre… Est-ce la fin? Non: le 24 décembre 1947, la Cour de Cassation renvoie l’affaire devant la Cour de Justice de Toulouse mais, à la suite d’une intervention du Ministère de la Justice, la Cour d’appel de Toulouse renvoie, à son tour, l’intéressé devant le Tribunal militaire de Bordeaux, le 18 octobre 1949; joint à l’instruction du dossier d’Oradour par la justice militaire le 16 février 1950, Paul G. figurera dans le box des accusés en janvier 1953. Sans jamais être remis en liberté dans l’intervalle393!
Pour ajouter au désordre, le juge d’instruction du Tribunal militaire de Bordeaux rend une ordonnance de non-lieu à l’encontre de quatre autres «Malgré nous» , le 17 août 1948, précisément parce qu’ils ont été enrôlés de force par l’occupant nazi394. La situation devient tendue. Dans le Limousin et en Alsace, les esprits s’échauffent. Deux expériences de l’Occupation, deux mémoires, deux souffrances, massacrés contre incorporés de force, s’affrontent. L’unité nationale se lézarde, jusque dans les ruines du «bourg martyr»: en 1946, un guide d’Oradour se fait rappeler à l’ordre pour avoir évoqué la participation d’Alsaciens au massacre395.
La crise s’apaise d’autant moins que les officiers allemands de la division «Das Reich», à savoir Lammerding et ses adjoints, Stückler (1er oficier d’état-major de la division), Stadler (commandant du régiment «Der Führer») et Kahn, sont introuvables. Le premier pourrait avoir été protégé par les autorités américaines396, un autre bourreau d’Oradour, Heinz Barth, se cache en Allemagne de l’Est. Un gradé de la division SS, Otto Weidinger, est extradé en France en 1947397, mais il n’est entendu qu’en qualité de témoin dans l’affaire Oradour, et encore, deux ans plus tard398, avant d’être jugé par le Tribunal militaire de Bordeaux pour son appartenance à l’«organisation criminelle» des SS; comme aucun fait précis ne peut lui être imputé, il est acquitté en 1951399.
Un procès tardif et inachevé
Le Parti communiste, les victimes elles-mêmes stigmatisent cette impuissance judiciaire. Pour faire taire les critiques et relancer les poursuites, le Parlement vote à l’unanimité une loi promulguée le 15 septembre 1948, et dont l’article 1er dispose:
«Lorsqu’un des crimes prévus par l’ordonnance du 28 août 1944 sur la répression des crimes de guerre est imputable à l’action collective d’une formation ou d’un groupe faisant partie d’une organisation déclarée criminelle par le tribunal militaire international, tous les individus appartenant à cette formation ou à ce groupe peuvent être considérés comme coauteurs, à moins qu’ils n’apportent la preuve de leur incorporation forcée et de leur non-participation aux crimes.»400Pareil texte, c’est le moins que l’on puisse dire, malmène les principes du droit pénal libéral: la loi pose un principe de responsabilité collective, renverse la charge de la preuve, de surcroît de manière rétroactive, non sans remettre en cause des ordonnances de non-lieu rendues au bénéfice de «Malgré nous» le 17 août 1948. Mais les parlementaires alsaciens, qui ont aussi apporté leurs suffrages, respirent, car à leurs yeux, ce texte protège les «Malgré nous»401! C’est oublier que ces derniers peuvent aussi être poursuivis en tant que membres des Waffen SS, organisation déclarée criminelle par le Tribunal militaire international de Nuremberg en 1946… Et comment rapporter la preuve de l’incorporation de force?
De fait, l’espoir de ces parlementaires s’évanouit très vite. Grâce la loi nouvelle du 15 septembre 1948, l’instruction du dossier «Oradour» reprend l’année suivante chez la Justice militaire, incluant quatorze accusés alsaciens. De renvois en pourvois, il faut encore quatre ans pour qu’enfin, le 12 janvier 1953, le procès des «criminels d’Oradour» s’ouvre devant le Tribunal militaire de Bordeaux402. Soulagement? Non. L’Alsace fulmine, le Limousin s’inquiète. «Nous n’avons plus d’illusion à nous faire, affirme le Maire communiste d’Oradour-sur-Glane, Aimé Faugeras. Les coupables ne seront pas punis…»403
Le procès, de fait, sera une déception à bien des niveaux, tant juridiques qu’historiques. Tout d’abord, les accusés présents sont peu nombreux, vingt-et-un hommes en tout, dont quatorze Français d’Alsace – de minoritaires dans le détachement ayant rasé Oradour, les «malgré nous» se retrouvent majoritaires chez les comparants! Ce ne sont là, par surcroît, que des sous-fifres, le plus élevé en grade, un Allemand, n’étant qu’un adjudant. Et ces accusés, bien encadrés par leurs avocats, s’efforcent de minimiser leur rôle autant que possible. Le dossier d’instruction facilite cette stratégie: lacunaire, il repose, pour l’essentiel, sur des témoignages français et allemands, ainsi que des rapports d’enquête, mais ignore les archives allemandes. Si bien que ces assises ne permettront pas d’expliquer les causes du massacre.
Les rescapés français, certes, peuvent s’exprimer, mais ne peuvent se constituer partie civile. Et leurs déclarations sont éclipsées par une polémique qui parasite la totalité des débats, à l’intérieur comme à l’extérieur de la salle d’audience: l’Alsace prend fait et cause pour les «malgré nous», ce qui nourrit des tensions avec le Limousin. Le 13 février 1953, tous les Allemands jugés par contumace sont condamnés à mort et, chez les présents, un seul écope de la même peine, cinq autres Allemands font l’objet de peines de dix à douze ans de travaux forcés ou d’emprisonnement, un seul est acquitté; quant aux quatorze Alsaciens, Boos est condamné à mort, les autres à des peines de cinq à huit années de travaux forcés ou d’emprisonnement. Devant la tempête de protestations qui se déchaîne en Alsace, une loi d’amnistie des «malgré nous» est promulguée le 21 février 1953, une semaine après le verdict, de sorte que ces derniers sont aussitôt libérés. Les autres condamnés seront tous remis en liberté avant la fin des années cinquante, dans le cadre du rapprochement franco-allemand.
Le long chemin vers l’apaisement mémoriel
A la suite de l’amnistie des «malgré nous», la «communauté d’Oradour» (ANFMOG, municipalité), se sentant trahie par la Justice, rompt avec l’Etat, se replie longtemps sur elle-même – en témoigne l’ouvrage Vision d’épouvante, quasiment jamais modifié jusqu’en 1992. Il faudra attendre plus de quatre décennies d’ouverture progressive pour que soit installé un Centre de la Mémoire en 1999, pour historiciser, contextualiser, expliquer les ruines. La mémoire de l’événement perdure, s’inscrit dans la culture populaire, notamment grâce au succès du film Le Vieux Fusil (Robert Enrico, 1975), qui s’inspire du massacre, mais là encore, ce n’est que dans les années 1990 que paraissent les premiers ouvrages scientifiques sur le sujet, de Sarah Farmer et Jean-Jacques Fouché.
Or ces premiers travaux ne sont pas sans mécontenter l’ANFMOG et la municipalité d’Oradour. Jean-Jacques Fouché, en effet, s’attire leurs critiques, en sa qualité de chef de projet du Centre de la Mémoire, dans la mesure où l’exposition permanente ne parlerait pas suffisamment du village lui-même. Son contrat n’est pas renouvelé404, et son ouvrage Oradour, paru en 2001, est attaqué pour avoir évoqué les violences sexuelles qui pourraient avoir été perpétrées par les SS lors du massacre405.
De semblables polémiques opposent à la même époque l’un des rescapés du massacre, Robert Hébras, à l’ANFMOG. Robert Hébras, en effet, s’est longtemps tu après le fiasco judiciaire de Bordeaux, et n’a recommencé à témoigner que quarante ans après le massacre. Mais, en 1992, alors qu’il préside l’ANFMOG, il publie son propre témoignage406, ce que contestent les autres membres de l’association car sa brochure concurrence directement les ventes de Vision d’Epouvante. Ce litige emporte son éviction407, mais ne l’empêche pas d’accomplir ce qu’il appelle sa «mission», c’est-à-dire «accompagner les jeunes dans les ruines», «témoigner»408, allant jusqu’à éditer, en 1999, un nouvel ouvrage sur Oradour avec André Desourteaux409.
De même, l’apaisement entre le Limousin et l’Alsace reste fragile. Maire d’Oradour de 1995 à 2014, Raymond Frugier s’est rapproché de l’Alsace, au point que, le 10 juin 1998, le Maire de Strasbourg, Roland Ries, lui-même fils de «Malgré nous», a assiste aux commémorations du massacre à Oradour410. Mais en 2009, l’ADEIF assigne Robert Hébras devant le Tribunal de Grande Instance de Strasbourg pour avoir publiquement douté que les «Malgré nous» présents à Oradour le 10 juin 1944 aient été effectivement incorporés de force: relaxé en première instance, Robert Hébras est condamné en appel, mais le verdict est cassé et annulé par la Cour de Cassation en 2013411. Un litige qui laisse d’amers souvenirs de part et d’autre.
Pourtant, écrit l’historien Pascal Plas,
«d’un lieu de “mémoire fermée”, Oradour redevint un lieu de “mémoire ouverte”, à nouveau inscrit dans la communauté nationale et dont le message devint enfin à vocation universelle. Le Centre, en procédant à une historisation même de la mémoire du lieu et en remettant en perspective tous les problèmes liés à celle-ci, a permis aux porteurs de mémoire locaux d’établir une distanciation aux faits. Les derniers témoins ont accepté que leur histoire puisse être racontée par d’autres et de passer de la mémoire d’un drame portée individuellement et par un groupe spécifique à la formulation d’un récit historique critique.»412Les ruines font plus que jamais partie de la mémoire républicaine. Le Président de la République Emmanuel Macron s’y déplace pendant les deux campagnes électorales présidentielles de 2017 (comme candidat le 28 avril, comme chef d’Etat le 10 juin) et de 2022. Mais il a fallu attendre 2013 pour qu’un chef d’Etat allemand visite les lieux. Longtemps, l’Allemagne fédérale a refusé d’assumer le passé nazi, ce qui a entravé les poursuites judiciaires, lesquelles n’ont jamais abouti à une quelconque condamnation413. Quant à l’Allemagne de l’Est, disparue en 1990 avec la réunification, elle a, pour sa part, instrumentalisé la mémoire du massacre pour discréditer l’Allemagne de l’Ouest, qu’elle dénonçait comme capitaliste et peuplée d’anciens nazis – alors qu’elle-même comptait son lot d’anciennes Chemises Brunes414… Paradoxalement, le régime communiste est-allemand a fait progresser notre connaissance du drame, car en 1983, il a traduit en justice un de ses ressortissants, Heinz Barth, tardivement identifié par la Stasi comme ancien officier SS de la «Das Reich» impliqué dans la tuerie et d’autres atrocités en Europe415. Deux autres anciens subordonnés de Barth, Rudi Altkofer et Willi Beier, tous deux nés en 1925 et également présents à Oradour, ont été identifiés et ont même témoigné contre lui, mais Berlin-Est a préféré taire leur existence, pour camoufler le fait que l’Allemagne socialiste avait pu servir de refuge à d’ex-SS416.
Barth, condamné à la réclusion à perpétuité, a avoué que l’atrocité avait été préméditée, et qu’elle ne correspondait en rien à un affrontement avec la Résistance. A l’évidence, ses aveux n’ont pas été extorqués, dans la mesure où il s’est efforcé de minimiser son rôle, non sans prétendre que le massacre serait lié à la capture d’Helmut Kämpfe417. Sa personnalité même l’atteste: «Il se montra cynique jusqu’au bout, écrira Robert Hébras, témoin à son procès. Lors de son procès, il se dit étonné de se retrouver en face d’une poignée de survivants d’Oradour-sur-Glane. A une journaliste allemande, il osa déclarer que cela signifiait qu’il avait le sentiment de ne pas avoir totalement accompli sa mission qui était d’éliminer tout le monde.»418 Bref, malgré les cachotteries de l’Allemagne de l’Est, qui tait l’existence de Rudi Altkofer et Willi Beier, le procès Barth marque une réelle avancée historiographique.
Par la suite, si l’appareil judiciaire fédéral allemand échoue à punir les bourreaux, le massacre d’Oradour et sa mémore font l’objet, depuis le début du XXIe siècle, de plusieurs travaux scientifiques outre-Rhin: les historiens Claudia Moisel419, Bernhard Brunner420 et Henry Leide421 travaillent sur la poursuite des criminels de guerre nazis après la Seconde Guerre mondiale, tandis qu’Ahlrich Meyer422 et Peter Lieb423 se livrent à des analyses poussées des forces d’occupation allemandes en France, abordant de front leur implication dans le massacre. Récemment, l’historienne Andrea Erkenbrecher a publié un ouvrage fondamental consacré à son héritage mémoriel vu sous le prisme des rapports franco-allemands: dans ce récit choral se croisent les Etats français, ouest- et est-allemands, notamment leurs appareils diplomatiques et judiciaires, ainsi que de nombreux intervenants mémoriels tels que l’ANFMOG, sans oublier les négationnistes allemands eux-mêmes, dont les falsifications inspireront fortement leurs homologues français424.
Ces progrès mémoriels et historiographiques se ressentent dans les travaux et documents publiés en France. En 2014, le journaliste Jean-Paul Picaper publie un ouvrage dévastateur pour les falsifications négationnistes ciblant le massacre425. L’histoire du village d’Oradour avant le 10 juin 1944 a, elle aussi, donné lieu à de nouvelles publications, des cahiers de jeunesse de Denise Bardet (institutrice assassinée lors du massacre)426 à l’album photographique composé par Michel Bélivier et Benoît Sadry, de l’ANFMOG, en 2007427. En 2020, grâce aux efforts d’un chercheur catalan, David Ferrer Revull, une 643e victime a pu être identifiée, une réfugiée espagnole du nom de Ramona Domínguez Gil, âgée de 73 ans lors de son assassinat par les SS: le fait rappelle la diversité de destins dans la «communauté des martyrs», et qu’Oradour, avant d’être transformé en charnier, était aussi un lieu de vie, peuplé d’individus de tous bords, de toutes origines428.
Longtemps, cette communauté a été réduite à une population de martyrs sans histoire, ce qui taisait la présence de «collabos» ou de Résistants. Il n’en est plus de même aujourd’hui, comme l’atteste, en 2024, la parution en français du livre de l’historien britannique Robert Pike consacré à l’histoire même du village d’Oradour. Son auteur, à partir de recherches archivistiques et de nombreux entretiens, ne tait rien à ce titre, évoque la présence de quelques Résistants parmi la population), apparaît d’autant plus remarquable qu’elle est appuyée aussi bien par le Centre de la Mémoire que par l’ANFMOG429. Le village d’Oradour, son passé, sa disparition, sont bel et bien devenus objets d’Histoire
Notes.
1. Alexander Dallin, La Russie sous la botte nazie, Paris, Fayard, 1970, p. 295 (trad. de l’anglais: German Rule in Russia 1941-1944, Londres MacMillan, 1957, et Boulder, Westview, 1981 (éd. rév. et aug.), p. 406-407). Une remarque récemment confirmée par l’historien Arnold Suppan: «Ainsi, le Danemark, la France et l’Italie ont contribué nettement plus à l’approvisionnement de l’Allemagne que tous les pays d’Europe du Centre-Est, de l’Est et du Sud-Est réunis» (Hitler - Beneš – Tito. Konflikt, Krieg und Völkermord in Ostmittel- und Südosteuropa, Vienne, Österreichischen Akademie der Wissenschaften, 2014, p. 742).
2. Sur ce point, voir notamment les conclusions de Robert Paxton, Old Guard and New Order, New York, Columbia University Press, 1972 et 2001 (éd. rév. et aug.) – trad. française: La France de Vichy. 1940-1944, Paris, Seuil, 1973 et 1997 (éd. rev. et aug.), coll. «Points – Histoire», 1999. Lesquelles reprennent, sur ce plan, celles d’Eberhard Jäckel, La France dans l’Europe de Hitler, Paris, Fayard, 1968 (trad. de l’allemand).
3. Sur ces aspects de la politique nazie en France, voir François Delpla, Hitler et Pétain, Paris, Nouveau Monde, 2019.
4. Gaël Eismann, «L’escalade d’une répression à visage légal: les pratiques des tribunaux du Militärbefehlshaber in Frankreich, 1940-1944», in Bernard Garnier, Jean-Luc Leleu et Jean Quellien (dir.), La répression en France, Actes du colloque international, 8, 9 et 10 décembre 2005 – Mémorial de Caen Caen, Centre de Recherche d’Histoire Quantitative, 2007, p. 91-105.
5. Hervé Villeré, L’Affaire de la Section Spéciale, Paris, Fayard, 1972.
6. Jean-Marc Berlière et Frank Liaigre, Le sang des communistes. Les bataillons de la jeunesse dans la lutte armée Automne 1941, Fayard, 2004 ainsi que, des mêmes auteurs, Liquider les traîtres. La face cachée du P.C.F. 1941-1943, Paris, Robert Laffont, 2007.
7. Gaël Eismann, Hôtel Majestic. Ordre et sécurité en France occupée (1940-1944), Paris, Tallandier, 2010, p. 373-403 et Patrice Arnaud, «Qui dirigeait la police allemande en France sous l’Occupation? Responsabilités individuelles et plaidoyers pro domo: Karl Oberg et Helmut Knochen devant le Tribunal militaire de Paris (1940-1954)», in Patrice Arnaud & Fabien Théofilakis (dir.), Gestapo et polices allemandes. France, Europe de l’Ouest 1939-1945, Paris, C.N.R.S. Editions, 2017, p. 19-60. A l’instar du MBF, les SS optent pour une politique de collaboration avec Vichy, mais ne se privent pas d’exécuter des otages, sans que le régime de Vichy ne puisse s’y opposer, sachant d’ailleurs que le régime mène sa propre politique répressive, qui se révèle plus efficace dans le démantèlement de certains réseaux.
8. Eismann, Hôtel Majestic, op. cit., p. 415-420.
9. D’après Edward L. Homze, en effet, le nombre total de travailleurs français en Allemagne, prisonniers de guerre inclus, a été de 1 344 000 (605 000civils et 739 000 prisonniers de guerre), auxquels il faut ajouter 44 000 femmes, sachant que ce chiffre tombe à 281 000 Belges (195 000 civils et 53 000 prisonniers de guerre, 33 000 femmes) et 256 000 Hollandais (236 000 civils, 20 000 femmes) - voir Homze, Foreign Labor in Nazi Germany, Princeton University Press, 1967, p. 195. D’après une autre étude conduite par Ulrich Herbert (Hitler’s Foreign Workers. Enforced Foreign Labor in Germany under the Third Reich, Cambridge University Press, 1997), le nombre total de travailleurs français, belges et hollandais en Allemagne, en août 1944, se décomposait comme suit: 1 254 749 Français, 253 648 Belges, 270 304 Hollandais (p. 298).
10. Cité dans Alrich Meyer, L’occupation allemande en France 1940-1944, Toulouse, Privat, 2002, p. 178.
11. Cité dans Christian Delporte, Philippe Henriot. La résistible ascension d’un provocateur, Paris, Flammarion, 2018, p. 290. S’agissant de Henriot, Goebbels écrira dans ses carnets, le 8 juin 1944: «C’est un homme énergique, intelligent et déterminé. Il adhère totalement à notre ligne et nous pouvons être satisfaits de sa politique.» Goebbels, Tagebücher, entrée du 8 juin 1944.
12. La Milice, n’en déplaise aux thuriféraires du Maréchal Pétain (il en reste…), est bel et bien, en 1944 le bras armé de l’Etat français. En promouvant cette organisation, Pétain et surtout Laval nourrissaient deux objectifs: canaliser les collaborationnistes, au besoin en créant un mouvement politique dont ils confieraient les rênes à un fanatique ne présentant aucun danger politique, à savoir Darnand; renforcer l’appareil du maintien de l’ordre dans le cadre de la politique de collaboration avec le Reich. Est donc mis sur pied, sous le contrôle de Darnand, lui-même contrôlable par Laval, un dispositif d’encadrement de l’Etat et de la population qu’il convient toutefois de ne pas armer, de manière à éviter les désordres qui attenteraient à l’image de marque du régime, outre d’éventuelles tentatives de coup de force, sachant que Laval a gardé le contrôle de la police nationale — voir J. Delpérrié de Bayac, Histoire de la Milice, Paris, Fayard, 1970 et Livre de Poche, p. 152-171 et Pierre Giolitto, Histoire de la Milice, Paris, Perrin, coll. «Tempus», 2002, p. 130-132) La Milice n’en est pas moins devenue un appareil idéologique fortement impliqué dans le régime de Vichy, et soutenu par lui sur tous les plans. Ce n’est qu’au bout de plusieurs mois de négociations entre Darnand et des représentants de Himmler que l’occupant a consenti à fournir aux Miliciens des armes prélevées sur les stocks de l’armée d’armistice ou dans les dépôts d’armes saisies aux Britanniques, sans armement lourd — cf. Delperrié de Bayac, Histoire de la Milice, op. cit., p. 205-235, et Giolitto, Histoire de la Milice, op. cit., p. 172-176. Le 5 juin 1944, Pétain avouera: span class="gouvr">«Je suis heureux de savoir que, grâce à la Milice, j’ai des troupes fidèles un peu partout en France» (cité in Jean-Pierre Azéma, «La Milice», Vingtième Siècle, 1990, vol. 28, no 28, p. 103-104).
13. Sur Darnand, voir sa récente biographie par Eric Alary, Joseph Darnand. De la gloire à l’opprobre, Paris, Perrin, 2023.
14. Gaël Eismann, «L’escalade d’une répression à visage légal: les pratiques des tribunaux du Militärbefehlshaber in Frankreich, 1940-1944», in Bernard Garnier, Jean-Luc Leleu et Jean Quellien (dir.), La répression en France, Caen, Centre de Recherche d’Histoire Quantitative, 2007, p. 91-105, notamment p. 102-104 (actes du colloque international, 8, 9 et 10 décembre 2005 – Mémorial de Caen).
15. Eugène Martres, «Points de vue allemands sur Résistance et maquis», in François Marcot (dir.), La Résistance et les Français. Lutte armée et maquis, Actes du colloque international de Besançon – 15-17 juin 1995, Besançon, Annales littéraires de l’Université de Franche-Comté, 1996, p. 196-197. Voir également Eismann, Hôtel Majestic, op. cit., p. 426-428.
16. Fabrice Grenard, Les Maquisards. Combattre dans la France occupée, Paris, Vendémiaire, 2019, p. 252-254.
17. Alary, Joseph Darnand, op. cit., p. 281-285.
18. Peter Lieb, Konventioneller Krieg oder NS-Weltanschauungskrieg? Kriegführung und Partisanenbekämpfung in Frankreich 1943/44, Munich, Oldenburg, 2006, p. 61-62.
19. Ordre du 3 février 1944 (dite «directive Sperrle»), reprise le 10 février 1944 par le commandant militaire pour la Belgique et le nord de la France et le 12 février 1944 par le commandant militaire en France, et élargi à la Zone Sud (TMI, vol. YYYIV, Document C-045, p. 242-244). Le 12 février 1944, le MBF durcit cette politique: sans faire référence à une hypothèse de riposte, il recommande à la troupe d’«apporter à la population pacifique protection et appui», mais ordonne de remettre à la Sipo-SD toute personne soupçonnée de soutenir les «terroristes», voire toute la population masculine d’un secteur – pour que, le cas échéant, la Sipo-SD les déporte en Allemagne: Der Militärbefehlshaber in Frankreich, Ia, Nr. 558/44, Bert.: Banden und Sabotagebekämpfung, 12.2.44 – BArch RW 35/551, f. 12-15, img. 0025-0031. Eismann, Hôtel Majestic, op. cit., p. 436-437.
20. Oberkommando der Wehrmacht, Nr. 002143/44 g.K./WFSt/Qu., Betr.: Bekämpfung von Terroristen-Gerichtsbarkeit, 4.3.1944 – BArch RW 35/551, f. 17-20, img. 0035-0042. Trad. française dans Meyer, L’occupation allemande en France, op. cit., p. 160.
21. Meyer, L’occupation allemande en France, op. cit., p. 163 ; Eismann, Hôtel Majestic, op. cit., p. 432.
22. Ibid. ainsi que Lieb, Konventioneller Krieg oder NS-Weltanschauungskrieg?, op. cit., p. 567.
23. Grenard, Les Maquisards, op. cit., p. 319.
24. Ibid., p. 324.
25. Lieb, Konventioneller Krieg oder NS-Weltanschauungskrieg?, op. cit., p. 400 et 568.
26. Grenard, Les Maquisards, op. cit., p. 312-313.
27. Meyer, L’occupation allemande en France, op. cit., p. 166 et 172-176. Selon Peter Lieb, près de 80, voire plus d’une centaine des hommes tués lors de l’opération «Brehmer» étaient juifs (Lieb, Konventioneller Krieg oder NS-Weltanschauungskrieg?, op. cit., p. 401). Selon Gaël Eismann, les meurtres de Juifs au cours de l’opération «Brehmer» «paraissent plutôt atypiques dans l’histoire de la «lutte contre les bandes» conduite par les militaires en France. La figure du Juif terroriste – ou simple menace pour la sécurité de la puissance occupante – qui occupait une place centrale dans les documents militaires des deux premières années d’occupation, n’apparaît guère, semble-t-il, dans les journaux de guerre des troupes allemandes engagées en France en 1944, ce qui n’empêche pas la propagande allemande de continuer à l’exploiter.» (Hôtel Majestic, op. cit., p. 432). Notons tout de même que les opérations anti-partisans conduites au printemps 1944 se soldent, et tel en est également le but, par l’arrestation et la déportation de Juifs de France, si bien que la répression ne peut être séparée de la Shoah. S’agissant de l’opération «Brehmer», Peter Lieb précise que les Allemands voyaient la Dordogne et la Corrèze comme infestés de communistes et de réfugiés juifs, ce qui a pu cristalliser, de nouveau, la confusion Juif-communiste-partisan (Lieb, Konventioneller Krieg oder NS-Weltanschauungskrieg?, op. cit., p. 400). Gaël Eismann et Peter Lieb soulignent, en toute hypothèse, la difficulté d’établir les responsabilités de chacun dans les meurtres de Juifs, entre troupes du MBF et Sipo-SD
28. Detlef Vogel, «German and Allied Conduct of the War in the West», in Horst Boog, Gerhard Krebs, Detlef Vogel (dir.), Germany and the Second World War, vol. VII, Oxford, Clarendon Press, 2006, p. 536.
29. Barch, RH 19 IV/133, fol. 159-162.
30. Et de préciser: «Les mesures expiatoires succèdent à la légitime défense après un certain délai. La décision de les décréter et de les exécuter […] est du seul ressort des commandants militaires et, le cas échéant, du Haut-Responsable de la Police et des SS en France. Les habitants arrêtés, lors de ratissages, sont des prisonniers, c’est le SD qui décide de la manière dont on doit les traiter ensuite.» Eismann, Hôtel Majestic, op. cit., p. 438-439.
31. Cité dans Eismann, Hôtel Majestic, op. cit., p. 420.
32. Merkblatt 69/2: Bandenbekämpfung (gültig für alle Waffen), 6.5.1944, p. 69-72 – Barch, RW 4/1342.
33. Lutz Klinkhammer, Stragi naziste in Italia 1943-1944, Rome, Donzelli, 1997 et 2006 (trad. de l’allemand), p. 91-98.
34. Eismann, Hôtel Majestic, op. cit., p. 439.
35. Arnulf Scriba, Pancevo 1941 - Hinrichtung oder Mord?, Berlin, Deutsches Historisches Museum, Berlin, 2011/2016: https://www.dhm.de/lemo/rueckblick/pancevo-1941-hinrichtung-oder-mord.html (consulté le 29 décembre 2020). Dimensionen des Vernichtungskrieges, op. cit., p. 536-549, qui reproduit plusieurs documents et photographies.
36. Christian Gerlach, Kalkulierte Morde. Die deutsche Wirtschafts- und Vernichtungspolitik in Weißrußland 1941 bis 1944, Hambourg, Hamburger Edition, 1999 et 2000, p. 586 (ebook).
37. Ibid., p. 597.
38. Kartheuser, Les Pendaisons de Tulle, op. cit., p. 286-287.
39. Le 1er février 1944, la division aligne 4 575 hommes – Bruno Kartheuser, Walter, agent du SD à Tulle, vol. III: Les pendaisons de Tulle – Le 9 juin 1944, Neundorf, Krautgarten, 2004, p. 284.
40. Percy E. Schramm (éd.), Kriegstagebuch des Oberkommandos der Wehrmacht (ci-après KTB-OKW), vol. IV: 1. Januar 1944 – 22 Mai 1945, tome I (IV/7), Munich, Bernard & Graefe, 1982, p. 282.
41. Voir notamment NARA, T-354, Roll 128, img 484 et 490.
42. BArch R 3-2/8, f. 22-23, img. 0044-0046.
43. Alors qu’au 1er avril 1944 la division devrait théoriquement encadrer près de seize mille hommes (dont 3 780 officiers et sous-officiers), elle n’en regroupe, que 13 500, dont 2 100 officiers et sous-officiers (Meldung vom 1.4.1944, BArch, RH 10/313, f. 23, img. 0049). Au 1er juin, malgré les renforts qui porteront à 18 000 hommes les effectifs, il manque toujours autant de cadres (Meldung vom 1.6.1944, BArch, RH 10/313, f. 29, img. 0061). Un mois plus tard, la division indiquera une carence persistante de plus de 500 officiers et sous-officiers (Meldung vom 1.7.1944, BArch, RH 10/313, f. 32, img. 0067).
44. 2. SS-Pz-Div. «Das Reich», Befehl über die weltanschauliche Erziehung im Rahmen der Neuaufstellung der Division, 9.3.44. NARA, T-354, Roll 129, img 114.
45. 2. SS-Pz-Div. «Das Reich», Betr.: Ausbildungsunterlage für weltanschauliche Erziehung Nr.1, Die Persönlichkeit des Führers – Der Weg des Führers, 9.3.44. NARA, T-354, Roll 129, img 116-124. Voir également, dans cette cote, img. 125-163. Egalement BArch, RS 3/2-61.
46. 2. SS-Pz-Div. «Das Reich», Politische Wochenübersicht Nr. 6, 5.5.44 NARA, T-354, Roll 129, img. 106.
47. Témoignage de Daniel Fischer dans Serge de Sampigny, Dans la tête des SS, Paris, Albin Michel, 2019, p. 149.
48. Le cursus professionnel de Lammerding est décrit par Jacques Delarue, Trafics et crimes sous l’Occupation, Paris, Fayard, 1968 et 1993, p. 290-293. Voir également La Contemporaine, Fonds Delarue, F Delta 835/25.
49. Leleu, La Waffen SS, op. cit., p. 788-790. Sur Bach-Zelewski, voir Andrej Angrick, «Erich von dem Bach-Zelewski. Himmlers Mann für alle Fälle», in Ronald Smelser et Enrico Syring (dir.), Die SS. Elite unter dem Totenkopf, Paderborn, Schöningh, 2000, p. 28-44. Christian Gerlach consacre de nombreux développements à Bach-Zelewski et son rôle dans la Shoah ainsi que contre les partisans, notamment avec la stratégie des «zones de mort», dans Kalkulierte Morde, op. cit. Après la guerre, Bach-Zelewski saura échapper à la peine capitale en collaborant avec les organes de poursuite des criminels de guerre, notamment lors du procès de Nuremberg, quitte à réécrire sa propre carrière… Voir Ruth Bettina Birn, «Criminals as manipulative witnesses: a case study of SS General von dem Bach-Zelewski», Journal of International Criminal Justice, 2009, vol. 9, no 2, p. 441–474.
50. Affidavit du général Von Mellenthin du 1er juillet 1946 – TMI, vol., YYYXII, Affidavit Generalstab et OKW-1041, p. 265. Bien entendu, il n’est pas impossible que Mellenthin exagère son rôle aux fins de disculper ses anciens supérieurs en général et sa propre personne en particulier. Conformément à la stratégie de défense des anciens cadres supérieurs de la Wehrmacht, il impute les atrocités allemandes en Russie aux SS Mellenthin n’en mentionne pas moins que ses rapports personnels avec Bach-Zelewski étaient «corrects» (ibid., p. 264).
51. Matthias Uhl, Thomas Pruschwitz, Martin Holler, Jean-Luc Leleu et Dieter Pohl (ed.), Die Organisation des Terrors - Der Dienstkalender Heinrich Himmlers 1943-1945, Munich, Piper, 2020 (ebook): 28 juillet, 11 et 12 août, 16 août, 21 août, 27 août, 3 septembre, 6 septembre, 11 septembre, 19 septembre, 21 septembre, 22 septembre, 25 septembre, 9 octobre, 16 octobre, 16 octobre, 26 octobre, 9 décembre, 24 décembre, 28 décembre.
52. Cité dans Kartheuser, Les Pendaisons de Tulle, op. cit., p. 286.
53. Cité dans Kartheuser, Les Pendaisons de Tulle, op. cit., p. 286.
54. Cité dans Kartheuser, Les Pendaisons de Tulle, op. cit., p. 286-287.
55. Témoignage d’Armand Durlewanger, dans Sampigny, Dans la tête des SS, op. cit., p. 141.
56. Sur cet épisode, voir Delarue, Trafics et crimes sous l’Occupation, op. cit., p. 314-316 ainsi que H.-F. Cayrou, Journées sanglantes de Montpezat-de-Quercy (2 mai 1944) et de Perches-Haut (nuit du 6 au 7 juin 1944), Montauban, Forestie, 1945, p. 3-20. En ligne, voir https://maitron.fr/spip.php?article232856, notice Montpezat-de-Quercy (Tarn-et-Garonne) 2 mai 1944 par Dominique Tantin , version mise en ligne le 10 octobre 2020, dernière modification le 11 octobre 2020.
57. Delarue, Trafics et crimes sous l’Occupation, op. cit., p. 306-312 (p. 311 pour l’extrait cité) et Réquisitoire définitif du commandant Guille, substitut du Commissaire du Gouvernement près le Tribunal militaire de Bordeaux, du 12 mars 1951, p. 9-14 – AJM, «Dossier Oradour», liasse XII (cote 430).
58. Delarue, Trafics et crimes sous l’Occupation, op. cit., p. 309 et Réquisitoire définitif du commandant Guille, op. cit., p. 14.
59. Sur l’opération des 21 mai et s., voir Delarue, Trafics et crimes sous l’Occupation, op. cit., p. 312-316 et Réquisitoire définitif du commandant Guille, op. cit., p. 15-17. L’un des accusés allemands à Bordeaux, Wilhelm Böhme, semble avoir assisté à l’atrocité de Frassyinet-le-Gelat, comme le suggère une déclaration volontaire figurant dans le dossier d’instruction de la Justice militaire – «Interrogatoire du Sturmann Wilhelm Böhme» AJM, liasse VII (III, 052). Voir également Kartheuser, Les Pendaisons de Tulle, op. cit., p. 294-295, qui précise que cet interrogatoire est intervenu à Londres le 27 mai 1947.
60. Jean-Luc Leleu, La Waffen SS. Soldats politiques en guerre, Paris, Perrin, 2007, p. 793.
61. André Balent, Bernard Reviriego, Jean-Paul Nicolas, «Miremont (Haute-Garonne), 5 mai; 14 mai; 2 juin 1944», Le Maitron: https://fusilles-40-44.maitron.fr/spip.php?article202527
62. K.T.B.-OKW, vol. IV, tome 1, p. 309-310.
63. 2. SS-Panzer-Division «Das Reich», Ia/Ic. Nr. 366/44, Abwehrlage Nr. 6, 27.5.44 – NARA, -354, Roll 26, f. 3761332. Trad. française dans Guy Penaud, Oradour-sur-Glane. Un jour de juin 1944 en enfer, La Crèche, Geste Editions, 2014, p. 79-81.
64. 2. SS-Panzer-Division «Das Reich», Ic. Tgb. Nr. 389/44, Abwehrlage Nr. 7, 3.6.44 – NARA, -354, Roll 26, f. 3761333-3761334. Trad. française dans Penaud, Oradour-sur-Glane, op. cit., p. 81-83.
65. 2. SS-Pz-Div. «Das Reich», Massnahmen gegen die Terroristen, 5.6.44. NARA, T-314, Roll 1496, img. 204-206. Reproduction en fac-similé et trad. française par le Centre de la Mémoire d’Oradour, Comprendre Oradour. L’intégrale du parcours de mémoire. Documentation, Iconographie, Témoignages, Limoges, 2000, p. 54. Egalement traduit en français dans Penaud, Oradour-sur-Glane, op. cit., p. 83-86 et Kartheuser, Les Pendaisons de Tulle, op. cit., p. 298-300.
66. Gen. Kdo. LVIII. Pz-Korps, Massnahmen gegen die Terroristen, 5.6.44. NARA, T-314, Roll 1496, img. 203. Trad française dans Penaud, Oradour-sur-Glane, op. cit., p. 86-87.
67. Comme le note un historien, le général SS ne fait «que reprendre la politique initiée dès l’été 1942 par Himmler» (Leleu, La Waffen SS, op. cit., p. 790). D’après son 1er officier d’état-major, il semble que le ratio «partisans exécutés par soldat allemand blessé ou tué» ne procède pas de sa seule initiative, mais reprenne une directive de Hitler que lui aurait répercuté Himmler en avril 1944: «Rapport» d’Albert Stückler, février 1949, «Die 2. SS-Panzer-Division «Das Reich» in Frankreich vom Februar – Juli 1944», Teil II, Anlage 7. «Vorgänge in Limoges und Oradour sur Glane (8.-10 Mai 1944)», page 4, fonds ADEIF – constaté par Leleu, La Waffen SS, op. cit., p. 1072. Pour rappel, selon Stückler, le ratio fixé par Hitler aurait été inférieur à celui proposé par Lammerding, à savoir trois partisans à exécuter pour un soldat allemand tué. En outre, les pendaisons de masse sont monnaie courante en Russie, en Pologne, en Yougoslavie, en Grèce et, depuis peu, en Italie (Patricelli, Il nemico in casa, op. cit., p. 145).
68. Comme le fait observer Peter Lieb, Konventioneller Krieg oder NS-Weltanschauungskrieg?, op. cit., p. 363.
69. Grenard, Les Maquisards, op. cit., p. 369-372.
70. Grenard, Les Maquisards, op. cit., p. 398-400.
71. Notamment, en milieu d’après-midi du 6 juin 1944, le Haut-Commandement à l’Ouest constate que «la situation des sabotages est jusqu’alors tranquille, à l’exception de la démolition d’un pont sur la Dordogne». Ob.West, Ic, Telefongespräche sowie Besprechungen, 6.6.44, p. 9. NARA, T-311, Roll 26, img. 365.
72. «Abenmeldung Ob. West/Ic vom 7.6.44», Ob.West, Ic Nr. 3643/44, p. 3. NARA, T-311, Roll 26, img. 0041. Voir également Ob.West, Ic, Telefongespräche sowie Besprechungen, 7.6.44, p. 17-19. NARA, T-311, Roll 26, img. 373 à 375.
73. Ob.West, Ic, Telefongespräche sowie Besprechungen, 7.6.44, p. 14 (10.50) – NARA, T311, Roll 26, img. 370.
74. Ob.West, Ic, Telefongespräche sowie Besprechungen, 7.6.44, p. 18 (18.05). NARA, T-311, Roll 26, img. 374.
75. Ob.West, Ic, Telefongespräche sowie Besprechungen, 7.6.44, p. 14-15 (10.50) – NARA, T311, Roll 26, img. 370-371.
76. Ob.West, Ic, Telefongespräche sowie Besprechungen, 7.6.44, p. 17 à 20 (17.45, 19.05, 19.45) – NARA, T311, Roll 26, img. 375-376. Egalement Leleu, La Waffen SS, op. cit., p. 790-791.
77. Voir les instructions allemandes reproduites dans Kartheuser, Les Pendaisons de Tulle, op. cit., p. 115.
78. Ob.West, Ia/Ic Nr. 1503/44 gKdos, 8.6.44 – NARA, T-311, Roll. 26, img. 0339. Ob.West röm., Ia Nr. 4414/44, g. Kdos, 8.6.44, p. 3 – NARA, T-311, Roll 25, f7029373. Le 8 juin, le 58e corps blindé répercute donc la directive suivante à l’unité de Lammerding: «L’évolution de la situation des bandes dans le Massif central nécessite l’intervention immédiate et brutale de forces importantes. […] La 2e division blindée SS doit immédiatement pénétrer dans la zone Tulle-Limoges où la présence des bandes est apparemment très forte.» LVIII Pz. Korps, Abt. Ia, Nr. 361/44 g. Kdos vom 8.6.44. NARA, T-314, Roll 1496, img. 215.
79. Ob.West, Ic, Telefongespräche sowie Besprechungen, 8.6.44, p. 4-5 (12.10) – NARA, T311, Roll 26, img. 380-381. Voir également Leleu, La Waffen SS, op. cit., p. 791-792.
80. Ob.West, Ia/Ic Nr. 1503/44 g Kdos, 8.6.44 – NARA, T311, Roll 26, img. 0340. Trad. française dans Leleu, La Waffen SS, op. cit., p. 792 et Eismann, Hôtel Majestic, op. cit., p. 447-448.
81. Il a été écrit que les Allemands auraient surnommé ce secteur «Petite Russie», par analogie aux mouvements de partisans des territoires de l’Est (Georges Beau et Léopold Gaubusseau, R5. Les SS en Limousin, Périgord et Quercy, Paris, Presses de la Cité, 1969 et 1984, p. 17) mais, selon Jean-Jacques Fouché, aucune archive allemande comportant ce qualificatif n’a été retrouvé (Fouché et Beaubatie, Tulle, op. cit., p. 124). Sur les racines de la Résistance dans ce secteur, voir Pascal Plas (dir.), Genèse et développement de la Résistance en R5 – 1940-1943, Treignac, Les Monédières, 2003.
82. Voir les rapports mensuels du Préfet de Région: AD Haute-Vienne, 185 W 1/44, et leur synthèse par Fouché, Oradour, op. cit., p. 58-60. Egalement, les rapports des Préfets de Corrèze: 185 W 1/49 (en ligne sur le site internet des Archives départementales de la Haute-Vienne) et, en Haute-Vienne, de la Sous-Préfecture de Rochechouart: 185 W 1/58.
83. Journal de guerre du 588e état-major principal de liaison à Clermont-Ferrand, TMI, vol. YYYVII, Doc. F-257, entrées des 6 et 7 juin 1944, p. 12. Le 7 juin, à 19 h, le Haut-Commandement à l’Ouest est informé qu’à Tulle, «la situation est terrifiante». Ob.West, Ic, Telefongespräche sowie Besprechungen, 7.6.44, p. 19 (19.00) – NARA, T311, Roll 26, img. 375.
84. 2. SS Pz-Div. «Das Reich», Ia 257/44, 5.6.44 (17.05), NARA, T-314, Roll 1496, img. 201.
85. LVIII Pz. Korps, Abt. Ia, Nr. 560/44, 7.6.44. NARA, T-314, Roll 1496, img. 214.
86. LVIII Pz. Korps, Abt. Ic, Nr. 455/44, 7.6.44. NARA, T-314, Roll 1496, img. 217. Voir également le recensement effectué par Réquisitoire définitif du commandant Guille, op. cit., p. 17-18.
87. Penaud, Oradour-sur-Glane, op. cit., p. 134; Fouché, Oradour, op. cit., p. 58 et 62.
88. Sur la composition administrative du groupe de combat, LVIII Pz. Korps, Abt. Ia, Nr. 363/44, 8.6.44. NARA, T-314, Roll 1496, img. 218. La détermination de ses effectifs est malaisée: 7 500 (Fouché et Beaubatie, Tulle, op. cit., p. 117)? 8 700 (Comprendre Oradour, op. cit., p. 56)? 10 000 (Penaud, Oradour-sur-Glane, op. cit., p. 134)?
89. Voir la carte du mouvement de la «Das Reich» dans Comprendre Oradour, op. cit., p. 56.
90. Réquisitoire définitif du commandant Guille, op. cit., p. 18-23 bis; Comprendre Oradour, op. cit., p. 57; Delarue, Trafics et crimes sous l’occupation, op. cit., p. 329-332. La cote AD Haute Vienne 1517 WW 424 comprend aussi plusieurs rapports d’enquête et témoignages sur ces atrocités: rapport de l’adjudant Froment du 26 avril 1945 sur les crimes allemands dans les localités de Carsac, Carlux, Calviac et Peyrilhac, img. 1481-1498 (également, le rapport du maréchal des logis chef Froment du 18 juin 1944, img. 1499-1501); PV du 2 octobre 1944 relatant les renseignements recueillis sur les crimes et délits commis par les Allemands dans la traversée de la circonscription le 8 juin 1944 – img. 1485-1498. Voir également Guy Penaud, La «Das Reich». 2e SS-Panzer Division, Périgueux, La Lauze, 2005, p. 509-519. 1436-1449.
91. En effet, une nouvelle instruction relative à la «lutte contre les bandes» confère dorénavant aux recommandations du 5 juin 1944 un caractère contraignant: les «bandes», y compris celles relevant de l’Armée secrète, sont instrumentalisées par les communistes; il importe de se concilier la population civile, ce qui implique, d’une part, de ravaler les «bandes» à des criminels, d’ailleurs à traiter comme tels (quitte à les enchaîner sous les yeux des civils!), et d’autre part de s’abstenir de tout pillage (!); un couvre-feu est instauré de 21 h à 6 h sous menace de peine de mort; les habitations d’où partent les coups de feu, ainsi que les immeubles adjacents, doivent être incendiées; il y a lieu de pendre trois bandits pour tout soldat blessé, dix pour tout soldat tué. «Les exécutions ne sont pas un spectacle, mais une mesure expiatoire. Ainsi, à l’exception des escouades d’exécution, les troupes reçoivent de brefs ordres à annoncer aux personnes désignées pour être exécutées, puis à la population civile par haut-parleurs et affichage mural. Invitez des ecclésiastiques à l’exécution, afin qu’ils puissent, s’ils le souhaitent, effectuer leur rituel religieux sans caractère démonstratif (en France, c’est très important!).» Abschrift! 2. SS-Pz-Div. «Das Reich» Ia/Ic, Bandenlage und Kampfführung, 9.6.1944. NARA, T-354, Roll 129, img 357 à 359. Il n’est pas impossible que cette instruction ait été annexée à l’ordre du jour de la «Das Reich» pour le 10 juin 1944, émise le 9 juin 1944 à 12 h 15 (et non 23 h 15) dans la mesure où ce dernier document mentionne: «On trouvera en annexe les détails concernant la situation des bandes et la conduite du combat à suivre». Voir 2. SS Panzer-Division «Das Reich», Ia 751/44, Divisionsbefehl für den 10.6.44, 9.6.44, p. 1 - NARA, T-354, Roll 128, img 731 ainsi que La Contemporaine, Fonds Delarue, F Delta 835/22.
92. Sur cet épisode, voir Jean-Jacques Fouché et Gilbert Beaubatie, Tulle. Nouveaux regards sur les pendaisons et les événements de juin 1944, Saint-Paul, Lucien Souny, 2008; Kartheuser, Les Pendaisons de Tulle, op. cit.; Grenard, Tulle, op. cit.; ainsi qu’Antoine Soulier, Le drame de Tulle – 9 juin 1944, Tulle, Maugein, 1971 (3e éd.; initialement paru en 1946). Bilan statistique par Fouché et Beaubatie, op. cit., p. 184, qui ajoutent que la garnison allemande de Tulle aurait perdu près de 70 tués.
93. Journal de guerre du 588e état-major principal de liaison à Clermont-Ferrand, TMI, vol. YYYVII, Doc. F-257, entrée du 10 juin 1944, p. 14.
94. Michel Thébault, «Guéret (Creuse), 7 – 9 juin 1944»: https://fusilles-40-44.maitron.fr/spip.php?article220195 (consulté le 5 janvier 2021).
95. Réquisitoire définitif du commandant Guille, op. cit., p. 23; exposé plus détaillé, à partir de nombreux témoignages, par Michel Baury, Oradour-sur-Glane. La falsification allemande, Waterloo, Jourdan, 2020, p. 65-72, qui relate que, parmi les victimes, un gendarme est abattu et son cadavre est écrasé par un véhicule blindé, et que trois cadavres de maquisards sont incinérés au lance-flammes – peut-être brûlés vifs.
96. Réquisitoire définitif du commandant Guille, op. cit., p. 23.
97. Réquisitoire définitif du commandant Guille, op. cit., p. 23 bis–25. Delarue, Trafics et crimes sous l’Occupation, op. cit., p. 400-412.
98. 2. SS Panzer-Division «Das Reich», Ia 751/44, Divisionsbefehl für den 10.6.44, 9.6.44 - NARA, T-354, Roll 128, img 731 et 732. L’archive indique que la directive aurait été émise à 23 h 15, mais Jacques Delarue a magistralement démontré que cette heure d’émission avait été falsifiée, et que cet ordre avait été édicté le 9 juin à 12 h 15. La falsification était censée innocenter Lammerding dans le massacre de Tulle. L’ordre, en effet, a été rédigé au «poste de commandement de la division: Tulle, Hôtel Moderne», ce qui établit la présence de Lammerding à Tulle à l’heure où cette directive a été rédigée. Or, si Lammerding était à Tulle à midi, il ne pouvait avoir manqué d’assister aux pendaisons exécutées par les SS dans la ville… l’après-midi. Voir Delarue, Trafics et crimes sous l’Occupation, op. cit., p. 361-366.
99. Der Oberbefehlshaber West, Ia Nr. 4424/44, 8.6.44, p. 3. NARA, T-311, Roll 25, f7029385.
100. LVIII Pz. Korps, Abt. Ia, Nr. 367/44, 9.6.44. NARA, T-314, Roll 1496, img. 229.
101. LVIII Pz. Korps, Abt. Ia, Nr. 374/44, 9.6.44. NARA, T-314, Roll 1496, img. 232.
102. Michel Baury, Résistance. Les derniers témoignages, Waterloo, Jourdan, 2019, p. 21-41.
103. Grenard, Une légende du maquis, op. cit., p. 311-312.
104. Sur cet épisode, qui fera l’objet de développements ultérieurs compte tenu de son instrumentalisation par les négationnistes, voir l’étude, à jour, de Baury, Résistance. Les derniers témoignages, op. cit., p. 43-62, ainsi que Roger Chastaing, J’étais FTPF en Hate-Vienne, Paris, Editions de l’Amicale de la Veytizou, 1990, p. 121-148.
105. Sur ce point, voir l’enquête minutieuse de Michel Baury, Oradour-sur-Glane. La falsification allemande, op. cit., p. 69-127. Egalement, du même auteur, Résistance. Les derniers témoignages, op. cit., p. 63-164, notamment les témoignages recueillis.
106. Voir le facsimilé de la fiche SS de Kämpfe dans Gérard Guicheteau, La «Das Reich» et le cœur de la France, Paris, éd. Daniel & Cie, 1974, p. 45. Egalement, Penaud, Oradour-sur-Glane, op. cit., p. 180-181 et Baury, Oradour-sur-Glane. La falsification allemande, Waterloo, Jourdan, 2020, p. 201-205, ainsi que Michael Williams: https://www.oradour.info/ruined/chapter3.htm#Kämpfe (consulté le 6 janvier 2020).
107. Réquisitoire définitif du commandant Guille, op. cit., page non numérotée, entre la page 23 et la page 23bis. Voir également les souvenirs de Paulette Gilet, fille de Pierre Just, l’un des cultivateurs assassinés, dans Baury, Oradour-sur-Glane. La falsification allemande, op. cit., p. 226-229, ainsi que d’Antoine Malaguise, fils de Pierre Malaguise, l’autre cultivateur abattu, ibid., p. 235-237.
108. Voir le témoignage de Fernand Laudoueineix dans Baury, Oradour-sur-Glane. La falsification allemande, op. cit., p. 222-223.
109. 2. SS Panzer-Division «Das Reich», Ia 751/44, Divisionsbefehl für den 10.6.44, 9.6.44, p. 1 - NARA, T-354, Roll 128, img 731.
110. Fouché, Oradour, op. cit., p. 78.
111. PV d’audition Eugène Patry, 11 décembre 1944, 1207/82, AD Haute-Vienne, 1517 W 524 (img. 315). Egalement AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00755-758.
112. PV d’audition de Louis Hamm, 15 décembre 1944, 1207-89, AD Haute-Vienne, 1517 W 524, 00554.
113. Réquisitoire définitif du commandant Guille, op. cit., p. 22.
114. Jean-Jacques Fouché, Oradour, Paris, Liana Levi, 2001, p. 75-82.
115. Pour plus de précisions sur la participation de Davoine à la persécution des Juifs, voir Fouché, Oradour, op. cit., p. 76-77.
116. PV d’audition Camille Davoine, 9 décembre 1944, 1207/81, AD Haute-Vienne, 1517 W 524 (img. 309-312). Egalement AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00752-754.
117. PV d’audition André Joyeux, 5 décembre 1944. AD Haute-Vienne, 1517 W 524 (img. 285-286). PV d’audition Georges Coudert, 9 décembre 1944. AD Haute-Vienne, 1517 W 524 (img. 322-323).
118. PV d’audition Eugène Patry, 7 décembre 1944. AD Haute-Vienne, 1517 W 524 (img. 301-304). Egalement AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-743-745.
119. PV de confrontation du 9 décembre 1944, 1207/80, AD Haute-Vienne, 1517 W 524 (img. 307-308). Egalement AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00750-751.
120. PV d’audition Eugène Patry, 9 décembre 1944, 1207/79, AD Haute-Vienne, 1517 W 524 (img. 305-306). Egalement AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-748-749.
121. Déposition de René Ohl, 10 juillet 1946, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00163.
122. PV d’audition Eugène Patry, 11 décembre 1944. AD Haute-Vienne, 1517 W 524 (img. 313-318).
123. «Etat des officiers, sous-officiers, et hommes de troupes appartenant à la Division SS «Das Reich», Régiment du Führer, identifiés responsables des crimes de guerre commis à Oradour-sur-Glane le 10 juin 1944» AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 00146-147.
124. Fouché, Oradour, op. cit., p. 82-85. Le chef de la 3e compagnie, le SS-Obersturmführer Otto Kahn, indiquera 145 à 150 hommes. Déposition d’Otto Kahn devant le procureur de Dortmund (dossier 45 Js 2/62), 12 décembre 1962, reproduite dans Jean-Paul Picaper, Les ombres d’Oradour – 10 juin 1944, Paris, L’Archipel, 2014, p. 375. Egalement mis en ligne (en anglais): https://www.oradour.info/appendix/kahnsta1.htm (consulté le 6 janvier 2020). Le soldat «malgré nous» Alfred S. mentionne 120 hommes, 24 mitrailleuses légères, 4 lourdes, et 15 F.M. (déposition du 14 décembre 1944, no 1207/86, AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00768-769).
125. Marie Georgeval, épouse Lévignac, dont deux fils étaient hébergés à Oradour, indiquera qu’un responsable de la Milice (à Avignon) lui aurait indiqué que cette organisation aurait participé au massacre (PV d’audition d’Andrée Georgeval, 31 octobre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, 0030 et AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00568). La présence d’individus en civil au milieu des Allemands, à tout le moins au soir du massacre, est attestée par d’autres témoins, tels qu’Aurélie Riffaud (PV d’audition d’Aurélie Riffaud, 12 juillet 1946, AJM, «dossier Oradour», Liasse VI, 04-00148-00149 et 04-00172-173). Justin Darthout indiquera: «Presque aussitôt, une colonne d’au moins vingt véhicules automobiles [est arrivée]. Dans cette colonne allemande, j’ai remarqué plusieurs voitures automobiles conduite intérieure. Dans l’une d’elles se trouvaient deux civils assis sur le siège avant […].» (PV d’audition de Justin Darthout, 8 décembre 1944, 1207/50, AD Haute—Vienne, 1517 W 424, 0183). Cependant, les Miliciens suspectés prétendront avoir été absents d’Oradour lors de l’extermination, ne rejoignant les SS qu’après (rapport du commissaire Marc Paul, 23 juillet 1946, p. 4, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-00143). Marcel Hubsch, interprète de la Gestapo de Limoges, précisera avoir été informé par le Milicien Patry qu’Oradour avait été incendié avec ses habitants, qu’un détachement de miliciens et de la Sipo-SD (incluant Patry) a pu participer à l’opération, mais que ce même Patry ne lui a pas confirmé sa présence à ce massacre (Déposition de Marcel Hubsch, 11 décembre 1944, 1207/83, AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00760). Comme l’écrira Jean-Jacques Fouché, «il est pratiquement exclu de démêler les déclarations lacunaires et contradictoires de ces collaborateurs de la police SS. Elles contiennent des éléments vérifiés, d’autres seulement vraisemblables, et d’autres douteux. Il est certain que ces collaborateurs accompagnaient les SS de la police de Limoges, qui eux-mêmes pilotaient les Waffen SS, ou au moins se coordonnaient avec eux. La succession de réunions identifiées entre policiers SS et Waffen SS, pour la préparation des actions du 10 juin, montre cette coordination, sans permettre de préciser laquelle des deux branches SS, police SS ou Waffen SS, assumait la conduite des opérations, dont l’initiative revenait aux Waffen SS. On ne peut exclure qu’un auxiliaire français des SS ait pu être présent dans l’après-midi ou plus vraisemblablement en soirée à Oradour. En uniforme, il n’était pas repérable. Le rôle des miliciens, “en civil”, n’est pas entièrement éclairci. Ils ont accompagné les Waffen SS du bataillon I DF du samedi matin 10 juin jusqu’au moment de leur départ vers Poitiers, le lundi 12. Il n’est pas impossible que cette équipe de miliciens soit passée par Oradour avant de rejoindre le cantonnement de Waffen SS à Nieul. Les miliciens ont pu être présents dans le convoi partant d’Oradour en soirée. Si la présence de collaborateurs à Oradour n’est pas exclue, rien dans la documentation n’indique qu’ils aient participé directement au massacre et au pillage.» (Fouché, Oradour, op. cit., p. 173-174).
126. Déclaration de Paul G., 8 septembre 1945, AD Haute-Vienne, 1517 W 484, img. 0831.
127. Déposition d’Otto Kahn du 12 décembre 1962, in Jean-Paul Picaper, Les ombres d’Oradour. 10 juin 1944, Paris, L’Archipel, p. 374. Egalement en anglais: https://www.oradour.info/appendix/kahnsta1.htm.
128. Nicolas Bernard, Oradour-sur-Glane 10 juin 1944. Histoire d’un massacre dans l’Europe nazie, Paris, Tallandier, 2024, p. 147-170.
129. Courrier de Jean d’Albis au Ministre de Suisse (à Vichy), 15 juin 1944, A.N., 24 J 5, Fonds Stucki, 003-004. Il est vrai que le journal de guerre du 588e état-major principal de liaison à Clermont-Ferrand (général Brodowski) mentionne inexactement qu’Oradour se situe à 30 kilomètres au sud-ouest de Limoges, ce qui correspond à Oradour-sur-Vayres: TMI, vol. YYYVII, Doc. F-257, p. 15 (entrée du 11 juin 1944) et p. 18 (entrée du 14 juin 1944). Mais une telle mention ne peut correspondre qu’à une erreur de plume, commise par un officier mal informé. En effet, il ressort dudit journal de guerre que Brodowski n’a été vraisemblablement avisé qu’après-coup du massacre, car il n’y existe aucune mention d’Oradour avant le 11 juin: si Brodowski avait été instruit en amont d’une telle atrocité, le journal de guerre y ferait certainement allusion. Tel n’étant pas le cas, l’on peut en déduire que Brodowski n’a été ni décisionnaire, ni même complice du carnage. Dès lors, l’erreur de localisation d’Oradour qui entache le journal de guerre résulte logiquement d’une sous-information de Brodowski.
130. La Contemporaine, Fonds Delarue, F Delta 835/36 et Robin Mackness, Oradour. L’or des SS, Genève, Nepal, 1989 (trad. de l’anglais).
131. Maysounave, Oradour. Plus près de la vérité, op. cit., p. 171-207.
132. Michel Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Le récit d’un survivant, Toulouse, Privat, 2018, p. 103-109.
133. Baury, Oradour-sur-Glane. La falsification allemande, op. cit., p. 31-48.
134. Rapport du commissaire Massiéra, 4 juillet 1944, p. 19 – AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0019.
135. Cité dans Georges Beau et Léopold Gaubusseau, R5. Les SS en Limousin, Périgord et Quercy, Paris, Presses de la Cité, 1969 et 1984, p. 223.
136. PV d’audition d’Henri Bouty, 29 novembre 1944, no 1207/54, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0192-0193. Un autre témoin, pharmacien et maire-délégué, fera état d’autres réquisitions de logements à Nieul dans la journée du 9 juin 1944 (PV d’audition de Marcel Rivet, 29 novembre 1944, no 1207/54, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0196-0198).
137. Le témoin le plus précis sera Clément Broussaudier (alors 26 ans): «Il était 2 heures moins 3 minutes quand je suis entré à Oradour-sur-Glane. Aussitôt, j’entends venir des camions.» Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 30 (fonds ADEIF).
138. Voir notamment la déposition Emile Faugeras, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 20.
139. Guy Pauchou et Pierre Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, Limoges, Lavauzelles, 1945, p. 25; Larriaga, Oradour-sur-Glane, op. cit., p. 72.
140. Cité dans Picaper, Les ombres d’Oradour, op. cit., p. 149.
141. Déposition d’Henri W., 1er septembre 1946, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00845.
142. Sur les brutalités, allant jusqu’au meurtre, voir, notamment la cote AD Haute-Vienne, 1517 W 424: témoignage de Jacques Garaud, rapport du commissaire Massiéra du 4 juillet 1944, p. 4; PV d’audition d’Aimé Renaud du 3 novembre 1944; PV d’audition de Jeannine Brandy, 3 novembre 1944; PV d’audition de Marcel Belivier, 8 novembre 1944; PV d’audition de Mathieu Borie du 9 novembre 1944; PV d’audition de Clément Broussaudier, 9 novembre 1944; PV d’audition de Jacques Boissou, 10 novembre 1944; PV d’audition d’Armand Senon, 14 novembre 1944, 1207/21, 0094; PV d’audition d’Yvon Roby, 15 novembre 1944; PV d’audition de Marie-Anne Deschamps, 20 novembre 1944; PV d’audition de Robert Hébras, 24 novembre 1944, 1207/46, img. 172; PV d’audition de Pierre Joyeux, 24 novembre 1944 (qui fait précisément état de ces assassinats; voir également son attestation du 30 novembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-00224); PV d’audition de Justin Darthout, 28 novembre 1944; PV d’audition de Jean-Marcel Darthout, 7 décembre 1944. Egalement, lors du procès de Bordeaux: déposition Hubert Desourteaux, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 9-10; déposition Aimé Renaud, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 22; déposition Clément Broussaudier, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 31; déposition Yvon Roby, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 39; déposition Mathieu Borie, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 42; déposition Jacqueline Claverie, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 24 janvier 1953, p. 33; déposition Armand Senon, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 25 janvier 1953, p. 26-27, qui relate qu’une sentinelle faisait avancer à coups de crosse une mère tenant son enfant au cou, terrorisé; il ne fait pas mention de cet incident dans son attestation du 27 novembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-242-245. Voir également PV d’audition Jeannine Brandy 3 novembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00576. Le soldat alsacien enrôlé de force Albert O. indiquera que son supérieur, le sous-officier Steger, a tué une vieille dame (blessant O. à cette occasion): déposition d’Albert O., 21 avril 1948, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00710. De même, voir les témoignages de Heinz Barth, in Picaper, Les ombres d’Oradour, op. cit., p. 150.
143. Yvon Roby indiquera qu’un Allemand lui a dérobé sa bicyclette (PV d’audition d’Yvon Roby, 15 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424).
144. PV d’audition d’Auguste L., 22 novembre 1945, no 2808, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00563. Confirmation par Heinz Barth lors de son procès à Berlin-Est en 1983 (La Montagne, 31 mai 1983).
145. Audition de Heinz Barth lors de son procès à Berlin-Est en 1983 (Le Populaire du Centre, 31 mai 1983).
146. PV d’audition d’Yvonne Gaudy, 25 mai 1948, AJM, «Dossier Oradour», Liasse XIII, 07-00329. Rapport du commissaire Hugonneau, 26 mai 1948, AJM, «Dossier Oradour», Liasse XIII, 07-00321. Le soldat devait être Auguste L., qui sera jugé au procès de Bordeaux (ibid.).
147. Plusieurs résidents, tels que Martial (32 ans) et Maurice Beaubreuil (20 ans), se planquent dans une cachette, chez leur tante, et pour cause: le premier est prisonnier de guerre évadé, le second s’est dérobé au «travail obligatoire»! Même crainte du STO chez Martial Brissaud, charron de 17 ans (qui s’abrite au grenier de sa maison)[147], ainsi que chez le cultivateur Marcel Belivier, 19 ans, et Paul Doutre, menuisier, 21 ans. Un autre, Hubert Desourteaux, 33 ans, garagiste de son état, et surtout, lui aussi, prisonnier évadé, tente de fuir, mais face aux Allemands qui se déploient, il se dissimule à son tour. Un autre, Martial Machefer, cordonnier, 36 ans, identifié par Vichy comme «notoirement communiste et meneur gréviste», cache chez lui une adolescente juive (Sarah Jakobowicz, 15 ans): son épouse l’incite à fuir, il brûle ses papiers, quitte le village, les SS le laissent partir parce qu’ils s’aperçoivent qu’il est mutilé. Un autre, Hippolyte Redon, maréchal ferrant de 43 ans, redoute lui aussi d’être «ramassé» avec les hommes du village, enfourche son vélo, se fait tirer dessus par les SS mais parvient à quitter le village, non sans avertir les gens qu’il croise. Un autre, Aimé Renaud, mécanicien de 30 ans, est lui aussi inquiet: quelques jours auparavant, un ami, anxieux, lui a proposé d’envisager de prendre le maquis; se croyant également surveillé, Aimé Renaud se terre[147], parviendra tout de même à retrouver son épouse Jeanine. Jacqueline Pinède, 19 ans, juive, parviendra à survivre avec sa sœur de 16 ans et son frère de 9 ans (lequel était en situation de handicap), après s’être cachés et grâce à un soldat allemand qui les laisse filer. Un autre, Armand Senon, lui, est contraint à l’immobilité: ce jeune homme de 29 ans est alité, pour cause de fracture de la jambe lors d’une partie de football, et miraculeusement les Allemands ne fouillent pas sa maison, qui donne sur le Champ de Foire. Un autre, Robert Besson, négociant en tissus de 27 ans, suit les recommandations de sa mère, qui l’invite à se cacher.
148. En effet, depuis des mois courent les rumeurs les plus terrifiantes. «Quelles sont les intentions des Allemands? écrit Léon Werth, à Paris, le 7 juin. Grouper les hommes, les diriger vers l’Allemagne? Les parquer en France? Les utiliser en France? Les utiliser à des travaux de défense? On dit qu’ils ont compulsé à la mairie les feuilles de recensement.» Werth, Déposition, op. cit., p. 658 (entrée du 7 juin 1944). «A propos du débarquement, il court des bruits divers et tous inquiétants, notait l’avocat parisien Maurice Garçon en janvier 1944. L’opinion commune la plus répandue est que les Allemands, par crainte de troubles intérieurs, enfermeront dans des camps de concentration tous les hommes de seize à soixante ans.» Garçon, Journal, op. cit., entrée du 12 janvier 1944, p. 816.
149. Dr. Bapt «Compte-rendu de ma mission à Oradour-sur-Glane les 14-15-16-17 et 19 juin 1944», in Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 153-158. Egalement AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00540 et AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0021-0025.
150. Déposition Roger Godfrin, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 4-9. PV d’audition de Roger Godfrin, 1er décembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0255-0257. Contrairement à ce qui a été parfois écrit, Roger Godfrin n’est pas le seul enfant du village à avoir survécu: d’autres enfants, qui n’étaient pas à l’école et étaient demeurés dans des hameaux éloignés (Larriaga, Oradour-sur-Glane, op. cit., p. 72); sur place, Robert Pinède, réfugié juif à Oradour, cache ses trois enfants, qui auront la vie sauve grâce à la mansuétude discrète d’un Waffen SS (Fouché, Oradour, op. cit., p. 142 et 156).
151. Sur ce point, les témoignages divergent. Certains, comme Marguerite Rouffanche, affirment que les pourparlers avec le Maire sont intervenus avant le départ des femmes et des enfants pour l’église. D’autres, après. Il est vrai que, de son propre aveu, Marguerite Rouffanche n’a rien entendu des pourparlers «parce que nous étions trop loin pour l’entendre» (Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 31 janvier 1953, p. 2).
152. Selon le témoignage de Mathieu Borie: PV d’audition du 9 novembre 1944 – AD Haute-Vienne, 1517 W 424. Voir également Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Le récit d’un survivant, op. cit., p. 54-57. Le courageux propos du Maire est confirmé par Robert Hébras (Pierre Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour. Le plus monstrueux crime de guerre, Limoges, Publications du Centre, 1944, p. 29). Un autre rescapé, Clément Broussaudier, relatera n’avoir rien pu entendre, étant trop loin (PV d’audition de Clément Broussaudier, 9 novembre 1944 - AD Haute-Vienne, 1517 W 424), de même que Mme Rouffanche (PV d’audition de Marguerite Rouffanche, 9 novembre 1944 - AD Haute-Vienne, 1517 W 424).
153. Yvon Roby indique que le propriétaire de la carabine était M. Compain, le pâtissier (PV d’audition d’Yvon Roby, 15 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424), mais Robert Hébras ainsi que Jean Darthout imputent ce propos à un autre habitant, M. Lamaud – voir PV d’audition de Robert Hébras, 24 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424; déposition de Jean-Marcel Darthout recueillie par Guy Pauchou le 2 décembre 1944 (AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-247) reproduite également dans Pauchou et Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 39; PV d’audition de Jean-Marcel Darthout, 7 décembre 1944, 1207/76, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0296. Le prétexte allemand de la présence d’un dépôt d’armes est également mentionné par Mathieu Borie, qui mentionne avoir entendu une détonation (mais il est bien le seul), qu’il impute à l’explosion d’une grenade allemande (Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Le récit d’un survivant, op. cit., p. 57).
154. Selon Heinz Barth, lors de son procès en 1983, ladite perquisition n’aurait duré que cinq minutes (Le Populaire du Centre, 31 mai 1983).
155. Voir le témoignage de Martial Brissaud reproduit dans Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 32, ainsi que déclaration de Martial Brissaud, 7 juillet 1947, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 0109-110 ainsi que son attestation du 30 novembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 00219.
156. PV d’audition de Jean-Pierre E., 12 août 1947, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00182.
157. D’après le témoignage d’Heinz Barth, in Picaper, Les ombres d’Oradour, op. cit., p. 152-153; audition de Heinz Barth lors de son procès à Berlin-Est en 1983 (Le Populaire du Centre, 31 mai 1983). Mathieu Borie évoque un fait identique, mais avant la répartition des civils dans les granges et garages: «Puis le fils R… se présenta à l’officier. Celui-ci le fit revenir dans son rang, tenant ses papiers à la main et habillé en tenue de milicien: il voulait présenter ses papiers d’identité au Boche. Les autres Boches qui l’entouraient se moquèrent de lui et le renvoyèrent dans les rangs.» (Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Le récit d’un survivant, op. cit., p. 60).
158. Déposition d’Auguste L., 12 juillet 1946, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00549.
159. D’après le SS-Oberscharführer Karl Lenz, interrogé au procès de Bordeaux, «Kahn a tiré en l’air avec son pistolet-mitrailleur et il nous a dit que ces hommes étaient des partisans et qu’ils seraient exécutés sur son ordre, sur le signal qu’il donnerait par un coup de feu.» (Interrogatoire de Karl Lenz, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 16 janvier 1953, p. 20). Le SS Georges-René Boos confirme l’usage d’un pistolet-mitrailleur (Déposition volontaire de Georges-René Boos, AJM, «Dossier Oradour», Liasse XIII, 07-00576 et PV d’audition de Georges-René Boos, 8 août 1947, AJM, «Dossier Oradour», liasse XIII, 07-00535. Heinz Barth, lors de son procès à Berlin-Est, indiquera qu’«il fallait attendre un signal pour que les exécutions aient lieu en même temps», et que ce signal était «une explosion» (Le Populaire du Centre, 31 mai 1983). Si le SS Herbert Daab décrira le signal comme «un coup de mitraillette» (PV d’audition d’Herbert Daab, 27 juillet 1949, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-0097), le SS alsacien Joseph B. indiquera que Kahn a tiré un coup de revolver (PV d’audition de Joseph B., 14 mars 1947, AJM, «Dossier Oradour», liasse XIII, 07-00581), en l’air, mais qu’il ne l’a pas vu (PV d’audition de Joseph B., 26 août 1947, AJM, «Dossier Oradour», liasse XIII, 07-00506). Le SS Fritz Peufer, témoin oculaire, indique que Kahn tire un coup de mitraillette en l’air (PV d’audition de Fritz Pfeufer, 7 août 1947, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00740). Un autre SS du même groupe d’exécution, Hermann Frenzel, évoque tantôt une mitraillette (PV d’audition d’Hermann Frenzel, 8 mars 1948, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00228), tantôt «un coup de revolver» (PV d’audition d’Hermann Frenzel, 19 mai 1948, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00208; interrogatoire d’Herman Frenzel, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 19). Le SS alsacien Auguste L. confirmera que Kahn a donné l’ordre des fusillades (Déclaration d’Auguste L., 12 avril 1945, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00571), et indiquera que cet officier aurait défini le signal comme «coup de feu avec mon pistolet» (PV d’audition d’Auguste L., 22 novembre 1945, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00566; également PV d’audition d’Auguste L., 12 juillet 1946, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00549). Selon Jean-Pierre E., Kahn aurait donné un ordre verbal, mais il ne l’a pas vu tirer un coup de mitraillette en l’air: 24 septembre 1945, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-0205; PV d’audition de Jean-Pierre E., no 2/207, 3 octobre 1945, AD Haute-Vienne, 1517 W 484, img. 0658; PV d’audition de Jean-Pierre E., 12 août 1947, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00182-183. Bien entendu, le principal intéressé, Otto Kahn, prétendra, dans sa déposition du 13 décembre 1962, prétendra s’être éloigné des zones de tir «parce que je ne voulais pas voir ou entendre ce meurtre» (Picaper, Les ombres d’Oradour, op. cit., p. 378)…
160. La présence du haut-parleur est notamment attestée par Robert Hébras (Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 202). Le 22 janvier 1953, Aimé Renaud indiquera, devant le Tribunal militaire de Bordeaux: «Il y a eu un haut-parleur vers l’église, je ne sais ce qu’on a annoncé et des coups de feu ont été tirés et aussitôt la mitrailleuse est entrée en action» (déposition reproduite dans Michel Bélivier & Benoît Sadry, Oradour-sur-Glane. Regards et Histoire, association «Les Enfants d’Oradour», 2007, p. 77). La retranscription sténographique consultée à l’ADEIF présente, sur ce point, une différence, Aimé Renaud n’évoquant aucun haut-parleur mais un officier (Déposition d’Aime Renaud, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 24).
161. Déposition du Dr. Bapt, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 36.
162. Témoignage de Marcel Darthout reproduit dans Pauchou & Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 47-48. La circonstance que les Allemands avaient ouvert un poste de TSF est corroborée par Clément Broussaudier (Déposition de Clément Broussaudier, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 34) et par Mathieu Borie (PV d’audition de Mathieu Borie, 9 novembre 1944, 1207/12, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0065 et Baury, éd., Oradour-sur-Glane. Le récit d’un survivant, op. cit., p. 63-64).
163. Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 201-203. Delage, Oradour. Ville martyre, op. cit., p. 108-110. PV d’audition de Robert Hébras, 24 novembre 1944, 1207/46, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0171. Déclaration de Robert Hébras, 7 juillet 1947, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00117. Déposition de Robert Hébras, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 45-49. Robert Hébras, Oradour-sur-Glane. Le drame heure par heure, Montreuil-Bellay, C.M.D., 1992. Robert Hébras, Avant que ma voix ne s’éteigne, Montfort l’Amaury, Elytel, 2014.
164. Attestation de Marcel Darthout, 2 décembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-0246-247. PV d’audition de Marcel Darthout, 12 décembre 1944, 1207/76, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0294 (et AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-0257). Témoignage reproduit dans Pauchou & Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 47-51. Marcel Darthout, «J’ai été fusillé à Oradour-sur-Glane», France-Soir, 30 et 31 janvier, 1er février 1945 (témoignage rédigé le 22 décembre 1944 – La Contemporaine, Fonds Delarue, F Delta 835/33). Déclaration de Marcel Darthout, 8 juillet 1947, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-0105. Déposition de Marcel Darthout, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 49-53.
165. Déclaration de Mathieu Borie au Travailleur du Centre, reproduite dans Delage, Oradour. Ville martyre, op. cit., p. 104-107. Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Le récit d’un survivant, op. cit., p. 27-89. Déclaration de Mathieu Borie du 3 octobre 1944, Rapport E.O. Munn, source privée et Michel Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Un crime contre l’humanité, Waterloo, Jourdan, 2021, p. 194-197. PV d’audition de Mathieu Borie, 9 novembre 1944, 1207/12, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0063. Déposition de Mathieu Borie, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 42-44.
166. PV d’audition d’Yvon Roby, 16 novembre 1944, 1207/24, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0104. Attestation d’Yvon Roby, 28 novembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-0237-238, 239-241. Déposition d’Yvon Roby, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 38-42.
167. PV d’audition de Clément Broussaudier, 9 novembre 1944, 1207/13, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0067. Déposition de Clément Broussaudier, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 30-38.
168. Pauchou & Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 49.
169. Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Le récit d’un survivant, op. cit., p. 65.
170. Pauchou & Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 49, 52-54. De sa cachette, Armand Senon entendra son assassinat (déposition d’Armand Senon, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 26 janvier 1953, p. 35).
171. Fouché, Oradour, op. cit., p. 154-159.
172. Pauchou & Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 69.
173. PV d’audition d’Armand Senon, 14 novembre 1944, 1207/21, 0095.
174. PV d’audition de Louis-François Tabaraud, 4 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0044 et AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-578. PV d’audition de Martial Dauriat, 4 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0047 et AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-580. Déposition de Martial Dauriat, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 24 janvier 1953, p. 17.
175. Dr. Bapt, «Compte-rendu de ma mission à Oradour-sur-Glane les 14-15-16-17 et 19 juin 1944», in Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 154-157, ainsi que AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00542-00545 et AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0022-0024.
176. Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 42-52 (narre le massacre dans l’église en reprenant le témoignage qu’il a recueilli de Marguerite Rouffanche). Rapport du commissaire Massiéra, 4 juillet 1944, p. 5-6 (AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0006-0007). Déclaration de Marguerite Rouffanche du 4 octobre 1944, Rapport E.O. Munn, source privée et Michel Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Un crime contre l’humanité, Waterloo, Jourdan, 2021, p. 204-206. PV d’audition de Marguerite Rouffanche, 16 novembre 1944, 1207/25, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0109. Attestation de Marguerite Rouffanche, 30 novembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00235-236. Déclaration de Marguerite Rouffanche, 7 juillet 1947, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00113. Déposition de Mme Rouffanche, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 31 janvier 1953, p. 1-11.
177. Déclaration de Marguerite Rouffanche du 4 octobre 1944, Rapport E.O. Munn, source privée et Michel Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Un crime contre l’humanité, Waterloo, Jourdan, 2021, p. 205. Selon ses déclarations, Marguerite Rouffanche indique avoir sauté du vitrail de gauche (PV d’audition de Marguerite Rouffanche, 16 novembre 1944, 1207/25, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0111), ce qui semble conforme à son témoignage enregistré par Ecto Munn, ou de la fenêtre du milieu, la plus grande (attestation de Marguerite Rouffanche, 30 novembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00237, reproduite dans Pauchou et Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 57-58). Une telle variation apparaît des plus bénignes.
178. PV d’audition de Marguerite Rouffanche, 16 novembre 1944, 1207/25, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0112. Déclaration de Marguerite Rouffanche du 4 octobre 1944, Rapport E.O. Munn, source privée et Michel Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Un crime contre l’humanité, Waterloo, Jourdan, 2021, p. 205. Plaide en ce sens le fait qu’un SS alsacien, enrôlé de force, a aperçu une traînée de sang sous un vitrail de l’église (PV d’audition d’Auguste L., 22 novembre 1945, no 2808, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00567).
179. Attestation de Marguerite Rouffanche, 30 novembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00237, reproduite dans Pauchou et Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 57-58. Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 51-52.
180. Déclaration de Marguerite Rouffanche du 4 octobre 1944, Rapport E.O. Munn, source privée et Michel Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Un crime contre l’humanité, Waterloo, Jourdan, 2021, p. 205.
181. Déclaration de Paul G., 8 septembre 1945, AD Haute-Vienne, 1517 W 484, img. 0832. Egalement PV d’audition de Paul G., 10 octobre 1946, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00047. On retrouvera, en effet, le cadavre d’Henriette Joyeux, porteur de traces de balles dans la tête, près des W.C. dans le jardin du presbytère sous une couche de 30 à 40 cm de terre (PV d’audition de Léonarde Devoyont, 23 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0165; PV d’audition d’André Petit, 22 décembre 1944, 1207/94, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 00572). Le petit René sera retrouvé le crâne défoncé, la jambe gauche brisée: attestation de Martial Machefer, 8 décembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00231; déclaration de Martial Machefer, 8 juillet 1947, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 0108; déposition de Martial Machefer, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 29 janvier 1953, p. 10. Voir également Pauchou et Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 67, ainsi que Baury, Oradour-sur-Glane. Un crime contre l’humanité, op. cit., p. 106-116. De même, déposition de René Hyvernaud, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 18-19; déposition d’Aimé Faugeras, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 23-24 (qui date cependant, mais inexactement, la découverte du corps du nourrisson au 12 juin); déposition de Jean Hyvernaud, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 44-45.
182. Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 93.
183. Voir la synthèse des témoignages allemands et alsaciens par Fouché, Oradour, op. cit., p. 161-165. Sur la blessure de Gnug, voir PV d’audition d’Albert D., 21 août 1946, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00139; PV d’audition d’Albert D., 22 novembre 1946, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00133. Egalement, PV d’audition de Paul G., 8 septembre 1945, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, 00948.
184. Voir la reconstitution effectuée par Maysounave, Oradour, plus près de la vérité, op. cit., p. 232-235.
185. Déclaration de Martial Brissaud, 7 juillet 1947, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00110. Déclaration de Marie Demery (née David), 8 juillet 1947, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 0104. Déclaration de Martial Machefer, 8 juillet 1947, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 0108. Déclaration de Martial Brissaud, 7 juillet 1947, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 0109-110.
186. Déclaration de Marcel Belivier, 7 juillet 1947, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00111-112.
187. Attestation de Pierre Joyeux, 30 novembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 00225; PV d’audition de Pierre Joyeux, 24 novembre 1944, no 1207/45, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0169; PV d’audition de Jacques Boissou, 10 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0082.
188. Dr. Bapt, «Compte-rendu de ma mission à Oradour-sur-Glane les 14-15-16-17 et 19 juin 1944», in Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 154-157, ainsi que AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00542-00545 et AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0022-0024.
189. PV d’audition de Joseph B., 14 mars 1947, AJM, «Dossier Oradour», liasse XIII, 07-00581. PV d’audition d’Auguste L., 22 novembre 1945, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00567; PV d’audition d’Auguste L., 12 juillet 1946, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00551 (qui évoque trois femmes tuées); PV d’audition d’Auguste L., 20 janvier 1948, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00524.
190. Cité dans Robert Pike, Oradour s’est tu. Le destin tragique d’un village français, Paris, Flammarion, 2024, p. 338 (trad. de l’anglais), qui cite très probablement Camille Senon.
191. Ibid.
192. Déposition de Camille Senon, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 27 janvier 1953, p. 15. V oir également Guy Perlier, Camille Senon. Survivante du tramway d’Oradour-sur-Glane, Limoges, Les Monédières, 2013, p. 46-47.
193. Déclaration de Léon Sage, reproduite dans le rapport du commissaire Massiéra du 4 juillet 1944, p. 10 (AD Haute-Vienne, 1517 W 424) ainsi que PV d’audition de Léon Sage, 13 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0085 et AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 00093 (déclaration remise au juge d’instruction du Tribunal militaire de Bordeaux le 8 juillet 1947). Un autre passager, M. Normand, relate qu’à la station de Vayrac «on avait appris que de graves événements se passaient à Oradour» (ibid., p. 8). Voir également PV d’audition d’Alphonse Levignac du 31 octobre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0027 et AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00566). Louise Compain précise qu’à la sortie de Limoges, au Moulin Roux, un employé de la compagnie de tramway leur a fait part du meurtre de Chalard (PV d’audition de Louise Compain, 3 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0037).
194. Déclaration de M. Normand, rapport du commissaire Massiéra du 4 juillet 1944, p. 8-9 (AD Haute-Vienne, 1517 W 424).
195. PV d’audition d’Alphonse Levignac du 31 octobre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0028.
196. PV d’audition de Louise Compain, 3 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0037.
197. Déclaration de M. Normand, rapport du commissaire Massiéra du 4 juillet 1944, p. 8-9 (AD Haute-Vienne, 1517 W 424).
198. Déclarations de Marie Gauthier et de Léon Sage, reproduites dans le rapport du commissaire Massiéra du 4 juillet 1944, p. 9-11 (AD Haute-Vienne, 1517 W 424). PV d’audition de Louise Compain, 3 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0037. Voir également attestation de Marie Gauthier, 4 décembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 00223.
199. Témoignage de Jean Pallier reproduit intégralement dans Les Lettres françaises, numéro spécial, 1er août 1944, «Sur les ruines de la morale: Oradour-sur-Glane». Voir également AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 00130 (extraits); CMO, A 2 A (1-30), «Ma mission des 9, 10, 11, 12, 13 juin 1944», Réf. OIW/3/36000 (version intégrale). Indication de l’emplacement du poste de commandement par Léon Sage, rapport du commissaire Massiéra du 4 juillet 1944, p. 10 (AD Haute-Vienne, 1517 W 424) ainsi que PV d’audition de Louise Compain, 3 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0037. Marie Gauthier remarque «de nombreux Allemands dissimulés dans les champs qui se levaient à notre approche et qui se recouchaient dès qu’ils s’étaient rendus compte que nous étions escortés» (Déclaration de Marie Gauthier, reproduite dans le rapport du commissaire Massiéra du 4 juillet 1944, p. 9 (AD Haute-Vienne, 1517 W 424).
200. Déposition de Louise Compain, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 27 janvier 1953, p. 14.
201. Déclaration de Léon Sage enregistrée le 8 juillet 1947, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 00094.
202. Déposition de Camille Senon, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 27 janvier 1953, p. 18.
203. PV d’audition de Louise Compain, 3 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0037.
204. PV d’audition de Camille Senon, 6 décembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 290. Déposition de Camille Senon, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 27 janvier 1953, p. 17.
205. Témoignage de Jean Pallier, «Sur les ruines de la morale: Oradour-sur-Glane», op. cit. Confirmé par PV d’audition de Léon Sage, 13 novembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0086.
206. Hypothèse de Léon Sage, rapport du commissaire Massiéra du 4 juillet 1944, p. 11 (AD Haute-Vienne, 1517 W 424).
207. PV d’audition de Louis Moreau, 23 novembre 1944, 1207/84, AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00762. Pauchou & Masfrand recensent 20 à 25 bouteilles de champagne retrouvées dans la «maison Dupic» (Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 91).
208. Pauchou & Masfrand semblent le suggérer: «Il est hors de doute qu’au cours de la nuit, dans cette maison, se déroulèrent d’atroces orgies. M. Moreau, maire délégué, a trouvé dans les décombres de cette demeure les restes de 20 à 25 bouteilles de champagne!… On y but, on y ripailla à la manière teutonne, et certaines autres découvertes indiquent assez le caractère monstrueux des scènes auxquelles se livrèrent ces brutes sadiques à la clarté des dernières lueurs de l’incendie.» (Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 91). Voir également les mises au point de Fouché, Oradour, op. cit., p. 182-184 et de Picaper, Les ombres d’Oradour, op. cit., p. 316-321. Quarante ans plus tard, Robert Hébras interrogera le SS Heinz Barth sur ce sujet lors du procès de ce dernier à Berlin-Est, car «la pensée que les soldats eussent pu abuser de jeunes femmes du village, après le massacre, parmi lesquelles aurait pu se trouver ma sœur Georgette, me hantait.» Barth éludera (Desourteaux et Hébras, Oradour/Glane. Notre village assassiné, op. cit., p. 159).
209. Témoignage de Jean Pallier, «Sur les ruines de la morale: Oradour-sur-Glane», op. cit. Déposition de Jean Courivaud, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 27 janvier 1953, p. 11-12.
210. Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 27 janvier 1953, p. 20.
211. Témoignage de Jean Pallier, «Sur les ruines de la morale: Oradour-sur-Glane», op. cit.
212. Déposition d’Hubert Desourteaux, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 15-16.
213. PV d’audition de Jean-Marcel Darthout, 7 décembre 1944, 1207/76, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0298.
214. Rapport au Préfet, 14 juin 1944, cité dans Fouché, Oradour, op. cit., p. 179.
215. Déposition d’Hubert Desourteaux, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 17.
216. PV d’audition d’Auguste L., 22 novembre 1945, no 2808, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VII, 03-00567.
217. Déposition Hubert Desourteaux, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 22 janvier 1953, p. 17.
218. Dr. Bapt «Compte-rendu de ma mission à Oradour-sur-Glane les 14-15-16-17 et 19 juin 1944», in Pierre Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour. Le plus monstrueux crime de guerre, Limoges, Publications du Centre, 1944, p. 154-155.
219. Limagne, Ephémérides de quatre années tragiques, vol. III, Paris, Candide, 1987, p. 2053.
220. Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit.; sur Poitevin, voir Pascal Plas, «Pierre Poitevin, journaliste d’investigation», Histoires & mémoires. Conflits contemporains. Limousin, Berry, Périgord, Charentes, Limoges, Lucien Souny, 2008, p. 11-45. Plus précisément, Poitevin avait adhéré au groupement «Libération», puis avait été membre, dès leur fondation, des Mouvements Unis de Résistance (Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 14). Ce qui n’empêchera pas L’Humanité de le décrire, lors de sa déposition au procès de Bordeaux, comme un «étrange «journaliste» (de Vichy)» (L’Humanité, 24 janvier 1953).
221. Déclaration de Pierre Poitevin, 10 juillet 1945, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, img. 00185. Déposition de Pierre Poitevin, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 23 janvier 1953, p. 27.
222. Rapport du Préfet de la Région de Limoges, 15 juin 1944, AD Haute-Vienne, 986 W 481, img. 0021 et AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00203-206. Voir également Pierre Trouillé, Journal d’un Préfet pendant l’Occupation, Paris, Gallimard, 1964, entrée du 10 juin 1944, p. 145 (curieusement, Trouillé date du 10 juin des faits qui ne peuvent être intervenus que le 11).
223. Rapport du Préfet de la Région de Limoges, 15 juin 1944, AD Haute-Vienne, 986 W 481, img. 0023-24 et AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00203-205.
224. Verbindungsstab 586, Abt. Ic, Tgb. no 1760/44, Betr.: Übergriffe der Truppe anlässlich der Unternehungen zur Bandebekämpfung im Regionalbereich Limoges, 12. Juni 1944, p. 2 – CMO, 1 ETUD 2-4. Trad. française dans Penaud, La «Das Reich», op. cit., p. 350-351.
225. Rapport du Préfet de la Région de Limoges, 15 juin 1944, AD Haute-Vienne, 986 W 481, img. 0021 et AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00203-203.
226. Limagne, Ephémérides de quatre années tragiques, III, p. 2056.
227. Rapport du Préfet de la Région de Limoges, 15 juin 1944, AD Haute-Vienne, 986 W 481, img. 0022 et AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00203-204.
228. Rapport du Préfet de la Région de Limoges, 16 juin 1944, AD Haute-Vienne, 986 W 481, img. 0014.
229. Verbindungsstab 586, Abt. Ic, no 1816/44, Betr.: Vorgänge in Oradour-sur-Glae, 20.6.1944, p. 3 – CMO, 1 ETUD 2-4. Penaud, La «Das Reich», op. cit., p. 351-352
230. Cité dans Fouché, Oradour, op. cit., p 217.
231. Sur les circonstances de la mort de Gleiniger, voir Michel Baury, La fin du mystère Gleiniger. Août 1944, la libération de Limoges, Panazol, Lavauzelle, 2013.
232. Limagne, Ephémérides de quatre années tragiques, III, p. 2061.
233. Hans Umbreit, «German Rule in the occupied territories» 1942-1945», in Bernhard Kroener, Rolf-Dieter Müller et Hans Umbreit (dir.), Germany and the Second World War, vol. V/2, Oxford, Clarendon, 2003, p. 196 (trad de l’allemand). Blaskowitz n’en a pas moins exploité le massacre auprès de l’administration de Vichy, pour l’amener à mieux contrôler la population, seule manière selon lui d’éviter de verser le sang: Der Oberbefehlshaber der Armeegruppe G, Abt. Ia, Nr. 393/44 g, 17.6.44 – BArch, 35/551, f. 52, img. 0105-0106.
234. Gruppe Ottenbacher, Br. B. Nr.134/44, Abrt. Ia., Betr. Verhalten der Truppe im Bandenkampf und Suehnemassnahmen, 30.6.1944 – BArch, RW 35/551, f. 50, img. 0101; Lieb, Konventioneller Krieg oder NS-Weltanschauungskrieg?, op. cit., p. 371.
235. Gen. Kdo. LVIII. Pz-Korps, Abt. Ia Nr. 957/44, Bandenbekämpfung durch Jagdkommandos, 16.7.1944, p. 3 – NARA, T-314, Roll 1496, img. 650.
236. Laissez-passer no 11 du 14 juin 1944, reproduit dans Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 71 et 126.
237. PV d’audition de Marc Freund-Valade, 21 juin 1945, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00191.
238. Une première équipe intervient dès l’après-midi du 14 juin 1944 et dégage trente-sept corps (Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 72). L’une de ses membres, l’assistante sociale Suzanne Lacoste, raconte: «On nous avait dit que des maisons étaient brûlées, qu’il y avait des victimes, témoignera Suzanne Lacoste, assistante sociale, mais malgré tout ce qu’entendaient nos oreilles, nous ne pouvions croire qu’un village entier avait été anéanti en quelques heures. Apercevant la première maison sinistrée, je crus, comme cela avait lieu, hélas! en tant d’endroits de notre Limousin, qu’il s’agissait simplement de quelques édifices détruits en représailles. Mais à mesure que j’avançais dans le bourg, je fus bien obligée de me rendre à l’évidence: par devant, un spectacle de mort: des rangées de maisons détruites; par derrière, antithèse effroyable, des jardins merveilleusement intacts, abandonnés en un clin d’œil par ceux qui, vivants encore une heure auparavant, y avaient laissé leurs outils de travail, toutes les pauvres choses à leur usage quotidien: une veste, une pelle, des chaises, etc… Notre première idée, en arrivant, fut de chercher l’église, car, nous avait-on dit, quelques personnes y avaient péri. Nous pensions trouver encore des femmes et des enfants à soulager dans leur détresse. Hélas! Le cœur étreint, en montant les marches de l’édifice, nous n’aurions cependant jamais pu soupçonner le spectacle d’horreur que nous allions être les premières femmes à contempler. Je n’oublierai jamais cette vision d’épouvante: une église où plus une chaise, plus un banc n’existaient. Ce n’était qu’un amas de cendres où çà et là gisaient les ossements épars: crânes, tibias, bras, un pied d’enfant, seul, au bas de l’autel. Ce pied d’enfant, aux petits doigts qui devaient ravir une maman, quelle émotion pour deux cœurs féminins de le trouver en un tel lieu et dans de telles circonstances. Dans un coin de chapelle, nous découvrons, émues, un reste de drapeau tricolore: ce bleu, ce blanc, ce rouge, sur des cendres grises, quel symbole: symbole de la patrie pour laquelle étaient mortes toutes ces innocentes victimes des hordes nazies. Détail touchant, ce drapeau devait nous servir, les jours suivants, à cravater les bouquets déposés sur les restes des morts, bouquets faits des pauvres fleurs de leurs jardins. Nous approchant de l’autel, nous nous apercevons qu’il avait été profané par les assassins; le ciboire avec les Saintes Espèces avait disparu. Seules nous retrouvons les reliques de la pierre d’autel que nous recueillons pieusement pour les remettre le soir même à Mgr Rastouil, évêque de Limoges.» (in Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 183-184). Voir également sa déposition devant le Tribunal militaire de Bordeaux (Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 42-44).
239. PV d’audition d’André Petit, 22 décembre 1944, 1207/94, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 00571-573.
240. Déposition de Pierre Poitevin, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 23 janvier 1953, p. 27.
241. Déposition d’André Petit, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 27.
242. Voir notamment la déclaration de Louis Moreau, non datée, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-00267.
243. Rapport du commissaire Massiéra, 4 juillet 1944, p. 13, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0014.
244. Déposition de Pierre Poitevin, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 23 janvier 1953, p. 28.
245. Déposition d’André Petit, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 29-30.
246. Déposition de René Touch, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 29 janvier 1953, p. 20.
247. Déposition du Dr. Bapt, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 35-37. Sur l’inhumation des victimes, voir Dr. Bapt «Compte-rendu de ma mission à Oradour-sur-Glane les 14-15-16-17 et 19 juin 1944», in Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 149-163. Egalement AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00540 et AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0021-0025.
248. Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 75-76.
249. Déposition du Dr. Bapt, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 37.
250. Déposition du Dr. Bapt, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 37.
251. Dr. Bapt, «Compte-rendu de ma mission à Oradour-sur-Glane les 14-15-16-17 et 19 juin 1944», in Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 160-162, ainsi que AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00540 et AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0021-0025. Voir, en outre, la déposition du Dr. Bapt, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 38.
252. Déposition du Dr. Benech, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 28 janvier 1953, p. 30.
253. Déposition de Pierre Poitevin, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 23 janvier 1953, p. 28.
254. Delarue, Trafics et crimes sous l’Occupation, op. cit., p. 439-440.
255. Déposition de Guy Pauchou, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 29 janvier 1953, p. 24-30.
256. CMO, A 2 A (1-30), «Ma mission des 9, 10, 11, 12, 13 juin 1944», Réf. OIW/3/36000 (version intégrale). Egalement, Fouché, Oradour, op. cit., p. 179. Son témoignage sera reproduit intégralement dans Les Lettres françaises, numéro spécial, 1er août 1944, «Sur les ruines de la morale: Oradour-sur-Glane».
257. Delarue, Trafics et crimes sous l’Occupation, op. cit., p. 437-43. Il est possible que le tract Un éditorial que Philippe Henriot ne fera pas. Les Huns sont passés par là, diffusé fin juin 1944, reprenne le rapport de Gaston Hyllaire - AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-00274, et la note de la police de Vichy du 29 juin 1944, 04-00276. Reproduit dans Mouvement de Libération nationale, Les Huns à Oradour, Limoges, 1945, p. 79. Voir également La Contemporaine, Fonds Jacques Delarue, F Delta 835-2.
258. Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 90-95.
259. Note des Renseignements généraux de la Haute-Vienne, 15 juin 1944, no 2674, AD Haute-Vienne, 986 W 0258, 0009-00010: «D’après deux témoignages sérieux, les Allemands à leur arrivée à Oradour auraient interrogé certains habitants de la commune afin de connaître un éventuel dépôt d’armes. Sur la réponse négative qui leur fut opposée, ces militaires montrèrent une vive irritation. Peu de temps après, plusieurs détonations retentirent et des hommes furent abattus. Effrayés, les enfants des écoles s’enfuirent et quelques-uns furent mitraillés. Les hommes furent rassemblés et dirigés vers une grange, tandis que les femmes et les enfants se précipitaient dans l’église. Au bout d’un instant, les portes de la grange furent ouvertes et les hommes au nombre d’une soixantaine environ, furent mitraillés et brûlés ensuite dans la grange. Aucun témoignage n’a pu être recueilli sur les faits qui se sont déroulés dans l’église où se trouvaient rassemblées 200 personnes environ, pour la plupart des femmes et des enfants.»
260. Rapport du commissaire Massiéra du 4 juillet 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424.
261. Jean-Jacques Fouché, Oradour. La politique et la justice, Limoges, Lucien Souny, 2004, p. 38-40.
262. Déposition de Guy Pauchou, Sténographie du procès de Bordeaux, audience du 29 janvier 1953, p. 27. L’épisode de Saint-Victurnien intervient le 27 juin et non le 29. Onze résistants sont tués ou exécutés par la Milice, mais rien ne semble indiquer que ces victimes aient été éliminées pour avoir retiré des cadavres des ruines d’Oradour. Pauchou fait probablement allusion à une rumeur inspirée de ce massacre. Sur cet épisode: https://fusilles-40-44.maitron.fr/spip.php?article192526.
263. Limagne, Ephémérides de quatre années tragiques, III, p. 2058.
264. Limagne, Ephémérides de quatre années tragiques, III, p. 2068.
265. Limagne, Ephémérides de quatre années tragiques, III, p. 2076.
266. Dépêche de Jean d’Albis à Walter Stucki, 15 juin 1944, Fonds Jean d’Albis, AD Haute-Vienne, 24 J 5.
267. Rapport du commissaire Massiéra, 4 juillet 1944, p. 17, AD Haute-Vienne, 1517 W 424.
268. Rapport du juge de paix, 4 juillet 1944, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-00272-273. Le 23 juin, le juge de paix dénombrait déjà, au conditionnel, 240 enfants morts dans l’église (Rapport sur les événements d’Oradour-sur-Glane par le juge de paix, 23 juin 1944, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-00277. Et 04-00536).
269. Attestation de Jean Villoutreix du 11 décembre 1944, AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-00220. Etonnamment, Villoutreix indiquera avoir aussi trouvé, à cette occasion, «diverses lettres que j’ai brûlées».
270. Pauchou & Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 137-139.
271. Pauchou & Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 137.
272. Limagne, Ephémérides de quatre années tragiques, III, p. 2061.
273. Limagne, Ephémérides de quatre années tragiques, III, p. 2069.
274. Limagne, Ephémérides de quatre années tragiques, III, p. 2076.
275. C.R. de réunion des chefs de cantons, chefs de secteurs et délégués à la propagande de la section de Limoges du samedi 17 juin 1944, AD Haute-Vienne, 986 W 0258, 0013.
276. Lettre de Robert de Bary, Délégué régional à la Famille, à Monsieur le Préfet régional de Limoges, 10 juin 1944 (sic: en fait, le 16 juin 1944), CMO, 20 FP 1.
277. Déclaration de Mgr. Rastouil, 16 juin 1944, AD Haute-Vienne, 986 W 481, 0011.
278. Lecture du pasteur Albert Chaudier, 18 juin 1944, AD Haute-Vienne, 986 W 481, 0007-0012. Reproduit dans Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 164-174.
279. Discours du Préfet Marc Freund-Valade du 21 juin 1944, AJM, «Dossier Oradour», liasse VI, 04-00187. Egalement AD Haute-Vienne, 986 W 0258, 0012.
280. Note du 12 juillet 1944 au Préfet délégué, AD Haute-Vienne, 986 W 481, 0025.
281. Fouché, Oradour. La politique et la Justice, op. cit., p. 36-38.
282. Reproduit dans Centre de la Mémoire d’Oradour, La mémoire d’Oradour . Récits publiés et photographies. Catalogue de l’exposition d 28 juin au 8 septembre 1996, p. 63-66.
283. Note de l’intendant du maintien de l’ordre au Préfet régional du 22 juin 1944 et tract Le crime horrible des hitlériens à Oradour-sur-Glane, AD Haute-Vienne, 986 W 481, 00352 et suivants. Farmer, Oradour 10 juin 1944, op. cit., p. 47. Tract reproduit dans Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour, op. cit., p. 212-213 et La mémoire d’Oradour, op. cit., p. 70.
284. Note des Renseignements généraux du 30 juin 1944 et tract Un éditorial que Philippe Henriot ne fera pas. Les Huns sont passés par là, diffusé fin juin 1944, AD Haute-Vienne, 986 W 481, 0355; également AJM, «Dossier Oradour», Liasse VI, 04-00274. Reproduit dans Mouvement de Libération nationale, Les Huns à Oradour, Limoges, 1945, p. 79 et La mémoire d’Oradour, op. cit., p. 67.
285. Reproduit dans La Mémoire d’Oradour, op. cit., p. 68-69.
286. Réseau Goelette, suite de l’envoi du 25 juin 1944, p. 5, CMO, 1 FP (1-10).
287. Guéhenno, Journal des années noires, op. cit., entrée du 22 juin 1944, p. 481-482.
288. Limagne, Ephémérides de quatre années tragiques, III, p. 2094.
289. Cité dans Henri Amouroux, La Grande Histoire des Français sous l’Occupation, Paris, Robert Laffont, «Bouquins», vol. IV, 1999, p. 551.
290. Farmer, Oradour. 10 juin 1944, op. cit., p. 49.
291. Luc Boels, «Les tragédies d’Oradour et de Tulle vues par Alexandre Varenne», «Juin 1944 en Limousin», La Montagne et Le Populaire du Centre, juin 2014, p. 97.
292. Neue Zurcher Zeitung, 13 juillet 1944; New York Times, 14 juillet 1944.
293. Le 22 juin, Léon Werth note ainsi dans son Journal: «On dit que, dans un bourg de quelque quinze cents habitants, près de Tulle ou Limoges, les SS ont rabattu les hommes dans des granges, les femmes et les enfants dans l’église et les ont brûlés vifs.» Werth, Déposition, op. cit., p. 672-673 (entrée du 22 juin 1944).
294. Vercors, Les nouveaux jours. Esquisse d’une Europe, Paris, Plon, 1984, p. 45.
295. Témoignage chrétien, no 12, juillet 1944, Gallica ; Les Lettres françaises, no spécial, 1er août 1944, Gallica (voir également La mémoire d’Oradour, op. cit., p. 71-72).
296. La mémoire d’Oradour, op. cit., p. 57-58 et 75-96.
297. Poitevin, Dans l’Enfer d’Oradour, op. cit. (octobre 1944).
298. Delage, Oradour. Ville martyre, op. cit. (mars 1945)
299. Léon Groc, Oradour, Paris, Rouff, coll. «Patrie libérée», 1945.
300. Antoine Soulier, Le drame de Tulle. 9 juin 1944, Tulle, Maugein, 1946.
301. Cayrou, Journées sanglantes de Montpezat-de-Quercy (2 mai 1944) et de Perches-Haut (nuit du 6 au 7 juin 1944), op. cit.
302. Jean-Louis Jeannelle, «Pour une histoire du genre testimonial», Littérature, no 135, 2004: Fractures, ligatures, p.87-117, ici p. 101-102.
303. Edmond Calvo, La bête est morte! La guerre mondiale chez les animaux, 2e partie: Quand la bête est terrassée, Paris, G.P., 1944-1945 et Gallimard, 1995.
304. Discours du 18 septembre 1941, in De Gaulle, Discours et messages, vol. I, op. cit., p. 102-103.
305. Cette conception, qui n’est pas sans atténuer la singularité du nazisme, imprègnera notamment l’accusation portée par le ministère public français lors du procès de Nuremberg – voir Antonin Tisseron, La France et le procès de Nuremberg. Inventer le droit international, Paris, Les Prairies ordinaires, 2014, p. 158-164.
306. Annette Wieviorka, Déportation et génocide. Entre la mémoire et l’oubli, Paris, Plon, 1992 et Hachette Littératures, coll. «Pluriel», 2003, p. 321-328.
307. Tákis Láppa, I sphayí tou Distómou. Khronikó, Athènes, éditions privées, 1945, p. 23, 25, 41
308. Karl Jaspers, La culpabilité allemande, Paris, Editions de Minuit, 1948 et 1990, p. 43 (trad. de l’allemand).
309. Jeannelle, «Pour une histoire du genre testimonial», op. cit., p. 101.
310. Laurent Joly et Françoise Passera, «Se souvenir, accuser, se justifier: les premiers témoignages sur la France et les Français des années noires (1944-1949)», Guerres mondiales et conflits contemporains, 2016/3, no 263, p. 5-34.
311. Marcel Darthout, «J’ai été fusillé à Oradour-sur-Glane», France-Soir, 30 et 31 janvier et 1er février 1945.
312. Les mémoires de Mathieu Borie ne seront publiés, dans leur intégralité, que sept décennies après le drame. Baury (éd.), Oradour-sur-Glane. Le récit d’un survivant, op. cit.
313. Voir notamment Pierre Laborie, Penser l’événement, Paris, Gallimard, 2019, p. 338-359.
314. Laborie, Penser l’événement, op. cit., p. 375-378.
315. Olivier Wieviorka, La mémoire désunie. Le souvenir politique des années sombres, de la Libération à nos jours, Paris, Seuil, 2010, p. 27-66.
316. Jean-Pierre Besse et Thomas Pouty, Les fusillés. Répression et exécutions pendant l’Occupation (1940-1944), Paris, Editions de l’Atelier/Editions ouvrières, 2006, p. 19-43.
317. La Révolution a célébré ses «martyrs de la liberté» (Albert Soboul, «Sentiment religieux et cultes populaires pendant la Révolution. Saintes patriotes et martyrs de la liberté», Archives de Sciences Sociales des Religions, 1956, no 2, p. 73-87). En 1898, Louise Michel dédie son livre sur la Commune de Paris aux «martyrs de Montjuich» (Louise Michel, La Commune, éd. d’Eric Fournier et Claude Retat, Paris, La Découverte, 2015, p. 39). Et pendant la Première Guerre mondiale, les localités belges et françaises saccagées, bombardées ou massacrées par les Allemands ont été qualifiées de «villes martyres» (Marius Vachon, Les villes martyres de France et de Belgique. Statistique des villes et villages détruits par les Allemands dans les deux pays, Paris, Payot, 1915).
318. Alfred Gernoux, Chateaubriant et ses martyrs, Nantes, Editions du Fleuve, 1946.
319. Luc Capdevila, «Martyr», in François Marcot (dir.), Dictionnaire historique de la Résistance, Paris, Robert Laffont, coll. «Bouquins», 2006, p. 953-955 (p. 954 pour la citation).
320. Pieter Lagrou, Mémoires patriotiques et Occupation nazie, Bruxelles, Complexe, 2003, p. 205.
321. Wieviorka, La mémoire désunie, op. cit., p. 34-35, 45-46 et 48.
322. Laborie, Penser l’événement, op. cit., p. 375-376.
323. Garçon, Journal, op. cit., entrée du 7 octobre 1944, p. 978.
324. Voir Frédéric Le Moigne, Les évêques français de Verdun à Vatican II. Une génération en mal d’héroïsme, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2005, p. 179-196.
325. Albert Valade, Oradour. La renaissance, Neuvic-Entier, Editions de La Veytizou, 2010, p. 23.
326. Arrêté du Préfet de Haute-Vienne du 12 septembre 1944, AD Haute-Vienne, 986 W 481, img. 0838.
327. Pascal Plas, «Les associations de victimes et d’ayants droit de victimes: le cas d’Oradour-sur-Glane», https://www.unilim.fr/iirco/2016/05/11/pascal-plas-les-associations-de-victimes-et-dayants-droit-de-victimes-le-cas-doradour-sur-glane/ (11 mai 2016). Voir AD Haute-Vienne, 986 W 481, img. 1046-1061.
328. Fouché, Oradour. La politique et la justice, op. cit., p. 27. Voir également courrier de l’ANFMOG du 27 février 1945 au Préfet de la Haute-Vienne, AD Haute-Vienne, 986 W 481, img. 1064.
329. Front national, Le massacre d’Oradour-sur-Glane par les hordes hitlériennes, Limoges, Imprimerie Brégéras, décembre 1944.
330. Arts, 6 avril 1945, cité dans Bertrand Tillier, «Le monument aux martyrs d’Oradour-sur-Glane par Fenosa», Vingtième Siècle. Revue d’histoire, no 55, juillet-septembre 1997, p. 43-57.
331. Mouvement de libération nationale, Les Huns à Oradour-sur-Glane. Haute-Vienne, France, Limoges, P.E.R.F.R.A.C., janvier 1945.
332. «Va-t-on laisser salir la mémoire d’Oradour?», La Semaine Religieuse, 2 novembre 1945.
333. Comité du Souvenir, Procès-verbaux des séances du Comité actif de conservation des ruines et création d’un sanctuaire à Oradour-sur-Glane, année 1944, réunion du 21 octobre 1944, p. 3-11, AD Haute-Vienne, 986 W 481, img. 1026-1035.
334. Ibid., p. 11.
335. Crimes ennemis en France, vol. I: Oradour-sur-Glane, Paris, Archives du Service de Recherche des Crimes de Guerre nazis, Office français d’Edition, 1945.
336. Pauchou et Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit. (août 1945). L’ouvrage semble avoir été achevé en décembre 1944. Ses ébauches figurent à la cote CMO, 20 FP 13.
337. Pauchou et Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 17.
338. Pauchou et Masfrand, Oradour-sur-Glane. Vision d’épouvante, op. cit., p. 143.
339. Fouché, Oradour, op. cit., p. 219-220. Voir le courrier de la Délégation générale à l’équipement national, «Objet: Reconstruction d’Oradour s/ Glane, totalement sinistrée», 22 juillet 1944, CMO 1 ETUD 15-18.
340. Antoine Leblanc, «La conservation des ruines traumatiques, un marqueur ambigu de l’histoire urbaine», L’Espace géographique, 2010/3, vol. 39, p. 253-266. Farmer, Oradour 10 juin 1944, op. cit., p. 151-152.
341. Janet Flanner, Paris est une guerre 1940-1945, Paris, Seuil/Editions du sous-sol, 2020, 13 janvier 1945, p. 245 (trad. de l’anglais).
342. Sur les citations: «Le général de Gaulle à Limoges et à Oradour», La Gazette provençale, 5 mars 1945; «Le général de Gaulle à Oradour», L’Aube, 6 mars 1945. Sur la visite de de Gaulle à Oradour, voir Farmer, Oradour. 10 juin 1944, op. cit., p. 104-108.
343. Farmer, Oradour. 10 juin 1944, op. cit., p. 108.
344. Chevereau, 25 août 1944, Maillé…, op. cit., p. 127-136.
345. Loi no 46-986 du 10 mai 1946, Journal officiel de la République française, no 110, 11 mai 1946, p. 4035.
346. Cité dans Farmer, Oradour. 10 juin 1944, op. cit., p. 116.
347. Farmer, Oradour. 10 juin 1944, op. cit., p. 129.
348. Fouché, Oradour, op. cit., p. 243.
349. Fouché, Oradour, op. cit., p. 14.
350. Voir l’étude de Gilles Karmasyn, «La chambre à gaz du crématoire d’Auschwitz I. Le Krema I et ses transformations», https://phdn.org/negation/krema-i.html (05/07/2001 — mis à jour le 22/04/2013).
351. Lercher, Les Fantômes d’Oradour, op. cit., p. 88.
352. Cité dans Farmer, Oradour. 10 juin 1944, op. cit., 145.
353. Décision no 46 du 9 juin 1948 citant Oradour-sur-Glane à l’ordre de l’Armée, AD Haute-Vvienne, 986 W 482, img. 6.
354. Allocution du maire d’Oradour du 10 juin 1948, reproduite dans la note des Renseignements généraux de la Haute-Vienne no 1513, 10 juin 1948, AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 9-10.
355. Décret du 28 février 1949 portant nomination dans la Légion d’honneur, AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 268.
356. Texte d’une affiche de la municipalité d’Oradour reproduit dans AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 129. Voir également «La municipalité d’Oradour refuse la Légion d’honneur tant que ne seront pas châtiés les bourreaux», L’Echo-Marseillaise, 29 mai 1949, AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 135.
357. Note du Préfet de la Haute-Vienne du 27 mai 1949, AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 111.
358. Fouché, Oradour, op. cit., p. 223.
359. Communication de l’ANFMOG, 2 juin 1949, AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 2381. Egalement reproduite dans Le Populaire, 3 juin 1949, AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 131.
360. Note d’information des Renseignements généraux de la Haute-Vienne no 1685, 10 juin 1949, AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 172-173.
361. L’Humanité, 8 juin 1949.
362. Livre d’Or d’Oradour. L’engagement des intellectuels un épisode en 1949. Catalogue de l’exposition 30 Juin / 10 Septembre 1995, Centre de la Mémoire d’Oradour, 1995.
363. L’Humanité, 25 octobre 1949.
364. Note d’information des Renseignements généraux de la Haute-Vienne no 2034, 21 juin 1950, AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 289-290.
365. L’Echo du Centre, 11 juin 1951. AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 332. Voir également la note d’information des Renseignements généraux de la Haute-Vienne no 231, 9 juin 1952, AD Haute-Vienne, 986 W 481, img. 0956.
366. Le Courrier, 11 juin 1951, AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 333-334.
367. Voir Le Populaire du Centre, 19 mai 1952 et Le Monde, 20 mai 1952 AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 373 et 375 ainsi que les déclarations du Maire d’Oradour, L’Echo du Centre, 9 juin 1952, AD Haute-Vienne, 986 W 482, img. 384.
368. Commission rogatoire du 20 septembre 1944, no 249, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0490-0491.
369. Rapport du commissaire de police Arnet du 23 décembre 1944, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0226-0242 et AJM, «Dossier Oradour», Liasse V, 04-00550.
370. AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img.0456-0482.
371. Fouché, Oradour. La politique et la justice, op. cit., p. 22.
372. Desourteaux et Hébras, Oradour/Glane. Notre village assassiné, op. cit., p. 153. «L’enquêteur chargé de recueillir ma déposition, rédigée par la brigade de police judiciaire, pour les besoins de la justice tout de suite après la libération de la région (septembre 1944), ne transcrivait pas forcément ce que je lui disais, précisera Marcel Darthout en 2015. Si mon discours ne lui convenait pas parfaitement, il traduisait dans le sens qu’il voulait donner à mon propos. Cette déposition ne m’a jamais été remise!» (cité dans Baury, Oradour-sur-Glane. Le récit d’un survivant, op. cit., p. 124) Le propos ne surprendra pas les professionnels du métier judiciaire: les termes de la personne interrogée ne sont pas retranscrits mot à mot, mais dactylographiés en récit imprégné de langage judiciaire, ne retenant que les éléments utiles aux besoins de l’enquête (c’est pourquoi, à titre d’exemple intemporel, un procès-verbal mentionne le mot «véhicule» en lieu et place de «voiture» ou «auto»), avant d’être signés par le déposant.
373. «Oradout-sur-Glane (Haute-Vienne). June 10th and 11th 1944. Photos & documents assembled by E. Munn pwd SHAEF», 13 octobre 1944, source privée. Egalement reproduit dans Baury, Oradour-sur-Glane. Un crime contre l’humanité, op. cit., p. 188-241. Sur l’enquête d’Ecto Munn, voir Fouché, Oradour. La politique et la justice, op. cit., p. 60-61.
374. Sur le SRCGE, voir Claudia Moisel, Frankreich und die deutschen Kriegsverbrecher. Politik und Praxis der Strafverfolgung nach dem Zweiten Weltkrieg, Göttingen, Wallstein Verlag, 2004, p. 71-82. Faute de moyens, ce service sera dissous en 1948.
375. Fouché, Oradour. La politique et la justice, op. cit., p. 62-67. Le SRCGE est également destinataire de rapports de ses propres agents, notamment le 27 juin 1945 (AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0514-0530).
376. TMI, vol. II, p. 55-56 et 64 (acte d’accusation).
377. Official Commission Transcript, Von Runstedt, 20 June 1946, Offficial transcript of testimony for the defense of organizations, taken before a commission appointed by the international military tribunal pursuant to paragraph 4, of the order of the tribunal dated 13 march 1946, Taube Archive of the International Military Tribunal (IMT) at Nuremberg, img. 51.
378. Contre-interrogatoire du général SS Paul Hausser (inexactement orthographié Hauser), 6 août 1946, TMI, vol. XX, p. 425: «Cette localité et cette accusation, je les ai connues seulement par l’acte d’accusation, en captivité, mais auparavant, je n’ai eu aucune connaissance de ces faits. Il s’agit vraisemblablement d’une compagnie isolée de cette division qui a été mise en ligne par les ordres locaux des Feldkommandanturen.» Voir également p. 441: «C’est par l’Acte d’accusation que j’ai entendu parler de cet événement. Je n’ai rien entendu dire d’autre. Il s’agit sans doute d’une aberration individuelle d’un chef de compagnie. C’était à une date précédant mon commandement, mais si cela était venu à mes oreilles, j’aurais donné au chef de division, s 'il avait été sous mes ordres, l’ordre d’ouvrir une procédure et de faire une enquête régulière.»
379. TMI, vol. XXII, p. 548.
380. Moisel, «Les procès pour crimes de guerre allemands en France après la Seconde Guerre mondiale», op. cit., p. 99.
381. Moisel, «Les procès pour crimes de guerre allemands en France après la Seconde Guerre mondiale», op. cit., p. 100 et Frankreich und die deutschen Kriegsverbrecher, op. cit., p. 8.
382. Adalbert Rückerl, Die Strafverfolgung von NS-Verbrechen 1945-1978. Eine Dokumentation, Heidelberg/Karlsruhe, C.F. Müller, 1979, p. 28-32.
383. Moisel, «Les procès pour crimes de guerre allemands en France après la Seconde Guerre mondiale», op. cit., p. 100 et Frankreich und die deutschen Kriegsverbrecher, op. cit., p. 8.
384. Le Monde, 12 octobre 1954.
385. Tisseron, La France et le procès de Nuremberg, op. cit., p. 81-83.
386. Moisel, «Les procès pour crimes de guerre allemands en France après la Seconde Guerre mondiale», op. cit., et Frankreich und die deutschen Kriegsverbrecher, op. cit. ainsi que Tisseron, La Francce et le procès de Nuremberg, op. cit., p. 320-329.
387. PV d’audition de Louis H., 14 décembre 1944, 1207/85, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0541-0544; PV d’audition d’Alfred S., 14 décembre 1944, no 1207/86, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 0545-0548; PV d’audition d’Auguste L., 15 juin 1945, no 1006, AJM, «Dossier Oradour», liasse XIII, 07-00518; auditions de Paul G., 8 et 11 septembre 1945, AD Haute-Vienne1517 W 424, img. 1290-1308; auditions de Jean-Pierre E., 22 juillet et 24 septembre 1945, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. 1310-1322.
388. Déclaration volontaire du prisonnier de guerre Unterscharführer Georg Boos, 21 avril 1947, AJM, «Dossier Oradour», Liasse XIII, img. 07-00576-00578.
389. Voir notamment Eugène Riedweg, Les «malgré nous». Histoire de l’incorporation de force des Alsaciens-Mosellans dans l’armée allemande, Mulhouse, Ed. du Rhin, 1995 et Strasbourg, La Nuée Bleue, 2008. Sur les engagés volontaires, voir Geoffrey Diebold, «Les volontaires alsaciens dans les troupes du IIIe Reich», Raison présente, 2019/3, no 211, p. 79 à 87. Voir également le témoignage de Guy Sajer, Le soldat oublié, Paris, Robert Laffont, 1967 et Livre de Poche, 1971.
390. Tambov. Le camp des «malgré nous» alsaciens et mosellans prisonniers des Russes, Strasbourg, La Nuée Bleue, 2010 (ouvrage collectif).
391. Voir Jean-Laurent Vonau, L’épuration en Allsace. La face méconnue de la Libération 1944-1953, Strasbourg, La Nuée Bleue/DNA, 2005.
392. Elizabeth Vlossak, «Traitors, Heroes, Martyrs, Victims? Veterans of Nazi ‘Forced Conscription’ from Alsace and Moselle», in Jan Rüger et Nikolaus Wachsmann (dir.), Rewriting German History. New Perspectives on Modern Germany, Londres/New York, Palgrave Macmillan, 2015, p. 103-104.
393. Fouché, Oradour. La politique et la justice, op. cit., p. 86-97 et 113-115; Jean-Louis Vonau, Le procès de Bordeaux. Les Malgré-Nous et le drame d’Oradour, Strasbourg, Editions du Rhin/La Nuée Bleue, 2003, p. 25-28.
394. Fouché, Oradour. La politique et la justice, op. cit., p. 93.
395. Lettre du Préfet de la Haute-Vienne, 30 juillet 1946, AD Haute-Vienne, 986 W 481, img. 0844.
396. Les preuves manquent, à ce jour, pour incriminer les services américains. Voir Bruno Kartheuser, Les pendaisons de Tulle, vol. IV: Crime sans châtiment, Neundorf, Krautgarten, 2008, p. 305-306 et Andrea Erkenbrecher, Oradour und die Deutschen. Geschichtsrevisionismus, strafrechtliche Verfolgung,Entschädigungszahlungen und Versöhnungsgesten ab 1949, Oldenbourg, De Gruyter, 2023, p. 181-182.
397. Douglas W. Hawes, Oradour. Le verdict final, Paris, Seuil, 2009, p. 313 (trad. de l’anglais).
398. PV d’information, Tribunal militaire de Bordeaux, 4 mai 1949, AD Haute-Vienne, 1517 W 424, img. img. 1071-1073.
399. La Croix, 21 juin 1951.
400. Loi no 48-1416 du 15 septembre 1948 modifiant et complétant l’ordonnance du 28 août 1944 relative à la répression des crimes de guerre.
401. Sur le vote de la loi, voir Fouché, Oradour. La politique et la justice, op. cit., p. 97-113 et Vonau, Le procès de Bordeaux, op. cit., p. 29-38.
402. Sur ces péripéties judiciaires, voir Fouché, Oradour. La politique et la justice, op. cit., p. 115-126.
403. Paris-presse – L’Intransigeant, 12 décembre 1952.
404. Fouché, «Le centre de la mémoire d’Oradour», op. cit., p. 137.
405. Le Monde, 8 juin 2004.
406. Robert Hébras, Oradour-sur-Glane. Le drame heure par heure, Montreuil-Bellay, CMD/Robert Hébras, 1992.
407. Jean-Jacques Fouché, «Le centre de la mémoire d’Oradour», Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 2002/1, no 73, p. 125-137, ici p. 128. Voir CMO, 1 ETUD 14 (3).
408. Hébras, Avant que ma voix ne s’éteigne, op. cit., p. 105-106.
409. Desourteaux et Hébras, Oradour/Glane. Notre village assassiné, op. cit.
410. Le Monde, 14 juin 1998; Libération, 16 juillet 1999.
411. Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 16 octobre 2013, pourvoi no 12-35.434, publié au Bulletin: https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000028094639.
412. Plas, «Oradour, de la mémoire à l’Histoire», in Garnier/Leleu/Quellien (dir.), La répression en France, op. cit., p. 341.
413. Voir d’Erkenbrecher, Oradour und die Deutschen, op. cit., ainsi que Bernhard Brunner, Der Frankreich-Komplex. Die nationalsozialistischen Verbrechen in Frankreich und die Justiz in der Bundesrepublik Deutschland, Göttingen, Wallstein, 2004. En français, Bernard, Oradour-sur-Glane, op. cit., p. 249-254.
414. Voir Henry Leide, NS-Verbrecher und Staatssicherheit. Die geheime Vergangenheitspolitik der DDR, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2005.
415. C. F. Rüter (éd.), DDR-Justiz und NS-Verbrechen, vol. I: Verfahren Nr.1001-1030 (1975–1989), Lfd.Nr.1009a, Stadtgericht Berlin, 07.06.1983, p. 277-291 (Amsterdam, 2002). En ligne…
416. Ces deux témoins sont identifiés et nommés dans Hauptabteilung IX/AG, VgM, «Strafrechtliche Einschätzung zum Verbrechenskomplex “Oradour-sur-Glane”», non daté, CMO, A 3 A. Voir également Erkenbrecher, Oradour und die Deutschen, op. cit., p. 368-371; Leide, NS-Verbrecher und Staatssicherheit, op. cit., p. 138-139.
417. Témoignage de Barth du 16 juillet 1981, reproduit dans Picaper, Les ombres d’Oradour, op. cit., p. 147-155 et CMO, A 3 A. Barth y a d’abord tenté de faire croire que son supérieur Diekmann se serait rendu à Oradour pour retrouver «son ami» Kämpfe avant d’admettre que l’extermination a été planifiée par le commandement de la division, en représailles de la capture de Kämpfe (voir notamment un témoignage de Barth postérieur au procès, 11 octobre 1983, p. 5, CMO, A 3 A). Voir la synthèse d’Erkenbrecher, Oradour und die Deutschen, op. cit., p. 356-359.
418. Hébras, Avant que ma voix ne s’éteigne, op. cit., p. 100-101.
419. Claudia Moisel, Frankreich und die deutschen Kriegsverbrecher. Politik und Praxis der Strafverfolgung nach dem Zweiten Weltkrieg, Göttingen, Wallstein Verlag, 2004.
420. Bernhard Brunner, Der Frankreich-Komplex. Die nationalsozialistischen Verbrechen in Frankreich und die Justiz in der Bundesrepublik Deutschland, Göttingen, Wallstein, 2004.
421. Henry Leide, NS-Verbrecher und Staatssicherheit. Die geheime Vergangenheitspolitik der DDR, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2005.
422. Ahlrich Meyer, L’occupation allemande en France 1940-1944, Toulouse, Privat, 2002 (trad. de l’allemand).
423. Peter Lieb, Konventioneller Krieg oder NS-Weltanschauungskrieg? Kriegführung und Partisanenbekämpfung in Frankreich 1943/44, Munich, Oldenburg, 2006.
424. Andrea Erkenbrecher, Oradour und die Deutschen. Geschichtsrevisionismus, strafrechtliche Verfolgung,Entschädigungszahlungen und Versöhnungsgesten ab 1949, Oldenbourg, De Gruyter, 2023.
425. Jean-Paul Picaper, Les ombres d’Oradour. 10 juin 1944, Paris, L’Archipel, 2014.
426. Jean Bardet (éd.), Cahiers de jeunesse de Denise Bardet. Institutrice à Oradour-sur-Glane. Le 10 juin 1944, La Geneytouse, Lucien Souny, 2002.
427. Michel Bélivier et Benoît Sadry, Oradour-sur-Glane. Regards et histoire, Oradour-sur-Glane, La Maison d’Oradour, 2007,
428. Le Populaire du Centre, 5 octobre 2020: https://www.lepopulaire.fr/oradour-sur-glane-87520/actualites/l-historien-david-ferrer-revull-raconte-comment-il-a-retrouve-la-643e-victime-du-massacre-d-oradour-sur-glane_13847570/.
429. Robert Pike, Silent Village. Life and Death in Occupied France, Cheltenham, The History Press, 2021, 2022 et 2024. Trad. française: Oradour s’est tu. Le destin tragique d’un village français 10 juin 1944, Paris, Flammarion, 2024.
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