Hagen à Hitler:
ne pas «traiter»
les Polonais comme
les Juifs, ne pas les tuer…Lettre du responsable de la santé publique de Varsovie, le docteur Wilhelm Hagen, à Adolf Hitler le 7 décembre 1942.
Introduction — fac-similés — traduction en français — transcription de l'original allemand — Sources et informations
Introduction
Le 1er mai 1942, le Statthalter du Reich et Gauleiter en Pologne occidentale du district du Warthegau (partie de la Pologne annexée au Reich), Arthur Greiser, responsable de la mise en œuvre du centre de mise à mort de Chelmno, écrit à Himmler. Son courrier a deux objectifs: d’une part informer Himmler que le «traitement spécial» de 100 000 Juifs de son Gau, à savoir leur assassinat à Chelmno est en bonne voie (ce que la note du 5 juin 1942 de Willy Just au SS-Obersturmbannführer Walter Rauff faisant état de 97 000 victimes confirmera), d’autre part lui proposer le même «traitement» pour les quelques 35 000 tuberculeux incurables recensés dans son Gau, comme mesure sanitaire destinée à protéger les Allemands de souche dans le territoire incorporé. Les termes de sa demande — Greiser écrit explicitement qu’il s’agit d’exterminer ces tuberculeux — éclairent le sort réservé aux Juifs à Chelmno et la signification de l’expression de camouflage «traitement spécial».
Un nombre important de documents portant sur ce même sujet est connu. Ils éclairent eux aussi la demande de Greiser de façon extrêmement crue. Nous avons publié l’intégralité de ces documents (fac-similés, transcriptions, traductions) sur une autre page du présent site.
Un document particulier s’ajoute, selon nous, à ce corpus, alors que les échanges entre les différents acteurs et décideurs du projet de Greiser ont finalement abouti à un rejet du projet de Greiser par Himmler, le 3 décembre 1942. Le responsable de la santé publique de Varsovie, le docteur Wilhelm Hagen, qui ignorait que Himmler était revenu sur son autorisation le 3 décembre, avait été informé d'un projet analogue à celui de Greiser, sinon de celui de Greiser lui-même, et le désapprouvait. Il envoie à Hitler le 7 décembre 1942 une lettre prenant position contre ce projet dont il convient de relever un élément spectaculaire: Hagen écrit de la façon la plus explicite qui soit: «70 000 personnes âgées et enfants de moins de dix ans pourraient être traitées de la même façon que les Juifs, autrement dit qu’on projette ou qu’on envisage de les tuer». On aura à l’esprit que la publication en 1958 dans une revue polonaise de ce courrier donna lieu à une réaction de Wilhelm Hagen, résidant alors, libre, en Allemagne de l’Ouest, qui en confirmait l’authenticité et la teneur et se faisait passer pour une sorte de nazi modéré ayant protégé les Polonais. Il avait cependant participé activement à la politique de meurtre des Juifs: en juillet 1941 Hagen avait préconisé à Hans Frank l’exécution pour raisons sanitaires de tout Juif pris hors du ghetto de Varsovie (Nicolas Berg, The Holocaust and the West German Historians. Historical Interpretation and Autobiographical Memory, Madison: University of Wisconsin Press, 2015, p. 220). Hagen confirma comme témoin, la teneur de sa lettre à Hitler le 1er août 1962 (Götz Aly et Suzanne Heim, Vordenker der Vernichtung: Auschwitz und die deutschen Pläne für eine neue europäische Ordnung, Hoffmann und Campe, 1991, p. 217. C’est Weirauch au cours d’une réunion sur la tuberculose en novembre 1942 qui l’avait mis au courant). Le lien entre le projet dont Hagen a eu vent et celui de Greiser ressort, selon nous de plusieurs éléments concordants; de la date des événements (la réunion dont parle Hagen a eu de toutes évidences, eu lieu avant le 7 décembre, probablement avant que la décision d’Himmler du 3 décembre soit connue), du fait que la réunion à l’occasion de laquelle Greiser est mis au courant traite de la tuberculose, que Varsovie se trouve très près du Warthegau, que Weirauch dans la propre lettre de protestation (déclenchée par le courrier de Hagen) du 4 février 1943 (à Krüger, voir plus bas) où il accuse Hagen de vouloir protéger les Polonais tuberculeux (Raul Hilberg, The Destruction of the European Jews, Holmes & Meier, 1985, p. 521) ce qui semble suggérer que les 70 000 Polonais visés par un projet d’assassinat auraient bien été des malades de la tuberculose, ce qui nous semble désigner le projet de Greiser. Il faut relever toutefois (c’est l’historien Nicholas Terry qui a attiré notre attention sur ce point), que le seul projet connu de déplacement de la population polonaise (dont il est question dans la lettre de Hagen) à cette époque est le projet Zamosc, a priori, sans lien avec le Warthegau. Nous sommes cependant convaincus que ce dont Hagen a eu vent fait bien écho au projet Greiser.
Au delà du passage sur les Juifs, la lecture de l’argumentaire de Hagen laisse interdit: sa réticence n’est nullement morale, mais purement politique. Il est naturel de discuter de l’opportunité de l’assassinat de masse de personnes innocentes et seules des considérations très pragmatiques peuvent s’y opposer (mais pas dans le cas des Juifs, qui ne soulève aucune objection). Les SS seront pourtant furieux de ce courrier, prétendant que Hagen était resté un «social-démocrate». C’est le SS-Obergruppenführer, General der Polizei Friedrich-Wilhelm Krüger qui transmet une copie de la lettre de Hagen à Himmler le 17 février 1943, accompagnée d’un commentaire de Lothar Weirauch, en date du 4 février, qui conteste la réalité du projet contre les Polonais mais, évidemment, confirme implicitement la nature du «traitement» des Juifs. Le chef des services administratifs d’Himmler, Rudolf Brandt confie au chef de la santé du Reich, Leonardo Conti qu’Himmler qui souhaite envoyer Hagen en camp de concentration s’enquiert de son avis sur le sujet. Conti sauve Hagen en préférant utiliser ses compétences dans l’Ancien Reich. Hagen avait néanmoins perdu son poste à Varsovie, ayant brisé le tabou de l’emploi du verbe «tuer». Après la guerre il se construit une image de «bon nazi» et fait une brillante carrière. En 1950, il était conseiller ministériel au Ministère fédéral de l’Intérieur, en 1952 Professeur honoraire à Bonn, de 1956 à 1958 Président de l’Office fédéral de santé publique. Lorsque Joseph Wulf découvre la lettre signée par Hagen instruisant d’exécuter les Juifs pris hors du Ghetto de Varsovie, c’est le très officiel Institut für Zeitgeschichte et Martin Broszat en personne qui prennent la défense de Wilhelm Hagen (voir Nicolas Berg, op. cit.) y perdant un peu de leur honneur. Hagen, meurt en 1982, sans avoir été véritablement inquiété, à 89 ans (Ernst Klee, Das Personenlexikon zum Dritten Reich. Wer war was vor und nach 1945?, S. Fischer, 2003, p. 219). Joseph Wulf s’était suicidé en 1974, ruiné et avec le sentiment d’avoir échoué à réveiller les consciences allemandes…
Le texte complet de la lettre de Hagen n’a été publié en français qu’une seule fois en 1959 et jamais sur internet. Voici ce document, sa traduction, suivi de la transcription de la version originale en allemand
Le document
Lettre de Wilhelm Hagen à Adolf Hitler du 7 décembre 1942 (traduction)
Dr. Wilhelm Hagen
Bureau d'état de la médecine
Médecin de la ville de Varsovie
Chef de district du Comité de
la tuberculose du Reich du Gouvernement Général
Varsovie, le 7 décembre 1942.
Brieffach 54
bis 27. X II. Anschrift:
Augsburg, Zeugplatz 7.
A l’attention
A l’attention du Führer du Grand Reich allemandA D O L F H I T L E R .
Mon Führer!
Après avoir pris conseil d’un ami de longue date, Friedrich Weber, "Oberlandweber", un homme dont le dévouement à votre personne, mon Führer, est à toute épreuve, je vous prie de m’entendre au sujet de la question suivante, Weber étant empêché par sa maladie de se charger de cette communication:
Lors d’une réunion sur la tuberculose le directeur de la Division de la population et de l’aide sociale, l’oberwaltungsrat Weirauch, nous a secrètement informés que, sur 200 000 Polonais qui doivent être réinstallés à l’Est du Gouvernement général pour faire de la place aux cultivateurs allemands travaillant à la défense nationale, un tiers — 70 000 personnes âgées et enfants de moins de dix ans — pourraient être traitées de la même façon que les Juifs, autrement dit qu’on projette ou qu’on envisage de les tuer.
Si ce renseignement n'avait pas été communiqué officiellement, je l’aurais placé dans la rubrique de racontars. J’ignore aussi dans quelle mesure cette idée a reçu déjà un commencement D’autre part, au cours des deux années d’activité dans le Gouvernement général, j'ai été témoin de trop d’erreurs commises par les services subalternes, pour croire facilement qu’une telle information puisse n’être qu’un produit de pure imagination. De plus, le nombre de personnes qui en parlent est déjà trop grand, et a dépassé de beaucoup le cercle de ceux qui avaient le droit d’être au courant.
J’estime que les conséquences d’une pareille mesure seraient si graves — et sur ce point je suis avec Friedrich Weber — que je fais appel à vous, mon Führer, pour trancher la question. Je ne dispose pas de voie officielle, vu que, dans ma communication il ne s'agit que d’une information se rapportant à une affaire qui n’est pas de mon ressort à proprement parler.
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Il faut, sans doute, attribuer l’idée d’une telle mesure contre les Polonais au fait qu’il n’existe, semble-t-il, pour le moment, nul endroit où l’on puisse diriger ceux d’entre eux qui doivent être transférés, si on ne peut les occuper immédiatement dans l’industrie d’armements. Mais il ne paraît pas qu’on en ait examiné à fond les conséquences.
- Du point de vue militaire et politique une propagande ennemie raffinée n’aurait rien trouvé de mieux, pour attiser le feu du mouvement de résistance polonais qui couve toujours, que de s'emparer d’un tel bruit ou d’une telle action. Nos communications sont déjà tellement gênées par des bandes et des partisans, qu’un renforcement de ces groupes de terroristes pourrait avoir pour effet de mettre sérieusement en danger nos lignes de secours pour le front. Dans le cas où nous effectuerions une forte sortie contre un groupe plus considérable de Polonais, ces bandes ne tarderaient pas à recevoir des renforts importants. Le Polonais répond volontiers aux appels à l’insurrection. Son caractère, dans lequel, conformément à son mélange de sang, s'unissent la malice slave à la colère germanique, penche toujours vers les actes irréfléchis de violence. Nous ne devrions pas non plus oublier ce que nous aurions fait nous-mêmes dans un pareil cas en Rhénanie occupée. Dans Mein Kampf il est dit pourtant, qu’un adversaire qui n’est pas détruit complètement — et comment serait-ce possible avec 15 millions de Polonais — ne devient que plus fort par l'oppressoin et par le martyre.
- Du point de vue de la politique étrangère, on fournirait aux adversaires un sujet d'agitation et l'on compromettrait gravement l’idée européenne qui commence à percer. Toutes les autres nations sont habituées à considérer les Polonais comme un peuple ayant les droits égaux aux leurs. Elle verraient dans leur destin un exemple de ce qui les attend dans l'avenir.
- Du point de vue de la politique démographique, 1es considérations plus poussées, qu'il serait trop long de développer plus en détail, mais que j'avais portées à la connaissance du chef de la Santé publique, m'ont amené à la conviction que nous n'avons aucun intérêt à réduire le nombre de la population polonaise et à arrêter sa poussée. De tous les ouvriers étrangers le Polonais représente, du point de vue racial, un élément qui nous est proche et beaucoup moins dangereux que les races du Sud-Est, et dont la pression démographique ne pourrait être arrêtée à la longue.
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L'image que la Police et le S.D. (Sichercheitsdienst, Service de Securité) donne des Polonais est peut-être trop unilatérale. Certaines dispositions à changer d’attitude qui se sont manifestées chez les Polonais pendant ces dernières années, n’ont pas été prises au sérieux par les policiers, et on les a négligées. La majorité du peuple est très fatiguée, misérable, et recherche la paix avec nous aussi. Mais dix fauteurs de troubles réduisent à néant la bonne volonté des centaines d’hommes. Les techniciens allemands qui retirent des Polonais une importante contribution de travail pour la victoire allemande, jugent dans certaines questions autrement que ceux qui sont obligés de combattre contre le monde souterrain du mouvement de résistance. Des deux opinions prises ensemble se dégage une vue exacte. Prêtez donc l’oreille, mon Führer, aux hommes appartenant à la direction d’armement aussi bien qu’au monde de l’industrie et de l’agriculture. Permettez aussi que des rapports vous soient présentés par des spécialistes en géopolitique, en politique démographique et, peut-être même, par un psychologue et un médecin.
Aussi est-ce à VOUS, mon Führer, de prendre la décision sur le sort de la Pologne et de ses hommes. Le Gouvernement général doit devenir un espace vital de la Grande Allemagne, qui se soudera peu à peu à la mère patrie. Transformé en désert brûlé, ce pays ne pourrait pas remplir cette tâche avant de longues années. La Pologne a besoin d’une main ferme, non pas pour détruire, mais pour construire. Nous avons germanisé dans le Reich des millions [sic] de Polonais. Nous le ferons aussi dans le Warthegau et il n'est pas impossible de faire des Polonais du Gouvernement général des collaborateurs loyaux. Mais n’oublions pas que l'amour de l'enfant est une des rares qualités sympathiques des Polonais, et qu'en supprimant des enfants polonais nous pourrions éteindre les derniéres étincelles d'une disposition favorable à l’entente. En méme temps nous détruirions des forces toutes prêtes pour le travail dont nous aurons besoin au cours des années à venir.
Notre oeuvre dans le Gouvernement général a été trop longtemps compromise par le manque de netteté dans la conception de son but. Nous Vous prions, vous, mon Führer, de nous donner une règle de conduite pour notre activité, et nous attendons avec confiance votre décision.
signé: Dr. Wilhelm Hagen.
Transcription de l’original
Dr. Wilhelm Hagen
Stadtmedizinalrat
Amtsarzt der Stadt Warschau
Bezirksleiter des Reichs-
tuberkulose-Ausschusses im GG
Warschau, den 7. Dezember 1942.
Brieffach 54
bis 27. X II. Anschrift:
Augsburg, Zeugplatz 7.
An den
An den Führer des Großdeutschen ReichesA D O L F H I T L E R .
Mein Führer!
Nach Beratung mit einem langjahrigen Freunde Friedrich Weber, „Oberlandweber“ — einem Manne, dessen Ergebenheit zu Ihnen, meinem Führer, außer allem Zweifel steht, bitte ich Sie, mich in folgender Sache zu hören, da Weber selbst durch Krankheit verhindert ist, die Vermittlung zu übernehmen:
Bei einer Regierungsbesprechung über die Tuberkulosebekampfung wurde uns von dem Leiter der Abteilung Bevölkerungswesen und Fürsorge, Oberverwaltungsrat Weirauch als geheime Reichssache mitgeteilt, es sei beabsichtigt oder werde erwogen, bei der Umsiedlung von 200.000 Polen im Osten des Generalgouvernements zwecks Ansiedlung deutscher Wehrbauern, mit einem Drittel der Polen — 70.000 alten Leuten und Kindern unter 10 Jahren so zu verfahren, wie mit den Juden, das heißt, sie zu töten.
Wenn diese Mitteilung nicht dienstlich erfolgt wäre, so wurde ich sie in das Reich der Fabel verweisen. Ich weiß auch nicht, inwieweit dieser Gedanke schon der Ausführung genähert wurde. Andererseits habe ich in den 2 Jahren meiner Tatigkeit im Generalgouvernement allzuviele Fehler untergeordneter Stellen miterlebt, um eine solche Mitteilung ais Phantasiegebilde leicht nehmen zu können. Auch ist die Zahl der Menschen, die davon reden, jetzt schon zu groß und hat den Kreis berechtigter Mitwisser weit tiberschritten.
Ich halte die Folgen einer solchen Tat für so schwer und weiß mich darin mit Friedrich Weber einig, daß ich Sie. mein Führer, zur Entscheidung anrufe. Ein dienstlicher Weg steht mir bei dem nur informatorischen Charakter der Mitteilung in einer Sache, die nicht zu meinen unmittelbaren Dienstaufgaben gehört, nicht offen.
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Der Gedanke eines solchen Vorgehens gegen die Polen ist wohl dadurch entstanden, daß im Augenblick für die auszusiedelnden Polen kein Raum vorhanden scheint, soweit sie nicht direkt ki Rüstungsarbeit eingesetzt werden konnen. Die Folgen aber scheinen mir nicht durchdacht.
- Militärisch-politisch hätte eine raffinierte Feindpropaganda wohl nichts erfinden können, was das stets schwelende Feuer der polnischen Widerstandsbewegung mehr anfachen könnte, ais ein solches Gerücht oder eine solche Tat. Unsere Verbindungen sind durch Banden und Partisanen schon so sehr gestört, daß ein Stärkerwerden dieser Terrorgruppen die Nachschublinien zur Front ernstlich gefährden würde. Falls wir gegen eine größere Gruppe der Polen aber mit Gewalt vorgehen, werden die Banden ungeheuren Zusirom erhalten. Der Pole folgt stets gerne dem Rufzum Aufstand. Sein Charakter, in dem sich slawische Tücke mit germanischem Jähzorn, getreu seiner Blutmischung paart, neigt zu jeglicher sinnloser Gewalttätigkeit. Wir wollen auch nicht vergessen, was wir selbst in einem solchen Falle im besetzten Rheinland getan hätten. In „MEIN KAMPF“ aber steht, daß ein Gegner, der nicht völlig vernichtet wird, — wie sollte das bei 15 Millionen Polen möglich sein — durch Unterdruckung und Märtyrertum nur stärker wird.
- Außenpolitisch wäre den Gegnern ein Agitationsstoff von ungeheurer Schlagkraft gegeben und der beginnende Durchbruch des Europagedankens schwer gefährdet. Alle anderen Nationen sind gewohnt, Polen ais ein gleichbereehtigtes Volk anzusehen. Sie würden sein Schicksal als Beispiel für die eigene Zukunft betrachten.
- Bevölkerungspolitisch haben mich eingehende Überlegungen, welt et ’m Einzelnen hier zu weit führen würden, den ich atber dem Reichsgesundeisführer als Material vorgelragen habe, zu der Überzeugung gebracht, daß wir kein Interesse an der Werringerung der polnischen Volkszahl oder der Zerstörung ihres Bevölkerungsauftriebes haben. Von allen Fremdarbeitern ist rassisch der Pole als ein uns nahestehendes Element zu betrachten und sehr viel weniger gefährlich als die Rassen im Südosten, dereń Bevölkerungsdruck wir auf die Dauer aus eigener Kraft nicht standhalten können.
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Das Bild, welches Polizei und SD von Polen entwerfen, ist vielleicht allzu einseitig. Mancher Ansatz ,zur Einordnung, der sich auf polniseher Seite in den letzten • ahren zeigte, ist unter diesem polizeilichen Gesichtspunkt nicht ernst genommen und wieder verschüttet worden. Die Mehrzahl des Volkes ist sehr müde und elend und sucht den Frieden lauch mit uns. 10 Unruhestifter aber machen den guten Wilen von Hunderten zu nichte. Die deutschen Fachleute, welche aus Polen wichtige Arbeitsleistung für den deutschen Sieg herausholen, urteilen in manchen Dingen anders als die Männer, welche gegen die Unterwelt der Widerstandsbewegung kämpfen müssen. Aus beiden Anschauungen zusammen ergibt sich ein richtiges Bild. Hören Sie, mein Führer, deshalb die Männer der Rüstungskommandos und der Industrie, sowie der Landwirtschaft. Und lassen Sie sich vortragen vom Geopolitiker, vom Bevölkerungspolitiker, ja vielleicht vom Psychologen und vom Arzt.
Dann entscheiden SIE, mein Fuhrer, über das Schicksal Polens und seiner Menschen. Hier im Generalgouvernement soli ein Lebensraum Großdeutschlands sein, der langsam mit dem Mutterlande verwachst. Als leergebrannte Ode wird diees Land eine solche Aufgabe in Jahrzehnten nicht erfüllen. Polen braucht eine harte Hand, aber nicht in der Zerstörung, sondern im Aufbau. Wir haben Millionen Polen im Reich eingedeutscht. Wir werden das auch im Warthegau leisten und es ist nicht unmöglich, den Polen des Generalgouvernements zum loyalen Mitarbeiter zu erziehen. Aber vergessen wir nicht, daß eine der wenigen sympatischen Eigenschaften der Polen die Liebe zum Kinde ist und dass wir mit dem Leben polnischer Kinder den letzten Funken von Verständigungsbereitschaft ausloschen würden. Zugleich aber würden wir die willigen Arbeitskräfte vernichten, die wir in den kommenden Jahrzehnten brauchen werden.
Allzulange hat unsere Arbeit im Generalgouvernement unter der Unsicherheit eines klaren Zieles gelitten. Wir erbitten von Ihnen, mein Führer, diese Richtschnur Unseres Handelns und erwarten vertrauensvoll Ihre Entscheidung.
gez.: Dr. Wilhelm Hagen.
Sources
La version intégrale en allemand de la lettre de Wilhelm Hagen a été publiée en 1958 dans la revue d’histoire polonaise Przegląd Zachodni: Karol Marian Pospieszalski, «Protest dra Wilhelma Hagena przeciw zamierzo nemu wymordowaniu czesci ludnosci zamojszczyzny w latach 1942-1943» [La protestation du Dr Hagen contre l’assassinat collectif d’une partie de la population de Zamosc en 1942-1943], Przegląd Zachodni, mars 1958, vol. 14 no 1. C’est la source de notre transcription, avec quelques adaptations provenant de l’original.
Raul Hilberg qui cite la lettre de Hagen (La destruction des Juifs d’Europe, Fayard, 1988, p. 447.) fournit la cote du document dans les microfilms des National Archives américaines à Washington DC, dans le fonds des documents SS: T-175, roll 38. Hilberg ne précise pas les numéros de frames, mais Edward L. Homze, les fournit (Foreign Labor In Nazi Germany, Princeton University Press, 1967, p. 301): 2547999-8011. Homze écrit que Hagen fut envoyé en camp de concentration, mais cette proposition de Himmler ne fut pas exécutée. Götz Aly et Suzanne Heim fournissent la cote de la lettre de Hagen dans les archives allemandes (Vordenker der Vernichtung: Auschwitz und die deutschen Pläne für eine neue europäische Ordnung, Hoffmann und Campe, 1991, p. 217), les Bundesarchiv: BArch, NS 19/1210 .
Les fac-similés proposés sur la présente page ont été obtenus aux Bundesarchiv par Hans Metzner de Holocaust Controversies, qui les a mis en ligne en août 2019:
http://holocaustcontroversies.blogspot.com/2019/08/the-hagen-letter-to-deal-with-13-of.htmlLa traduction en français présentée ici est, à quelques ajustement près, celle — complète — publiée dans le numéro 2 (juillet-août-septembre 1959) de la revue Cahiers Pologne Allemagne (p. 92-96).
Il est intéressant de noter que la lettre de Hagen, notamment le passage sur les Juifs est rapidement remarquée et diffusée. Dès octobre 1958 l’article de Przegląd Zachodni est mentionné en français («Bibliographie», Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale, no 32, p. 106). Début 1959 la correspondance de Hagen est spécifiquement présentée dans la même revue (Jean B. Neveux, «Sur la Pologne occupée», Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale, janvier 1959, no 33, p. 106) et de nouveau en 1960 (K. M. Pospieszalski, «Le statut du peuple polonais sous l’occupation allemande», Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale, janvier 1960, no 40, p. 20). En juin 1959, l’article de Przegląd Zachodni et la protestation de Hagen sont présentées en allemand dans Historische Zeitschrift (section «Neueste Geschichte (1871-1945)», Historische Zeitschrift, Bd. 187, H. 3, p. 724). D’autres mentions suivent dans d’autres langues (notamment en anglais), mais le passage sur les Juifs fait vraiment l’objet d’une large diffusion à partir de 1965 avec la publication du très connu Anatomie des SS-Staates - Gutachten des Instituts für Zeitgeschichte. La lettre de Hagen est citée dans le premier volume, Hans Buchheim, Martin Broszat, Hans-Adolf Jacobsen, Helmut Krausnick (éds.), Anatomie des SS-Staates, vol. 1, Hans Buchheim. Die SS, das Herrschaftsinstrument, Befehl und Gehorsam, Olten: Walter-Verlag, 1965, p. 358).
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