L'invention d'une doxa néo-fasciste : le rôle de l'avant-garde nationaliste-révolutionnaire
Idéologie négationniste, propagandes anti-américaine, anti-immigration, anti-juive
Par Nicolas Lebourg
Domitia*, no 1, octobre 2001.
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1. Introduction
La fin de la Seconde Guerre mondiale et la révélation de l'existence des camps d'extermination avaient placé l'extrême droite sous une opprobre morale des plus difficiles à assumer : elle était le champ idéologique dont l'exercice mena à forger le mot génocide, à créer la notion de crime contre l'humanité. La mise en pratique de l'assassinat de masse a délégitimé la théorie raciste, mais, en France, c'est surtout le discours ultra-nationaliste de l'extrême droite qui est mis en cause : collaboratrice du IIIe Reich elle est montrée du doigt en tant que traître à la Nation. Elle ne paraît plus habilitée à donner des leçons patriotiques au PCF qui, dès la Libération, place sa propagande sous le signe de la France et du « parti des fusillés ». Maurice Bardèche, beau-frère de Brasillach, qui s'auto-définira une décennie après comme écrivain fasciste, se doit de reconnaître que l'esprit du temps veut que Quiconque n'a pas été un résistant a été un mauvais Français1.
La condamnation morale et civique qui frappe l'extrême droite a eu pour effet de frapper d'anathème son idéologie. Si elle veut être efficace, il n'est plus possible pour elle de recourir à son moteur naturel, à son élément premier, qu'était l'antisémitisme. Exsangues, les néo-fascistes voient leurs rangs se re-développer avec le refus du processus de décolonisation. L'échec sera flagrant mais il mène d'aucuns à s'interroger sur la nature de leur mouvement, toujours du camp des vaincus. Ses intellectuels se sont chargés de réaliser une restructuration théorique et propagandiste, tant il était certain que les mêmes vieux slogans ne pouvaient être réutilisés directement -d'autant plus que la législation antiraciste de 1881 devait être complétée en 1949, 1966, 1972, et 1990. Ceux qui choisirent d'importer en France l'étiquette de nationaliste-révolutionnaire (NR) jouèrent en ce sens un rôle de premier plan, quelque peu occulté par la masse des recherches et publications relatives au GRECE et au Front National2.
En s'appuyant largement sur les langages d'autres horizons politiques que les leurs, plus légitimes, ils allaient pouvoir mettre en place un nouveau mythe mobilisateur, au sens sorélien d'un tel terme3. Pour cela, il leur faudra réhabiliter leur courant politique, acquérir une tactique et une stratégie, c'est-à-dire une propagande apte à séduire les masses et une idéologie revitalisée.
Notes.1. Maurice Bardèche, Lettre à François Mauriac, La Pensée Libre, 1947, p. 14.2. Les principaux mouvements NR français sont issus les uns des autres, ce sont : les Groupes Nationalistes-Révolutionnaires (GNR ; 1976), le Mouvement Nationaliste Révolutionnaire (MNR, 1979), Troisième Voie (TV ; 1985), Nouvelle Résistance (1991) et Unité Radicale (UR ; 1998). L'attitude du GUD dépend des époques, il participe actuellement à UR.
3. En ces Réflexions sur la violence (1906), Sorel définit le mythe comme une expression de volonté mobilisatrice, un élément irréfutable, traduction des convictions d'un groupe en langage de mouvement.
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05/01/2002