Cliquez pour suivre le lien. [Note de PHDN] L’original en Anglais, «Historical Note on the Jaeger Report» fait partie du site du Holocaust History Project. 1. Roland Headland, Messages of murder, Farleigh Dickenson University Press, 1992, p. 155. 2. French L. MacLean, The Field Men, Schiffer Military History Press, 1999, p. 13. 3. La résistance juive a en fait débuté avec une déclaration du Nouvel An 1942, par Abba Kovner. Elle survient après la période couverte par le rapport Jäger. Un récit complet de la réponse de Gens à l’occupation et à la décision éventuelle de commencer un mouvement de résistance se trouve dans Raul Hilberg, Perpetrators, Victims, Bystanders, Harper Collins, New York, 1992. 4. Un récit de la façon dont les soldats lituaniens ont participé au meurtre de masse de la population juive se trouve dans l’affaire U.S. contre Stelmokas 100 F. 3rd 302 (3rd Cir.; 1996). Stelmokas était un officier de les troupes lituaniennes assignées à un des forts autour de Kaunas. Stelmokas a émigré aux Etat-Unis après la guerre et a été naturalisé citoyen américain. Au cours de cette action judiciaire victorieuse, les Etats-Unis lui ont retiré sa citoyenneté. La décision était fondée en grande partie sur les informations trouvées dans le rapport Jäger. Par la suite, une seconde affaire a été documentée contre Stelmokas afin de l’extrader en Lituanie pour le procès. Les Etats-Unis gagnèrent à nouveau mais l’affaire a été en appel. Jonas Stelmokas est mort en 1999 avant qu’une décision soit prise en appel. 5. Headland, op. cit., p. 155. 6. 22 officiers des Einsatzgruppen ont été jugés pour leurs crimes dans l’affaire «Etats-Unis contre Otto Ohlendorf, et al.» en 1946. Ils ont tous été reconnus coupables et les leaders condamnés à mort. Le juge Michael Musmanno de la cour suprême de Pennsylvanie présidait le procès. On peut lire son jugement final en ligne sur le site Einsatzgruppen de Ken Lewis. Le juge Musmanno, qui a déposé comme témoin expert des Einsatzgruppen au procès d’Adolphe Eichmann a également écrit un excellent récit du procès, The Eichmann Kommandos, Peter Davies, Londres, 1962. 7. La décision de la Cour fédérale n’a pas été publiée. 8. Headland, op. cit., p. 187-190.

Introduction historique sur le rapport Jäger*

Par Yale F. Edeiken

auteur d’«Une introduction aux Einsatzgruppen»

Traduction, C.B. © PHDN, 2009 - tHHP, 2002
Reproduction interdite par quelque moyen que ce soit

Dans Messages of murder, une étude sur les rapports des Einsatzgruppen, Ronald Headland écrit : «Le rapport Jäger ne fait que quelques pages, mais en ce qui concerne l’horreur de sang-froid, la dépravation ahurissante qui laisse le lecteur figé et incrédule quant à l’enregistrement ordonné de telles atrocités, ce rapport est sans égal parmi tous les rapports des Einsatzgruppen.»1. Il a été écrit à la demande de Walter Stahlecker, le commandant de l’Einsatzgruppe A, par Karl Jäger, le chef du commando 3, une des sous-unités de l’Einsatzgruppe A.

L’Einsatzgruppe A est celui des quatre Einsatzgruppen qui opéraient derrière les lignes pendant que la Wehrmacht avançait dans l’Union soviétique, dont nous connaissons le mieux la composition. A l’époque de l’invasion de l’Union soviétique, l’Einsatzgruppe A se composait de 990 hommes organisés en un quartier général et quatre sous-groupes : Les Sonderkommandos 1A et 1B et les Einsaztcommandos 2 et 3. L’Einsatzkommando 3, que Jäger dirigeait, tirait ses 141 hommes de différentes formations de l’armée allemande et des institutions nazies. Le tableau de service inclut2 :

Waffen-SS32
Chauffeurs34
Administration1
SD10
Police criminelle10
Police d’Etat29
Police auxiliaire15
Auxiliaires féminines  1
Traducteurs8
Opérateur radio1

En juillet 1941, l’Einsatzkommando 3 a été chargé de prendre le relais des opérations de tuerie dans la région lituanienne de Vilna-Kaunas, à la suite de l’Einsatzkommando 2 (Einsatzgruppe A) et de l’Einsatzkommando 9 (Einsatzgruppe B). Cette région contenait la plus grande et la plus influente communauté juive de la Baltique. La communauté, célèbre pour ses études et son érudition, avait produit le «Gaon de Vilna», un des plus grands penseurs juifs du XIXe siècle. Il n’y avait pas d’activités de résistance dans la région grâce aux efforts de Jakob Gens, le chef du ghetto juif de Vilna, qui cherchait constamment des accomodements avec les occupants3. La tâche de l’Einsatzkommando 3 était de détruire cette communauté. Comme le détail le rapport Jäger, ils la réalisèrent en assassinant plus de 135 000 personnes dans les cinq mois d’opérations couverts par le rapport.

Il faut noter que l’Einsatzkommando ne travailla pas seul. Des détachements des Sonderkommandos 1B (Einsatzgruppe A) furent également détachés dans cette région. La réaction des Lituaniens fut plus perturbante. Comme le note le rapport Jäger, une partie des assassinats fut perpétrée par des «milices» lituaniennes et des «partisans» même avant que l’Einsatzkommando 3 ne commence ses opérations. Les forces lituaniennes ont continué à assister l’Einsatzkommando 3 pendant la période couverte par le rapport Jäger. Cette coopération consista à encercler les Juifs et à garder les ghettos, tout comme à participer aux massacres réels. Les Lituaniens étaient particulièrement actifs à Kaunas qui était entourée d’une série de forts où l’essentiel des tueries a eu lieu. Ces forts étaient attribués à des soldats lituaniens coopérant avec les forces du Troisième Reich et ces soldats prirent une part active dans les opérations4.

En réponse à la demande du commandant, Jäger compose son rapport de détails laconiques à propos des meurtres commis par ses troupes. Seules cinq copies de ce rapport existaient et parmi elle, seule la quatrième a survécu. Elle était localisée dans les Archives centrales lituaniennes à Vilnius5. Bien qu’il ait été découvert trop tard pour être utilisé dans le procès de Nuremberg devant le tribunal militaire international et dans le jugement des commandants des Einsatzgruppen dans les procès ultérieurs6, le rapport Jäger a été utilisé dans plusieurs autres procédures légales dans plusieurs pays incluant l’Allemagne, le Canada et les Etats-Unis. L’usage le plus récent du rapport Jäger date de l’affaire «U.S. contre Stelmokas» 100 F.3rd 302 (3rd Cir.; 1996). Pendant le procès devant la cour fédérale américaine pour le district est de Pensylvanie7, le rapport Jäger a été accepté comme authentique et fiable malgré les objections de la défense. On peut jauger l’impact du rapport Jäger par la déclaration d’un des juges de la cour d’appel qui a étudié le document. «Le colonel Jäger rapporte les exécutions de milliers de Juifs et de centaines d’autres d’une façon tellement impersonnelle, prosaïque et avec tellement de fierté que son récit laisse le lecteur en état de choc dû à l’horreur.» (100 F.3rd 302, 325). Comme la cour l’a noté dans ce cas, il n’y a pas de doute sur l’authenticité et la fiabilité du rapport.

Ni Jäger ni Stahlecker ne furent jugés pour leurs crimes. Stahlecker a été mortellement blessé par des partisans soviétiques en mars 1942. Jäger a survécu à la guerre et a vécu en Allemagne jusqu’à ce que son rapport soit découvert. Arrêté et accusé pour ses crimes, Karl Jäger s’est suicidé en prison pendant qu’il attendait son procès.

Le rapport Jäger n’est pas seulement authentique mais constitue un des documents les plus importants sur l’Holocauste. Il donne à l’historien un regard précis sur les procédures réelles suivies par les Einsatzgruppen et sur la fierté qu’ils ressentaient à propos de leur travail8. Aucun autre document connu ne présente un récit aussi détaillé de la croissance régulière et constante du nombre de victimes à mesure que l’Holocauste progressait. Pour le profane, le rapport Jäger — avec son récit précis et dépassionné du meurtre de masse — aide à faire de l’assassinat de sang-froid et prémédité de plus d’un million d’êtres humains par les Einsatzgruppen une réalité terrifiante.


Lire le rapport Jäger 


Notes.

* [Note de PHDN] L’original en Anglais, «Historical Note on the Jaeger Report» fait partie du site du Holocaust History Project.

1. Roland Headland, Messages of murder, Farleigh Dickenson University Press, 1992, p. 155.

2. French L. MacLean, The Field Men, Schiffer Military History Press, 1999, p. 13.

3. La résistance juive a en fait débuté avec une déclaration du Nouvel An 1942, par Abba Kovner. Elle survient après la période couverte par le rapport Jäger. Un récit complet de la réponse de Gens à l’occupation et à la décision éventuelle de commencer un mouvement de résistance se trouve dans Raul Hilberg, Perpetrators, Victims, Bystanders, Harper Collins, New York, 1992.

4. Un récit de la façon dont les soldats lituaniens ont participé au meurtre de masse de la population juive se trouve dans l’affaire U.S. contre Stelmokas 100 F. 3rd 302 (3rd Cir.; 1996). Stelmokas était un officier de les troupes lituaniennes assignées à un des forts autour de Kaunas. Stelmokas a émigré aux Etat-Unis après la guerre et a été naturalisé citoyen américain. Au cours de cette action judiciaire victorieuse, les Etats-Unis lui ont retiré sa citoyenneté. La décision était fondée en grande partie sur les informations trouvées dans le rapport Jäger. Par la suite, une seconde affaire a été documentée contre Stelmokas afin de l’extrader en Lituanie pour le procès. Les Etats-Unis gagnèrent à nouveau mais l’affaire a été en appel. Jonas Stelmokas est mort en 1999 avant qu’une décision soit prise en appel.

5. Headland, op. cit., p. 155.

6. 22 officiers des Einsatzgruppen ont été jugés pour leurs crimes dans l’affaire «Etats-Unis contre Otto Ohlendorf, et al.» en 1946. Ils ont tous été reconnus coupables et les leaders condamnés à mort. Le juge Michael Musmanno de la cour suprême de Pennsylvanie présidait le procès. On peut lire son jugement final en ligne sur le site Einsatzgruppen de Ken Lewis :http://www.einsatzgruppenarchives.com/. Le juge Musmanno, qui a déposé comme témoin expert des Einsatzgruppen au procès d’Adolphe Eichmann a également écrit un excellent récit du procès, The Eichmann Kommandos, Peter Davies, Londres, 1962.

7. La décision de la Cour fédérale n’a pas été publiée.

8. Headland, op. cit., p. 187-190.

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