67. Le premier volume de sa grande synthèse sur L'Allemagne nazie et les juifs (t.1, Les Années de persécution (1933-1939, Seuil, 1997) fait apparaître une réalité sensiblement différente de celle qui ressort des travaux de Goldhagen. L'élimination des juifs n'est pas un « projet national ». La population, sans doute massivement antisémite, n'apparaît pas choquée devant les lois raciales et les mesures de ségrégation, mais elle se montre réticente devant les déchaînements de violence. Cet « antisémitisme passif » - fondé sur la conviction qu'il y a bien « une question juive non résolue » - évolue avec la guerre et la remise en cause des valeurs qu'elle entraîne. 68. Son livre (Hachette, 1999) aborde le même sujet que celui, controversé, de Daniel Goldhagen. Mais l'explication de Bartov, historien israélien, est très différente : l'armée allemande est devenue peu à peu une armée politisée et fanatisée, « l'armée d'Hitler ». Cette culture de la violence et de la haine s'est forgée en quatre étapes :
- La « démodernisation », c'est-à-dire la dégradation des conditions matérielles du front, qui rendit les troupes de plus en plus insensibles.
- La destruction des « groupes primaires », en raison des pertes considérables, ce qui réduit la cohésion et la responsabilité dans l'armée allemande.
- La perversion de la discipline devenue d'une extraordinaire rigueur.
- La déformation, par la propagande, de la réalité perçue par les soldats.
69. La meilleure synthèse est celle de Philippe Burrin, Hitler et les Juifs, Genès d'un génocide, Points H 190, Seuil, Paris, 1995. Cette mise à jour doit beaucoup à l'article qu'il a publié dans Le Monde diplomatique (juin 1997), « Aux origines du 'mal radical'. Le génocide des juifs en débat » ainsi qu'à celui de Ulrich Herbert, « La politique d'extermination. Nouvelles réponses, nouvelles questions sur l'histoire de l'holocauste », in « La violence nazie », Revue d'histoire moderne et contemporaine 47-2, avril-juin 2000, pp. 233-264. 70. L'absence d'ordre écrit émanant de sa main, utilisée par exemple par
David Irving, ne prouve rien. Presque tous les historiens s'accordent pour considérer qu'il a participé au processus de décision personnellement et directement ; à sa manière, oralement, à demi-mot pour ne pas laisser de traces, mais sans équivoque possible. Même s'il n'a peut-être fait qu'approuver certaines expériences menées par ses collaborateurs, une initiative d'une telle importance dans la politique nazie ne pouvait se produire à son insu. Les intentionnalistes rappellent qu'il écrivait, dans Mein Kampf, « Si l'on avait, au début et au cours de la guerre, tenu une seule fois douze ou quinze mille de ces Hébreux corrupteurs du peuple sous les gaz empoisonnés que des centaines de milliers de nos meilleurs travailleurs allemands de toute origine et de toutes professions ont dû endurer sur le front, le sacrifice de millions d'hommes n'eût pas été vain. Au contraire, si l'on s'était débarrassé à temps de ces quelques douze mille coquins on aurait peut être sauvé l'existence d'un million de bons et braves Allemands pleins d'avenir », N.E.L. p. 677-678. Dans un discours prononcé le 30 janvier 1939 au Reichstag, il ajoute : « Aujourd'hui, je serai encore prophète : si la finance juive internationale en Europe et hors d'Europe devait parvenir encore une fois à précipiter les peuples dans une guerre mondiale, alors le résultat ne sera pas la bolchevisation de la terre, donc la victoire du judaïsme; au contraire, ce sera l'anéantissement de la race juive en Europe. » 71. C. Browning, "L'origine de la solution finale: du contexte militaire et politique à la prise de décision (1939-1941)", dans F. Bedarida (dir.), La politique nazie d'extermination, A. Michel, 1989, p. 156 à 176. 72. Celle-ci aurait dû se tenir un mois plus tôt. Christian Gerlach a étudié les notes prises par plusieurs dirigeants du NSDAP, réunis autour du Führer, à Berlin le 12 décembre 1941, au lendemain de Pearl Harbor. Hitler, revenant sur sa « prophétie » de janvier 1939, aurait alors décidé de donner à l'extermination des juifs un caractère systématique. 73. Ulrich Herbert a montré - après d'autres - combien le mouvement völkish y était influent. Le racisme antisémite le plus radical règne dans les multiples corporations regroupées dans la Deutscher Hochschulring. Or, les 3/4 des cadres du SD, de la police de Sécurité ou de la Gestapo, ont fait des études universitaires sous Weimar et sont imprégnés par cette idéologie. 74. Dernier ouvrage en date sur ce sujet, celui, très discuté du journaliste américain Edwin Black sur IBM et l'Holocauste, R. Laffont, Paris, 2001 75. Les penseurs de l'extermination. E.o. Vordenker der Vernichtung. Auschwitz und die deutschen Plane für eine neue europäische Ordnung, Hoffmann und Campe, Hambourg, 1991. 76. Comme Werner Conze, spécialiste des structures agraires en Europe centrale et orientale, alors théoricien de la surpopulation agricole en Pologne. 77. Des conclusions identiques se dégagent des travaux de Michael Zimmermann sur les Tsiganes, de Walter Manoschek sur la Serbie ou de Christian Gerlach sur la Biélorussie. 78. Entre 1933 et 1945, quelque 700 000 Allemands ont résisté. Plus de 8 000 furent condamnés à mort. Longtemps la mémoire collective n'a voulu retenir que les purs enfants de la Rose blanche et les responsables de l'attentat du 20 juin, Il est vrai que la mémoire de la résistance de gauche a été occultée (Gerhard Ritter assimilait les membres de l'Orchestre rouge à des traîtres à la patrie !) Dans l'abondante littérature que la Résistance a suscitée, on retiendra surtout les actes du colloque franco-allemand de Paris (mai 1996), A. Michel, 1997, et la récente synthèse de Gilbert BADIA, Ed. de l'Atelier, 2000.

Le nazisme : controverses et interprétations

Enrique Leon

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III.  Vraies et fausses querelles :
5.  Autour de la Shoah

III-5.  Autour de la Shoah

Dépassant et prolongeant à la fois le débat historiographique entre intentionnalistes et fonctionnalistes, une nouvelle génération d'historiens a pris la relève de la « génération des HJ ». Elle n'hésite pas à prendre à bras-le-corps les problèmes les plus brûlants, à commencer par la participation des Allemands à la « guerre d'anéantissement ».

Entre 1990 et 1995, il a paru presque autant de travaux sur la persécution et l'extermination des juifs que de 1945 à 1985 ! Si les historiens de langue française sont encore relativement peu présents (Michel Fabréguet sur Matthausen), leurs confrères allemands se pressent aux côtés des Anglo-Saxons (Goldhagen, Browning, Friedlander67) et des Israéliens (Omer Bartov68).

La question de la décision du génocide reste objet de discussion, même si le débat a perdu beaucoup de l'aspérité qui le caractérisait lorsqu'il mettait aux prises Eberhard Jackel, Martin Broszat ou Hans Mommsen69. Plus personne ne conteste vraiment aujourd'hui la responsabilité de Hitler70, mais les débats portent sur le moment précis, la chaîne de la décision et la nature des motivations du Führer. Les uns la situent au début de 1941, la conquête prochaine de l'URSS impliquant le passage de la « solution territoriale » à la « solution finale » ; les autres dans l'hiver 1941, quand la campagne à l'Est connaît ses premiers ratés. Pour Christopher Browning, les instructions fournies aux Einsatzgruppen le 3 mars 1941 - donc avant même le lancement de l'attaque contre l'URSS - confient déjà à ces « groupes d'intervention » des « campagnes spéciales » visant l' élimination des communistes et des « éléments criminels »71. Raoul Hilberg (la destruction des juifs d'Europe, Fayard, 1988) parle de la "cristallisation de la mi-41 " pour désigner le moment où le processus trouve sa cohérence et se constitue en système. Aujourd'hui, le basculement dans l'extermination apparaît donc plutôt comme la conséquence d'une « radicalisation cumulative » qui s'est achevée avant la célèbre conférence de Wannsee du 20 janvier 194272.

Les « structuralistes » ont stimulé l'étude de la complexité du « processus décisionnel » et des multiples rouages - organismes d'État, mais aussi groupes d'intérêts privés - qui ont contribué au crime. Les travaux récents sur le rôle de ministères comme celui des finances ou du travail, de personnalités comme Albert Speer, d'institutions comme la justice, la Reichsbahn, ou encore l'Université73, sans oublier les multiples entreprises associées à la construction et à la gestion des camps74, mettent en évidence à quel point le génocide fut la résultante de contributions multiples... Crime de sadiques et de fanatiques, la Shoah a aussi été un "crime d'employés".

Pour deux historiens berlinois, Götz Aly et Susanne Heim75, « l'économie de la solution finale » a bénéficié du concours d'un bon nombre d'experts - économistes, sociologues, géographes, démographes, urbanistes et historiens76 - qui, pour la plupart, allaient ensuite faire de belles carrières en République fédérale. Ces spécialistes, chargés du « remembrement ethnique » de l'Europe centrale et de sa rationalisation économique, prônaient un relocalisation de la population et une restructuration économique et sociale impliquant l'élimination des juifs : ainsi, en Pologne, entendaient-ils déplacer une partie de la population agricole vers les emplois urbains libérés par l'« aryanisation ».

Ainsi, la radicalisation progressive de la politique nazie fut la suite d'une série d'échecs : le transfert des juifs vers une « réserve » lointaine (Madagascar, le Grand-Nord sibérien...) se révèle impossible alors que leur présence, dans des ghettos où ils souffrent de la faim et du typhus, est source de multiples difficultés.

Nombre d'études récentes portent une attention particulière à la réalité concrète de la violence du régime, que celle-ci vise les juifs, les handicapés physiques et mentaux, les homosexuels, les travailleurs forcés ou les « tsiganes ». Un lien conceptuel associe ces différentes formes de criminalité, fondée sur le mépris de la vie et un amtihumanisme diffus. La population européenne, juive et non juive, n'est plus qu'une variable sur laquelle les dirigeants nazis entendent intervenir à leur gré, transplantant, stérilisant, exterminant les « bouches inutiles » (nutzlose Esser) pour garantir au peuple-maître son « espace vital » et un niveau de vie supérieur.

Dieter Pohl, étudiant le génocide en Galicie orientale (in « La violence nazie », RHMC, avril-juin 2000, pp. 290-307), montre qu'on peut reconstituer avec précision les étapes et l'ampleur du drame, les rapports entre les différents services, la tension entre mise au travail et extermination, l'attitude - hésitant entre passivité et complicité - des populations non juives ou celle des occupants, une société largement touchée par la corruption, par un antisémitisme de masse et surtout par une désinhibition croissante envers l'usage de la violence77.

Bref, on le voit, il semble bien que les « jeunes » historiens n'aient plus de tabou, la génération de 1989 a pris le relais de la « génération Fischer » (C'est-à-dire des iconoclastes qui l'avaient alors soutenu, Hans-Ulrich Wehler, Hans Mommsen...). Toutefois, plutôt que de débattre des grandes abstractions - totalitarisme, impérialisme, fascisme, etc, - ils préfèrent se pencher sur les violences quotidiennes. Parler de la contribution des Allemands ordinaires aux entreprises ordinaires du Reich, mais aussi montrer que la défaillance du sens moral, pour largement répandu qu'elle ait été, n'était pas systématique78, c 'est aider à comprendre, comment à un moment donné de son histoire, le peuple de Goethe a pu devenir le peuple d'Auschwitz et incarner le « mal radical ».

Pour certains, comme Claude Lanzmann qui l'a répété bien des fois, expliquer est non seulement impossible mais même inconvenant : expliquer, ce serait déjà banaliser, exonérer, réduire l'horreur en la « comprenant ». Pour l'auteur de Shoah, « il y a bien une obscénité absolue du projet de comprendre » ! Sans doute, la barbarie nazie présentera-t-elle toujours sa part d'opacité, moins peut-être dans les intentions de ceux qui voulaient bâtir un ordre nouveau que dans l'incroyable démission d'une société, dans la perte collective des valeurs morales les plus élémentaires. Mais renoncer à comprendre - même si on est convaincu de ne pas pouvoir y parvenir - n'est-ce pas pire ? Commémorer ne suffit pas. Ni comme citoyen ni comme enseignant nous ne pouvons oublier ce que disait en 1946 Karl Jaspers : « ce qui est arrivé constitue un avertissement... cela a pu arriver et peut encore arriver à tout moment. Ce n'est qu'en connaissant le passé qu'on peut l'empêcher de se reproduire ».

       


Notes.

67. Le premier volume de sa grande synthèse sur L'Allemagne nazie et les juifs (t.1, Les Années de persécution (1933-1939, Seuil, 1997) fait apparaître une réalité sensiblement différente de celle qui ressort des travaux de Goldhagen. L'élimination des juifs n'est pas un « projet national ». La population, sans doute massivement antisémite, n'apparaît pas choquée devant les lois raciales et les mesures de ségrégation, mais elle se montre réticente devant les déchaînements de violence. Cet « antisémitisme passif » - fondé sur la conviction qu'il y a bien « une question juive non résolue » - évolue avec la guerre et la remise en cause des valeurs qu'elle entraîne.

68. Son livre (Hachette, 1999) aborde le même sujet que celui, controversé, de Daniel Goldhagen. Mais l'explication de Bartov, historien israélien, est très différente : l'armée allemande est devenue peu à peu une armée politisée et fanatisée, « l'armée d'Hitler ». Cette culture de la violence et de la haine s'est forgée en quatre étapes :
- La « démodernisation », c'est-à-dire la dégradation des conditions matérielles du front, qui rendit les troupes de plus en plus insensibles.
- La destruction des « groupes primaires », en raison des pertes considérables, ce qui réduit la cohésion et la responsabilité dans l'armée allemande.
- La perversion de la discipline devenue d'une extraordinaire rigueur.
- La déformation, par la propagande, de la réalité perçue par les soldats.

69. La meilleure synthèse est celle de Philippe Burrin, Hitler et les Juifs, Genès d'un génocide, Points H 190, Seuil, Paris, 1995. Cette mise à jour doit beaucoup à l'article qu'il a publié dans Le Monde diplomatique (juin 1997), « Aux origines du 'mal radical'. Le génocide des juifs en débat » ainsi qu'à celui de Ulrich Herbert, « La politique d'extermination. Nouvelles réponses, nouvelles questions sur l'histoire de l'holocauste », in « La violence nazie », Revue d'histoire moderne et contemporaine 47-2, avril-juin 2000, pp. 233-264.

70.L'absence d'ordre écrit émanant de sa main, utilisée par exemple par David Irving, ne prouve rien. Presque tous les historiens s'accordent pour considérer qu'il a participé au processus de décision personnellement et directement ; à sa manière, oralement, à demi-mot pour ne pas laisser de traces, mais sans équivoque possible. Même s'il n'a peut-être fait qu'approuver certaines expériences menées par ses collaborateurs, une initiative d'une telle importance dans la politique nazie ne pouvait se produire à son insu. Les intentionnalistes rappellent qu'il écrivait, dans Mein Kampf, « Si l'on avait, au début et au cours de la guerre, tenu une seule fois douze ou quinze mille de ces Hébreux corrupteurs du peuple sous les gaz empoisonnés que des centaines de milliers de nos meilleurs travailleurs allemands de toute origine et de toutes professions ont dû endurer sur le front, le sacrifice de millions d'hommes n'eût pas été vain. Au contraire, si l'on s'était débarrassé à temps de ces quelques douze mille coquins on aurait peut être sauvé l'existence d'un million de bons et braves Allemands pleins d'avenir », N.E.L. p. 677-678. Dans un discours prononcé le 30 janvier 1939 au Reichstag, il ajoute : « Aujourd'hui, je serai encore prophète : si la finance juive internationale en Europe et hors d'Europe devait parvenir encore une fois à précipiter les peuples dans une guerre mondiale, alors le résultat ne sera pas la bolchevisation de la terre, donc la victoire du judaïsme; au contraire, ce sera l'anéantissement de la race juive en Europe. »

71. C. Browning, "L'origine de la solution finale: du contexte militaire et politique à la prise de décision (1939-1941)", dans F. Bedarida (dir.), La politique nazie d'extermination, A. Michel, 1989, p. 156 à 176.

72. Celle-ci aurait dû se tenir un mois plus tôt. Christian Gerlach a étudié les notes prises par plusieurs dirigeants du NSDAP, réunis autour du Führer, à Berlin le 12 décembre 1941, au lendemain de Pearl Harbor. Hitler, revenant sur sa « prophétie » de janvier 1939, aurait alors décidé de donner à l'extermination des juifs un caractère systématique.

73. Ulrich Herbert a montré - après d'autres - combien le mouvement völkish y était influent. Le racisme antisémite le plus radical règne dans les multiples corporations regroupées dans la Deutscher Hochschulring. Or, les 3/4 des cadres du SD, de la police de Sécurité ou de la Gestapo, ont fait des études universitaires sous Weimar et sont imprégnés par cette idéologie.

74. Dernier ouvrage en date sur ce sujet, celui, très discuté du journaliste américain Edwin Black sur IBM et l'Holocauste, R. Laffont, Paris, 2001

75. Les penseurs de l'extermination. E.o. Vordenker der Vernichtung. Auschwitz und die deutschen Plane für eine neue europäische Ordnung, Hoffmann und Campe, Hambourg, 1991.

76. Comme Werner Conze, spécialiste des structures agraires en Europe centrale et orientale, alors théoricien de la surpopulation agricole en Pologne.

77. Des conclusions identiques se dégagent des travaux de Michael Zimmermann sur les Tsiganes, de Walter Manoschek sur la Serbie ou de Christian Gerlach sur la Biélorussie.

78. Entre 1933 et 1945, quelque 700 000 Allemands ont résisté. Plus de 8 000 furent condamnés à mort. Longtemps la mémoire collective n'a voulu retenir que les purs enfants de la Rose blanche et les responsables de l'attentat du 20 juin, Il est vrai que la mémoire de la résistance de gauche a été occultée (Gerhard Ritter assimilait les membres de l'Orchestre rouge à des traîtres à la patrie !) Dans l'abondante littérature que la Résistance a suscitée, on retiendra surtout les actes du colloque franco-allemand de Paris (mai 1996), A. Michel, 1997, et la récente synthèse de Gilbert BADIA, Ed. de l'Atelier, 2000.

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16/02/2003