Les amis de Rassinier
Henry Coston
On peut sans hésiter qualifier Henry Coston d’antisémite professionnel et ultra-virulent. Pendant plus de 70 ans, jusqu’à sa mort en juillet 2001, il n’a cessé sa propagande de haine. Repreneur, en 1930, avec un autre antisémite hystérique, Jacques Ploncard, du journal de Drumont, La Libre Parole, le Coston d’avant-guerre se faisait remarquer par la distribution de tracts reproduisant au verso un billet de 100 frs et au recto un texte antisémite1.
En 1930 il avait créé les «jeunesses anti-juives» dont le programme comportait l’exclusion des Juifs de la communauté française et la spoliation de leurs biens2. Il allait créer également en 1933 un parti politique, «explicitement national-socialiste»3. L’objectif de l’organisation de Coston, le Francisme, mentionne explicitement «la sauvegarde de la race française»4. En 1936, il est candidat à la députation à Oran. Il se présente sous l’étiquette «candidat antisémite»5.
A partir de 1934, il fut en relation avec le centre allemand de propagande anti-juive d’Erfurt, la fameuse Weltdienst. En fait Coston était probablement vendu à la Weldienst, l’organisme nazi de propagande antisémite, à visée internationale. Il était perçu à l’époque par les services allemands comme un «authentique idéaliste national-socialiste». Le colonel Fleichauer, directeur de la Weldienst, écrivait en février à l’idéologue nazi Alfred Rosenberg:
«Les royalistes peuvent être éventuellement antijuifs, mais, pour le moment, ils sont réactionnaires et chauvins. Il ne faut pas s’y fier. Les catholiques aussi. Seuls les gens de Coston se sont mis au-dessus de tout cela et pourraient devenir des alliés précieux pour réaliser ce que le Führer propose comme but.6»
Et de fait, La Weldienst verserait de l’argent à Coston pour sa propre propagande antisémite. En 1934 il avait été reçu par le gauleiter de Franconie, l’antisémite fanatique Julius Streicher7. Il édita, entre autres, le trop célèbre faux antisémite tsariste, les Protocoles des sages de Sion8.
Le Bulletin d’information anti-maçonnique qu’il publie affirme: «Pour Henry Coston, anti-sémite [sic] et anti-maçon de la première heure, la lutte anti-maçonnique et anti-juive n’est pas un vain mot»9.
En 1973, Coston déclarait, à propos de Louis Darquier (auto-proclamé “de Pellepoix”), qui avait été, pendant la guerre, le deuxième directeur du Commissariat général aux questions juives, le plus virulent et pro-allemand:
«Darquier de Pellepoix! Je lui ai appris tout ce qu’il sait. Quand il est venu nous voir après les émeutes de 1934, il n’y connaissait rien à l’antisémitisme. C’est moi qui lui ai fourni les livres et les pamphlets nécessaires10»
L’influence de Coston en l’occurence semble avoir été efficace. Lors de la même interview, Coston déclarait encore:
«il [Darquier] exigeait dès 1937 qu’ils [Les Juifs, principalement étrangers et les plus démunis] soient ou expulsés ou exécutés […] Et il fit les deux.11»
Pendant la guerre, Coston fut vice-président de l’association des journalistes anti-juifs12. Il multiplie alors les ouvrages anti-maçonniques et antisémites, relevant de diverses théories du complot —; ce serait sa spécialité après-guerre13. Il participait à nombres de publications, comme Au pilori, qui faisait de la haine antisémite leur fond de commerce. Certaines de ces feuilles étaient contrôlées par les nazis. En 1944, Coston était la cheville ouvrière d’une brochure antisémite intitulée Je vous hais, «la publication la plus violemment antisémite de la période de l’occupation»14. Dans cette brochure, Coston faisait l’apologie des camps de concentration15.
En août 1944, Coston fuit en Allemagne. Il est arrêté en Autriche en 1946, jugé en 1947, condamné aux travaux forcés à perpétuité, élargi au début des années 1950, gracié en 195216.
Après guerre, Coston a repris la même propagande, édulcorée dans la forme, mais identique sur le fond. Il a écrit dans Jeune Nation, Défense de l’Occident (la revue de Bardèche), Carrefour, Europe Action, etc. L’infatigable Coston a été plus récemment chroniqueur à Présent puis à National-Hebdo.
En 1954, Rassinier sollicite l’alter-ego de Henry Coston, son épouse Gilberte Coston, pour qu’elle lui commande, via son entreprise de diffusion, le «Club national des lecteurs», des exemplaires de son Mensonge d’Ulysse. L’affaire se fait et on retrouve Rassinier lors d’une réception pour le premier anniversaire du «Club», en compagnie de Henry Coston, Pierre-Antoine Cousteau, Jacques Benoist-Méchin, René Binet, Lucien Rebatet17, la fine fleur du racisme et de l’antisémitisme collaborationniste! Coston et Rassinier allaient nouer de solides liens. Dès 1955, Coston rééditait le Mensonge d’Ulysse. En 1961, il publierait la cinquième édition ainsi que Ulysse trahi par les siens.
Coston publia également des articles de Rassinier dans sa revue Lectures françaises, organe paranoïaque qui prétendait répertorier «tous les faits tendant à prouver que la puissance économique et financière est aux mains des Juifs […] que les les états sont peu ou prou, soumis à la volonté d’un lobby pro-sionniste […]»18.
Rassinier participa, sous le pseudonyme de J.-P. Bermont, au livre de Coston parue en 1960, Partis Journaux et hommes politiques d’hier et d’aujourd’hui19.
Quand Rassinier se piqua d’interprétation économique, il ne fit que piller allègrement, en les reformulant des pamphlets antisémites de Coston20, notamment, Les financiers qui mènent le Monde, publié en 1955. Pour Florent Brayard, c’est à partir de sa rencontre avec Coston que Rassinier «se mit à croire à la réalité d’un complot juif mondial contre la paix»21.
Bibliographie
- Henri Minczeles, «Henry Coston, profession: antisémite», Revue d’Histoire de la Shoah, 2002/2, no. 175. En ligne…
- Pierre Assouline, «Henry Coston, itinéraire d’un antisémite», L’Histoire, octobre 1991, p. 57.
- Michaël Lenoire, «Notice biographique de Coston», dans L’Antisémitisme de Plume, 1940-1944 études et documents, sous la direction de Pierre-André Taguieff, Berg International, 1999, p. 370-383.
Notes.1. Paul J. Kingston, Anti-semitism in France during the 1930s, Organisations, Personalities and Propaganda, University of Hull Press, 1983, p. 44
2. Michaël Lenoire, «Notice biographique de Coston», dans L’Antisémitisme de Plume, 1940-1944 études et documents, sous la direction de Pierre-André Taguieff, Berg International, 1999, p. 372
3. Florent Brayard, Comment l’idée vint à M. Rassinier. Naissance du révisionnisme, Fayard, 1996, p. 241
4. Cité par Richard Millman, La question juive entre les deux guerres. Ligues de droite et antisémitisme en France, Armand Colin, 1992, p. 195.
5. Florent Brayard, Comment l’idée vint à M. Rassinier…, op. cit., p. 241.
6. Ibid.
7. Michaël Lenoire, «Coston…», op. cit., p. 373.
8. Michaël Lenoire, «Coston…», op. cit., p. 375.
9. Jean-Yves Camus et René Monzat, Les droites nationales et radicales en France, Presses universitaires de Lyon, 1992, p. 78.
10. Frederick Busi, «In the Lair of the Fascist Beast», Midstream, vol. XIX, n°2, février, 1973, p. 22.
11. Ibid.
12. Michaël Lenoire, «Coston…», op. cit., p. 375.
13. Quelques titres: Le Cartel Maçonnique contre la France, La Franc-Maçonnerie, voilà l’ennemi, Algerusalem, Les Juifs contre la France, Les Juifs et leurs crimes, etc. Voir liste dans Florent Brayard, op. cit., p. 242.
14. Michaël Lenoire, «Coston…», op. cit., p. 379.
15. Florent Brayard, op. cit., p. 242.
16. Florent Brayard, op. cit., p. 243.
17. Florent Brayard, op. cit., p. 239.
18. Camus, Monzat, p. 467.
19. Florent Brayard, op. cit., p. 275.
20. Nadine Fresco, Fabrication d’un antisémite, Seuil, 1999, p. 551 et suiv.
21. Florent Brayard, op. cit., p. 394.
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25/11/99 —; mis à jour le 15/08/2001