L’incompétence scientifique
et les falsificationsde Germar Rudolf
A propos de l'évaporation de l'acide cyanhydrique
du Zyklon Bpar Gilles Karmasyn
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Introduction Germar Rudolf est un négationniste allemand qui a une formation de chimiste. Très tôt associé à l’extrême droite allemande la plus dure, il produit au début des années 1990 un «rapport» démontrant prétendument l’impossibilité de gazages d’êtres humains à Auschwitz, traduit dès 1996 en français et publié par le groupe nazi belge, VHO. Contrairement à ce que lui-même et les thuriféraires négationnistes affirment, Germar Rudolf ne fait pas de véritable science et use des procédés négationnistes habituels, mensonges et falsifications diverses, et ce dès ses premières publications. On peut trouver un profil et une biographie complète dans la présente section.
Les «démonstrations» de Germar Rudolf ont très tôt été réfutées en anglais, notamment par un ingénieur chimiste professionnel (ce que n’est pas Germar Rudolf), Richard J. Green:
https://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/chemistry/
https://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/chemistry/blue/
https://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/chemistry/not-the-science/La seconde étude mentionnée ci-dessus a été traduite en français: https://phdn.org/negation/rudolf/green_cyanures/
Elle est très importante, car le postulat principal de Rudolf s’y trouve réfuté: Rudolf avait fait analyser des échantillons prélevés (illégalement) à Auschwitz afin d’y rechercher la présence d’un dérivé spécifique de l’acide cyanhydrique, la famille des ferrocyanures d’hydrogène, communément appelé bleus de Prusse. N’en trouvant pas dans les échantillons prélevés (dit-il) dans les ruines des anciennes chambres à gaz, Rudolf prétend en déduire l’absence de gazages à l’acide cyanhydrique dans ces lieux. Le raisonnement et la conclusion sont faux pour la raison suivante: il n’est nullement établi (et plutôt très improbable) que du bleu de Prusse doive nécessairement se former en cas d’utilisation d’acide cyanhydrique. C’est ce qu’a démontré Richard J. Green. Il faut souligner que des scientifiques polonais ont retrouvé des quantités significatives de résidus d’acide cyanhydrique dans les anciennes chambres à gaz, mais en ciblant des résidus n’appartenant pas à la famille des bleus de Prusse. Cela corrobore évidemment la réalité des assassinats de masse par gazage commis en ces lieux, connue tant par les documents que par les témoignages.
Cela suffit à disqualifier complètement la production de Rudolf. Néanmoins, Germar Rudolf a produit quantité d’autres affirmations et «analyses» dans son rapport, allant toujours dans le sens d’une impossibilité des gazages. Si certains des «arguments» techniques de Rudolf ont été réfutés en anglais, on ne dispose pas sur le web d’article en français examinant d’autres points de son «rapport». C’est l’objet du présent texte, consacré aux affirmations de Germar Rudolf sur la vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique. Sur ce seul sujet il illustre en quoi Rudolf est un manipulateur que la vérité n’intéresse pas, prêt à falsifier les données scientifiques pour avancer son discours négationniste. Nous montrerons qui plus est que Germar Rudolf est scientifiquement incompétent.
Il convient de souligner qu’il ne s’agit nullement ici d’établir la réalité du génocide des Juifs, parfaitement étudiée, décrite, documentée, mais bien de démontrer que même le «fleuron» des négationnistes «scientifiques» est un vulgaire imposteur.
Nous prenons appui pour cette étude sur l’édition française du «rapport Rudolf» publiée par l’officine nazie belge VHO1 en 1996, traduction très proche de l’original allemand de 1993. Rudolf n’a cessé de republier, modifier, allonger son rapport depuis dans des éditions (au moins huit en 2024) dans lesquelles il a notamment camouflé plus ou moins subtilement, voire supprimé certaines de ses premières manipulations et falsifications (mais pas toutes, loin de là), évidemment renseigné par les nombreuses démonstrations relatives à celles-ci, sans jamais en prendre acte, évidemment. Quelques négationnistes ont prétexté de ces éditions ultérieures pour prétendre que les critiques que nous portons ici contre le «rapport Rudolf» seraient infondées (sinon «mensongères»). Ce procédé consistant à faire l’économie de notre mention explicite de la version sur laquelle nous nous appuyons (la première, la plus «sincère», celle qui a fondé l’entrée fracassante — on devrait dire fracassée — de Rudolf dans le cercle des propadandistes négationnistes acharnés) est évidemment une spectaculaire et pitoyable manifestation de mauvaise foi, sinon d'incompétence et de bêtise, bref, de négationnisme.
Il est nécessaire d’être doté d’un bagage scientifique pour détecter les falsifications de Rudolf et une formation scientifique facilite la compréhension de leur réfutation. L’auteur du présent article a été formé dans les classes préparatoires scientifiques et est titulaire d’un diplôme d’ingénieur.
Les négationnistes qui jouent sur «l’expertise» technique parient sur l’incapacité des lecteurs à évaluer leurs mensonges et sur le fait que l’habillage scientifique en impose. La démonstration suivante n’est fournie que pour illustrer ce point et montrer combien il est vain de jouer sur ce terrain là et risqué de se laisser impressionner.
Contexte À Auschwitz, les nazis utilisaient du Zyklon B qui diffusait de l’acide cyanhydrique, HCN (cyanure d’hydrogène), un poison foudroyant pour l’être humain, dont le Zyklon B (des granules poreux) était imprégné à l’état liquide. C’est le passage à l’état gazeux et la diffusion sous forme d’acide cyanhydrique gazeux qui provoquait la mort rapide des Juifs qui le respiraient.
L’un des arguments «techniques» de Germar Rudolf, repris par la suite par les petits soldats de la propagande négationniste, est de prétendre que les concentrations létales en HCN ne pouvaient être atteintes rapidement, c’est-à-dire que le dégagement de l’acide cyanhydrique gazeux serait un processus très lent. Rudolf ne fait preuve d’aucune originalité: il ne fait que recycler un mensonge que le négationniste Robert Faurisson martelait déjà en 1979. Rudolf en déduit le caractère impraticable de l’assassinat par gazage à l’HCN.
Rudolf trafique documents et calculs pour parvenir à ce «résultat», une spectaculaire contre-vérité factuelle, comme nous le verrons. Il est intéressant de noter que ces calculs ne sont aucunement reliés à ce qui constitue en théorie le cœur de sa démonstration, sa prétendue analyse d’échantillons. On a affaire ici à un syndrome classique chez les négationnistes: ils soulignent certes le caractère impossible (selon eux…) de tel ou tel aspect des processus d’assassinat, mais s’acharnent à montrer que chaque aspect, chaque étape, le moindre détail de ce processus constitue une impossibilité. Ainsi, le rapport Rudolf est-il consacré dans sa majeure partie à de telles démonstrations, sans liens avec ses analyses d’échantillons, une part significative de ces «démonstrations» n’ayant d’ailleurs aucune dimension scientifique et se contentant de reprendre des argumentaires négationnistes classiques.
La clé de voûte des raisonnements que Germar Rudolf tient dans son rapport à propos des quantités d’acide cyanhydrique dégagées repose sur un seul chiffre: selon lui, 10 % au plus de l’HCN se dégagerait du Zyklon B en 10 minutes (p. 59). Avec ce «résultat», Germar Rudolf prétend ensuite démontrer que la vitesse de dégagement de l’acide cyanhydrique (le gaz, poison mortel) issu du Zyklon B est trop lente pour tuer quiconque en quelques minutes, conformément aux nombreux témoignages. Encore est-il nécessaire d’établir préalablement la réalité de ce chiffre. Pour y parvenir, Germar Rudolf va trafiquer données, diagrammes et documents. C’est ce que nous allons voir.
Toutefois, le lecteur, s’il souhaite s’épargner la longue et fastidieuse démonstration des diverses falsifications de Germar Rudolf, pourra se contenter du graphique ci-dessous qui résume ce à quoi nous aboutissons. La loi d’évaporation proposée par Rudolf correspond à la courbe du bas en bordeaux, la réalité documentée correspond a minima à la courbe supérieure en bleu:
I. Comment Rudolf a fabriqué sa courbe de vitesse d’évaporation de l’HCN Rudolf se présente comme un scientifique et affirme effectuer des démonstrations scientifiques. Pour affirmer que la vitesse d’évaporation est lente il faut disposer de mesures concrètes. Rudolf n’en dispose pas mais va tout de même proposer une courbe. Il nous faut examiner comment ainsi que la nature de cette courbe.
Il prétend (p. 59) disposer de deux sources, dont l’une émane, prétend Rudolf de «l’US-Army Chemical Corps». Nous l’examinerons plus tard car, bien qu’intéressante pour notre propos, elle est peu exploitée par Rudolf.
Celui-ci insiste surtout sur une lettre qu’il aurait reçue de la firme Detia Freyberg, qui a pris la suite de la société Degesch dans la commercialisation de produits comme le Zyklon B. Il y serait question de la vitesse de dégagement de l’acide cyanhydrique. Cette lettre, Rudolf n’en donne absolument aucun extrait, et il est le seul à l’avoir jamais vue. Le support du produit moderne de la Freyberg, à partir duquel l’acide cyanhydrique se dégage, on n’en connaît rien et Rudolf n’en dit rien: or il a une influence déterminante sur la vitesse d’évaporation de l’HCN. Rien ne dit qu’il soit proche des granules du Zyklon B. Tirer des conclusions quantitatives relatives à la vitesse d’évaporation du Zyklon B à partir de ce courrier est donc impossible. Cela ne retient nullement Rudolf qui ose poser avec insistance au scientifique impartial.
Le contenu précis de la lettre n’est nullement cité, mais seulement vaguement évoqué pour dire que:
«la SARL Detia Freyberg ne donne que des indications approximatives» (p. 58)On a bien lu: «indications approximatives». Rudolf ne précise d’ailleurs pas explicitement lesquelles. Il écrit cependant que «selon ces données le support libère à une température de plus de 20 oC […] 80 à 90 % de l’acide cyanhydrique en 2 heures» (p. 58). Germar Rudolf ne nous fournit nulle part «ces données» et ne cite pas le contenu de la lettre. On peut cependant raisonnablement supposer que cette fourchette (80 à 90 % après deux heures) figure en fait dans la lettre et que c’est sans doute la seule information quantitative («approximative» en effet) qui s’y trouve. Rudolf peut également avoir extrapolé cette fourchette de façon tout à fait infondée, mais il nous est évidemment impossible de le savoir, puisque de façon tout à fait incroyable, le contenu de la lettre n’est pas cité.
Partant de là, Rudolf se permet un tour de passe-passe étonnant en multipliant, comme on va le voir, les affirmations quantitatives. Il commence par renvoyer à un graphique (graphique 13 p. 59), comme pour justifier ces chiffres, mais il est clair que ce graphique ne vient pas de la lettre de la Detia Freyberg (Rudolf l’aurait évidemment mentionné et n’aurait pas parlé d’indications approximatives), qu’il a été créé de toutes pièces par Rudolf lui-même à partir des «indications approximatives» (non citées, non accessibles…) de cette lettre, de façon à être compatible avec l’affirmation comme quoi, au bout de 2 heures, de 80 à 90 % de l’acide cyanhydrique a été libéré… Notons encore que Rudolf ne facilite vraiment pas la lecture puisqu’il parle de quantité totale dégagée, mais fournit un graphique de quantité résiduelle. Ce n’est vraiment pas sérieux. Voici ce graphique:
Intéressons-nous de près à cette courbe: il s’agit un diagramme décrivant une cinétique chimique (une vitesse de réaction, en l’occurence le dégagement de l’HCN, à savoir son passage de l’état liquide à l’état gazeux). Or pour dessiner une courbe d’évolution en cinétique chimique il est indispensable de connaître:
- soit de nombreux points de la courbe (c’est à dire des couples temps écoulé - taux d’HCN résiduel, issus de mesures précises en condition réelle).
- soit un ou deux points de la courbe et la loi (mathématique) d’évolution de la réaction.
Rudolf ne dispose évidemment pas d’un ensemble de points précis (encore une fois, il aurait fourni ces données sans parler du caractère «approximatif» de la lettre de la Detia Freyberg), et n’indique nulle part à quelle loi d’évolution devrait obéir le dégagement de l’HCN à partir du support du Zyklon B!
La courbe en question a une forme que Rudolf ne justifie jamais scientifiquement. Il ne fournit aucune indication sur la façon dont elle a été établie. C’est un véritable tour de magie de la part de Rudolf. Mais certainement pas de la science. Or, c’est bien de cette courbe qu’il va déduire (prétendra-t-il) un certain nombre de données quantitatives précises, justifiant sa théorie d’une dégagement lent de l’acide cyanhydrique.
Toutefois, un œil exercé, reconnaît que Germar Rudolf a décidé de faire obéir la vitesse de dégagement de l’acide cyanhydrique à une loi simple et classique: Rudolf décide que le dégagement doit obéir à une cinétique suivant une loi exponentielle décroissante. Cela se déduit facilement de la forme de la courbe et nous allons le prouver, scientifiquement pour le coup. Une loi exponentielle (classique en cinétique chimique) exprime un cas simple: la vitesse à un instant $t$ d’évolution de la quantité d’HCN, ou de son pourcentage restant, (sa dérivée par rapport au temps) est proportionnelle à la quantité d’HCN à cet instant. Cela reflète notamment que cette vitesse décroit (moins il reste d’acide cyanhydrique plus lente est sa vitesse d'évaporation). Notons que, en soi, l’hypothèse d’une telle loi pour l’évaporation du Zyklon B n’est pas déraisonnable. Encore faudrait-il le dire clairement. Cette loi s’exprime mathématiquement par l’équation dérivée (par rapport au temps) suivante, en prenant $K$ comme coefficient constant de proportionnalité (constante de vitesse du dégagement, dans ce cas indépendante de la quantité d’HCN à l’instant $t$):
${d[%HCN]_r}/{dt} = -K.[%HCN]_r$
où $[%HCN]_r$ est le pourcentage d’HCN résiduel à l’instant $t$;
Cette équation se résoud aisément et permet d’obtenir le pourcentage résiduel d’HCN au bout d’une durée $T$
$[%HCN]_r = [%HCN]_{r(t=0)}.e^(-K.T)$
où $[%HCN]_{r(t=0)}$ est le pourcentage d’HCN résiduel à l’instant $t=0$, c’est à dire au début du processus, et donc, puisque que l’on raisonne en pourcentage, $[%HCN]_{r(t=0)} = 100$. Cela permet de simplifier notre équation:
$[%HCN]_r = 100.e^(-K.T)$
Nous choisissons de manipuler des puissances de 10 plutôt que des exponentielles. En posant la constante $k=K/{ln(10)}$
$[%HCN]_r = 100.10^(-k.T)$
Cependant, dans la mesure où Rudolf parle constamment, de façon assez naturelle, de la quantité totale d’acide cyanhydrique dégagée avec la durée, il nous faut raisonner en pourcentage total d’HCN dégagé. Premièrement, il est très facile de restituer la courbe de dégagement cumulé $[%HCN]_d$ de l’acide cyanhydrique, correspondant à la courbe fournie par Rudolf, par une symétrie verticale de la courbe, correspondant à l’opération $[%HCN]_d = 100-[%HCN]_r$:
A partir de maintenant, suivant d’ailleurs Rudolf, nous parlerons de la quantité totale de HCN dégagé. Cela se traduit ainsi pour notre équation, avec $[%HCN]_d = 100-[%HCN]_r$:
$[%HCN]_d = 100-100.10^(-k.T)$
où $[%HCN]_d$ est le pourcentage total d’HCN dégagé au bout de la durée $T$. Pour continuer, nous devons d’abord tester notre hypothèse sur cette loi. Nous commençons par placer la courbe de dégagement totale selon Rudolf sur un graphe beaucoup plus détaillé, finement quadrillé, où les durées sont exprimées en minutes et sur lequel on peut lire facilement les valeurs correspondant aux points sur la courbe (cliquer pour zoomer):
Si notre hypothèse est valable, il suffit de trouver un point sur la courbe, de calculer le coefficient $k$ correspondant et de tracer la courbe de loi exponentielle correspondante. Si la courbe théorique obtenue est proche de la courbe de Rudolf, notre hypothèse sera pleinement validée.
Pour cela, il nous faut un point de la courbe de Rudolf et calculer le coefficient $k$. Si pour la $n$ième minute on lit sur le graphe le pourcentage total $P_n$ de HCN dégagé, $k$ s’obtient facilement par le calcul suivant:
$k = -{log((100-P_n)\/100)}/n$
Il se trouve que la courbe fournie par Rudolf passe par 60 % d’HCN dégagé au total pour 60 minutes. On trouve:
$k = {log((100-60)\/100)}/60 = -{log(0,4)}/60 = 0,0066323335$
Traçons la courbe correspondante sur le même graphe, en pourpre:
C’est tout à fait spectaculaire: la correspondance est parfaite pendant les 90 premières minutes et la divergence maximale est de 2 % au bout de 240 minutes (4 heures)! Il ne s’agit pas d’une coïncidence. Notre intuition était la bonne: Germar Rudolf a construit sa courbe en utilisant une loi exponentielle. En fait, Rudolf livre la clé de sa démarche lorsqu’il écrit que selon le courrier de la Detia Freyberg, «le support libère à une température de plus de 20 oC […] 80 à 90 % de l’acide cyanhydrique en 2 heures» (p. 58). Bien qu’il ne le dise pas explicitement cela correspond très probablement au seul contenu quantitatif présent dans cette lettre. Rudolf a arbitrairement décidé que cela correspondait à 85 % d’HCN dégagé en 2 heures et a construit sa courbe à partir de ce point là, en utilisant, comme nous le supposions, une loi exponentielle, mais sans le dire. Notre positionnement sur la grille de la courbe de Rudolf correspond à une position entre 85 % et 86 % à 120 minutes, littéralement dans l’épaisseur du trait. In fine, cela explique à la fois la position et la forme de la courbe.
Même si c’est une hypothèse raisonnable, Rudolf la passe complètement sous silence et, forcément, ne la justifie pas. Surtout, il ne fournit aucune donnée justifiant la position (85 % ou la valeur de $k$) de sa courbe. Il demeure qu’il est scientifiquement parlant, inacceptable de ne pas informer le lecteur qu’il utilise une équation précise pour construire sa courbe. Rappelons en outre que nous ne savons rien du produit de la Detia Freyberg, qu’il s'agit d’un composé moderne, et non du Zyklon B original. Rudolf ne justifie nulle part la validité de la comparaison (il faudrait pour cela démontrer la stricte identité entre le composé moderne et le Zyklon B; une telle démonstration est absente). Tout cela relève de la malhonnêteté la plus éhontée et n’a qu’un lointain rapport avec la rigueur scientifique dont Rudolf se réclame. L’enthousiasme hystérique que Rudolf avait déclenché dans les milieux négationnistes est tout simplement risible. Comme nous le disions, son choix de 85 % plutôt que 80 % ou 90 % est arbitraire et reflète seulement son manque de données. Nous verrons pourtant que ces incertitudes ne sont pas sans conséquences.
Dans la suite, pour étudier la loi d’évaporation fournie par Rudolf, nous utiliserons (comme Rudolf!) la courbe théorique correspondant à 85 % à 120 minutes, soit, finalement, un coefficient $k$:
$k = -{log((100-85)\/100)}/120 = -{log(0,15)}/120 = 0.0068659062$ et donc la loi:
$[%HCN]_d = 100-100.10^(-0.0068659062.T)$
Graphiquement, cela donne ce qui suit:
La correspondance est excellente à moins de 2 % près.
Pour comparer les différentes valeurs avancées successivement par Rudolf (dont le but est toujours de corroborer son chiffre de 10 % en 10 minutes) nous tracerons à chaque fois la courbe correspondante, obéissant à une loi exponentielle, car elle est raisonnable et c’est le postulat même (quand bien même passé sous silence) de Germar Rudolf. Rappelons ici la formule générale qu’on utilisera pour effectuer ces comparaisons et détecter les fraudes et incohérences de Rudolf:
$[%HCN]_d = 100-100.10^(-k.T)$
Et remarquons que l’équation inverse qui permet de calculer la durée $T$ permettant d’obtenir un dégagement donné $[%HCN]_d$ est:
$T=-{log(1-[%HCN]_d\/100)}/k$
Enfin, rappelons la méthode permettant de calculer le coefficient $k$ lorsque l’on dispose de la donnée pourcentage total $P_n$ de HCN dégagé en $n$ minute:
$k = -{log((100-P_n)\/100)}/n$
L’une des bizarreries de la courbe proposée par Rudolf est de couvrir 4 heures, ce qui, dans le contexte de gazages d’êtres humains, n’a strictement aucun intérêt. Seules les premières minutes nous intéressent. Aussi allons-nous nous limiter, dans les prochains diagrammes à la première heure et demie, ce qui nous permettra d’être plus précis. Les courbes proposées par Germar Rudolf, sur plusieurs heures sont en effet in fine inexploitables par le lecteur ordinaire. Il ne s’agit que d’une mise en scène de science et non de science véritable.
II. Premières falsifications et incompétence de Germar Rudolf Voyons à présent quelles affirmations quantitatives Rudolf prétend tirer de sa courbe. Il écrit des choses très précises:
«Il importe par la suite de constater qu’à une température supérieure à 20 oC le support, pendant les cinq premières minutes, et vraisemblablement même pendant les dix premières minutes suivant la dispersion du produit, a libéré tout au plus 10 % de l’acide cyanhydrique.» (p. 59)Il y a ici un premier mensonge dont on ne comprend pas bien les motivations. La courbe même fournie par Rudolf indique très clairement que la quantité totale d’HCN dégagée arès 10 minutes est de 14,6 %, pas vraiment inférieure à 10 %! Partant d’«indications approximatives» Rudolf construit une courbe remarquablement précise et commence par mentir sur sa propre courbe en diminuant de plus de 30 % la quantité d’HCN dégagé en 10 minutes! On gardera bien à l’esprit que la courbe proposée par Rudolf infirme le chiffre qu’il prétend corroborer par cette courbe.
Plus grave est son choix non justifié du point 85 % à 2 heures (120 minutes). En effet, les conséquences sur les quantités d’HCN évaporées dans les premières minutes sont loin d’être négligeables. En effet, pourquoi 85 % et non 80 % ou 90 % ? 80 % dégagé en 2 heures/120 minutes ($k=0,00582475$) correspond à 12,5 % d’HCN dégagé en 10 minutes (ce qui est toujours supérieur aux 10 % de Rudolf!) et 90 % ($k=0,008333333$) correspond à 17,5 % en 10 minutes. Ce n’est absolument pas la même chose puisque dans le second cas, le dégagement est 40 % supérieur au premier!
Si, pour les besoins de la cause, on compare les 17,5 % d’HCN dégagé correspondant à 90 % en 2 heures (chiffre présenté par Rudolf comme réaliste) aux 10 % en 10 minutes martelés par Rudolf, on se retrouve avec un écart de 75 %! Ce n’est plus un écart, c’est un gouffre. D’ailleurs, il est aisé de calculer le dégagement total d’HCN au bout de deux heures, pour la courbe qui passe par 10 % à 10 minutes ($k=0,004575749$): 72 %, bien loin des 80 à 90 % de Rudolf… Rudolf est non seulement malhonnête (il promeut un chiffre significativement inférieur aux propres données dont il prétend disposer) mais aussi incompétent. Il ne semble même pas réaliser qu’il accumule des chiffres significativement incohérents.
Continuons de tirer les conséquences des propres chiffres mentionnés par Rudolf. Qu’en serait-il de la courbe correspondant à 10 % d’HCN dégagé en 5 minutes ($k=0,009151498$), hypothèse effleurée par Rudolf? En 10 minutes, on a 19 % d’HCN dégagé, 90 % de plus que l’hypothèse privilégiée par Rudolf!
Un autre point qui souligne le manque de sérieux de Rudolf: il affirme, toujours à propos de sa courbe, que «dans les conditions du graphique 13, 50 % de l’acide cyanhydrique est libéré après 40 ou 45 minutes» (p. 59). Alors? 40 ou 45? Il suffit pourtant de lire la courbe ou d’utiliser l’équation. La durée de la courbe correspondant à 50 % se situe entre 44 et 46 minutes. Et le calcul utilisant la loi pour 85 % en deux heures ($k=0.0068659062$) donne (utilisation de l'équation inverse) 43 minutes et 51 secondes, disons 44 minutes. Si Rudolf avait voulu arrondir, prendre 45 minutes aurait été satisfaisant. Pourquoi prétendre utiliser une fourchette alors qu’il dispose de l’équation exacte? C’est tout à fait hypocrite et l’on a un peu l’impression qu’il navigue à vue. Ce n’est, au final, pas tant la lettre de la Detia Freyberg qui est approximative, c’est Rudolf lui-même. Approximatif et malhonnête. Couper la poire en deux en choisissant 85 % ne signale d’ailleurs que le brouillard dans lequel il navigue et tient à maintenir son lecteur. Ce n’est pas le pire.
III. Rudolf utilise des chiffres frelatés et contradictoires Rudolf connait bien la faiblesse de sa position. Aussi tente-t-il de renforcer la crédibilité de sa courbe en se référant à des données de l’époque en prétendant que selon les sources d’époque, 50 % de l’HCN se dégage en 1/2 heure, chiffre dont il suggère qu’il serait en accord avec sa courbe. Rudolf écrit:
«Selon Irmscher, le temps de dégagement de 50 % de l'acide cyanhydrique est de 1/2 heure […] Cela correspond à peu près aux données de la SARL Detia Freyberg» (p. 59)«Irmscher» renvoie à une source de 1942. Nous y reviendrons plus bas. Rudolf affirme donc explicitement que 50 % en 1/2 heure corrobore la courbe qu'il nous a proposée et que nous commençons à bien connaître. Il y a là une preuve éclatante du manque total de sérieux de Rudolf sur le plan scientifique. En effet, sa courbe correspond à un dégagement de 50 % pour 44 minutes, très, très loin des 30 minutes de la source qu'il prétend citer. Comment peut-il oser affirmer que cela «correspond à peu près» à 50 % en 30 minutes. C’est presque comme s’il écrivait qu’une vitesse de 200 km/h «correspond à peu près» à une vitesse de 135 km/h!
Posons alors une question: pourquoi Rudolf, qui prétend disposer (dont on verra plus loin ce qu’il en est vraiment) d’une donnée numérique de l’époque (50 % en 30 minutes) ne s’appuie-t-il pas sur ce chiffre, relatif au Zyklon B, contemporain de son utilisation, pour construire sa courbe? Cela paraîtrait tout de même beaucoup plus logique.
La raison en est simple: avec le type de loi d’évolution choisi par Rudolf lui-même, 50 % en 30 minutes ($k=0,010034333$), cela donne un dégagement de de 94 % en 2 heures et de 20,6 % d’HCN en 10 minutes… plus du double du chiffre privilégié par Rudolf. On comprend pourquoi ce dernier a préféré trafiquer les données (aussi floues soient-elles) de la Freyberg! Encore que nous échappe qu’il puisse avoir fabriqué une courbe qui ne corrobore même pas son chiffre de 10 % en dix minutes.
On peut facilement visualiser les incohérences de Rudolf en traçant les différentes courbes qui, si on le comprend bien, sont toutes plus ou moins équivalentes. Nous proposons deux diagrammes. Le premier présente les courbes correspondant aux trois principales «propositions de Rudolf» (sur 90 minutes, ce qui est suffisant):
On constate visuellement que Rudolf offre simultanément des chiffres contradictoires, pour peu qu’on se conforme à la loi exponentielle qu’il propose. Et cela devient un festival si l’on présente toutes les possibilités qu’on peut tirer de ce qu’écrit Rudolf (on épargne au lecteur la courbe «10 % en 5 minutes», très proche de «50 % en 30 minutes»…):
En utilisant la démarche de Rudolf et ses propres chiffres (quoique eux-mêmes falsifiés comme on le verra plus loin), mais en étant plus logique (on applique au Zyklon B les données du Zyklon B!) on aboutit à un résultat équivalent à 200 % de celui de Rudolf. 50 % en 1/2 heure ne confirme ni le graphe fabriqué par Rudolf sur la base de la lettre de la Detia Freyberg, et encore moins l'hypothèse basse de Rudolf, 10 % en 10 minutes. Remarquons une fois de plus que 10 % en 5 minutes et 10 % en 10 minutes ne sont absolument pas des valeurs équivalentes, ni même proches, puisque 10 % en 5 minutes entraîne 19 % dégagé en 10 minutes. Les seules hypothèses qui se corroborent pourraient, à la rigueur, être 10 % en 5 minutes et 50 % en 30 minutes qui correspondent à des courbes assez proches ($k=0,009151498$ et $k=0,010034333$), mais Rudolf ne le relève même pas. C’est un incompétent.
Nous ne sommes pas au bout de nos peines car le chiffre même de 50 % en 30 minutes est le résultat d’une incroyable falsification minimisant radicalement la vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique!
IV. Rudolf falsificateur de textes et de documents Revenons à l’origine de ce chiffre de 50 % de dégagement en 1/2 heure. Ici les versions précédentes (anglaises et allemandes) du rapport Rudolf vont nous être utiles. Dans la version française, Rudolf énumère, comme s’il venait d’en parler, deux auteurs Freyberg et Peters, donnant des informations sur la vitesse de libération de l’HCN2. Or si effectivement Rudolf cite la lettre de la Detia Freyberg, aucune information n’était auparavant citée comme émanant de Peters. On a lu par contre, on s’en souvient, «Selon Irmscher, le temps de dégagement de 50 % de l’acide cyanhydrique est de 1/2 heure […]». Il nous faut donc enquêter.
La note (153) qui accompagne cette affirmation nous met sur la piste. Elle devrait contenir la référence à un travail de ce Irmscher, ce qui est effectivement le cas. La surprise (ou pas) vient du fait qu’elle présente une seconde source, une référence à un ouvrage, justement de G. Peters, daté de 19333. C’est en nous reportant aux premières versions du rapport Rudolf, en anglais et en allemand, que l’on comprend ce qui s’est passé. Effectivement, dans les versions précédentes de son rapport, il n’était pas du tout question de Irmsher, mais seulement de Peters. Rudolf écrivait alors:
«G. Peters[152] gibt für eine 50%ige Freisetzung der Blausäure 1/2 Stunde an […]. Damit liegt dies ungefähr in dem von der Detia Freyberg GmbH genannten Zeitbereich4».Ce qui signifie:
«G. Peters[152] donne un dégagement de 50 % d’acide cyanhydrique en 1/2 heure […]. Cela est à peu près cohérent avec les données d’évolution fournies par la Detia Freyberg».La note 1525 renvoyait à la page 64 de l’ouvrage de Peters. Le chiffre de 50 % en une demi-heure était donc justifié par le seul ouvrage de Peters de 1933. Il est clair que dans la version française, le maintient de la référence à Peters dans la note 153 est une erreur, un oubli, puisque c’est sur Irmscher seul que Rudolf prétendait désormais fonder son chiffre de 50 % après 30 minutes. Pourquoi ce changement?
Gerhard Peters est co-inventeur du Zyklon B. Il a dirigé un temps la firme Degesch qui le commercialisait. Dans son ouvrage de 1933, Blausäure zur Schädlingsbekämpfung6, que connait bien Rudolf, Peters décrit le processus de dégagement de l’acide cyanhydrique depuis le Zyklon B d’une façon qui contredit de façon spectaculaire toute la construction de Rudolf. Peters déclare, à la page 64, celle-là même initialement citée par Rudolf, que dès que le contenu d’une boite de Zyklon est répandu, l’HCN se dégage «très violemment»7. Rien à voir avec le dégagement lent avancé par Rudolf…
Et ce n’est pas tout. Initialement donc, Rudolf écrivait (tant dans les versions allemandes qu’anglaises) que d’après Peters, 50 % de l’HCN se dégageait en 1/2 heure, ce dont on trouve la trace dans la note 153. Qu’avait vraiment écrit Peters? Toujours à la page 64, Peters écrit:
«In der Regel, […] der größte Teil der Blausäure bei Zimmertemperatur bereits nach einer halben Stunde entwickelt ist».Ce qui signifie:
«En règle générale, à température ambiante, la plus grande partie du cyanure s’est déjà dégagée au bout d'une demi-heure».En restituant l’expression «la plus grande partie (der größte Teil)» par exactement «50 %», Germar Rudolf, d’incompétent et malhonnête qu’il était déjà se promeut au statut de falsificateur pur et dur. Rudolf a falsifié sans vergogne, transformé cette «plus grande partie» en «moitié», afin de faire coller — et on a vu que cela ne fonctionnait même pas! — les écrits de Peters à son diagramme. En science cela s’appelle une fraude.
On comprend que Rudolf a réalisé que sa manipulation était trop énorme et a pitoyablement cherché une autre source pour fonder son chiffre de 50 %. Non seulement Germar Rudolf falsifie ses sources et ment de façon éhontée sur la réalité — dont il a parfaitement connaissance — de la (très élevée!) vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique, mais il cherche à camoufler son forfait de façon lâche et hypocrite. La référence, dans les dernières versions de son rapport, à Irmscher, dont il ne cite pas le texte original dans la version française, n’est alors qu’une tentative de Rudolf de nettoyer les falsifications les plus grosses de son «rapport» et de camoufler la réalité (un dégagement extrêmement rapide) qui le gêne tant.
Dès 1996, Rudolf sait qu’il a été pris la main dans le sac8. Il n’aura de cesse de publier de nouvelles versions de son rapport en modifiant le passage en question afin de faire disparaître sa falsification initiale, sans jamais la reconnaître. Il ira même jusqu’à prétendre en 1997, dans une note de bas de page d’un article écrit sous pseudonyme9, qu’il s’agissait d’une sorte de coquille, alors qu’il avait répété la même falsification en 1993 en allemand et en 1994 en anglais10. Par la suite, Rudolf préféra passer complètement sous silence sa falsification initiale. Nous verrons plus bas ce qu’il en est de Irmscher…
Ce sur ce quoi il nous faut nous arrêter c’est donc bien que ce chiffre de 50 % en 1/2 heure est une invention de Rudolf fondée sur une falsification. L’information authentique est que «la plus grande partie» se dégage en 30 minutes. Le bon sens, l’usage courant nous indiquent que «la plus grande partie» signifie évidemment que l’on est plus proche de la totalité que de la moitié. Que se passe-t-il si l’on attribue, honnêtement cette fois une valeur précise à l’expression«la plus grande partie»? 60 %, 70 %, 80 %, 90 % ? A chaque fois, une courbe correspond qui permet de calculer les valeurs dégagées après 2 heures ou 10 minutes. Examinons ce tableau (arrondi au %):
Qté d’HCN dégagée selon la qté évaporée en 30 minutes 30 min 60 % 70 % 80 % 90 % 10 min 26 % 33 % 41 % 54 % 1 heure 84 % 91 % 96 % 99 % 2 heures 97 % 99 % 99,8 % 100 % k 0,013264667 0,017429292 0,023299 0,033333333 Le constat est spectaculaire. Dès qu’on accorde à l’expression «la plus grande partie» une signification raisonnable (au moins 70 %), on se retrouve avec des quantités d’acide cyanhydrique dégagées après 10 minutes significativement plus élevées que les chiffres martelés par Germar Rudolf. On comprend aisément l’objet de sa falsification: minimiser coûte que coûte la vitesse de dégagement de l’HCN. On peut visualiser sur un diagramme (en comparant les 50 % de Rudolf à, par exemple, 70 % ou 90 % pour «la plus grande partie» de Peters):
La falsification de la réalité à la fois scientifique et expérimentale par Germar Rudolf est d’ailleurs évidente pour peu que l’on se réfère aux documents originaux sur le Zyklon B: ils sont en totale contradiction avec la thèse du Rudolf d’une évaporation lente. Ainsi le brevet de 1926 — qui complète celui de 1922 — (que se garde de jamais mentionner Rudolf) décrivant le principe du Zyklon stipule:
«Wenn man den Inhalt der Büchse in dünner Schicht Überstreut, verdunstet die Blausäure in etwa 10 Minuten, so dass die Höchstkonzentration des Gases im Raum mit ausserordentlicher Schnelligkeit erreicht wird wird.11»Ce qui signifie:
«L’acide prussique s’évapore en environ 10 minutes si le contenu de la boite est répandu en une couche fine, de sorte que la concentration maximale du gaz dans la pièce est atteinte avec une rapidité extraordinaire.»Bref, les documents même émanant des professionnels qui ont mis au point le Zyklon B démontrent que la vitesse d’évaporation est extrêmement rapide, contrairement à ce que les négationnistes soutiennent à coup d’approximations anti-scientifiques et de falsifications diverses.
Qu’en est-il cependant de l’autre source évoquée par Rudolf, Irmscher? Le contenu de cette publication de 1942 n’est pas citée dans notre version française, ce qui est évidemment facheux. Nous devons nous tourner vers les éditions ultérieures, en allemand ou en anglais, du «rapport» de Germar Rudolf. Dans ces versions ultérieures, la mention de Gerhard Peters pour étayer le chiffre de 50 % en 30 minutes disparaît complètement, remplacée par la seule mention de Irmscher et cette fois accompagnée d’un diagramme de qualité très moyenne reproduisant celui de la publication originale. Cette dernière étudie la vitesse d’évaporation du de l’acide cyanhydrique aux très basses températures (et selon la nature des absorbats) et fournit des diagrammes incluant des courbes d’évaporation pour plusieurs températures allant de -18 à 15 oC. Ce sont en fait deux diagrammes qui sont proposés par Irmscher:
Dans les premières versions de son rapport, Germar Rudolf n’avait pas plus pris la peine d’expliquer qu’il utilisait le second de ces diagrammes (qui correspond au support granulé utilisé dans le Zyklon B d’Auschwitz) qu’il n’avait pris celle de le fournir. Le voici donc en meilleure qualité:
Pas plus qu’il ne précisait quel diagramme il utilisait, Germar Rudolf ne précisait à laquelle des quatre courbes il se réfèrait pour son chiffre de 50 % en 30 minutes. Nous avons affaire à un amateur déchaîné (le fait qu’il ait corrigé petit à petit, au fil des innombrables éditions de son rapport, tous ces points ne fait que souligner l’improvisation lamentable initiale, commandée avant tout par la volonté de forcer un résultat décidé d’avance). Il nous est cependant aisé de comprendre qu’il a utilisé la courbe 4, correspondant aux mesures effectuées par Irmscher à 15 oC.
La loi cinétique expérimentale semble d’ailleurs ressembler à la loi exponentielle proposée par Rudolf. Cela ne suscite chez lui aucune remarque puisque dans ces éditions ultérieures, Rudolf a renoncé, sans la moindre explication, à utiliser la lettre de la Detia Freyberg et à la courbe qu’il avait fabriquée. Mais nous ne pouvons pas traiter ici des innombrables éditions successives commises par Rudolf qui tente à chaque fois de camoufler ses plus grosses manipulations en essayant de répondre aux réfutations produites sur ses premières versions (ce qui le pousse, on le voit, à en modifier significativement le contenu). Le premier constat évident c’est qu’on se demande comment Rudolf a trouvé son chiffre de 50 % en une demi-heure à partir des courbes à 15 oC. Le lecteur peut exercer ses yeux et sa perplexité sur cette question, à laquelle Rudolf n’apporte évidemment aucune réponse. Ce n’est pas de la science, c’est du bricolage dans le brouillard (d’autant plus malhonnête que les diagrammes ne sont pas fournis dans notre édition française!). Pourtant il n’est pas bien difficile d’effectuer le travail sérieusement, d’isoler la courbe 4 et de la placer sur un diagramme quadrillé (sur les 90 première minutes, c'est largement suffisant):
Et voilà… La courbe ne vérifie évidemment pas le chiffre martelé par Rudolf. Il suffit de lire. Selon Irmscher, à 15 oC, il se dégage 45 % en une demi-heure. Plus croustillant encore, nous l’avions déjà relevé plus haut, mais le constatons de visu sur la courbe sur laquelle Rudolf prétend fonder sa conclusion de 10 % en 10 minutes: nous lisons sur la courbe en question… 18 % en 10 minutes:, soit une valeur 80 % plus élevée que celle avancée par Rudolf.
Plus fondamental: on constate que la vitesse d’évaporation dépend de façon très importante de la température: plus la température augmente plus la vitesse est importante, soit dit en passant une évidence d’un point de vue scientifique. Nous y reviendrons parce que Germar Rudolf passe cette propriété incontournable pour le sujet traité totalement sous silence. Rappelons une fois de plus ce qu’écrit Rudolf:
«Selon Irmscher, le temps de dégagement de 50 % de l’acide cyanhydrique est de 1/2 heure […] Cela correspond à peu près aux données de la SARL Detia Freyberg» (p. 59)La seule courbe utile des diagrammes de Irmscher concerne celle de l’évaporation à 15 oC. Or Rudolf écrivait à propos de la lettre de la Detia Freyberg:
«Selon ces données [fournies par la Detia Freyberg] le support libère à une température de plus de 20 oC […] 80 à 90 % de l’acide cyanhydrique en 2 heures».Cela signifie évidemment que, pour le coup, une information explicite figurait dans la lettre: ses données concernent des températures supérieures à 20 oC! Dans ces conditions des données relatives à une courbe à 15 oC ne sauraient s’appliquer. Les diagrammes fournis par Irmscher, quand bien même on pourrait en tirer l’information que 50 % de l’acide cyanhydrique se dégage en une demi-heure, à 15 oC, ne corroborent donc en rien un tel chiffre pour des températures supérieures à 20 oC. Rudolf nage, ou plutôt se noie, dans un océan d’incohérences: de la courbe à 15 oC de Irmscher, on tire aisément que le dégagement est beaucoup plus rapide (plus de 80 % après 1 heure et 10 minutes, 90 % en à peine plus de 1 heure et trente minutes) que ce que Rudolf prétend tirer de la fumeuse lettre de la Detia Freyberg à plus de 20 oC. Rudolf, qui a pourtant sous les yeux, cette information capitale apportée par Irmscher — plus la température est élevée, plus la vitesse de dégagement est rapide — ne se demande pas comment à 20 oC, la vitesse pourrait être plus faible qu’à 15 oC. Cela disqualifie évidemment cette lettre invisible, sinon celui qui prétend s’en servir de source… Si Rudolf avait eu une once d’honnêteté et de compétence, il aurait déduit de Irmscher qu’à 20 oC (et au dessus) la vitesse de dégagement de l’acide cyanhydrique devait être plus élevée que celle de la courbe à 15 oC de Irmscher.
Une fois encore, d’un point de vue scientifique, les affirmations de Rudolf sont tout à fait irrecevables. Après avoir falsifié Peters, tenté de camoufler sa falsification, Rudolf en est réduit à commettre une nouvelle fraude, scientifique celle-là. La seule information utile est intéressante provient de l’étude de Gerhard Peters de 1933, corroborée par le brevet de 1922, à température ambiante, l’acide cyanhydrique s’évapore avec une rapidité extraordinaire, le dégagement étant réalisé dans sa plus grande partie en une demi-heure… Demeure cette question fondamentale de la température, à peine effleurée par Rudolf. Nous allons comprendre pourquoi.
V. Une négligence scientifique majeure de Germar Rudolf: l’importance de la température Sommes-nous arrivés au bout de nos peine? Avons-nous vu toutes les falsifications de Rudolf concernant le dégagement de l’HCN? La réponse est négative. Il reste le plus énorme, la plus «belle» des fraudes scientifiques de Germar Rudolf: la température.
La cinétique de dégagement (c’est à dire d’évaporation du HCN) de Rudolf vaut, dit-il, pour des températures supérieures à 20 degrés. Hors, non seulement une cinétique chimique est très fortement influencée par la température, ce qui se constate de façon spectaculaire sur le second diagramme de Irmscher que nous avons reproduit plus haut — Rudolf n’en tient absolument aucun compte, comme nous l’avons vu (une aberration scientifique absolue) — mais la température d’ébullition du HCN est de 26 oC. Cela signifie qu’à partir de 26 oC, l’HCN se comporte comme de l’eau bouillante et s’évapore à très grande vitesse, largement plus grande qu’à des témpératures inférieures, où cette vitesse semble déjà extraordinairement rapide (contrairement à ce que Rudolf tente de faire croire à coups de falsifications).
C’est ici que le contexte de notre étude de l’évaporation de l’acide cyanhydrique doit être rappelé: l’assassinat de masse par gazage d’êtres humains.
Un temps, un préchauffage avait été prévu pour certaines chambres à gaz. Cela ne peut évidemment s’expliquer que par la volonté d’atteindre voire de dépasser la température d’ébullition de l’acide cyanhydrique. Cependant ce préchauffage ne fut pas mis en place, car si on force à coup de crosses des centaines d’êtres humains nus, dont le corps est a minima au dessus de 30 oC et l’air exhalé à 37 oC, à s’accumuler dans une pièce où elles finiront par être écrasées les unes contre les autres, la température augmente rapidement, largement au dessus de 26 oC. On dispose d’ailleurs de témoignages explicites stipulant qu’après avoir fait pénétrer les Juifs dans la chambre à gaz on attendait, avant de verser le Zyklon B, que la température soit suffisamment élevée12!
Cela signifie que dans les chambres à gaz, l’acide cyanhydrique du Zyklon B était exposé à des températures significativement supérieures à sa température d’ébullition, et donc s’évaporait extrêmement rapidement, plus rapidement encore que ce que Peters décrivait, comme de l’eau qui bout! Cela est évidemment passé sous silence, «oublié» par Germar Rudolf et rend dérisoires toutes ses arguties sur les vitesses d’évaporation de l’HCN. Aucun scientifique digne de ce nom n’oserait négliger la question de la température dans une étude relative à une problématique d’évaporation! Ce serait comme discourir des heures sur l’évaporation de l’eau à 70 oC pour appréhender ce qui se passe quand on la chauffe à 120 oC! C’est bien parce qu’il en est parfaitement conscient — il n’est pas idiot — que Germar Rudolf commet cet évitement massif de la question de la température. Germar Rudolf est tout simplement, scientifiquement parlant, un escroc.
Pour autant, ne dispose-t-on vraiment d’aucune donnée précise sur la vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique du Zyklon B? Ce n’est visiblement pas du coté des négationnistes qu’il faut les chercher, on l’aura compris. Les historiens, eux, ont fait leur travail…
Herbert Rauscher était un chimiste au sein de la Heli, une des sociétés spécialisées dans la distribution du Zyklon B pendant la guerre. Il a fait une déposition après la guerre, dans le contexte du procès qui concernait la société Degesch, en tant que témoin pour la défense. C’était un spécialiste de l’HCN et du Zyklon B: il maîtrisait donc son sujet. C’est donc sans surprise qu’il fournit des chiffres précis pour les vitesses d’évaporation de l’HCN du Zyklon B à 20 degrés (donc les vitesses en conditions réelles, dans les chambres à gaz, sont beaucoup plus rapides). Herbert Rauscher fournit un chiffre particulièrement intéressant: à 20 oC, 28 % de l’HCN se dégage en 5 minutes13. Herbert Rauscher apporte une information d’une importance extrême: les chiffres qu’il avance sont le fruit de mesures effectuées lors d’expériences; il s’agit bien ici de la réalité mesurée de la vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique à partir du Zyklon B14.
On peut alors, évidemment, calculer le coefficient k de la loi d’évaporation exponentielle que l’on a déjà vue, l’hypothèse même de Rudolf ($k=0,028533501$). On peut ainsi tracer la courbe et calculer les quantités dégagées à 10 minutes, 30 minutes et 2 heures, respectivement: 48 %, 86 %, 100 %. Vous avez bien lu. 48 % en 10 minutes, cinq fois plus que le chiffre de 10 % proposé sans justification par Rudolf, et 86 % en 30 minutes, tout à fait la «la plus grande partie» de Peters. Une fois encore, il s’agit de chiffres pour 20 oC, en deça de la température d’ébullition. Dans une chambre à gaz, à des températures supérieures à 20 oC, voire très probablement supérieures à la température d’ébullition, le dégagement d’acide cyanhydrique devait être foudroyant, ce que confirment évidemment les témoignages.
On est décidément très loin des élucubrations de Rudolf. Il est alors ici intéressant de comparer deux des principales courbes correspondant au chiffres proposés par Rudolf (50 % en 30 minutes et 10 % en 10 minutes) à la courbe correspondant à une donnée enfin réelle:
En résumé, c’est un festival: Germar Rudolf s’appuie sur une lettre vague, qu’il ne cite pas, pour choisir arbitrairement un point puis en déduire une courbe dont il ne justifie pas la forme, avance des chiffres en contradiction avec cette courbe (10 % en 10 minutes, 50 % en 30 minutes) et en contradiction entre eux, n’hésitant pas à falsifier un document de 1933 (Peters) pour justifier l’un de ces chiffres, abandonnant cette première falsification pour recourir (en faisant de l’auto-révisionnisme selon les versions successives de son rapport) à un second document qu’il n’a néanmoins, scientifiquement pas le droit d’invoquer, pour justifier ce même chiffre, le tout en négligeant systématiquement le facteur le plus important: la température. Tout cela pour minimiser outrageusement la vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique en contradiction avec les documents émanant des experts. De quoi faire virer n’importe quel étudiant en n’importe quelle matière de n’importe quelle université! Rudolf n’est pas un scientifique, c’est un clown.
Ce n’est pas fini.
VI. Germar Rudolf dupe et complice d’un faux
Souvenons-nous que Germar Rudolf prétendait (p. 59) disposer de deux sources. Nous avons vu ce qu’il en était de la lettre de la Detia Freyberg et «accessoirement», comment Rudolf traitait les documents contemporains et la science elle-même. Nous allons à présent voir ce qu’il en est de la seconde source. Citons ici complètement ce que Germar Rudolf écrit:
«L’information donnée par la seconde source [168], qui émane de l’US-Army Chemical Corps, est reproduite au graphique 12. Malheureusement, la source ne dit rien sur la nature du support ni sur la manière dont le produit était étalé/entassé. A une température ambiante d’environ 26 oC, ce qui est la température d’ébullition de l’acide cyanhydrique, il faut environ 9 heures, selon cette source, pour que 80 à 90 % de l’acide cyanhydrique soit évaporé» (p. 59)Et voici le «graphique 12» dont il accompagne ce texte, «émanant de l’US-Army Chemical Corps»:
Avant tout, restituons les courbes équivalentes pour la quantité totale d’HCN dégagé:
Et dans une version avec grille détaillée:
Citons à présent la note [168] fournissant la référence de ce graphique «émanant de l’US-Army Chemical Corps»:
«[168] S. Pinter, Mauthausen-Bericht, Beilage 3/US-Army Chemical Corps, 5.8.’48.» (p. 114)Une première remarque à propos de cette source: il est étrange qu’un rapport émanant de l’armée américaine soit intitulé «Bericht» («rapport» en allemand, et non «report» en Anglais). Plus étrange est l’absence totale d’origine archivistique, de cote ou de précision qui permettrait de remonter à cette source. Entre une lettre non citée (et perdue) et un rapport invérifiable, Rudolf soigne décidément la fiabilité de ses sources…
Mais avant de revenir à cette source, examinons les données quantitatives. Souvenons nous que la réalité de la vitesse d’évaporation de l’acice cyanhydrique, à 20 oC, c’est 28 % en 5 minutes, 86 % en 30 minutes, 98 % en une heure, grandeurs cohérentes avec le document Peters de 1933 falsifié par Rudolf. Ici, à 25 oC, en 30 minutes, il se ne serait évaporé que 6 % d’HCN! Germar Rudolf produit un diagramme qui présente des chiffres au moins 8 fois plus faibles que le réalité. Même proche de la température d’ébullition, les chiffres fournis divisent par 3 la réalité à 20 oC. C’est du grand n’importe quoi.
Il est évident que Germar Rudolf boit du petit lait à exhiber des vitesses d’évaporation aussi incroyablement lentes. Si incroyablement lentes qu’elles sont évidemment incompatibles avec la lettre de la Detia Freyberg ou avec les documents Peters et Irmscher, même dans leurs présentations frauduleuses par Rudolf! Si incroyablement lentes que Germar Rudolf n’exploite absolument pas ces courbes. Il les montre, il est content, mais il n’en fait rien et passe son chemin, le chemin d’incohérences et de falsifications que nous avons décrit plus haut, mais auquel cette source ne participe pas.
Le malaise perceptible de Rudolf devant ces exagérations va se révéler plus que fondé. Le nom de l’auteur présumé du rapport en question serait «S. Pinter». Il faut être familier des discours négationnistes pour reconnaître un négationniste mineur, le germano-américain Stephen F. Pinter. Il compte beaucoup aux yeux des négationnistes parce que ce personnage aurait participé entre 1946 et 1948 comme juriste côté alliés à diverses procédures contre les Allemands, notamment à Dachau, et qu’en 1959 il a écrit une lettre à un journal local américain, affirmant qu’il n’y avait pas eu de chambre à gaz à Dachau, où il avait été en poste15.
De l’aveu même de Pinter, il a abordé ses missions en Europe dans le but de faire acquiter le plus d’Allemands accusés. Ses propos sur Dachau, contraires à la réalité physique, à la documentation et aux témoignages16 démontrent évidemment qu’il était soit un exécrable observateur, soit un personnage purement malhonnête, que son parti pris pro-allemand a conduit à mentir. Cela n’est pas étonnant: Franz Sephan Pinter, né en Autriche en 1888 est très probablement l’auteur, sous le nom de Hester Warwick, d’une très longue lettre (aussi longue qu’un article) négationniste, publié en Allemand dans la revue nazie Der Weg en 195417 en Argentine, où nombre de cadres nazis étaient présents à l’époque. Cette lettre déployait des contre-vérités devenues classiques dans l’arsenal négationniste. Der Weg servit d’ailleurs de «source» au négationniste Paul Rassinier.
Le pedigree de l’auteur présumé, l’absence de toute information archivistique sur la provenance de ce «Mauthausen Bericht» suffiraient à jeter le doute sur sa fiabilité. Cela se corse un peu plus lorsque l’on apprend que l’information comme quoi Stephen F. Pinter aurait été à la tête d’une commission alliée à Mauthausen provient d’Emil Lachout18, un vieux néo-nazi et négationniste ayant fabriqué des faux, en mentant accessoirement sur sa biographie, à la fin des années 1980 en Allemagne19. Or, qu’apprendrait-on en 2004, au plus profond d’une publication négationniste confidentielle? Germar Rudolf tenait son graphique «émanant de l’US-Army Chemical Corps» de… Emil Lachout20! Le clou dans le cercueil de cette fumisterie a été fourni par Stephen F. Pinter en personne et par avance, dès 1974. Il confiait alors à un correspondant: «Je n’ai rien eu à voir avec Mauthausen»21! Est-il utile de rajouter qu’il n’y a évidemment pas la moindre trace d’une commission alliée sur Mathausen en 1948? Ouïlle. In fine, il est même évident que Stephen F. Pinter n’est l’auteur d’aucun «Mauthausen Bericht». C’était de toutes façons un bien mauvais choix de la part d’Emil Lachout…
Le fait que Rudolf n’ait pas révélé dès le départ la provenance de son diagramme prouve à la fois sa malhonnêteté et le fait qu’il ne croyait pas complètement à son authenticité, tout en étant incapable de résister à l’envie de présenter, quitte à ne pas les exploiter vraiment, des «données» aussi conformes (bien que de façon particulièrement outrancière) à la direction de ses propres falsifications.
Rudolf a semble-t-il compris assez tôt le caractère vraiment trop douteux de son diagramme: celui-ci disparaît en effet très rapidement des éditions successives du «Rapport Rudolf». Cette «disparition» n’a évidemment fait l’objet d’aucun commentaire de la part de Rudolf dont la révélation qu’il le tenait de Lachout intervient plus de 12 ans après sa première publication. Une manifestation assez cocasse du rétropédalage paniqué mais discret de Germar Rudolf se trouve dans l’édition web/pdf d’une de ses innombrables publications, ici un recueil de 1993, écrit sous pseudonyme et intitulé pompeusement «Leçons sur l’histoire contemporaine»22. Dans la troisième leçon, une «causerie» sur les aspects «physico-chimiques» d’Auschwitz, Rudolf déploie ses falsifications habituelles. La version papier reproduisait le diagramme Pinter-Lachout (sans dire sa provenance). La version web/pdf a remplacé le diagramme par le commentaire suivant: «Da die Daten dieser Grafik unfundiert und irreführend sind, wird sie hier nicht dargestellt», à savoir «Compte-tenu de la nature trompeuse et sans fondement des données de ce graphique, il n’est pas reproduit». Re-ouïlle. Faut-il enfoncer le couteau dans la plaie en mentionnant que Rudolf y répète son mensonge sur Gerhard Peters23?
Au delà du caractère frauduleux de ce diagramme, on peut cependant remarquer qu’il propose des formes de courbes d’évaporation tout à fait cohérente avec une loi exponentielle, dont nous pensons qu’elle est une hypothèse raisonnable. Surtout, au delà des durées délirantes qu’il propose, une information intéressante, que l’on connaît déjà, s’y trouve: l’influence de la température sur la vitesse d’évaporation. On constate notamment qu’au dessus de 25 oC (au dessus de la température d’ébullition?) la vitesse d’évaporation est deux fois plus rapide que la vitesse à 25 oC! Cela est évidemment conforme à ce que nous disions plus haut. D’ailleurs, cette évidence ne peut avoir échappé à Germar Rudolf qui a fait le choix de l’ignorer totalement car cela, ainsi que nous l’avons signalé, rend irrecevables tous ses «raisonnements», qui passent sous silence le facteur température.
C’est à se demander quelle part de vérité il pourrait y avoir dans ces diagrammes. Emil Lachout est connu pour avoir été probablement en possession de documents authentiques. Mais ceux qu’il a rendus publics étaient altérés de façon à corroborer le discours négationniste. Se pourrait-il qu’il soit parti de vraies données pour fabriquer un diagramme visiblement «ralenti»? Germar Rudolf nous fournit, sans doute involontairement une piste. Dans la lettre de 2004 de Germar Rudolf, citée plus haut, extraite d’une publication négationniste confidentielle, il écrivait: «Sans doute par erreur [sic], les durées d’évaporation présentées dans le diagramme sont dix fois supérieurs à la réalité»24. Si c’est le fond de la pensée de Rudolf, que ne l’a-t-il dit dans les version ultérieures de son rapport et exploité le diagramme débarrassé de cette erreur? Voici pourquoi:
Nous avons effectué ce que Rudolf préconise: diviser les durées par dix. On peut alors faire deux constats. Il y a enfin une courbe qui corrobore la fameuse affirmation de Rudolf, «50 % en 30 minutes», c’est la courbe d’évaporation à 25 oC (notons que cela ne corrobore toujours pas, évidemment, «10 % en 10 minutes»). Il est tout de même curieux que Rudolf n’ait pas souhaité utiliser pareille donnée. Ou pas. Car le second constat, spectaculaire, c’est la vitesse d’évaporation au dessus de 25 oC: très rapide. 20 % en 5 minutes, 40 % en dix minutes, 94 % en 30 minutes («la plus grande partie»…). Rudolf ne peut se permettre de faire connaître une telle possibilité, soulignant l’importance de la température qu’il doit absolument négliger pour promouvoir son évaluation frelatée de 10 % en 10 minutes. Notons que la réalité (le brevet de 1922, Peters & Rauscher) indiquent des vitesses d’évaporation plus rapides que cette version corrigée du graphique Rudolf-Lachout-Pinter. Dernière expérience de pensée aussi anecdotique qu’édifiante (et honnêtement tirée par les cheveux): si l’on applique aux données réelles dont on dispose à 20 oC (28 % en 5 minutes, 48 % en 10 minutes), le ratio constaté (sur la courbe Lachout-Pinter corrigée Rudolf) du double pour les températures supérieures à la température d’ébullition, on obtient… 56 % en 5 minutes et 96 % en 10 minutes…
Il est clair qu’en réalité ce diagramme est inexploitable. Mais Rudolf, tout en en connaissant la provenance et le caractère douteux a commencé par l’utiliser et lorsqu’il y renonce, il pense quand même qu’il correspond à une réalité (il suffit de diviser les durées par dix), mais comme dans ce cas, le diagramme corrigé fournit une courbe tout à fait contraire aux chiffres frelatés qu’il avance, Rudolf cache l’objet du forfait et falsifie d’autres sources. Après avoir été dupe et complice d’un faussaire, Rudolf retombe dans la mauvaise foi la plus anti-scientifique. Tout ceci est simplement risible.
Conclusion Rudolf n’a jamais démontré que le chiffre qu’il va utiliser partout dans son «rapport», dégagement de 10 % en 10 minutes, est corroboré par le moindre élément concret. Il tient des raisonnement anti-scientifiques, falsifie ses sources, utilise des faux, tente de camoufler ses turpitudes. La réalité documentée révèle que l’acide cyanhydrique se dégageait en réalité à une vitesse foudroyante, plus (car dans des conditions de température très probablement supérieures au seuil d’ébullition) de 28 % en 5 minutes, 48 % en 10 minutes, 73 % en 20 minutes, etc., confirmant les durées de gazages très courtes mentionnées par tous les témoins. Ce qui est risible c’est que même à 10 % en 10 minutes, les quantités d’acide cyanhydrique dégagées suffisaient, dans les conditions décrites par les témoins, à assassiner en 5 minutes. Pour se sortir de cet autre mauvais pas, Germar Rudolf aura recours à d’autres falsifications, que nous analyserons ailleurs.
L’étude qui s’achève ici ne concerne que quelques lignes réparties sur deux pages d’un «rapport» qui en compte plus de cent. Il faut bien comprendre que la densité de mensonges, falsifications, affirmations anti-scientifiques demeure également élevée tout le long de ces cent pages. C’est la raison pour laquelle il est humainement impossible de tout réfuter, mais qu’il est important de démontrer sur quelques exemples que Germar Rudolf est un incompétent scientifique, un hypocrite et un falsificateur.
Cheers.
Post-scriptum (2020)
Le présent post-scriptum n’ajoute, in fine, rien à ce que nous savons désormais de Germar Rudolf, à savoir que c’est un menteur et un incompétent. Cependant, le lecteur curieux (et endurant) y trouvera de spectaculaires confirmations via la façon dont Rudolf a modifié les versions successives de son rapport, comment il (n’)a (pas) répondu à la présente étude et comment, pris par suprise dans une interview en 2020, il a enfoncé les clous de son propre cercueil.
Le 20 juillet 2020, Germar Rudolf donne une interview sur le blog néo-nazi et négationniste The Right Stuff du suprémaciste raciste conspirationniste et antisémite particulièrement virulent Mike Enoch, dans le cadre de son podcast largement écouté TDS, The Daily Shoah (une jeu de mot subtil et raffiné sur the daily show…). Ce n’était pas la première fois d’ailleurs que Rudolf se rendait au micro de Mike Enoch, ni même d’ailleurs au micro des plus délirants racistes et antisémites qui soient (il venait de donner une interview, pas la première non plus, à l’ancien Grand Dragon du Ku Klux Klan, David Duke). En ce beau jour de juillet 2020, Mike Enoch pose une question, visiblement non préparée, à Rudolf sur la présente page web…
Lorsque que nous avons mis en ligne le présent texte en 2016, nous étions persuadé que Germar Rudolf serait rapidement mis au courant et ne manquerait pas de «répondre» par une salve de nouvelles falsifications et d’accumulations de protestations hypercritiques. Nous avions raison pour le premier point, mais pas complètement pour le second. En effet, dans aucune de ses nombreuses publications produites depuis, Germar Rudolf ne fit la moindre allusion à nos démonstrations ni ne tenta véritablement d’y faire pièce.
Entre 1991 et 2003 il publie pas moins de cinq versions de son «rapport». Il réduit considérablement la section consacrée à la vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique, supprimant les références les plus suspectes et les manipulations et mensonges les plus grossiers, ne gardant plus que la seule référence à l’article (et aux courbes) de Irmscher. Dans la version de 2003, devenue un monstrueux pavé de plus de 450 pages (les premières version en comptaient environ quatre-vingt-dix25), les chiffres qu’il promeut alors sont devenus les suivants: 10% de l’HCN s’est évaporé en 5 minutes et 50% en une demi-heure. Le premier chiffre est équivalent au double de celui qu’il promouvait avec tant d’ardeur dans les premières versions (voir plus haut) et le second (qui ne correspond même pas à la courbe Irmscher pour peu qu’un peu de rigueur soit mise en œuvre) demeure celui auquel il s’accroche coûte que coûte, fruit initial de sa falsification de l’ouvrage de Gerhard Peters et surtout de sa négligence des facteurs températures et des informations fournies par Peters et Rauscher. Dans aucune de ces versions il ne fait allusion à la question de la température (c’est-à-dire à son influence primordiale sur la vitesse de dégagement), dont nous avons montré qu’elle était fondamentale. Remarquons que Rudolf qui a connaissance des écrits de Peters relatifs à la vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique (qui contredisent évidemment ses chiffres frauduleux) les passe complètement sous silence. Ici encore, la malhonnêteté radicale de Rudolf demeure constante et spectaculaire tout au long de ces années.
En 2011 Rudolf introduit enfin dans la sixième édition, pour la première fois, la notion de température (à savoir le fait que la température a une influence sur la vitesse de dégamenent de l’acide cyanhydrique), sans toutefois expliquer pourquoi il le fait ni surtout pourquoi il ne l’avait jamais fait auparavant26. Il écrit (p. 183):
«Malheureusement le graphe [Imscher] ne contient pas de données pour des températures plus élevées, mais, en considérant les différences entre les courbes pour 0 oC et 15 oC, on peut effectuer une extrapolation grossière d’une courbe pour 30 oC».Il faut remarquer que Rudolf poursuit ici la démonstration de son incompétence et de sa malhonnêteté radicale. Il n’explique nulle part pourquoi il évoque désormais une température de 30 oC (nous savons nous qu’il y est acculé27), mais l’on comprend qu’il considère, quand bien même implicitement, que c’est la température qui devait régner dans les chambres à gaz. Il y a ici une certaine ironie que ne percevront que ceux qui se rappelleront que dans ses premières versions, Rudolf martelait que des températures plutôt basses devaient y régner (facteur qui selon lui devait favoriser la formation de bleu de prusse: Germar Rudolf devient évidemment — et très hypocritement — muet lorsqu’il doit prendre acte d’une température élévée et ne tire pas la conclusion qu’il devrait de sa précédente affirmation, à savoir que de telles températures devraient être défavorables à la formation de bleu de prusse…). Jamais Germar Rudolf n’évoque ni ne justifie ses volte-faces. Par ailleurs, il ne décrit nullement quelle règle il applique pour «extrapoler» une courbe à 30 oC. Les chiffres qu’il propose dans un premier temps (15 % après 5 minutes et 60 % après 30 minutes. Une simple vérification montre d’ailleurs que Rudolf applique ici, de nouveau sans le dire la loi expontielle que nous avons démontrée, à partir du couple de valeur 5 minutes/15 %) sont le fruit d’un pur abitraire que Rudolf ne s’abaissera pas à justifier. Ce n’est pas de la science, c’est du tir de fléchettes les yeux bandés. Ces valeurs arbitraires sont en réalité fortement sous-évaluées quand on se rappelle que l’expert allemand Herbert Rauscher donnait la valeur (expérimentale) de 28 % en 5 minutes à 20°C (10 de moins…), ou même par rapport aux descriptions, connues de Rudolf (mais désormais passées sous silence), fournies par Gehard Peters (voir plus haut). Rudolf ment et sait qu’il ment.
Surtout, et c’est là un «oubli» proprement hallucinant, Germar Rudolf n’évoque absolument pas qu’au dessus de 26 oC, on se trouve au dessus de la température d’ébullition et que l’accélération de la vitesse d’évaporation ne peut en aucun cas être extrapolée à partir des courbes obtenues pour des valeurs inférieures à cette température d’ébullition. En réalité, comme on l’a mentionné plus haut, au dessus de 26 oC, les vitesses d’évaporation sont très probablement fulgurantes.
Tout cela est d’autant plus risible que Rudolf invoque alors deux raisons pour abaisser encore la vitesse d’évaporation à 30 oC dans les chambres à gaz, la répartition non adéquate des granules de Zyklon B et une forte humidité de l’air. Il ne nous semble plus nécessaire de faire ici la démonstration détaillée de l’inanité de ces prétextes, compte-tenu du fait que nous avons déjà apporté la preuve du fait que Rudolf n’hésitait jamais à mentir pour tordre le cou à la réalité scientifique28. Il faut relever que les impacts quantitatifs de ces deux motifs de ralentissement ne sont absolument pas justifiés par Rudolf. Sur le premier, qu’il n’explique que de façon qualitative sans réelle justification scientifique, on ne peut que relever cette indigence. Sur le second, l’humidité, il faut relever d’où Rudolf le tire, à savoir le même article de Irmscher qui spécifie que:
«les mesures n’ont pu être effectuées dans les cas où la l’humidité dans la pièce est élevée, induisant un dépot d’eau ou de neige (selon la température) sur les surface d’évaporation, ce qui diminue de façon significative la vitesse d’évaporation»29.Ce n’est donc pas l’humidité en soi qui peut ralentir (et on ne parle ici que des conditions étudiées par Irmscher inférieures à 15 oC) la vitesse d’évaporation, mais la condensation ou un dépôt de neige (on voit bien qu’il s’agit de températures basses). Germar Rudolf qui répète au moins quatre fois (il y tient) dans son texte l’influence de l’humidité (mais toujours en la tirant du seul Irmscher) se garde évidemment de citer précisément Irmscher. Pourquoi? Parce que, à la lecture de Irmscher, on comprend que la situation décrite par celui-ci ne s’applique en fait nullement aux conditions qui règnent dans une chambre à gaz. Pour qu’il y ait condensation, il faut que l’air soit saturé d’humidité soit une humidité de 100%. Or, plus la température est élevée, plus un tel taux est en fait difficile à atteindre. De plus la condensation qui limite la vitesse d’évaporation est une condensation à basse température, inférieure à la température d’ébullition de l’acide cyanhydrique. Une humidité due à la respiration humaine (comme le suggère Rudolf30) dans une pièce à plus de 30 oC, aurait-elle un impact négatif? Rien ne l’assure, au contraire. D’une part, Rudolf ne prouve jamais que l’humidité atteint nécessairement 100% dans les conditions de température élevée qui régnaient dans les chambres à gaz (une fois de plus il fait l’économie de l’étude de ce facteur fondamental qu’est la température). D’autre part, même si une telle valeur était atteinte, une condensation de goutelettes à une température de plus 30 oC n’aurait-elle pas sur l’acide cyanhydrique liquide l’effet d’une plaque de fer à repasser chaud sur des gouttes d’eau, à savoir favoriser une évaporation (et plutôt un passage à l’état gazeux par ébullition) quasi-instantannée? En fait, et nous aurions du insister sur ce point dès 2016: exposé à des températures supérieures à 30 oC, l’acide cyanhydrique contenu dans le Zyklon B n’est plus avant tout soumis à un phénomène d’évaporation, mais bien avant tout à celui d’ébullition, radicalement différent (ce n’est plus un simple phénomène de surface), beaucoup plus violent et induisant un dégagement gazeux beaucoup plus rapide. Tout constat effectué sur le phénomène de l’évaporation à des températures significativement inférieures à la température d’ébullition devient purement et simplement caduc pour le phénomène radicalement différent d’ébullition à des températures significativement supérieures! En particulier, on le voit, l’impact négatif, non de l’humidité, mais, en fait, de la condensation à basse température constaté par Irmscher ne saurait justifier d’en tirer de conclusions ni qualitatives et encore moins quantitatives (ce que fait Rudolf sans la moindre justification. Comme à son habitude il décide arbitrairement de chiffres qui l’arrangent) pour le cas de températures supérieures à 30 oC, c’est à dire significativement supérieures à la température d’ébullition de l’acide cyanhydrique. Une fois encore, Germar Rudolf fait la démonstration de sa mauvaise foi et de son incompétence. Le discours de Germar Rudolf sur l’impact de l’humidité, et les coefficients (arbitraires) de ralentissement qu’il choisit d’utiliser n’ont pas la moindre validité scientifique.
Notons également cette curiosité que dès 2003, Rudolf mentionnait ces deux facteurs, selon lui, de ralentissement, mais ne jugeait pas nécessaire d’abaisser les chiffres de Irmscher à 15 oC (rappelons qu’il ne tenait alors aucun compte de la température), preuve qu’alors ils ne lui semblaient pas si déterminants. Ce qui nous intéresse ici est la conclusion de Rudolf, à savoir qu’il va faire (p. 185):
«l’hypothèse que le Zyklon B se comporterait au mieux, dans le cas d’une température de 30 oC dans une chambre [à gaz], de la même façon que décrite par Irmscher pour 15 oC».Bref, Rudolf ne démord pas des seuls chiffres qu’il veut absolument utiliser (désormais 10% en cinq minutes et 50% en trente, qui n’est toujours pas le chiffre correspondant à la courbe de Irmscher). Il ne justifie jamais pourquoi il introduit la mention de la température de 30 oC (qui est très probablement un minimum, comme nous l’avons vu). On comprend qu’il ait alors besoin que les deux facteurs de ralentissement qui ne ralentissaient pas grand chose en 2003 (quand il ne tenait nullement compte de la température) dussent désormais absolument ralentir radicalement la vitesse d’évaporation à 30 oC. Mais Rudolf introduit implicitement des coefficients précis de ralentissement sans prendre la peine d’en esquisser la moindre justification scientifique: il parle lui-même d’«hypothèse» mais ne fournit aucun élément destiné à l’étayer. Ce sont les mêmes procédés que vingt ans plus tôt. Cela est d’autant plus infondé que les constats de Irmscher pour des basses températures ne sauraient s’appliquer à une situation de température supérieure à la température d’ébullition de l’acide cyanhydrique, réalité et concept que Rudolf continue toujours scandaleusement à passer sous silence et donc négliger, sciemment évidemment. C’est scientifiquement du grand n’importe quoi et cela doit tout à l’extrême mauvaise foi de Rudolf qui se contorsionne de façon pitoyable pour obtenir non des chiffres conformes à la réalité, mais les chiffres dont il a besoin pour mener à bien la négation de la réalité.
En 2017, Germar Rudolf sort une septième version de son rapport, tout en en changeant le titre qui devient un très prétentieux The Chemistry of Auschwitz. The Technology and Toxicology of Zyklon B and the Gas Chambers – A Crime-Scene Investigation31. Le contenu est presque identique à la version précédente. La section qui nous intéresse est quasiment inchangée par rapport à la version de 2011. Elle comporte cependant des ajouts et des modifications qui montrent que Rudolf a lu avec attention la présente étude de 2016.
D’abord, Rudolf cesse enfin de parler de «50% en trente minutes» et consent enfin à lire la courbe qu’il utilise depuis vingt-sept ans. Désormais, c’est le chiffre de 45% en trente minutes (que nous mentionnons ici même, ceci expliquant sans doute cela) qu’il utilise. Par ailleurs, Germar Rudolf fournit un graphique où il isole la courbe à 15 oC de Irmscher et lui superpose une courbe théorique équivalente correspondant à une loi exponentielle. Voici cette courbe (p. 237):
Franchement, Rudolf aurait pu avoir la décence de nous remercier: la proximité, tant sur le fond que sur la forme, de ce graphique avec ceux que nous avions produits pour nos démonstrations est frappante. Le procédé est d’autant plus pitoyable et puéril que ce graphique n’apporte aucune information ni complément aux propos de Rudolf. Il l’a placé là, uniquement en réaction à la présente page, uniquement pour faire sérieux. Il s’agit ici, in fine, d’un vulgaire hommage du vice à la vertu. En passant, Rudolf valide de nouveau le fait qu’il a, depuis le début de ses mensonges, fait l’hypothèse d’une loi exponentielle. Il aura fallu plus de vingt ans (et notre étude…) pour que Germar Rudolf consente à respecter un minimum une règle de probité scientifique banale, dire clairement ce que l’on fait. La rigueur de Rudolf n’ira toutefois pas jusqu’à justifier cette hypothèse, ce qui était pourtant à sa portée puisque son graphe démontre bien que l’approximation par une loi exponentielle est plutôt bonne. Rudolf rate la seule occasion qu’il avait de faire, enfin, un peu de science sérieuse. Mais peut-être attend-il la version 23 prévue pour 2046 pour s’y mettre… Ce n’est pas là, toutefois, l’aspect le plus intéressant de la (non) prise en compte par Rudolf des éléments que nous avons présentés ici.
En toute fin de section, Rudolf ajoute une note de bas de page qui ne figurait pas dans la version 2011, la note 297 (p. 238). Il écrit:
«La démonstration du degré d’ignorance dans lequel même les plus savants des experts allemands du Zyklon B étaient de sa toxicité émane du témoignage donné en 1948, par le Dr. Herbert Rauscher, le représentant à l’étranger de la Heli, firme de distribution du Zyklon B, et proche collaborateur du meilleur expert d’Allemagne de lutte anti-nuisibles, le Dr. Gerhard Peters. Nous y lisons: “[une boîte de 500g de Zyklon B] étaient absolument suffisante pour tuer tous ceux présents en 2 minutes, une fois ouverte et son contenu déversé […] Afin de provoquer la mort, disons en une minute, une concentration de gaz de 5 grammes par mètre cube doit être obtenue.” (Walendy 1981, p. 186). Il n’en savait pas plus précisément parce qu’ils n’avaient aucune expérience de la mise à mort d’êtres humains avec du Zyklon B».La lecture de cette note virulente appelle plusieurs remarques. La première concerne son objet apparent: la toxicité du Zyklon B (en fait de l’acide cyanhydrique), pas la vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique. Autrement dit, cette note est hors sujet, elle ne figure pas dans la bonne section du pavé de Rudolf. C’est que ce sujet apparent (une autre marotte de Germar Rudolf qui fait l’objet d’autres falsifications radicales de sa part, sur lesquelles nous reviendrons prochainement sur phdn) n’est pas le vrai sujet de cette note. Ce que vise ici Rudolf c’est à disqualifier Herbert Rauscher, la source de la donnée expérimentale — que nous avions révélée — qui réduit à néant ses falsifications et ses mensonges sur la vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique, à savoir 28 % en 5 minutes. Rudolf a de toute évidence été radicalement gêné par cette donnée, qu’il a découvert ici-même… S’il avait été cet esprit si honnête, rigoureux et impartial qu’il prétend depuis 30 ans, il aurait pris acte de cette information fournie par Herbert Rauscher, quand bien même pour la contester. Mais non! Il la passe, ainsi que la présente étude (il est vrai qu’il n’aurait pu mentionner l’une sans l'autre) entièrement sous silence…. Rudolf utilise un procédé dérisoire, tenter de décrédibiliser Rauscher sur un autre sujet. Un lecteur un peu attentif ne peut évidemment que rester perplexe devant cette attaque hors sujet (Germar Rudolf ne parle nulle part ailleurs de Herbert Rauscher qui surgit ici sur le point de la toxicité, sans qu’on comprenne bien pourquoi) dont il ne saisit sans doute pas la nécessité, mais celui qui a connaissance de la présente page en comprend le pitoyable objectif, qui n’est même pas explicité par un Rudolf plus hypocrite et retors que jamais.
Le plus drôle, c’est que Rudolf va lamentablement échouer à décridibiliser Rauscher. En fait, il fournit un argument qui atteint l’effet inverse.
L’ouvrage que cite Rudolf, du négationniste allemand Udo Walendy, est un recueil de dépositions et interrogatoires de témoins et accusés allemands à l’occasion des procès de Nuremberg et notamment du procès de l’IG-Farben dont des filiales fabriquaient et distribuaient le Zyklon B32. La reproduction de sources primaires par les négationnistes est assez rare car elle aboutit toujours à infirmer de façon spectaculaire leur négation, pour peu qu’on fasse l’effort de lire sans se laisser impressionner par les gloses falsificatrices dont ils les entourent. C’est évidemment le cas avec ce gros recueil de Walendy. Le point important est que le passage cité, que nous avons vérifié, n’illustre nullement l’incompétence de Rauscher. La première affirmation de Rauscher à savoir qu’une boîte de 500g de Zyklon B peut tuer en deux minutes n’est tout simplement pas possible à juger car dans l’interrogatoire du 3 avril 1948 dont elle est extraite, la taille de la pièce où cette quantité serait utilisée n’est pas précisée. Il s’agit du lieu où se tient l’interrogatoire et l’on comprend évidemment qu’il s’agit d’une approximation par Rauscher auquel il a explicitement été demandé une évaluation rapide (Walendy, op. cit., p. 185). La fiabilité, ou plutôt l’exactitude de l’affirmation de Rauscher ne peut être évaluée puisque cette information ne nous est pas fournie et était sans doute inconnue de Rauscher lui-même qui exprime là un avis rapide. On reste pantois que Rudolf, qui se prétend plus compétent que les meilleurs experts allemands du Zyklon B, semble ne pas s’en apercevoir et émette un jugement aussi péremptoire qu’illégitime. Cela est d’autant plus grave que le passage cité par Walendy contient une question posée à Rauscher par son interlocuteur, justement à propos de l’impact de la dimension de la pièce. Rudolf évite opportunément de citer ce passage. Les incises importantes pratiquées par Rudolf dans le verbatim de l’échange retranscrit par Walendy ne permettent évidemment pas, à dessein, de comprendre ce qui est dit. Rauscher répond que la quantité de Zyklon B dépend évidemment du volume de la pièce où le gazage a lieu, et c’est dans le cadre de cette réponse qu’il développe un raisonnement détaillé sur les quantités unitaires nécessaires pour tuer en une minute. Il mentionne alors le second point relevé par Germar Rudolf, à savoir que 5 grammes par mètre cube d’acide cyanhydrique sont suffisants pour tuer en une minute, ce qui est en réalité tout à fait fondé: cela correspond en effet parfaitement aux données toxicologiques de l’acide cyanhydrique, dont on sait qu’il peut tuer en quelques minutes dès 300 ppm (parties par million). La quantité évoquée ici correspond approximativement à 5000 ppm, une dose foudroyante selon toute la littérature scientifique33. La plus récente littérature scientifique confirme de façon spectaculaire l’ordre de grandeur fourni par Rauscher. Dans un ouvrage spécialisé de 201934, on peut lire:
«Globalement, les différentes estimations concernant la toxicité aigüe mortelle pour les vapeurs d’acide cynhydrique suggèrent que […] que pour une minute d’exposition une concentration d’acide cyanhydrique d’environ 3640 ppm [est fatale]».Mentionnons en passant que c’est justement à peu de choses près la concentration atteinte en cinq minutes dans une chambre à gaz (en utilisant le chiffre de Rauscher pour 20 oC, donc probablement très en dessous de la réalité au dessus de 30 oC)… Il est évident que, contrairement à ce qu’espérait montrer Germar Rudolf, l’interrogatoire du 3 avril 1948 de Herbert Rauscher démontre la grande compétence de celui-ci ainsi que sa très bonne connaissance des propriétés du Zyklon B. Voilà qui renforce évidemment — cela n’était même pas nécessaire compte tenu de son profil — la crédibilité de Rauscher et des données expérimentales sur la vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique de sa déposition du 19 avril 1948 (données qui corroborent les écrits de Gerhard Peters, connus de Rudolf mais qu’il passe sous silence). On n’insistera hélas pas assez sur le caractère radicalement malhonnête et pervers de Germar Rudolf qui cite, en les tronquant, des déclarations non pertinentes pour le sujet de la vitesse de l’évaporation de l’acide cyanhydrique afin d’oter tout crédit à leur auteur quant aux données expérimentales qu’il fournit sur ce sujet-là, données dont Rudolf a de toute évidence désormais connaissance (grâce à nous) mais qu’il passe sous silence. Tout ceci est proprement hallucinant.
Avant de poursuivre, attardons-nous tout de même sur la dernière phrase de Rudolf: «Il [Rauscher] n’en savait pas plus précisément parce qu’ils n’avaient aucune expérience de la mise à mort d’êtres humains avec du Zyklon B». Il faut bien comprendre que, justement, c’est l’exacte inverse qui est vrai: Rauscher connaît très précisément les concentrations létales parce qu’une «expérience» massive, à très grande échelle, d’assassinats d’êtres humains avec de l’acide cyanhydrique a eu lieu, avec le produit fourni par la société de Rauscher qui en était l’un des meilleurs experts. Une fois de plus, le postulat négationniste (inexistence des assassinats par gazage) est érigé en démontration.
Nous avions fait ces constats depuis longtemps mais n’avions pas jugé nécessaire de rajouter un tel post-scriptum, la guerre d’attrition argumentative fractale à laquelle se livre Germar Rudolf ne modifiant nullement nos conclusions et démonstrations sur ses fraudes passées. Toutefois l’interview de près de trois heures (les négationnistes sont tous atteints de logorrhée) qu’il donne le 20 juillet 2020 au néo-nazi Mike Enoch contient deux passages croustillants. Le premier, peu après 1h et 19min lorsque Rudolf déclare qu’à température ambiante (ce qui signifie environ 20 oC) l’évaporation de l’acide cyanhydrique peut être complète «en une heure ou un peu plus». Même s’il l’accompagne de la précision «avec un air sec» (humidité oblige), cet aveu (probablement involontaire) de Rudolf est intéressant. Il contredit ses premières affirmations péremptoires (mal) fondées sur la fumeuse lettre de la Detia Freyberg dont il prétendait qu’elle lui permettait d’affirmer qu’il fallait au moins deux heures pour que l’évaporation dépasse 80% (cette durée est, selon les propos mêmes de Rudolf, divisée par deux) et surtout, il suffit de se reporter à nos courbes précédentes pour constater que cela correspond plutôt bien aux données de… Herbert Rauscher.
Là où cela devient vraiment intéressant c’est dans le court passage suivant, vers 1 heure 22 minutes, dont nous fournissons l’extrait ci-contre. Et un verbatim partiel que nous commentons35.
Mike Enoch demande soudain à Germar Rudolf:
«Il y a cet autre type, tu as probablement déjà répondu à ça [spoiler: jamais] […], je suis sûr que tu le connais, il s’appelle Gilles Karmasyn [prononcé Jaïlz Karmacine…], il a ce site web, p.h.d.n, il a une attaque sur toi datant de 2016. Je dois avouer que je n’ai pas pu tout comprendre mais ce que j’ai compris c’est que c’est à propos de l’évaporation de l’acide cyanhydrique du Zyklon B, et il prétend — et je ne pense pas que ce type soit vraiment un scientifique […] — il prétend que tes affirmations à propos de la vitesse d’évaporation ou les concentrations de l’évaporation [sic] sont pour ainsi dire toutes fausses et que tu es un escroc. Je ne sais pas si tu as vu son article, c’est sur phdn, je suis sûr que tu connais ce site…».Le néo-nazi Mike Enoch qui n’a pas tout compris de la présente page (mais l’essentiel, il faut le constater) se permet tout de même un jugement sur notre qualité de «scientifique»… Ce qu’il y a de bien avec les interviews orales entre familiers (Gerrmar Rudolf a toujours été un néo-nazi et le ton de l’entretien est celui d’une franche camaraderie), c’est que l’ambiance chaleureuse entraîne une baisse de vigilance. Certaine prudence et retenue de mise pour l’écrit sont spontanément oubliées… La réponse de Germar Rudolf, après un «blanc» est la suivante:
«Oui, je le connais… Euh… Et bien… le seul fait d’affirmer quelque chose ne signifie pas que cela soit vrai. Tout est faux».Avant de poursuivre l’examen de la suite de la réponse de Rudolf (qui va essayer d’articuler quelque chose de plus concret après avoir rassemblé ses esprits), arrêtons-nous rapidement sur cette première défense… D’abord, Rudolf admet qu’il connaît la présente page, ce que nous savions depuis 2017, pourtant Rudolf n’a jamais osé faire la moindre allusion explicite à notre travail, tout en tentant d’allumer de dérisoires contre-feux, comme on l’a vu plus haut. Et le réflexe d’un Germar Rudolf visiblement pris au dépourvu est un truisme assez pitoyable qui s’applique en réalité à un nombre impressionnant de ses propres affirmations (et notamment celles sur l’effet négatif de l’humidité). Nos affirmations, notamment sur l’incompétence et la malhonnêteté radicale de Rudolf sont cependant parfaitement étayées, contrairement à ce que Rudolf tente de suggérer ici. Le jugement qu’il émet alors sur les présentes démonstrations («tout est faux») est évidemment risible, d’autant plus risible qu’aucune réfutation ne leur a jamais été opposée.
Rudolf, cependant, se rend compte que ce genre de déclaration péremptoire ne lui permet pas de défendre l’image de scientifique compétent et rigoureux qu’il cherche (mais échoue) à promouvoir. Aussi, sans du tout nier l’ensemble des falsifications et malhonnêtetés que nous avons dénoncées, tente-t-il malgré tout de sauver sa fiction d’une évaporation lente. Et il va se tirer une balle dans le pied. Il poursuit donc:
«[…] Il est vrai que si vous rassemblez un millier de personnes dans un lieu clos, la témpérature de la pièce peut probablement s’approcher des 27 oC peut-être même près de la température du corps [37 oC!!!] là où les gens sont proches les uns des autres, il n’y a aucun doute là-dessus».Nous laissons le lecteur goûter ce passage. Rudolf confirme ce que Richard Green écrivait en 2001, et nous même de nouveau en 2016 (et que tout spécialiste de climatisation trouve banal), à savoir que rassembler une foule compacte d’êtres humains dans un lieu clos induit une augmentation rapide et importante de température, et même (quand bien même du bout des lèvres) que cette température dépasse en fait significativement la température d’ébullition de l’acide cyanhydrique. La mention de 27 oC (en anglais 80 oF, soit 26,6 oC) est en fait une référence implicite (quoique peut-être inconsciente — Rudolf n’a pas le temps de réfléchir et ce qu’il sait sort spontanément) à la température d’ébullition de l’acide cyanhydrique. Associé à l’information qu’il confirmait précédemment, l’influence décisive de la température sur la vitesse d’évaporation, telle qu’à 20 oC les données de Herbert Rauscher sont confirmées, Rudolf valide en fait complètement le scénario et ses conséquences que nous soulignions dans la présente étude.
On peut donc faire le constat que non seulement Rudolf en a connaissance, mais également qu’il en confirme les aspects fondamentaux dans un moment où il se trouve déstabilisé. Toutefois, Germar Rudolf ne peut évidemment se résoudre à déposer les armes, aussi tente-t-il de trouver des raisons pour affirmer que la vitesse d’évaporation ne pouvait être élevée. Le premier point qu’il soulève de façon assez confuse ne mérite même pas qu’on s’y attarde puisqu’il se contente de rappeler que le Zyklon B était déversé (uniquement d’ailleurs, dans le cas des chambres à gaz des crématoires II et III de Birkenau) dans des colonnes grillagées. Le lecteur peut entendre ce passage très embrouillé dans notre extrait. Beaucoup plus intéressant est le point sur lequel il insiste dans la foulée, sur un ton quasi-larmoyant:
«[…] Et [le Zyklon B] va refroidir et il va s’humidifier, c’est juste le problème de l’humidité que les gens ne comprennent pas. L’acide cyandhydrique, c’est mentionné dans les spécifications, l’évaporation ne marche que par faible humidité. Dès qu’on atteint 100% d’humidité, le support, le gypse refroidit à cause de l’évaporation, et alors vous avez de la condensation qui entraîne quasiment un effondrement de tout le processus d’évaporation et même à 30 oC, vous avez toujours de la condensation, vous avez toujours de l’humidité, et ça va quand même durer longtemps…».Et c’est tout. Ici se clôt la réponse de Rudolf à la présente page. De ses inventions anti-scientifiques et incohérentes à partir de la lettre de la Detia Freyberg, rien. De ses falsifications de l’ouvrage de Gerhard Peters, rien. De son utilisation d’un faux grotesque, rien. De sa négligence incroyable de la témpérature pendant des années et de son silence totalement inacceptable sur la température d’ébullition (qui continue!), rien. Sur les données expérimentales fournies par Herbert Rauscher, rien. Voilà le champion «scientifique» des négationnistes.
Le seul argument qu’il tente (comme dans les dernières versions de son «rapport») de promouvoir est celui de l’humidité. La façon dont il le fait ici est d’ailleurs révélatrice. Alors qu’il ne l’avait jamais mentionné par écrit, il exprime en fait que ce n’est pas l’humidité en soi qui pose problème mais la condensation, comme le dit clairement (voir notre citation plus haut), l’article de Irmscher. Or, comme nous l’avons montré plus haut, l’impact négatif sur la vitesse d’évaporation de la condensation à des températures inférieures, voire très inférieures, à 15 oC ne peut pas être généralisé à des températures largement supérieures, notamment supérieures à la température d’ébullition de l’acide cyanhydrique, lorsque c’est un processus d’ébullition qui prime. Mais Rudolf brode, invente, paraphrase en enrichissant arbitraitement le passage très laconique de l’article de Irmscher, sa seule et unique source. Il ne s’agit d’ailleurs nullement de «spécifications»! Ici Rudolf renoue avec le mensonge et tente de faire croire à son auditoire que l’on disposerait d’une description quasi officielle de l’impact négatif de l’humidité. C’est tout simplement faux. L’article de Irmscher n’est ni une spécification ni un mode d’emploi. Le seul document qui se rapprocherait de la spécification ou du mode d’emploi serait l’ouvrage de Gerhard Peters de 1933. Mais celui-ci a été falsifié par Germar Rudolf qui se contente désormais de surtout ne pas en parler puisqu’il contient un passage en totale contradiction avec les mensonges qu’il promeut…
Ensuite Rudolf falsifie de deux manières la brève remarque laconique de Irmscher. Irmscher n’écrit nulle part, même pour les températures qu’il étudie, que l’évaporation fonctionne uniquement par faible humidité, ni que la condensation fait s’effondrer l’évaporation. Il parle de «diminution significative de la vitesse d’évaporation», pas d’«effondrement». Rudolf d’ailleurs prend soin de ne pas mentionner ni sa source, ni les termes qui y sont employés, ni les conditions auxquelles ils se rapportent. Il compte bien qu’aucun de ses auditeurs néo-nazis ne manifestera la moindre curiosité. La fin de l’intervention de Rudolf est évidemment à pleurer. Rudolf sait que ce qu’Irmscher a constaté ne s’applique qu’à des température inférieures à 15 oC, il sait que quiconque examinerait ses propres inepties en ferait le constat, il sait que dans une chambre à gaz où les nazis entassent des êtres humains, la température augmente au delà de 30 oC (lui-même est obligé de concéder «proche de la température corporelle», soit 37 oC), aussi Rudolf tente-t-il d’asséner que cela ne change pas grand chose à son raisonnement. Sauf que Rudolf n’a jamais prouvé ni même cherché à le faire, qu’il y avait «toujours de la condensation» dans les conditions qui régnaient dans les chambres à gaz. Sauf que la vague explication qualitative qui décrit selon lui la diminution de la vitesse d’évaporation à des températures inférieures à 15 oC, soit significativement en dessous de la température d’ébullition de l’acide cyanydrique, ne saurait s’appliquer au dessus, notamment quand se produit le phénomène radicalemet différent, et brutal, d’ébullition. Comme l’avait déclaré en introduction, mais fort mal à propos, Rudolf, son affirmation ne vaut ici nullement démonstration. Last but not least, les derniers mots de Rudolf signent son impuissance. Il déclare, sur un ton quasi implorant, que, malgré tout, malgré la température très élevée, l’évaporation (ce n’est même plus le phénomène qui est principalement à l’œuvre) «va quand même durer longtemps». Come on! Longtemps? Comme le fut du canon? Voilà tout ce dont est finalement capable le champion des négationnistes, une affirmation totalement vague, parfaitement dénuée de la plus petite démonstration concrète ou étayée (et pour cause: sa seule source est laconique et hors sujet pour les conditions de température qui, de l’aveu même, inédit, de Rudolf, devait régner dans les chambres à gaz)? Les données quantitatives que Rudolf prétend utiliser dans les dernières versions de son rapport, martelant la lenteur de la vitesse d’évaporation de l’acide cyanhydrique ne sont que le fruit pourri de sa mauvaise foi négationniste et de son incompétence militante.
Trois constats s’imposent. Germar Rudolf a été contraint de prendre acte de la température très élevée, supérieure à 30 oC («proche de la température corporelle») qui régnaient dans les chambres à gaz et de l’impact important de la température sur l’augmentation de la vitesse d’évaporation. Germar Rudolf, en tentant de tirer des données quantitatives pour de telles températures d’une courte et laconique remarque qualitative valant pour des températures inférieures à 15 oC, demeure un incompétent scientifique radical. Enfin, Germar Rudolf n’a jamais ni écrit ni prononcé l’expression de «température d’ébullition»: il montre une fois de plus par là, et de façon spectaculaire, sa malhonnêteté radicale.
Ci-gît Germar Rudolf (1964-2020).
1. Germar Rudolf, Le Rapport Rudolf. Rapport d’expertise sur la formation et le contrôle de la présence de composés cyanurés dans les «chambres à gaz» d’Auschwitz, Anvers: Vrij Historisch Onderzoek, 1996, Traduction de Das Rudolf Gutachten, Cromwell Press, 1993. L’auteur de la présente étude en avait publié une première version très courte le 30 janvier 2003 sur les forums Usenet en réponse à un message négationniste (fr.soc.histoire & fr.soc.politique, "Rapport Rudolf, Gilles Karmasyn est naif ou malhonnete", 30/01/2003, Message-ID: <3e3908e7$0$2574$afc38c87@news.easynet.fr>). Nous avions commencé cependant nos travaux sur cet aspect depuis bien plus longtemps. Ils se sont poursuivis jusqu’à la présente publication. Il nous faut signaler qu’en 2001 avait été publiée une réfutation d’un autre document produit par Germar Rudolf dans le cadre du procès intenté par le négationniste David Irving contre l’historienne Deborah Lipstadt. Cette réfutation due à Richard Green, qui ne traite pas du sujet de la présente page, comprenait néanmoins un constat identique sur la loi cinétique de dégagement de l’acide cyanhydrique implicitement utilisée par Rudolf (à savoir une loi exponentielle). Notre propre déduction quant aux choix de Germar Rudolf était cependant indépendante de celle du Dr. Green (qui fait ce constat sur une courbe différente de celle que nous étudions ici) dont nous n’avions pas encore lu ce travail. Le Dr. Green procédait par ailleurs comme nous ici: il utilisait les propres hypothèses de Rudolf pour montrer l’incompétence de celui-ci et ses nombreuses incohérences.
2. Germar Rudolf mentionne «les données des deux sources allemandes (Detia Freyberg et Peters)» (p. 59).
3. La note 153 (p. 113) est la suivante: «G. Peters, Blausäure zur Schädlingsbekämpfung, Verlag von Ferdinand Enke, Stuttgart, 1933. R. Irmscher, Zeitschrift für hygienische Zoologie und Schädlingsbekämpfung, 1942, p. 36». On remarque que Rudolf ne fournit aucun numéro de page pour l’ouvrage de Peters, ce qui rend évidemment toute vérification quasi-impossible… Ce n’est évidemment pas ainsi que travaillent les vrais scientifiques.
4. Germar Rudolf, Gutachten über die Bildung und Nachweisbarkeit von Cyanidverbindungen in den 'Gaskammern' von Auschwitz (3., erweiterte und korrigierte Auflage, November 1992), Stuttgart, 1992, p. 59, cité notamment par Nizkor, également disponible en ligne, sur le site nazi VHO, administré par Rudolf. Dans un article paru en 1997 en anglais Germar Rudolf répète la même chose. Le passage correspondant est le suivant: «According to a publication by G. Peters the Zyklon B expert with DEGESCH, in the early 1930s Zyklon B released 50 % of its HCN in about 30 minutes» (Germar Rudolf, «The 'Gas Chambers' of Auschwitz and Majdanek», in Ernst Gauss [pseudonyme de Germar Rudolf], Foundations of Contemporary History. A Handbook on Controversial Questions of the Twentieth Century, traduit de l’Allemand par Victor Diodon, en ligne).
5. La note 152 est la suivante: «G. Peters, Blausäure zur Schädlingsbekämpfung, Verlag von Ferdinand Enke Verlag, Stuttgart, 1933. erlag, Suttgart 1933, bezueglich der Geschwindigkeit der Blausäure-Verdunstung vom Zyklon B-Traeger: S. 64f». On remarque que dans la version française le numéro de page a disparu…
6. Gerhard Peters, Blausäure zur Schädlingsbekämpfung, Verlag von Ferdinand Enke in Stuttgart, 1933. En ligne.
7. Peters écrit: «Die Gasentwicklung aus dem Zyklon setzt unmittelbar nach dem Ausstreuen mit großer Heftigkeit ein» (Peters, op. cit., p. 64) ce qui signifie «Le dégagement à partir du Zyklon se produit très violemment [avec une grande violence] dès [immédiatement après] la dispersion [du Zyklon]»
8. Le 9 décembre 1995, le Professeur Ulrich Rößler (Docteur en physique) relevait la falsification de Rudolf sur le forum Usenet alt.revisionim («Re: Luftl's 'Report' Again (Re: Comments and Questions to Ulri», alt.revisionism, 9 décembre 1995, Message-ID: <4aclps$9cr@gwdu19.gwdg.de>, cité par Nizkor). Le 5 août 1996, Rudolf faisait transmettre sur alt.revisionism un message prouvant qu’il avait pris connaissance du dévoilement de Ulrich Rößler, mais il bottait en touche, sans contester le constat de falsification (Ehrlich606, «Germar Rudolf Responds on Zyklon Outgassing», alt.revisionism, 8 août 1996, Message-ID: <4u5kqb$9qc@newsbf02.news.aol.com>). Ce court message présente un intérêt certain, outre l’évitement de Rudolf relatif à sa falsification. D’une part Germar Rudolf confirme le caractère très peu précis de la lettre de la Detia Freyberg, qu’il prétend ne plus posséder en raison d’une confiscation par la police (comme c’est pratique!). D’autre part, comme Ulrich Roessler avait remarqué que Rudolf avait utilisé, sans le mentionner, une loi d’évolution exponentielle, Rudolf répond, sans du tout contester le constat de Ulrich Roessler, qu’il «ne voit vraiment pas le problème à utiliser une loi exponentielle» (An der Annahme eines exponentiellen Verlaufes der Gasabgabe wird aber doch wohl kaum etwas auszusetzen sein). Germar Rudolf confirme donc notre hypothèse (que le tracé de la courbe théorique avait évidemment validé) et surtout sa malhonnêteté: il s’était gardé de mentionner son utilisation d’une telle loi ce qui est, scientifiquement, parfaitement inacceptable. Enfin, la raison invoquée par Rudolf pour l’utilisation d’une loi exponentielle mérite d’être citée: «parce qu’il n’existe pas de fonction décroissant plus rapidement» ( zumal es keine Funktion gibt, die schneller abfaellt). D’une part cette justification est tout à fait hors sujet (nous avons vu que de telles lois sont classiques en chimie et reflètent une certaine réalité). D’autre part, l’affirmation de Rudolf est, en tant que telle, mathématiquement, une totale ineptie. L’incompétence de Rudolf est ici aussi clairement illustrée. Nous laissons au lecteur le soin de soumettre ce point à n’importe quelle personne possédant un bagage mathématique de niveau license (quoique que le baccalauréat soit suffisant).
9. Wolfgang Lambrecht [très probablement un pseudonyme de Germar Rudolf] «Zyklon B – eine Ergänzung», Vierteljahreshefte für freie Geschichtsforschung, vol. 1, 1997, note 17, page 5 (Il écrit à propos de l’ouvrage de Peters: «Dies wurde von G. Rudolf in R. Kammerer, A. Solms, Das Rudolf Gutachten, Cromwell, London 1993, S. 59, irrtümlich falsch zitiert», à savoir que dans l’édition allemande de son rapport de 1993, Peters aurait été «mal cité par erreur»). Recourir à la rhétorique du «c’est pas moi m’sieur, on l’a mis dans ma poche» est évidemment pitoyable.
10. En 1993: «G. Peters[13] gibt für eine 50%ige Freisetzung der Blausäure eine halbe Stunde an» (Ernst Gauss [pseudonyme de Germar Rudolf!], Vorlesungen über Zeitgeschichte. Strittige Fragen im Kreuzverhör, Tübingen: Grabert-Verlag, 1993, p. 139. En 1994: «According to a publication by G. Peters the Zyklon B expert with DEGESCH, in the early 1930s Zyklon B released 50 % of its HCN in about 30 minutes» (Germar Rudolf, «The 'Gas Chambers' of Auschwitz and Majdanek», in Ernst Gauss [pseudonyme de Germar Rudolf], Foundations of Contemporary History. A Handbook on Controversial Questions of the Twentieth Century, traduit de l’Allemand par Victor Diodon, en ligne). Germar Rudolf a bien tenté de noyer sa falsification initiale en multipliant les publications ultérieures, mais il a été suffisamment prolifique pour laisser de nombreuses traces.
11. Cité dans Irene Sagel-Grande, H.H. Fuchs & C.F. Rüter (éd.), Justiz und NS-Verbrechen. Sammlung deutscher Strafurteile wegen nationalsozialistischer Tötungsverbrechen 1945-1966, Band XIII, Die vom 17.11.1954 bis zum 27.06.1956 ergangenen Strafurteile Lfd. Nr. 410-438, Amsterdam: University press, 1975, Verfahren Nr. 415: Die Urteile gegen die Lieferanten des Zyklon-B, Lfd.Nr.415b, 2. Die Giftgaslieferungen an das KZ Auschwitz, 415 b-8, p. 137. Le passage cité est en ligne. Les références du brevet sont les suivantes: Reichspatentamt. Patentschrift Nr 438818. Klasse 45l Gruppe 3. Ausgegeben am 27. Dezember 1926. Deutsche Gesellschaft für Schädlingsbekämpfung m.b.H. in Frankfurt a.M. Verfahren zur Schädlingsbekämpfung. Patentiert im Deutschen Reiche vom 20. Juni 1922 ab. Von dem Patentsucher ist als der Erfinder angegeben worden: Dr. Walter Heerdt in Frankfurt a.M.-Eschersheim. La série Justiz und NS-Verbrechen contient des informations, témoignages et documents inestimables, notamment le volume XIII que nous citons ici.
12. Par exemple, ce témoignage cité dans Justiz und NS-Verbrechen, Band XIII, op. cit., p. 134: «Nach Füllung der Kammern mit Menschen hätte man noch etwa 10 Minuten gewartet, um eine bestimmte Temperatur zu bekommen.» à savoir: «Après le remplissage de la chambre avec les gens, on attendait encore environ 10 minutes, afin qu’une température adéquate soit atteinte».
13. Déposition de Herbert Rauscher du 19/04/1948, citée par Hervé Joly, «L’implication de l’industrie allemande et la Shoah. Le cas du Zyklon B», Revue d’histoire moderne et contemporaine, 47-2 avril-juin 2000, p. 392. Je remercie vivement Hervé Joly qui m’a fait parvenir la transcription de la déposition de Herbert Rauscher, que nous exploiterons dans une étude à venir. À notre connaissance, Hervé Joly est le premier à citer ce document, dont la mention n’est jamais apparue non plus sur internet.
14. Cette précision n’est pas mentionnée dans son article par Hervé Joly mais figure bien dans la déposition de Herbert Rauscher que nous avons consultée (NARA M892 roll 64, Degesch defense Dokumentbuch III, Dokument Degesch NR. 74). Herbert Rauscher accompagne ses chiffres de la précision «wie aus Laboratoriumsversuchen bekannt ist» (soit: «comme le montrent les tests en laboratoire»). On ne peut être plus explicite sur la matérialité scientifique des données qu’il fournit. On est loin des inventions et de l’incompétence de Rudolf…
15. Stephen F. Pinter, «Letter to the Editor«, Our Sunday Visitor (Huntington, Indiana), 14 juin 1959, p. 15. La fascination des négationnistes pour Pinter, qui n’est peut-être pas infondée, donne lieu à une véritable Pinterologie. Nous tirons les renseignements sur Stephen Pinter de l’auteur négationniste Klaus Schwensen, «Stephen F. Pinter: An Early Revisionist», Inconvenient History, 2012, vol.. 4, no. 1. et «On the Roads of Truth: Searching for Warwick Hester», Inconvenient History, 2012, vol.. 4, no. 2. Ne touchant pas au sujet du génocide ces articles, dont nous avons vérifié plusieurs citations, font partie d’une stratégie mise en place par les négationnistes eux-mêmes d’exposition d’une érudition rigoureuse, sinon neutre, relative à l’histoire même des discours et auteurs négationnistes. Le négationniste Jean Plantin est le seul représentant de cette stratégie en France. Il est intéressant de noter que dès que quelqu’un issu du négationnisme se met à fournir des informations internes non expurgées sur les milieux négationnistes et à leurs petites histoires, cela se révèle in fine dévastateur pour leur crédibilité.
16. La chambre à gaz de Dachau est connue, toujours debout, et l’objet de documents nazis bien connus. Voir la réponse à la question négationniste no 4.
17. Warwick Hester, «Auf den Straßen der Wahrheit», Der Weg, no. 8, août 1954, Buenos Aires.
18. Interview de Emil Lachout dans la revue nazie SIEG, no. 6, 1989, cité par Klaus Schwensen, «Stephen F. Pinter: An Early Revisionist», art. cit.
19. Sur l’affaire Lachout, les faux qu’il a produits et ses mensonges, voir Brigitte Bailer-Galanda, Wilhelm Lasek, Wolfgang Neugebauer, Gustav Spann, Das Lachout-„Dokument“. Anatomie einer Fälschung, Wien: DÖW, 1989. Traduction anglaise, The Lachout Document Anatomy of a Forgery, en ligne sur Nizkor. L’accueil hystérique par les négationnistes envers les faux produits par Lachout n’a d’égale que leur gueule de bois suite aux démonstrations irréfutables de ses manipulations. Visiblement Emil Lachout mentait même aux autres négationnistes…
20. Lettre de Germar Rudolf du 13 mai 2004 à Klaus Schwensen citée par Klaus Schwensen, «Zur Echtheit des Lachout-Dokuments», Vierteljahreshefte für freie Geschichtsforschung, vol. 8 no. 2, 2004, p. 176. Klaus Schwensen écrit «Von Germar Rudolf hören wir nun, daß er selbst den Großteil der besagten Remer-Broschüre verfaßte und daß das Diagramm ihm von EmilLachout zugesandt wurde»: «Germar Rudolf nous révèle qu’il était l’auteur de la brochure de Remer et que le diagramme lui avait été tranmis par Emil Lachout». La brochure en question, Die Zeit lügt publiée par le nazi historique Otto Ernst Remer en 1992 avait en fait été rédigée par Germar Rudolf. Le diagramme de Stephen F. Pinter y apparaîssait pour la première fois. L’article de Klaus Schwensen tente de redorer le blason des négationnistes en établissant, dans une publication négationniste, le caractère frauduleux des documents produits par Lachout.
21. Lettre de Stephen F. Pinter du 22 mars 1974 à Robert J. Miller, citée par Klaus Schwensen, «Stephen F. Pinter: An Early Revisionist», art. cit.
22. Ernst Gauss [pseudonyme de Germar Rudolf], Vorlesungen über Zeitgeschichte: strittige Fragen im Kreuzverhör, Tübingen: Grabert, 1993.
23. «G. Peters gibt für eine 50%ige Freisetzung der Blausäure eine halbe Stunde an», Rudolf renvoyant évidemment à Blausäure zur Schädlingsbekämpfung de Gerhard Peters. (Ibid., p. 138)
24. «jedoch sind im Diagramm (wahrscheinlich aus Versehen) die Verdampfungszeiten 10mal länger dargestellt als in Wirklichkeit» (Lettre du 13 mai 2004 à Klaus Schwensen déjà citée).
25. La version de début 1992 en allemand, Gutachten über die Bildung und Nachweisbarkeit von Cyanidverbindungen in den Gaskammern von Auschwitz comptait en tout 92 pages, la traduction française de 1997 un peu plus de cent.
26. Nous ne pensons pas que la première version de la présente étude avait que nous avions publiée sur les forums de discussion Usenet en 2003 en soit la cause, mais bien plutôt, quasi certainement le rapport d’expertise rédigé par le Dr. Richard Green à l’occasion de l'appel (perdu) du procès fait par (et perdu par) David Irving contre l’historienne Deborah Lipstadt. David Irving avait sollicité un nième rapport de la part de Germar Rudolf et avait renoncé à le présenter au juge, une fois qu’il avait pris connaissance de l’expertise de Richard Green. Celui-ci écrivait (p. 30): «This estimate depends on the chambers being only 15 oC. The gas chambers are likely to have been much warmer than the warmest temperature he studied. Human body temperature, for example, is 37 oC, and the chambers were packed with people before the Zyklon was inserted». Comme souvent Rudolf ne mentionne pas les critiques dont les versions successives de son rapport sont l’objet, mais altère les versions suivantes de façon à essayer de faire implicitement pièce à ces critiques. Ce procédé est tellement systématique que les contempteurs de Rudolf mériteraient presque d’être mentionnés en co-auteurs de celui-ci…]
27. Voir note précédente.
28. Sur le premier point, le système d’introduction du Zyklon B dans les chambres à gaz des crématoires II et III permettait en fait une bonne répartition spatiale des granules de Zyklon, contrairement à ce que suggère Rudolf. Dans les crématoires IV et V, le Zyklon B était simplement dispersées via une lucarne aux pieds des personnes assassinées. Nous reviendrons plus bas sur le second point, l’humidité.
29. R. Irmscher, «Nochmals: “Die Einsatzfähigkeit der Blausäure bei tiefen Temperaturen”», Zeitschrift für hygienische Zoologie und Schädlingsbekämpfung, 1942, p. 36.
30. Les allégations de Rudolf comme quoi l’humidité serait aussi due au nettoyage à grande eau des chambres à gaz est infondé: il se produisait en fait très rarement d’opérations de gazages consécutives, dans la mesure où ce qui prenait le plus de temps était la crémation des corps et la pièce avait largement le temps de sécher dans le cas où une seconde opération d'assassinat succédait à une première (uniquement après que les corps des victimes précédentes aient pu être auparavant incinérés).
31. Castle Hill Publishers, 2017, doté d’une préface rédigée par… Germar Rudolf.
32. Udo Walendy, Auschwitz im IG-Farben Prozess - Holocaustdokumente?, Weser: Verlag fur Volkstum und Zeitgeschichtsforschung, 1981.
33. Nous discutons de cet aspect dans une autre page de phdn consacrée aux mensonges du négationniste nazi Vincent Reynouard.
34. Brian J. Lukey, James A. Romano & Jr. Harry Salem (éd.), Chemical Warfare Agents Biomedical and Psychological Effects, Medical Countermeasures, and Emergency Response, Third Edition, Boca Raton, FL: CRC Press, 2019, p. 187.
35. Enoch et Rudolf n'en sont pas à leur première interview, aussi traduisons nous you par l'usage du tutoiement tant ils sont de toute évidence familiers.
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