QER 19
Une réponse à la "Q&A" 19 par Nizkor
19.
Si Auschwitz n'était pas un camp d'extermination, pourquoi son commandant, Rudolf Höss, a-t-il avoué qu'il l'était ?
Les négationnistes de l'IHR répondent (version originale) :
«Il a été torturé par des interrogateurs juifs en uniformes britanniques, ainsi que l'un d'eux l'a admis plus tard.»Les négationnistes de l'IHR répondent (version révisée) :
«Il a été torturé par la police militaire britannique, ainsi que l'un de ses membres l'a admis plus tard.»La version Samisdat dit :
«Des méthodes éprouvées par le temps ont été utilisées pour lui faire dire à ses gardiens ce qu'ils voulaient entendre.»Nizkor répond :
Une minute! L'histoire devient de plus en plus vague avec chaque version.
Qu'est-ce que les "tortionnaires" ont avoué exactement ? La première affirmation de l'IHR était que les interrogateurs étaient des agents juifs portant (de faux) uniformes britanniques. Si l'un des interrogateurs l'a prétendument admis, pourquoi l'IHR a-t-elle changé sa version et transformé ces agents déguisés juifs en véritables policiers militaires britanniques ?
La vraie réponse réside dans le fait que l'affirmation des "interrogateurs juifs en uniformes britanniques" n'apparaît nulle part ailleurs dans la "littérature négationniste". Elle ne figure que dans les "Q&A". Sans le moindre commencement de trace de preuve.
En d'autres termes, quelqu'un l'a tout simplement inventé. plus tard, quelqu'un d'autre a décidé qu'ils feraient mieux d'abandonner rapidement tout ce bobard. Combien d'autres des 65 Q&A ont une histoire similaire ? Il nous est impossible de le savoir, car leurs auteurs ne présentent jamais la moindre preuve pour les soutenir.
En ce qui concerne la confession de Höss :
Nous devons considérer toute l'information et son contexte [ce que ne font jamais les négationnistes]. Il y a de nombreux autres témoignages qui confirment l'essentiel des faits évoqués dans la confession de Höss. Il y a les documents capturés qui évoquent clairement les gazages et les tueries de masse par fusillades. La liste ne s'arrête pas là. Pour quelques exemples, on se reportera à la question 1.
Les négationnistes s'appuient beaucoup sur le fait que Höss aurait été soumis à une coercition et qu'on lui aurait fourni l'histoire à rédiger. Mais ils ne disposent que de deux éléments de "preuve".
- Un livre obscur d'un nommé Rupert Butler intitulé Legions of Death. Les négationnistes, citent l'ouvrage de Butler, où ce dernier déclare avoir interrogé un officier anglais présent pendant le passage à tabac de Höss lors de sa capture. Celui-ci ne fait bien sûr aucune mention d'agents juifs en uniformes britanniques.
Et, plus important, la version des événements présentée par Butler contredit l'hypothèse des négationnistes selon laquelle on a imposé une histoire à Höss. A aucun moment le livre de Butler ne mentionne une telle chose; il y est dit que Höss a été battu. Point. [N.d.T.: sur la fiabilité du récit de Butler, voir plus bas]
- Un "on-dit", qui est supposément contenu dans un document secret que le "révisionniste" Robert Faurisson n'a pas la liberté de révéler. (Et quand bien même il le serait, ce serait bien la première fois que les négationnistes acceptent la validité d'une rumeur…)
(Voir notes de bas de page 2 du pamphlet de Mark Weber intitulé "Let's Hear Both Sides" sur le site web de Greg Raven, ainsi que "Different Views on the Holocaust" sur le site web de Ernst Zündel.)
Sur la base de ces deux misérables excuses les négateurs rejettent et ignorent la confession de Höss, son témoignage, ses mémoires et tout ce qu'il a pu dire ou écrire d'autre sur les gazages et le programme d'extermination. On dispose bien sûr de ces témoignages et de ces mémoires, dont des extraits sont disponibles sur le serveur web de Nizkor.
[N.d.T.: Ces mémoires sont disponibles en français sous le titre Le commandant d'Auschwitz parle, La Découverte, 1995. Il faut préciser que ces mémoires furent rédigées alors que Höss était prisonnier des Polonais à Cracovie, qu'il n'était plus placé sous l'autorité des Britanniques. On trouvera bien sûr des négateurs pour soutenir que c'est finalement les Polonais et/ou les Soviétiques qui lui auront soutiré ses mémoires. Mais il leur sera toutefois extrêmement difficile d'avancer le moindre commencement de preuve positive et encore moins d'expliquer les quelques jugements très sévères que Höss porte sur les Polonais et les Soviétiques dans ses mémoires ainsi que les données sur Auschwitz qui contredisent les versions soviétiques des événement! Enfin on reste rêveur devant cette hypocrisie qui consiste, via l'interprétation frauduleuse d'une (et une seule!) source de seconde main, à conclure à la torture de Höss dans le but de lui dicter ses aveux, alors que, par ailleurs, les négationnistes refusent sytématiquement de prendre en compte les très nombreux témoignages et documents convergents qui confirment les écrits de Höss. La nature particulièrement fiable des mémoires de Höss a été analysée en détail par John C. Zimmerman dans une étude disponible sur PHDN.
Il nous faut d'ailleurs signaler quelques éléments à propos cette «source» utilisée par les négationnistes comme «preuve» qu'Höss aurait été torturé. Butler est un journaliste dont le gagne-pain consiste à publier des récits romancés sur la Gestapo et autres "troupes d'élites nazies" comme les Waffen SS ou les jeunesses hitlériennes sur un ton qui oscille entre le morbide et le voyeurisme. Ses titres témoignent du sérieux de son entreprise : les légions de la mort, les anges noirs, la malédiction de la tête de mort, etc. En tout état de cause, ce n'est pas un historien… Il suffit d'ailleurs de feuilleter l'ouvrage auquel se réfèrent les négationnistes, Legions of Death, paru en 1983. N'y figurent aucune note de bas de page ni référence à aucune source. Butler y multiplie les récits dramatisés de scènes qu'il n'a aucun moyen de connaître, de dialogues dont il ne peut avoir eu connaissance, de précisions dramatiques purement inventées (untel parle d'un «air mielleux», Heydrich parcours l'assemblée «d'un regard bleu et froid», etc.), le tout sur un ton sentionnaliste. On nage dans du roman historique à la sauce hollywoodienne, mais il ne s'agit certainement pas d'un travail d'historien fiable. La meilleure illustration des libertés que Butler prend avec la réalité est le récit de la conférence de Wannsee, qui eut lieu en janvier 1942, donné par Butler: il fait tenir à Heydrich des propos que celui-ci ne peut avoir tenus tels quels, puisque Butler les prend des minutes de la conférence, dont on sait qu'elles sont un récit édulcoré de ce qu'a vraiment dit Heydrich. De plus, comment Butler peut il prétendre savoir ce que (et sur quel ton…) Heydrich a effectivement dit à Wannsee? Il ne le peut pas. Il invente. Et surtout Butler prétend que Otto Thierack était présent à Wannsee ce qui est complètement faux. Non seulement, Butler place Thierack à Wannsee, mais en plus, il le fait s'exprimer publiquement, citant, guillemets à l'appui, les prétendues paroles de Thierack. Et ce qu'il fait dire à Thierack correspond à un accord, portant sur la déportation des «associaux», que celui-ci passera effectivement avec Himmler, en septembre 1942, soit sept mois après Wannsee, événement auquel Thierack n'assistait pas. Tout, chez Butler, est à l'avenant. Aucun historien sérieux ne daignerait tirer des faits précis du roman de Butler (Pour un développement de ces points voir William Daffer, « The complete Butler 5/5 », alt.revisionism (Usenet), 9 mars 2001, Message-ID: <m3vgpjjvjd.fsf@scythia.localdomain>).]
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20/07/97 -- mis à jour le 30/07/2001