i. Rudolf Höss, Le Commandant d’Auschwitz parle, Julliard, Paris, 1959; La Découverte, Paris, 2005. Traduit de l’allemand par Constantin de Grunwald (1959), édité par Geneviève Decrop (2005). ii. Sur la chambre à gaz du crématoire I de Auschwitz I, voir: http://phdn.org/negation/krema-i.html iii. Il existe de nombreux documents illustrant que l’expression «traitement spécial» signifiait l’assassassinat. Nous en donnons quelques exemples parmi de nombreuses citations contemporaines illustrant la volonté et la politique de génocide menée par les nazis, notamment, un message de Eichmann du 26 juillet 1942 préconisant le «traitement spécial» des «inaptes au travail», les échanges entre Greiser et Himmler sur un projet d’exécution de plusieurs dizaines de milliers de tuberculeux polonais. On renverra également au chapitre II de Eugen Kogon, Herrmann Langbein, Adalbert Rückerl, Les chambres à gaz secret d’État, Seuil, Points Histoire, 1987 ainsi qu’au chapitre 7 de Maxime Steinberg, Les yeux du témoin et le regard du borgne, Les Éditions du Cerf, Paris, 1990. iv. La traduction française (Julliard, 1959 et La Découverte, 2005) est entachée d’une inexactitude dans la numérotation des Krematorien, puisque procédant à une confusion entre le Krematorium III et le Krematorium IV (p. 235): «Au bout de très peu de temps, on renonça au crématoire III, et l’on ne s?en servit plus par la suite.» Il faut en fait lire «crématoire IV»: ce dernier, en effet, comprenait un double-four à quatre creusets incinérateurs (c?est-à-dire huit creusets incinérateurs, comme l’indique Höss), fut bel et bien livré à Auschwitz par la firme Topf und Söhne le 22 mars 1943, et ses nombreuses pannes conduisirent les SS à cesser de l’utiliser à compter de la mi-mai 1943 (voir Robert J. Van Pelt & Deborah Dwork, Auschwitz. 1270 to the present, W. W. Norton, NY, 1996, p. 331 ainsi que Jean-Claude Pressac, Les crématoires d’Auschwitz. La machinerie du meurtre de masse, CNRS Editions, Paris, 1993, p. 76-77). Le Krematorium III, qui comprenait cinq fours à trois creusets incinérateurs (conformément au témoignage de Höss), fut livré à Auschwitz le 24 juin 1943 et se révéla, à l’inverse, fonctionnel (ibid., p. 80-81). En d’autres termes, c?est bel et bien au Krematorium IV que Höss ici fait allusion, et non au Krematorium III. v. Les Polonais auraient donc eu tout intérêt à tenir la plume de Höss pour éviter que son récit ne contredise leur version, ce qui est pourtant le cas, illustration supplémentaire qu’à aucun moment, Höss n?a été contraint dans la rédaction de son récit. vi. Nouvelle erreur de traduction ou de retranscription dans la version française, laquelle confond les Krematorien IV et V (p. 235-236): «Quant au crématoire IV, il a fallu arrêter son utilisation à plusieurs reprises parce que au bout d’un bref laps de temps — quatre à six semaines d’incinération — les fours ou les cheminées avaient brûlé. On incinérait généralement les gazés dans les fosses installées derrière le crématoire.» (p. 234-235) Il faut en fait lire «crématoire V». Comme exposé supra, l’activité du Krematorium IV cessa à compter du mois de mai 1943. Le Krematorium V, pour sa part, comprenait également huit creusets incinérateurs, mais connut plusieurs pannes, outre que l’extermination des Juifs de Hongrie excéda ses capacités, obligeant les SS à creuser à proximité des fosses en plein air pour se débarrasser des corps (Pressac, op. cit., p. 79-81 et 90). vii. Les études pionnières de Gerald Reitlinger et Raul Hilberg fournissent cependant dès la fin des années 50 et le début des années 60 des bilans du même ordre de grandeur que celui de Rudolf Höss. L’historiographie est moins surévaluée que ne le prétend John C. Zimmerman. Voir http://phdn.org/histgen/auschwitz/bilan-auschwitz.html 1. Francizek Piper, «Gas Chambers and Crematoria », dansYisrael Gutman et Michael Berenbaum, Anatomy of the Auschwitz Death Camp (Bloomington: 1994), p. 177, note. 18. 2. Lucy Dawidowicz, The Holocaust and the Historians (NY: 1981), pp. 176, 177, note. 1. 3. Mark Weber, “My Role in the Zundel Trial,” 9 Journal of Historical Review No 4 (Winter 1989/1990), p. 405. 4. Jerusalem Post, August 17, 1986, p. 1. 5. Jerusalem Post, August 21, 1986, p. 10. voir aussi le dossier de Nizkor sur ce sujet, en ligne. 6. La question du témoignage des victimes et des bourreaux à la lumière des preuves dans la Shoah est examinée dans John C. Zimmerman, Holocaust Denial: Demographics, Testimonies and Ideologies, Lanham, MD: University Press of America, 2000, chapitres 5 et 6. 7. Miklos Nyiszli, Auschwitz: A Doctor?s Eyewitness Account (NY:1993), p. 41. 8. Danuta Czech, Auschwitz Chronicle (NY: 1990), p. 699. 9. Rudolf Höss, Le Commandant d’Auschwitz parle (Julliard, Paris, 1959, La Découverte, Paris, 1995 et 2005). Traduit de l’allemand par Constantin de Grunwald (1959), édité par Geneviève Decrop (1995 et 2005). Les citations de cette source sont celles de l’édition de 2005 et apparaîtront dans le texte en petite taille et en gras. Ex: (27-28). 10. Voir John C. Zimmerman, Holocaust Denial, op. cit, chapitres 5 et 6. 11. Rupert Butler, Legions of Death (Feltham: 1983), pp. 237, 238. Complément de PHDN: cette source, en fait un récit journalistique romancé, est la seule disponible en dehors des mémoires de Höss sur les circonstances de l’arrestation de Höss. Bien que les négationnistes en fassent des gorges chaudes depuis des années, elle est à prendre avec beaucoup de précautions pour des raisons : qui sont exposées sur le présent site, en ligne. 12. Texte de Pery Broad, «The Reminiscences of Pery Broad», dans Jadwiga Bezwinska et Danuta Czech, Eds., K L Auschwitz Seen by the SS (NY: 1984). Texte abrégé dans Bernd Naumann, Auschwitz (NY: 1966), pp. 162-183. 13. Texte du journal de Kremer et ses explications des entrées à Bezwinska et Czech, ibid pp. 214-231. Pour une analyse détaillée des passages du journal de Kremer et l’aspect négationniste de ces entrées, voir chapitre 4 de la source citée en note 6. On retrouve également une partie du journal de Kremer, en français dans Maxime Steinberg, Les yeux du témoin et le regard du borgne, Les Éditions du Cerf, Paris 1990, en Annexe. : Disponible en ligne. 14. Le texte de ce témoignage figure dans David Fyfe, The Belsen Trial of Joseph Kramer and Forty Four Others (London: 1949). 15. Pour une analyse de tous les témoignages aux procès d’Auschwitz au milieu des années 1960, voir Bernd Naumann, Auschwitz (NY: 1966). Naumann était un journaliste qui a couvert le procès. C?est la seule analyse complète des procès en anglais. La transcription des audiences a été publiée dans Hermann Langbein, Der Auschwitz Prozess: eine Dokumentation (Wien: 1965) 2 vol. 16. A la page 226-227, Höss donne l’impression que ce fut le seul gazage dans le Block 11, mais ailleurs, en (179), il suggère qu’il y a eu un autre gazage dans ce Block. 17. Czech, Auschwitz Chronicle, 121. 18. Les registres mortuaires d’Auschwitz sont discutés dans les chapitres 4 et 10 de la source citée en note 6. Ils sont également discutés dans une étude en ligne: «Body Disposal at Auschwitz: the End of Holocaust Denial». 19. Czech, Auschwitz Chronicle, pp. 102, 112, 120, 131. 20. Voir le négationniste Carlo Mattogno, «The First Gassing at Auschwitz: The Genesis of a Myth», Journal of Historical Review No 2 (Summer 1989), pp. 212-213. Mattogno fournit en fait un grand nombre d’informations utiles qui montrent que les gazages ont bien eu lieu, la chose ayant visiblement échappé à Mattogno et au JHR. Il avance que le premier gazage ne peut pas avoir eu lieu en raison des contradictions des témoins directs et pas à l’automne 1941. Cependant, à la lumière des découvertes de l’institut de Cracovie (voir ci-dessous), la véritable date est moins importante que l’événement lui-même. Par ailleurs, il y a pu avoir des confusions à propos du premier gazage parce qu’il a pu y avoir deux gazages dans le Block 11 comme Höss le suggère (179). 21. Ce rapport est paru dans le journal polonais Z Zagadnien Sqdowych. z XXX 1994, pp. 17-27. : Une traduction en Français est disponible sur PHDN. J?ai [John C. Zimmerman] reçu la permission écrite de l’Institut de reproduire l’étude en annexe dans la source citée en note 6. 22. David Irving, «The Suppressed Eichmann and Goebbels Papers», 13 Journal of Historical Review No 2 (March/April 1993), p. 22. 23. David Irving, Hitler’s War (NY: 1977), p. 330. [PHDN: Irving n?est pas le découvreur de ce document bien connu des historiens puisqu’il s’agit d’un document utilisé lors du Procès de Nuremberg (voir note 24); il est cité par exemple dès 1957 par Gerald Reitlinger (The SS, alibi of a nation, 1922-1945, Heinemann, p. 280, et par Raul Hilberg en 1961 dans The destruction of european jews.] 24. NO-365 daté du 25 octobre 1941. Traduction dans Gerald Fleming, Hitler and the Final Solution (Berkeley: 1982), pp. 70-71. Mes remerciements aux Archives Nationales [américaines] pour m?avoir fourni une photocopie du document original. Texte complet disponible en français. Voir également Contexte et fac-simile. 25. Les textes de ces rapports sont dans PS-501, dans Office of the Special Counsel, Nazi Conspiracy and Aggression (Washington D.C. 1947), Vol. 3, pp. 418-422. : Version française en ligne avec références du rapport Becker. 26. Photocopie de l’allemand original avec une traduction anglaise dans Eugen Kogon, Hermann Langbein et Adalbert Ruckerl, Nazi Mass Murder: A Documentary History of the Use of Poison Gas (Yale: 1993), pp. 228-235. Voir texte complet en français, références et fac-simile: http://phdn.org/histgen/documents/rauff420605.html. 27. Jean-Claude Pressac, Auschwitz: Technique and Operation of the Gas Chambers (NY: 1989), p. 429. Photocopie de la liste à la p. 438. Le document est en ligne. Voir également, : éléments en français en ligne. 28. Texte original avec traduction anglaise dans ibid., p. 231. Le document est en ligne. 29. Texte dans ibid., p. 211. Le mot allemand «Vergasungskeller», chambre à gaz, est souligné dans le rapport original. La chambre à gaz était la Morgue no1. Voir ibid., p. 212. Voir également Gutman, Anatomy of the Auschwitz Death Camp, Washington D.C and Bloomington: United States Holocaust Memorial Museum and Indiana University Press,1994, p. 223, 227. Jean-Claude Pressac, Les crématoires d’Auschwitz, la machinerie du meurtre de masse, CNRS Éditions, p. 60 et p. 69. Le document : est reproduit en ligne. . 30. Jean Claude Pressac, Les Crématoires d’Auschwitz: La Machinerie du Meurtre De Masse (Paris: 1993), p. 107, note. 256. Pressac a découvert ce document dans les archives d’Auschwitz à Moscou. Le témoignage direct est reproduit dans Pressac, Auschwitz: Technique and Operation of the Gas Chambers, pp. 161, 164, 171, 181. 31. Texte du rapport dans Jeremy Noakes et G Pridham, Nazism 1919-1945 (Exeter: 1988), Vol. 3, p. 1184. Données d’enregistrement dans Czech, Auschwitz Chronicle, p. 347. [PHDN: le rapport est également mentionné par Maxime Steinberg, Les yeux du témoin et le regard du borgne, Les Éditions du Cerf, Paris 1990, au chapitre 7.] 32. Texte dans Kogon, Langbein et Ruckerl, Nazi Mass Murder, p. 160. Version française dans Eugen Kogon, Herrmann Langbein, Adalbert Rückerl, Les chambres à gaz secret d’État, Seuil, Points Histoire, 1987, p. 202. 33. “Aktenvermerk Betr: Stromversorgung und Installation des KL und KGL” dans Auschwitz Archives From Moscow, File 502-1-26 Reel 20. Mes remerciement à Aaron Kornblum du Museum de l’Holocauste des Etats-Unis pour m?avoir fourni ceci et d’autres documents des archives. En ligne: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/19430129-electricity/ 34. Texte dans Raul Hilberg, Documents of Destruction (NY: 1971), pp. 220-221. Photocopie de l’original dans Death Books From Auschwitz: Remnants (London: 1995), Vol. 1, Appendix, p. 144. En ligne: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/19420826-dessau/ 35. Source citée dans la note 21, en ligne: http://phdn.org/negation/markiewicz.html 36. Chapitre 10 de la source citée dans la note 6 et une étude intitulée «Body Disposal at Auschwitz: the End of Holocaust Denial»: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/body-disposal/ 37. New York Times, November 25, 1942, p. 10. 38. Czech, Auschwitz Chronicle, p. 357. La date était 22 mars 1944. 39. Pressac, Les Crematoires d’Auschwitz, pp. 79-80, citant une lettre des archives d’Auschwitz à Moscou datée du 9 juin 1943. 40. Dino Brugioni, “Auschwitz-Birkenau,” Military Intelligence (January-March, 1983), p. 53. 41. Michael Shermer, Why People Believe Weird Things (NY: 1997), p. 236. l’analyste de la photographie est Dr. Nevin Bryant. 42. Pressac, Auschwitz: Technique and Operation of the Gas Chambers, p. 422. l’arrière-plan de la photographie est cohérent avec le crématoire V. Beaucoup de photographies des crématoires, y compris du crématoire V ont été publiées par Pressac. Voir également les photos reproduites dans Czech, Auschwitz Chronicle. On peut trouver la photo dont il est question : en ligne. 43. Dino Brugioni et Michael Poirier, The Holocaust Revisited: A Retrospective Analysis of the Auschwitz-Birkenau Extermination Complex (CIA: 1979), p. 6. En ligne: https://www.cia.gov/library/center-for-the-study-of-intelligence/kent-csi/vol44no4/html/v44i4a06p_0001.htm 44. Piper, «Gas Chambers and Crematoria », p. 175. 45. Czech, Auschwitz Chronicle, pp. 633, 636, 641, 642, 643, 647, 648, 650, 655, 661, 666, 671, 673, 686. 46. Lettre datée du 11 juillet 1944 d’Edmund Veesenmayer, le plénipotentiaire allemand pour la Hongrie, NG 5615 dans Randolph Braham, The Destruction of Hungarian Jewry: A Documentary Account (NY: 1963), Vol. 2, p. 443. 47. NOKW 266, dans Tribunal militaire de Nuremberg, Trials of War Criminals (Washington D.C. 1947), Vol. 2, p. 557. 48. Raul Hilberg, The Destruction of the European Jews (NY: 1985), Vol. 3, p. 935. 49. Franciszek Piper, «Estimating the Number of Deportees to and Victims of the Auschwitz-Birkenau Camp», 21 Yad Vashem Studies (1991), pp. 97-99 pour un résumé des données mentionnées plus tôt dans l’étude. Piper a produit une étude plus détaillée sur le sujet en allemand. Voir son Die Zahl Der Opfer von Auschwitz: Aufgrund der Quellen der Etrage der Forschung, 1945-1990 (Oswiecim: 1993). 50. United States Holocaust Memorial Museum, Atlas of the Holocaust (NY: 1996), p. 97. 51. Piper, «Estimating the Number of Victims», pp. 53, 54, 58, 59. Le texte de USSR-008 en allemand apparaît dans Tribunal militaire international, Trials of Major War Criminals (Washington D.C., 1947), Vol. 39, pp. 241-261. La référence des quatre millions figure à la p. 260. 52. Photocopie de l’original dans Henry Friedlander and Sybil Milton, eds, Archives of the Holocaust (NY: 1989), Vol. 11, Part 2. Docs. 405 and 406, p. 300. En ligne: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/19440524-weisse/ et http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/1944-weisse/ 53. D-728. Texte dans Nazi Conspiracy and Aggression, Vol. 7, p. 175. Mes remerciements aux Archives Nationales pour m?avoir fourni une photocopie du document original. 54. Voir Richard Breitman, The Architect of Genocide: Himmler and the Final Solution (NY: 1991), p. 7, pour la destruction des documents incriminant Himmler. 55. Discours du 4 octobre 1943. Extraits significatifs dans Yitzhak Arad, et. al, Eds. Documents on the Holocaust (Jerusalem: 1981), pp. 344-345; Lucy Dawidowicz, ed. A Holocaust Reader (West Orange: 1976), p. 133; Michael Berenbaum, Witness to the Holocaust (NY: 1997), p. 178. Texte en allemand dans Tribunal militaire international, Trials of Major War Criminals (Washington D.C. 1947), Vol. 29, p. 145. Mitchell Jones, un chercheur indépendant, a obtenu un enregistrement du discours aux Archives Nationales. Voir ses commentaires sur l’affirmation négationniste selon laquelle l’expression d’Himmler ne signifiait pas l’extermination physique des Juifs. Mitchell Jones, The Leuchter Report: A Dissection (Cedar Park: 1992), p. 62. Les principaux passages en français sont disponibles en ligne. 56. New York Times, 21 janvier 1998, p. A4. La note date du 18 décembre 1941. On peut en trouver un scan sur internet à l’adresse http://www.mazal.org/archive/documents/DOC-00002.htm. Une entrée similaire dans le journal de Goebbels pour le 12 décembre 1941 a été découverte dans les archives. Voir Gord McFee, «When Did Hitler Decide on the Final Solution?»: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/hitler-final-solution/.

La fiabilité des mémoires de Höss

Par John C. Zimmerman
professeur associé, université du Nevada, Las Vegas

Traduction française de C.B.
Adaptation par Nicolas Bernard et Gilles Karmasyn

© John C. Zimmerman/PHDN - Reproduction interdite sauf pour usage personnel - No reproduction except for personal use only
 

Introduction à la version française:

Le présent texte est une traduction d’une étude particulièrement intéressante de l’universitaire John C. Zimmerman («How Reliable are the Höss Memoirs?», The Holocaust History Project, 1998-1999) collaborateur du Holocaust History Project et auteur de Holocaust Denial: Demographics, Testimonies, and Ideologies (Lanham, MD: University Press of America, 2000). Quelques précisions, surtout en note (numérotées en chiffres romains), ont été ajoutées par PHDN et nous avons retrouvé et utilisé les références à l’édition en Français des mémoires de Rudolf Höss dans sa dernière édition de 2005, parues sous le titre Le Commandant d’Auschwitz parlei, qui se substituent ici aux références à la version anglaise fournies dans le texte original. Les références aux pages des mémoires de Höss figurent directement dans le texte entre parenthèses. D’autres adaptations de style ont été apportées.

Une meilleure compréhension du texte nécessite un bref rappel: Auschwitz-Birkenau est un complexe concentrationnaire comprenant principalement deux «camps», Auschwitz I et Auschwitz II appelé Auschwitz-Birkenau qui fut également un centre de mise à mort industrielle. Auschwitz I a été muni d’un premier crématoire (bâtiment comprenant notamment des fours d’incinération de cadavres), le crématoire I, qui abrita quelques temps une chambre à gaz où l’on assassinait principalement des Juifs, après des premiers essais menés dans un autre bâtiment de Auschwitz Iii. Le gaz utilisé à Auschwitz était de l’acide cyanhydrique dégagé par un produit appelé le Zyklon B. Auschwitz II-Birkenau a été ensuite doté des quatre ensembles crématoires/chambres à gaz, les crématoires II, III, IV et V. Les II et III étaient semblables avec des chambres à gaz sous-terraines et les IV et V étaient batis sur un même modèle, différent des II et III, avec des chambres à gaz en rez-de-chaussez. La littérature historienne ou les témoignages ont parfois numéroté les quatre crématoires de Birkenau, I à IV, au lieu de II à V, comme le veut aujourd’hui la pratique historiographique. Par ailleurs avant l’achèvement des crématoires II à V à Birkenau, d’autres bâtiments de Birkenau (appelés «bunkers») ont été aménagés et utilisés comme chambres à gaz.

L’étude de John C. Zimmerman s’attache à démontrer qu’un ensemble d’informations apportées par l’ancien commandant d’Auschwitz, Rudolf Höss, dans ses mémoires, relatives au déroulement de l’extermination des Juifs, est largement corroboré par d’autres témoignages et documents. Il faut remarquer que Höss aborde bien d’autres sujets dans ses mémoires, pour lesquels les mêmes vérifications sont possibles. Les historiens ont établi que pour certains récits relatifs à sa propre responsabilité, Rudolf Höss se permettait évidemment des entorses à la vérité, mais que sur de nombreux aspects techniques, il apporte une information très précise. C’est l’exemple type de document dont la fiabilité, le caractère vérifiable des informations apportées, permet de considérer qu’on peut lui accorder une excellente confiance quant aux éléments effectivement vérifiables (surtout non relatifs au rôle direct de Höss), mais également, quant aux éléments «originaux» (le témoin n’a aucun moyen de savoir lesquelles de ses affirmations seront ou non vérifiables!), pour lesquels il serait la seule source. C’est ainsi que travaillent les historiens: ils vérifient le degré de fiabilité d’un document ou d’un témoignage grace aux éléments qu’ils connaissent par ailleurs. Cela leur permet d’accorder, ou pas, leur confiance aux informations «originales», non corroborrées clairement (ou non contredites) par d’autres témoins ou documents.

Article de John C. Zimmerman

L’enjeux de la fiabilité du témoignage direct a été abordé depuis longtemps dans l’élaboration de l’histoire de la Shoah. Les négationnistes, quant à eux, accusent systématiquement les témoins directs d’être des menteurs ou enclins à l’exagération. Il est évident que, parmi les témoignages directs, certains ne sont pas fiables. Il est vrai également que certains témoins mentent ou exagèrent [PHDN: cela est vrai des témoignages relatifs à n’importe quel événement et ces considérations font partie des élément que traitent, par des méthodes bien connues de critique interne, ou externe de confrontation des témoignages entre eux ou avec les documents de toute nature, les historiens de métier depuis des décennies.]

Les témoignages posent toujours un problème important: la fréquence des incohérences relatives aux détails. Ce n’est pas inhabituel. N’importe quel juge sait qu’il y a des différences dans la façon dont les témoins voient et relatent un événement. Mais même si ces derniers diffèrent quant aux détails d’un événement, ils ont rarement tort quant à l’événement lui-même. Ainsi, les témoins du nombre de personnes pouvant être gazées dans la chambre à gaz du crématoire I à Auschwitz ont donné des chiffres aussi variés que 600, 700, 900 ou 1000 victimes1. Les négationnistes excipent de ces différences entre les témoignages pour prétendre que s’il existe des écarts quant aux nombres de gens pouvant être gazés rapportés par les témoins, alors il doit y avoir un doute sur la réalité même de l’événement [PHDN: un tel raisonnement constitue évidemment une aberration dans le cadre d’une saine pratique de la critique historique].

Les historiens de la Shoah n’ont pas éludé le débat sur la fiabilité de ces témoignages. L’historienne aujourd’hui disparue Lucy Dawidowicz a écrit:

«Plusieurs milliers d’histoires orales transmises par les survivants racontant leurs expériences existent dans de nombreux pays et archives du monde. Leur qualité et leur utilité varient significativement selon la mémoire de l’informateur, sa compréhension de l’événement, sa perspicacité et bien sûr, sa précision. Plus le temps a passé [entre l’événement et le témoignage], moins il est vraisemblable que l’informateur ait gardé la fraîcheur du souvenir. Les témoignages transcrits que j’ai étudiés étaient remplis d’erreurs sur les dates, les noms de participants, les lieux et il y a des méprises évidentes sur les événements eux-mêmes. Pour le chercheur insouciant, certains de ces récits représentent plus un problème qu’une solution.»2.

Le négationniste Mark Weber a frauduleusement cité un rapport dans lequel le directeur des archives de Yad Vashem (le centre pour la mémoire de la Shoah en Israël) aurait estimé que plus de la moitié des 20000 témoignages en possession des archives n’étaient pas fiables3. Le véritable article citait le directeur disant que beaucoup de témoignages, mais pas la majorité, étaient inexacts4. Weber s’est gardé de mentionner que le directeur en colère avait réfuté l’estimation qui lui était attribuée. Ce dernier, Schmuel Krakowski, écrivit: «J’ai dit qu’il y a quelques — et heureusement très peu — de témoignages, qui se sont révélés inexacts.»5.

Dans ce cas cependant, comment évaluer la fiabilité de tels témoignages? Il existe une méthode qui consiste à les comparer à d’autres témoignages sur le même sujet: le témoignage est-il globalement en accord avec d’autres sur le même événement? Une autre méthode propose de comparer le témoignage à d’autres preuves qui le confirment: y a-t-il des preuves documentaires qui corroborent le témoignage? Par exemple, Miklos Nyiszli était un médecin juif participant aux convois hongrois déportés à Auschwitz de mai à juillet 1944. Ses mémoires ont été écrits en mars 1946 et publiées à Budapest en 1947. Une copie du hongrois originel est à la bibliothèque centrale de UCLA. Ils ont été traduits en anglais en 1960. Nyiszli a servi comme médecin, prisonnier du célèbre Joseph Mengele. Il a vu les corps des victimes assassinées par gaz ainsi que la crémation des corps dans les crématoires. Il a aussi vu les fosses de crémation creusées par les autorités d’Auschwitz pour se débarrasser des corps des victimes assassinées. Comment évaluer son témoignage? Ce dernier peut être classé en tant que témoignage de victime, la majorité d’entre eux ayant été vérifiés par d’autres victimes. Les criminels ont également confirmé les aspects essentiels de son témoignage6. Cependant, il y a d’autres preuves grâce auxquelles la véracité de son témoignage peut être mesurée. Nyiszli a écrit que pendant son séjour à Auschwitz, il y avait 860 prisonniers de commandos spéciaux assignés aux quatre crématoires pour détruire des corps des victimes assassinées7. C’est un chiffre très élevé, cohérent avec les besoins des autorités du camp pour s’occuper des cadavres des victimes assassinées en masse. Une liste d’affectation des travailleurs du camp datée du 29 août 1944 dénombre 874 «travailleurs spéciaux» assignés aux quatre crématoires. Ils sont également répartis parmi ces installations et divisés encore en équipes de jour et de nuit8. Par conséquent, Nyiszli est un témoin tout à fait crédible au regard de ces confirmations indépendantes.

Rudolf Höss

Rudolf Höss a été le commandant du camp d’Auschwitz pendant une partie de l’existence de celui-ci. Ses mémoires montrent qu’il a occupé une position unique dans l’histoire de l’accomplissement par les nazis de la «Solution Finale de la question juive»9. Il était un intermédiaire entre ceux qui ont ordonné le meurtre des Juifs et ceux qui ont appliqué cette politique. Par ailleurs, il a pu observer la «solution finale» des deux côtés. Il explique comment Heinrich Himmler, la deuxième autorité sur tout le IIIe Reich, lui a dit (223-224) qu’Hitler avait ordonné que tous les Juifs à la portée des Nazis devaient être annihilés.

Les mémoires de Höss sont divisés en deux parties sur lesquelles les historiens se sont appuyés et qu’ils ont citées depuis leur publication en 1959. La première partie est intitulée «La Solution Finale de la question juive» et est datée de novembre 1946. Il y détaille comment les rouages de l’extermination ont été mis en place à Auschwitz. Il faut préciser que son récit est en accord substantiel avec d’autres témoignages des victimes et criminels d’Auschwitz10.

La seconde partie de ses mémoires, datée de février 1947, traite de son ascension dans la hiérarchie nazie et de quelques uns des problèmes administratifs auxquels il dut faire face à Auschwitz. Il y révèle (161) un ordre de 1941 ordonnant «de procéder à la liquidation des Juifs, sans exception aucune». Il y a un chapitre distinct sur le meurtre par gaz (175-192), mais il contient moins de détails que dans le chapitre sur la Solution Finale.

Pour des raisons évidentes, les négationnistes ont dénigré ces mémoires pendant des années, prétendant que leur valeur était nulle. L’argument classique des négationniste est que Höss aurait été torturé pour qu’il confesse à tort des crimes qu’il n’avait pas commis. Höss a écrit ces mémoires pendant sa captivité polonaise. Cependant, nous savons qu’il a été torturé par Britanniques qui l’ont catpuré, avant qu’il soit livré aux Polonais. Or les négationnistes ne révèlent jamais que si nous le savons, c’est parce que Höss lui-même l’a écrit dans ses mémoires. S’il y avait eu une tentative de ses gardiens polonais pour falsifier ces mémoires ou pour faire mentir Höss, cette information ne serait jamais parue. Höss rapporte (213):

«Mon premier interrogatoire fut “frappant”, au sens exact du terme. J’ai signé le procès-verbal, mais je ne sais pas ce qu’il contenait: l’alternance de l’alcool et du fouet était trop sensible, même pour moi.»

Il semble que ce traitement brutal s’expliquerait par la présence de sergents juifs, dont les parents seraient morts à Auschwitz, dans le peloton ayant procédé à l’arrestation de Höss. Un sergent juif aurait prétendu que Höss avait admis sans aucun remord qu’il avait été responsable d’environ deux millions de morts. Pourtant, ce même sergent aurait mentionné les lettres de Höss à sa femme. «Parfois, ma gorge se serrait. Il y avait deux hommes différents dans ce seul homme. L’un était brutal, sans respect pour la vie humaine. L’autre était tendre et affectueux.»11

Höss a été livré au Tribunal Militaire International [de Nuremberg] afin de témoigner à la demande de l’avocat de la défense de Ernst Kaltenbrunner, l’ancien chef du bureau général pour la sécurité du Reich, accusé de crime de guerre. Höss écrit (213) que comparé à l’endroit où il avait été détenu auparavant, «mon séjour dans la maison d’arrêt me fit l’effet d’une cure en sana». Il a été ensuite livré aux Polonais pour son procès à Cracovie en Pologne. Il décrit (214-215) ses premières semaines en prison comme «tout à fait supportables». Cependant, les attitudes de gardiens se détériorèrent. Lui et les prisonniers polonais étaient maltraités. Le bureau du procureur intervint et les choses changèrent. «Je dois dire en toute franchise que je ne m’étais jamais attendu à être traité dans une prison polonaise de façon aussi convenable, avec tant de prévenance: ce fut le cas après l’intervention du procureur.» La surprise de Höss provenait, sans doute, du fait qu’environ 300000 Polonais, des Juifs pour la plupart, ont péri à Auschwitz.

La fiabilité de ces mémoires peut être évaluée en les comparant avec des preuves indépendantes allant dans le même sens. Tous les témoignages directs essentiels corroborent les mémoires de Höss sur Auschwitz. Pery Broad, un SS stationné à Auschwitz à l’époque où Höss était commandant, a écrit sur les chambres à gaz et les crématoires dans ses mémoires12. De la même façon, ils sont confirmés par le journal tenu par le médecin SS Johann Kremer à Auschwitz13. Le témoignage après-guerre des victimes et des criminels au procès de Belsen en 1947 sur les nombreux gardes qui servaient à Auschwitz est une preuve de plus en ce sens14. Il y a eu aussi un grand nombre de témoignages de victimes et bourreaux aux procès Auschwitz à Francfort en Allemagne, au milieu des années 1960 à propos de 20 prévenus stationnés dans le camp15.

Dans le cas d’Auschwitz, il y a également un grand nombre de preuves documentaires qui ont survécu et qui confirment les mémoires de Höss dans tous les détails. L’analyse qui suit examine cette documentation afin évaluer la fiabilité des mémoires.

Höss à propos du gazage et du meurtre de masse

Höss évoque un ordre secret (226; 178) donné à l’automne 1941, de tuer tous les commissaires soviétiques et les fonctionnaires politiques dans les camps. De tels prisonniers arrivaient constamment à Auschwitz. Höss raconte donc (226) comment les premiers gazages des prisonniers de guerre soviétiques ont eu lieu dans la cellule du Block 11, un bloc d’exécution où les prisonniers étaient habituellement abattus ou pendus, mais pas gazés. Cependant, il semble que cet événement ait été soit le premier gazage à avoir lieu dans le Block 11 soit l’un des deux premiers gazages16. Le Block 11 n’était pas aménagé pour le gazage car il a fallu deux jours pour aérer la cellule après-coup. Höss affirme ensuite que le gazage des prisonniers de guerre soviétiques a été transféré au crématoire I. Les Juifs (227) furent d’abord gazés ailleurs.

Dans quelle mesure Höss est-il fiable à propos de cet épisode? Un fichier concernant les prisonniers de guerre soviétiques pour l’automne 1941 montre que 9997 d’entre eux avaient été amenés dans le camp17. Les registres de la morgue d’Auschwitz — à ne pas confondre avec les Livres des Décès d’Auschwitz18 — montrent que 7343 prisonniers soviétiques sont morts pendant une période de quatre mois entre octobre 1941 et janvier 1942, soit une proportion stupéfiante de 73 %19.

Les négationnistes avancent qu’il n’y a pas eu de premiers gazages des prisonniers de guerre soviétiques à Auschwitz20. Cependant, en 1994, l’Institut de Recherche en médecine légale de Cracovie a réalisé une étude détaillée des structures identifiées comme des chambres à gaz à Auschwitz. L’Institut a trouvé des traces d’acide cyanhydrique, le gaz toxique utilisé pour le meurtre de masse, dans la cellule du Block 11, l’endroit identifié par Höss comme le site du premier gazage. De plus, l’Institut a également découvert que les taux de l’acide en question étaient faibles comparés aux autres sites de gazage, confirmant ainsi l’affirmation de Höss sur l’abandon précoce du Block 11 comme chambre à gaz pour cause d’incompatibilité. De l’acide cyanhydrique a aussi été trouvé dans le crématoire I par l’Institut, là où Höss établit les opérations ultérieures de gazage des prisonniers de guerre soviétiques21.

Höss écrit (224) qu’il a rencontré Adolf Eichmann, le chef du Bureau des Affaires Juives à la Gestapo, qui «m’expliqua la façon de tuer les gens pendant le transport en camion en employant des résidus de gaz de moteur comme cela se faisait jusqu’alors en zone orientale».

Le négationniste David Irving a obtenu les mémoires non publiés d’Eichmann. Ces mémoires ont été écrit avant sa capture par les Israéliens; ils n’ont donc été rédigés sous aucune contrainte. Irving cite Eichmann qui écrit qu’il se trouvait dans un bus et que le chauffeur lui avait dit «de regarder à travers un judas à l’arrière du bus où il vit un certain nombre de prisonniers se faire gazer par les fumées d’échappement.»22

Irving a tenté de minimiser l’aveu d’Eichmann en avançant que c’était un incident isolé. Il a également essayé de prétendre que les mémoires d’Eichmann contredisaient Höss. Mais il n’était lui-même pas dupe. La précision de Höss sur le rôle d’Eichmann avait été confirmée par Irving même avant qu’il devienne négationniste. Dès 1977, Irving lui-même mentionnait un document de 1941 montrant qu’Eichmann approuvait «l’idée que ceux [les Juifs] qui arrivaient à Riga [en Lettonie] devaient être tués par des camions à gaz mobiles.»23 Le mémorandum confirme en détail la description par Höss du rôle d’Eichmann en la matière. Il s’agit d’un document classé secret du conseiller pour les Affaires Juives avec le ministère du Reich pour les territoires de l’Est occupés intitulé «La solution de la question juive». On peut y lire:

«[…] notez s’il vous plaît que l’Oberdienstleiter [Chef supérieur du service] Brack de la chancellerie du Führer, est disposé à prêter son assistance à la construction du local et des équipements de gazage nécessaires. Pour le moment, nous ne disposons pas d’une quantité suffisante d’équipements, il faut donc d’abord les fabriquer. […]Je me permets d’ajouter que le Sturmbannführer Eichmann, le responsable des questions juives à l’Office Central de Sécurité du Reich, est absolument d’accord avec cette procédure. Selon des informations qui nous ont été données par le Sturmbannführer Eichmann, des camps pour les juifs seront établis à Riga et à Minsk […]Les choses étant ce qu’elles sont, il ne saurait y avoir de scrupules concernant le fait que les Juifs qui sont inaptes au travail doivent être supprimés en utilisant la méthode de Brack.»24

Höss témoigne aussi (243) avoir vu à Treblinka «divers moteurs de grands camions et de chars qu’on mettait en marche. A travers la tuyauterie, les gaz d’échappement de moteurs étaient amenés vers les chambres et provoquaient la mort de tous ceux qui s’y trouvaient». C’était la méthode de gazage privilégiée à Treblinka, Belzec, Sobibor, Chelmno et celle des camions à gaz patrouillant sur le territoire soviétique. Ses observations sont confirmées par un rapport «top secret» daté du 16 mai 1942 sur les activités dans le territoire soviétique occupé par le lieutenant SS August Becker, qui rapporte que «pour arriver à nos fins le plus vite possible, le conducteur appuie sur l’accélérateur le plus possible. Ce faisant, les personnes exécutées meurent de suffocation et non par perte de conscience comme prévu». Quatre semaines plus tard, un rapport était envoyé du Bureau Principal de sécurité du Reich à Riga demandant «l’envoi de 20 tuyaux de gaz pour trois camions à gaz» devant être utilisés pour un «convoi de Juifs demandant un traitement spécial (qui) arrive chaque semaine»25. Durant la même période, un autre rapport du Bureau Principal de la Sécurité du Reich mentionne que depuis décembre 1941, «quatre vingt dix-sept mille (personnes) ont été traitées en utilisant trois camions.» Le rapport mentionne que «pour faciliter la distribution rapide du CO (monoxyde de carbone)...deux fentes...seront percées au sommet du mur arrière.» Il établit que «le tuyau qui connecte l’échappement au camion a tendance à rouiller parce qu’il est rongé par les liquides qui coulent à l’intérieur.»26

Höss écrit (244) que les chambres à gaz d’Auschwitz étaient décorées de pommes de douches pour donner l’impression de vrais bains publics. Un inventaire émanant des autorités du camp pour la cave 1 de la morgue du crématoire III mentionne «14 douches» et une «porte étanche au gaz»27. Les négationnistes ont beaucoup de difficulté à expliquer pourquoi des douches et une porte étanche au gaz se trouveraient dans une «morgue». Höss mentionne également (228, 241) l’extraction des dents en or de la bouche des victimes gazées. Cette même mention est fréquente parmi les témoignages des survivants. Le document d’achèvement pour le crématoire II établit qu’au sous-sol, où se situaient deux morgues, il y avait une pièce de traitement de l’or28. Deux mois plus tôt, le 29 janvier 1943, une de ces pièces de la morgue était identifiée comme «cave de gazage» dans un rapport de la direction centrale de construction du camp29.

Höss affirme (229) qu’à l’été 1942, cinq baraques ont été construites à proximité de deux bunkers. Ces deux bunkers avaient été convertis en chambres à gaz dans la région boisée du camp de Birkenau (Auschwitz II), et servaient à assassiner les Juifs. Ces deux chambres à gaz ont précédé celles des quatre crématoires d’Auschwitz, devenues opérationnelles en 1943 et utilisées également pour le gazage (234-235). Les baraques étaient utilisées pour le déshabillage des victimes. Un rapport de la direction centrale de construction d’Auschwitz de juillet 1942 demande «quatre baraques [Stuck Baracken] pour le traitement spécial [Sonderbehandlung] des prisonniers de Birkenau.» Ce document est le premier à confirmer tous les témoignages visuels sur l’existence de ces structures30. Höss écrit également (237) que le terme «traitement spécial» était une désignation d’Eichmann pour l’assassinat des convois juifs.

L’expression «traitement spécial» est un euphémisme nazi bien connu pour désigner les assassinats. A Auschwitz, deux rapports du camp ont survécu, qui montrent que le «traitement spécial» signifiait la disparition des prisonniers. Un rapport du 8 mars 1943 corrobore la définition de Höss comme quoi cette expression signifie le meurtre des convois de Juifs. Le rapport établit que le 5 mars, un total de 1128 Juifs est arrivé de Berlin. Seulement 389 de ces prisonniers ont été admis dans le camp pendant que le restant, femmes et enfants, recevaient le «traitement spécial». Les registres d’entrée d’Auschwitz du 6 mars montrent 389 hommes et 96 femmes enregistrés pour ce convoi. Le même rapport établit que le 5 mars, 1405 Juifs sont arrivés de Breslau. Ce convoi, selon le rapport, a vu 406 hommes et 190 femmes admis tandis que le restant recevait le «traitement spécial». Les registres d’entrée à Auschwitz montrent 406 hommes et 190 femmes enregistrés pour ce convoi.

Le rapport en question établit également que le 7 mars, 690 prisonniers sont arrivés de Berlin, parmi lesquels 243 ont été admis dans le camp, tandis que le restant — 30 hommes et 417 femmes — recevaient le «traitement spécial». Les registres d’entrée à Auschwitz pour le 7 mars montre 243 arrivées de Berlin, recevant un numéro d’enregistrement31. Par conséquent, dans l’ensemble des ces trois convois, les prisonniers ayant reçu le «traitement spécial» disparaissent dès leur arrivée à Auschwitz. Les données concernant ces trois convois confirment également l’affirmation de Höss (233) selon laquelle entre 25 et 30% des nouveaux venus étaient jugés aptes au travail et admis dans le camp, le reste étant directement assassiné, soumis au «traitement spécial»iii

Un rapport du camp daté du 8 octobre 1944 sur la force de travail des prisonniers pour le camp des femmes à Birkenau établit que le 7 octobre, il y avait 38792 prisonnières. Un total de 8 est arrivé, amenant le total à 38800. Le rapport traite ensuite d’une diminution de 2394, qui abaisse le total à 36406. Cette diminution se décompose en sept morts naturelles, huit libérations, 1150 transferts et 1229 sous la nomenclature «SB», abbréviation consacrée de Sonderbehandlung (traitement spécial). Puisque ce «SB» ne peut signifier mort naturelle, libération ou transfert, il peut uniquement vouloir dire que ces prisonniers sont tués32.

Un document découvert récemment permet de décoder également cette expression comme signifiant le gazage des prisonniers; il s’agit un rapport du service de construction d’Auschwitz daté du 29 janvier 1943 à propos de problèmes électriques au crématoire II. Il est écrit: «Le fonctionnement est limité aux machines existantes (permettant ainsi une combustion concomitante avec le traitement spécial).»33 La combustion ne peut signifier que la crémation des corps. Ce rapport établit donc que dans le crématoire II, le «traitement spécial» (c’est à dire le gazage) et la crémation peuvent se produire simultanément. La date du 29 janvier 1943 est également très significative. Souvenons nous que le même jour, le même service mentionnait qu’il y avait une «cave de gazage» dans le crématoire II. Le lien entre traitement spécial et gaz toxique a été établi encore plus précisémment dans un rapport du 26 août 1942, dans lequel la permission d’«expédier un camion à Dessau pour charger du matériel pour le traitement spécial» a été donnée au camp de concentration d’Auschwitz. Dessau est l’endroit où le Zyklon B [dont le gaz empoisonné se dégageait au contact de l’air] était produit34.

L’Institut de recherche en médecine légale de Cracovie, mentionné plus tôt, a trouvé de nombreuses traces de Zyklon B dans la cellule du crématoire II35.

Ainsi, la description chez Höss du terme «traitement spécial» est confirmée dans tous ses aspects. L’expression est liée directement à ce qui se déroule dans les crématoires, à l’utilisation de gaz toxique et à la disparition des prisonniers.

Höss à propos de la créamation des cadavres

Höss mentionne les problèmes posés par la destruction des cadavres des victimes assassinées. Ce sujet a généré un grand nombre des discussions sur l’internet et dans les publications des négationnistes. Il est traité de façon détaillée ailleurs36. L’objectif de l’analyse qui suit est d’évaluer la fiabilité du récit de Höss sur ce sujet à la lumière de ce que nous connaissons par ailleurs.

Höss mentionne (228) les deux bunkers, déjà cités, qui avaient été convertis en chambres à gaz. Les prisonniers étaient alors gazés et leurs dépouilles enterrées. Cependant, les corps ont été exhumés à la fin de l’été 1942 et les crémations de masse commencèrent. Ces dernières continuèrent jusqu’à la fin de novembre 1942, lorsque les fosses communes furent vides. Un article dans le New York Times, datant de la fin de novembre 1942, relate:

«Les nouvelles reçues ici sur les méthodes utilisées par les Allemands en Pologne pour mener à bien le massacre des Juifs inclut des récits de convois ferroviaires d’adultes et d’enfants emmenés vers de grands crématoires à […] Oswiencim près de Cracovie.»37

Oswiecim est le nom polonais d’Auschwitz. Ce compte-rendu de «grands crématoires» est cohérent avec la chronologie et les crémations extérieures de masse mentionnées par Höss. Au moment où cet article est écrit, Auschwitz avait seulement six fours (ce nombre augmentera plus tard jusqu’à 52). Les crémations en plein air étaient utilisées parce que les crématoires ne pouvaient traiter tous les cadavres.

Höss écrit (234) que les huit fours dans le crématoire IV, opérationnels en mars 194338, «ne correspondaient pas aux exigences. Au bout de très peu de temps, on renonça au crématoire IV, et l’on ne s’en servit plus par la suite.»iv Cela est confirmé dans un document relatif à une visite à Auschwitz, en mai 1943, de l’ingénieur en chef responsable de la construction des fours. Il a conclu que les fours du crématoire IV ne pouvaient plus être réparés39. Il faut noter que si les gardiens polonais de Höss avaient tenté de lui imposer des informations erronées, ils ne lui auraient certainement pas permis de mentionner les pannes permanentes de ces structures, un fait qui suggèrerait les limites des crématoires. Ainsi que nous le verrons plus tard, les capacités théoriques de ces fours à brûler plus de corps que dans la réalité sont à l’origine de l’estimation polonaise d’un taux trop important de mortalité à Auschwitzv.

Höss écrit (235) que les cadavres des gazés du crématoire V étaient principalement incinérés dans des fosses derrière le bâtimentvi. Une photographie aérienne du complexe le 31 mai 1944 montre de la fumée d’élevant d’un espace derrière le crématoire V. La photo a été rendue publique en 198340. Un agrandissement récent réalisé par le responsable du traitement d’images et des applications cartographiques au laboratoire Caltech/NASA pour la propulsion à réaction à Pasadena montre des prisonniers emmenés au crématoire V41. Il existe également une photo connue montrant des cadavres dénudés brûlés à Birkenau en plein air. Le paysage à l’arrière-plan de la photographie montre que ces corps sont brûlés derrière le crématoire V42. Une photographie aérienne de la zone de Birkenau, prise le 26 juin 1944, montre des terres retournées derrière les crématoires IV et V cohérentes avec la présence de fosses43.

Höss écrit (234) qu’un sixième crématoire était prévu. L’idée en a été abandonnée car Himmler ordonna l’arrêt des exterminations fin 1944. Une lettre à Höss datée du 12 février 1943 provenant de la direction de l’agence de construction d’Auschwitz prouve que l’idée d’un sixième crématoire avait été discutée avec un ingénieur de la compagnie qui construisait les fours44.

Höss à propos des nombres de déportés et de morts

Höss écrit qu’en 1944 (194), des dizaines de milliers de Juifs ont été transférés d’Auschwitz pour servir de main d’œuvre dans la production industrielle d’armement. Il ne spécifie pas pendant quelle période de 1944 mais apparemment il désigne les déportés hongrois qui ont commencé à arriver en mai. Les registres du camp d’Auschwitz montre qu’entre le 29 mai et le 13 août, environ 20000 Juifs ont été envoyés hors du camp45. Un total de 437000 personnes ont été déportées de Hongrie vers Auschwitz entre mi-mai et mi-juillet46. Cependant, Höss note (194) que les travailleurs sont inutiles à l’effort de guerre allemand parce qu’ils sont inaptes au travail. «J’ai toujours pensé, écrit-il, que les Juifs les plus forts et les plus sains devraient être sélectionnés». La remarque de Höss est confirmée par les minutes des rencontres du ministère de l’armement. Le 26 mai, le directeur du département central du ministère, Fritz Schmelter, se plaint: «Pour la construction des avions de chasse, on ne nous a fourni que des enfants, des femmes et des vieillards, avec lesquels on ne peut presque rien faire...»47 Deux semaines plus tard, Schmelter annonça qu’il pouvait obtenir 10000 à 20000 ouvrières juives. Cependant, seules 520 d’entre elles furent sélectionnées, qui, au final, ne furent pas considérées comme aptes au travail48.

La remarque de caracatère démographique la plus importante de Höss concerne le nombre total de victimes assassinées à Auschwitz. Il fournit le total (238) de 1130000 morts. Longtemps après la guerre, les estimations de cet ordre de grandeur étaient rares. La plupart des études sur Auschwitz donnait alors un chiffre au moins deux fois plus importantvii. Même la couverture de l’édition [anglaise] des mémoires utilisée pour cette étude place le nombre des assassinats à 2 millions. Cependant, en 1991, un historien polonais expert d’Auschwitz, Dr. Franciszek Piper, a réalisé l’étude démographique la plus détaillée jamais réalisée sur le nombre de déportés au camp. Il a commencé sa recherche en 1980. Il conclut que 1,3 millions de personnes ont été déportées à Aushwitz durant ses quatre ans et demi d’existence mais que seulement 400000 ont reçu un numéro d’enregistrement. Sur ces 400000, seuls 200000 n’ont pas été tués. Tous les déportés non enregistrés, que personne n’a comptabilisés, sont morts. Cela signifie que 1,1 million de personnes ont été tuées49. Le Memorial Museum sur la Shoah des Etats-Unis à Washington D.C. prend désormais acte de ce bilan50.

Quelques détails sont incorrects chez Höss. Par exemple, il surestime le nombre de Juifs français et néerlandais morts à Auschwitz et sous-estime d’autres groupes. Cependant, cela n’est pas suprenant. Il ne disposait par des données correspondantes en face de lui puisqu’elles avaient été détruites mais il connaissait le total, chiffre dont il devait probablement se souvenir.

L’aspect le plus intéressant de cette évaluation de Höss à 1,1 million de morts est qu’elle constitue une preuve irréfutable du fait qu’il n’a pu être forcé à mentir dans ses mémoires. Au moment où Höss a écrit ses mémoires, le nombre officiel de victimes d’Auschwitz était de quatre millions. Les Soviétiques, qui avaient libéré Auschwitz en janvier 1945, avaient publié un rapport daté du 6 mai 1945 dans lequel figurait ce nombre de quatre millions de morts. Ce chiffre a été par la suite classé sous la cote USSR-008 par le tribunal international de Nuremberg. Beaucoup d’anciens prisonniers affirmèrent que quatre millions de personnes étaient mortes à Auschwitz. Ce nombre avait également été accepté par les autorités polonaises qui ont jugé Höss51. Pourtant, à l’époque même où ces rapports reprenaient le chiffre de quatre millions de morts, Höss revenait sur son témoignage antérieur mentionnant 2,5 millions de morts à Auschwitz, témoignage qu’il avait donné devant le tribunal militaire international de Nuremberg [en tant que témoin de la défense], avant d’être livré aux Polonais. Il écrit (239): «Je considère le chiffre de deux millions et demi comme beaucoup trop élevé. Même à Auschwitz, la capacité d’extermination avait ses limites. Les chiffres indiqués par des anciens détenus sont des produits de leur fantaisie et ne reposent sur rien.»

Höss met directement en cause la crédibilité de ses gardiens! Il n’a tout simplement pas pu écrire cela sous la contrainte. Au contraire, s’il avait été forcé à écrire ces mémoires, le chiffre de quatre millions serait certainement apparu. Cela montre également que ses mémoires n’ont pas été falsifiés par les autorités polonaises ou soviétiques. Ce fait pourrait expliquer pourquoi — bien que l’auteur n’ait aucune information sur ce sujet — les mémoires de Höss n’ont pas été autorisés de parution par les Polonais avant 1958, plus de onze ans après avoir été écrits.

Il faut néanmoins remarquer, par honnêteté envers les anciens prisonniers et les chercheurs qui ont proposé le chiffre de quatre millions, que le nombre réel de morts n’était pas connu. On savait seulement que ce nombre était très élevé. Le calcul des décès effectué par les Soviétiques était fondé sur le nombre de corps qui auraient pu être incinérés dans les fours selon les autorités du camp. Les chiffres fournis par les Soviétiques dans USSR-008 étaient bien trop élevés, en partie parce qu’ils étaient fondés sur la supposition que tous les fours des crématoires avaient fonctionné à plein régime 24h/24 pendant deux ans et demi. Cette supposition était erronée et est examinée plus en détail dans autre une étude. A l’instar de beaucoup d’événements historiques, la totalité des faits n’apparaît qu’avec le passage du temps et les travaux des historiens.

Höss à propos du secret

Le meurtre de masse à Auschwitz imposait nécessairement le secret. Höss écrit (233) que les membres des SS qui participaient aux meurtres étaient tenus au secret, mais que «même les peines les plus sévères ne pouvaient empêcher les bavardages». Un des documents-clé ayant survécu est la déclaration signée du caporal SS Gottfried Weisse le 24 mai 1944 durant l’opération hongroise. Il déclare qu’il ne volera aucun bien juif et ne révélera aucune information sur les «évacuations» juives, sous peine de mort. Il reconnaît également avoir été informé du cas d’une employée SS condamnée à mort pour avoir révélé des secrets d’Etat52.

Höss raconte (238) que Himmler lui a donné l’ordre de détruire toutes les informations relatives au nombre de victimes tuées après chaque «action» [terme désignant dans ce contexte la déportation massives de Juifs vers Auschwitz et l’assassinat par gazage de la majorité d’entre eux à l’arrivée] à Auschwitz. Il déclare qu’il a personnellement détruit toutes les preuves du massacre de masse et que les autres responsables de département ont fait pareil. Il cite Eichmann lui disant qu’Himmler et le quartier général de la Gestapo avaient détruit des documents qui pouvaient les incriminer pour crime de masse. Il mentionne que, si quelques documents ont pu échapper à la déchiqueteuse, ils «ne pourraient donner aucune information utile sur le total». C’est une des déclarations les plus contestées par les négationnistes. Ils prétendent que la raison pour laquelle il n’y a pas plus d’information à propos du nombre de morts à Auschwitz est que le massacre n’y a jamais eu lieu. En fait, il est notoire que les ordres généraux de détruire toute preuve incriminante ont existé. Malheureusement, la plupart de ces ordres ont également été détruits. Cependant, un document important a survécu, qui montre la nature des matériels dont la destruction était ordonnée. C’est un ordre secret daté du 15 mars 1945 du Gauleiter et commissaire pour la défense du Reich, Sprenger:

«Tous les dossiers, particulièrement les dossiers secrets, doivent être complètement détruits. Les dossiers secrets concernant […] les installations et le travail de dissuasion dans les camps de concentration doivent être détruits à tout prix. Identique pour l’extermination de certaines familles, etc. Ces dossiers ne doivent en aucune circonstance tomber aux mains de l’ennemi, car après tout, ils s’agissait d’ordres secrets du Führer.»53

Les «installations» et le «travail de dissuasion» dans les «camps de concentration», comme les «familles» sujettes à l’«extermination» ne sont pas définis. Comme le «traitement spécial», il y avait des expressions codées pour la destruction des preuves incriminantes.

Conclusion

La réponse à la question posée par le titre de cette étude est que, à partir de toute les preuves disponibles, on peut affirmer que les mémoires de Höss sont très fiables d’un point de vue global. Il y a une documentation nombreuse et indépendante qui confirme presque toutes les affirmations de Höss. Les mémoires de Höss se distinguent parmi les plus fiables des sources de cette nature sur la Seconde Guerre mondiale. Malheureusement, il n’y a pas de confirmation indépendante pour toutes ses déclarations. La déclaration-clé pour laquelle nous n’avons pas de preuve est l’assertion de Höss (223-224) selon laquelle Himmler lui aurait dit à l’été 1941 que Hitler avait ordonné le massacre de tous les Juifs à la portée des Nazis. Si Himmler a pu avoir des enregistrements de cette conversation mais il a du les détruire, comme d’autres preuves relatives au même sujet54. Néanmoins, il est connu qu’Himmler s’exprimait de cette façon. Il y a en particulier les terribles discours de Posen en 1943, pour lequel il existe notamment un enregistrement sur bandes aux archives nationales, où il parle ouvertement de l’«extermination du peuple juif»55. Une découverte récente de documents allemands saisis dans les archives russes montre une note écrite par Himmler dans son carnet en décembre 1941 après une rencontre avec Hitler, qui dit: «La question juive / à exterminer comme partisans»56.

Plus de cinquante ans ont passé depuis l’exécution de Höss pour ses crimes. Le passage du temps a permis de valider ses mémoires. Les nouvelles découvertes accentuent leur crédibilité. Les historiens ont eu raison, depuis quarante ans, de s’appuyer sur ces écrits.

Modifié pour la dernière fois: 11 février 1999 (version originale) — 5 octobre 2010 pour la présente version française Copyright © 1998 John Zimmerman. Tous droits réservés.Copyright © PHDN pour présente version française


Notes.

1. Francizek Piper, «Gas Chambers and Crematoria », dans Yisrael Gutman et Michael Berenbaum, Anatomy of the Auschwitz Death Camp (Bloomington: 1994), p. 177, note. 18.

2. Lucy Dawidowicz, The Holocaust and the Historians (NY: 1981), pp. 176, 177, note. 1.

3. Mark Weber, “My Role in the Zundel Trial,” 9 Journal of Historical Review No 4 (Winter 1989/1990), p. 405.

4.Jerusalem Post, August 17, 1986, p. 1.

5.Jerusalem Post, August 21, 1986, p. 10. voir aussi le dossier Nizkor http://www.nizkor.org/ftp.cgi/people/k/krakowski.shmuel/press.

6. La question du témoignage des victimes et des bourreaux à la lumière des preuves dans la Shoah est examinée dans John C. Zimmerman, Holocaust Denial: Demographics, Testimonies and Ideologies, Lanham, MD: University Press of America, 2000, chapitres 5 et 6.

7. Miklos Nyiszli, Auschwitz: A Doctor’s Eyewitness Account (NY:1993), p. 41.

8. Danuta Czech, Auschwitz Chronicle (NY: 1990), p. 699.

9. Rudolf Höss, Le Commandant d’Auschwitz parle (Julliard, Paris, 1959, La Découverte, Paris, 1995 et 2005). Traduit de l’allemand par Constantin de Grunwald (1959), édité par Geneviève Decrop (1995 et 2005). Les citations de cette source sont celles de l’édition de 2005 et apparaîtront dans le texte en petite taille et en gras. Ex: (27-28).

10. Voir John C. Zimmerman, Holocaust Denial, op. cit, chapitres 5 et 6.

11. Rupert Butler, Legions of Death (Feltham: 1983), pp. 237, 238. Complément de PHDN: cette source, en fait un récit journalistique romancé, est la seule disponible en dehors des mémoires de Höss sur les circonstances de l’arrestation de Höss. Bien que les négationnistes en fassent des gorges chaudes depuis des années, elle est à prendre avec beaucoup de précautions pour des raisons qui sont exposées ici: http://phdn.org/negation/66QER/qer19.html

12. Texte de Pery Broad, «The Reminiscences of Pery Broad», dans Jadwiga Bezwinska et Danuta Czech, Eds., K L Auschwitz Seen by the SS (NY: 1984). Texte abrégé dans Bernd Naumann, Auschwitz (NY: 1966), pp. 162-183.

13. Texte du journal de Kremer et ses explications des entrées à Bezwinska et Czech, ibid pp. 214-231. Pour une analyse détaillée des passages du journal de Kremer et l’aspect négationniste de ces entrées, voir chapitre 4 de la source citée en note 6. On retrouve également une partie du journal de Kremer, en français dans Maxime Steinberg, Les yeux du témoin et le regard du borgne, Les Éditions du Cerf, Paris 1990, en Annexe. Disponible en ligne:
http://phdn.org/negation/steinberg/journal.html

14. Le texte de ce témoignage figure dans David Fyfe, The Belsen Trial of Joseph Kramer and Forty Four Others (London: 1949).

15. Pour une analyse de tous les témoignages aux procès d’Auschwitz au milieu des années 1960, voir Bernd Naumann, Auschwitz (NY: 1966). Naumann était un journaliste qui a couvert le procès. C’est la seule analyse complète des procès en anglais. La transcription des audiences a été publiée dans Hermann Langbein, Der Auschwitz Prozess: eine Dokumentation (Wien: 1965) 2 vol.

16. A la page 226-227, Höss donne l’impression que ce fut le seul gazage dans le Block 11, mais ailleurs, en (179), il suggère qu’il y a eu un autre gazage dans ce Block.

17. Czech, Auschwitz Chronicle, 121.

18.Les registres mortuaires d’Auschwitz sont discutés dans les chapitres 4 et 10 de la source citée en note 6. Ils sont également discutés dans une étude en ligne, «Body Disposal at Auschwitz: the End of Holocaust Denial»: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/body-disposal/.

19. Czech, Auschwitz Chronicle, pp. 102, 112, 120, 131.

20. Voir le négationniste Carlo Mattogno, «The First Gassing at Auschwitz: The Genesis of a Myth», Journal of Historical Review No 2 (Summer 1989), pp. 212-213. Mattogno fournit en fait un grand nombre d’informations utiles qui montrent que les gazages ont bien eu lieu, la chose ayant visiblement échappé à Mattogno et au JHR. Il avance que le premier gazage ne peut pas avoir eu lieu en raison des contradictions des témoins directs et pas à l’automne 1941. Cependant, à la lumière des découvertes de l’institut de Cracovie (voir ci-dessous), la véritable date est moins importante que l’événement lui-même. Par ailleurs, il y a pu avoir des confusions à propos du premier gazage parce qu’il a pu y avoir deux gazages dans le Block 11 comme Höss le suggère (179).

21. Ce rapport est paru dans le journal polonais Z Zagadnien Sqdowych. z XXX 1994, pp. 17-27. Une traduction en Français est disponible sur PHDN: http://phdn.org/negation/markiewicz.html. J’ai [John Zimmerman] reçu la permission écrite de l’Institut de reproduire l’étude en annexe dans la source citée en note 6.

22.David Irving, «The Suppressed Eichmann and Goebbels Papers», 13 Journal of Historical Review No 2 (March/April 1993), p. 22.

23.David Irving, Hitler’s War (NY: 1977), p. 330. [PHDN: Irving n’est pas le découvreur de ce document bien connu des historiens puisqu’il s’agit d’un document utilisé lors du Procès de Nuremberg (voir note 24); il est cité par exemple dès 1957 par Gerald Reitlinger (The SS, alibi of a nation, 1922-1945, Heinemann, p. 280, et par Raul Hilberg en 1961 dans The destruction of european jews.]

24. NO-365 daté du 25 octobre 1941. Traduction dans Gerald Fleming, Hitler and the Final Solution (Berkeley: 1982), pp. 70-71. Mes remerciements aux Archives Nationales [américaines] pour m’avoir fourni une photocopie du document original. Texte complet en français:
http://phdn.org/histgen/documents/wetzel411025.html. Contexte et fac-simile: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/19411025-wetzel-no365/.

25. Les textes de ces rapports sont dans PS-501, dans Office of the Special Counsel, Nazi Conspiracy and Aggression (Washington D.C. 1947), Vol. 3, pp. 418-422. Version française en ligne avec références du rapport Becker:
http://phdn.org/histgen/documents/becker420516.html.

26. Photocopie de l’allemand original avec une traduction anglaise dans Eugen Kogon, Hermann Langbein et Adalbert Ruckerl, Nazi Mass Murder: A Documentary History of the Use of Poison Gas (Yale: 1993), pp. 228-235. Voir texte complet en français, références et fac-simile: http://phdn.org/histgen/documents/rauff420605.html.

27. Jean-Claude Pressac, Auschwitz: Technique and Operation of the Gas Chambers (NY: 1989), p. 429. Photocopie de la liste à la p. 438. Document en ligne: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/19430624-inventory/. Voir également: http://phdn.org/histgen/schmitz/invntry.html.

28. Texte original avec traduction anglaise dans ibid., p. 231. En ligne: http://phdn.org/histgen/auschwitz/19430129-vergasungskeller.html.

29. Texte dans ibid., p. 211. Le mot allemand «Vergasungskeller», chambre à gaz, est souligné dans le rapport original. La chambre à gaz était la Morgue no1. Voir ibid., p. 212. Voir également Gutman, Anatomy of the Auschwitz Death Camp, Washington D.C and Bloomington: United States Holocaust Memorial Museum and Indiana University Press,1994, p. 223, 227. Jean-Claude Pressac, Les crématoires d’Auschwitz, la machinerie du meurtre de masse, CNRS Éditions, p. 60 et p. 69. Le document est reproduit ici:
http://phdn.org/histgen/auschwitz/19430129-vergasungskeller.html.

30. Jean Claude Pressac, Les Crématoires d’Auschwitz: La Machinerie du Meurtre De Masse (Paris: 1993), p. 107, note. 256. Pressac a découvert ce document dans les archives d’Auschwitz à Moscou. Le témoignage direct est reproduit dans Pressac, Auschwitz: Technique and Operation of the Gas Chambers, pp. 161, 164, 171, 181.

31. Texte du rapport dans Jeremy Noakes et G Pridham, Nazism 1919-1945 (Exeter: 1988), Vol. 3, p. 1184. Données d’enregistrement dans Czech, Auschwitz Chronicle, p. 347. [PHDN: le rapport est également mentionné par Maxime Steinberg, Les yeux du témoin et le regard du borgne, Les Éditions du Cerf, Paris 1990, au chapitre 7.]

32. Texte dans Kogon, Langbein et Ruckerl, Nazi Mass Murder, p. 160. Version française dans Eugen Kogon, Herrmann Langbein, Adalbert Rückerl, Les chambres à gaz secret d’État, Seuil, Points Histoire, 1987, p. 202.

33. “Aktenvermerk Betr: Stromversorgung und Installation des KL und KGL” dans Auschwitz Archives From Moscow, File 502-1-26 Reel 20. Mes remerciement à Aaron Kornblum du Museum de l’Holocauste des Etats-Unis pour m’avoir fourni ceci et d’autres documents des archives. En ligne: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/19430129-electricity/

34. Texte dans Raul Hilberg, Documents of Destruction (NY: 1971), pp. 220-221. Photocopie de l’original dans Death Books From Auschwitz: Remnants (London: 1995), Vol. 1, Appendix, p. 144. En ligne: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/19420826-dessau/

35. Source citée dans la note 21, en ligne: http://phdn.org/negation/markiewicz.html

36. Chapitre 10 de la source citée dans la note 6 et une étude intitulée «Body Disposal at Auschwitz: the End of Holocaust Denial»: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/body-disposal/

37.New York Times, November 25, 1942, p. 10.

38. Czech, Auschwitz Chronicle, p. 357. La date était 22 mars 1944.

39. Pressac, Les Crematoires d’Auschwitz, pp. 79-80, citant une lettre des archives d’Auschwitz à Moscou datée du 9 juin 1943.

40. Dino Brugioni, “Auschwitz-Birkenau,” Military Intelligence (January-March, 1983), p. 53. En ligne: http://www.globalsecurity.org/intell/library/imint/holocaust2.htm

41. Michael Shermer, Why People Believe Weird Things (NY: 1997), p. 236. L’analyste de la photographie est Dr. Nevin Bryant.

42. Pressac, Auschwitz: Technique and Operation of the Gas Chambers, p. 422. L’arrière-plan de la photographie est cohérent avec le crématoire V. Beaucoup de photographies des crématoires, y compris du crématoire V ont été publiées par Pressac. Voir également les photos reproduites dans Czech, Auschwitz Chronicle. On peut trouver la photo dont il est question en ligne:
http://www.nizkor.org/ftp.cgi/camps/auschwitz/images/burning-pit.jpg.

43. Dino Brugioni et Michael Poirier, The Holocaust Revisited: A Retrospective Analysis of the Auschwitz-Birkenau Extermination Complex (CIA: 1979), p. 6. En ligne:
https://www.cia.gov/library/center-for-the-study-of-intelligence/kent-csi/vol44no4/html/v44i4a06p_0001.htm

44. Piper, «Gas Chambers and Crematoria », p. 175.

45. Czech, Auschwitz Chronicle, pp. 633, 636, 641, 642, 643, 647, 648, 650, 655, 661, 666, 671, 673, 686.

46. Lettre datée du 11 juillet 1944 d’Edmund Veesenmayer, le plénipotentiaire allemand pour la Hongrie, NG 5615 dans Randolph Braham, The Destruction of Hungarian Jewry: A Documentary Account (NY: 1963), Vol. 2, p. 443.

47. NOKW 266, dans Tribunal militaire de Nuremberg, Trials of War Criminals (Washington D.C. 1947), Vol. 2, p. 557.

48. Raul Hilberg, The Destruction of the European Jews (NY: 1985), Vol. 3, p. 935.

49. Franciszek Piper, «Estimating the Number of Deportees to and Victims of the Auschwitz-Birkenau Camp», 21 Yad Vashem Studies (1991), pp. 97-99 pour un résumé des données mentionnées plus tôt dans l’étude. Piper a produit une étude plus détaillée sur le sujet en allemand. Voir son Die Zahl Der Opfer von Auschwitz: Aufgrund der Quellen der Etrage der Forschung, 1945-1990 (Oswiecim: 1993).

50. United States Holocaust Memorial Museum, Atlas of the Holocaust (NY: 1996), p. 97.

51. Piper, «Estimating the Number of Victims», pp. 53, 54, 58, 59. Le texte de USSR-008 en allemand apparaît dans Tribunal militaire international, Trials of Major War Criminals (Washington D.C., 1947), Vol. 39, pp. 241-261. La référence des quatre millions figure à la p. 260.

52. Photocopie de l’original dans Henry Friedlander and Sybil Milton, eds, Archives of the Holocaust (NY: 1989), Vol. 11, Part 2. Docs. 405 and 406, p. 300. En ligne: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/19440524-weisse/ et http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/auschwitz/1944-weisse/

53. D-728. Texte dans Nazi Conspiracy and Aggression, Vol. 7, p. 175. Mes remerciements aux Archives Nationales pour m’avoir fourni une photocopie du document original.

54. Voir Richard Breitman, The Architect of Genocide: Himmler and the Final Solution (NY: 1991), p. 7, pour la destruction des documents incriminant Himmler.

55. Discours du 4 octobre 1943. Extraits significatifs dans Yitzhak Arad, et. al, Eds. Documents on the Holocaust (Jerusalem: 1981), pp. 344-345; Lucy Dawidowicz, ed. A Holocaust Reader (West Orange: 1976), p. 133; Michael Berenbaum, Witness to the Holocaust (NY: 1997), p. 178. Texte en allemand dans Tribunal militaire international, Trials of Major War Criminals (Washington D.C. 1947), Vol. 29, p. 145. Mitchell Jones, un chercheur indépendant, a obtenu un enregistrement du discours aux Archives Nationales. Voir ses commentaires sur l’affirmation négationniste selon laquelle l’expression d’Himmler ne signifiait pas l’extermination physique des Juifs. Mitchell Jones, The Leuchter Report: A Dissection (Cedar Park: 1992), p. 62. Passages principaux, en français, en ligne:
http://phdn.org/histgen/documents/nazisdoc.html#himmler-19431004

56.New York Times, 21 janvier 1998, p. A4. La note date du 18 décembre 1941. On peut en trouver un scan sur internet à l’adresse http://www.mazal.org/archive/documents/DOC-00002.htm. Une entrée similaire dans le journal de Goebbels pour le 12 décembre 1941 a été découverte dans les archives. Voir Gord McFee, «When Did Hitler Decide on the Final Solution?»: http://phdn.org/archives/holocaust-history.org/hitler-final-solution/.


Notes de PHDN.

i. Rudolf Höss, Le Commandant d’Auschwitz parle, Julliard, Paris, 1959; La Découverte, Paris, 2005. Traduit de l’allemand par Constantin de Grunwald (1959), édité par Geneviève Decrop (2005).

ii. Sur la chambre à gaz du crématoire I de Auschwitz I, voir: http://phdn.org/negation/krema-i.html]

iii. Il existe de nombreux documents illustrant que l’expression «traitement spécial» signifiait l’assassassinat. Nous en donnons quelques exemples parmi de nombreuses citations contemporaines illustrant la volonté et la politique de génocide menée par les nazis, http://phdn.org/histgen/documents/nazisdoc.html, notamment, un message de Eichmann du 26 juillet 1942 préconisant le «traitement spécial» des «inaptes au travail», http://phdn.org/histgen/documents/nazisdoc.html#eichmann-19420726, les échanges entre Greiser et Himmler sur un projet d’exécution de plusieurs dizaines de milliers de tuberculeux polonais, http://phdn.org/histgen/documents/nazisdoc.html#greiser-19420501. On renverra également au chapitre II de Eugen Kogon, Herrmann Langbein, Adalbert Rückerl, Les chambres à gaz secret d’État, Seuil, Points Histoire, 1987, ainsi qu’au chapitre 7 de Maxime Steinberg, Les yeux du témoin et le regard du borgne, Les Éditions du Cerf, Paris, 1990.

iv. La traduction française (Julliard, 1959 et La Découverte, 2005) est entachée d’une inexactitude dans la numérotation des Krematorien, puisque procédant à une confusion entre le Krematorium III et le Krematorium IV (p. 235): «Au bout de très peu de temps, on renonça au crématoire III, et l’on ne s’en servit plus par la suite.» Il faut en fait lire «crématoire IV»: ce dernier, en effet, comprenait un double-four à quatre creusets incinérateurs (c’est-à-dire huit creusets incinérateurs, comme l’indique Höss), fut bel et bien livré à Auschwitz par la firme Topf und Söhne le 22 mars 1943, et ses nombreuses pannes conduisirent les SS à cesser de l’utiliser à compter de la mi-mai 1943 (voir Robert J. Van Pelt & Deborah Dwork, Auschwitz. 1270 to the present, W. W. Norton, NY, 1996, p. 331 ainsi que Jean-Claude Pressac, Les crématoires d’Auschwitz. La machinerie du meurtre de masse, CNRS Editions, Paris, 1993, p. 76-77). Le Krematorium III, qui comprenait cinq fours à trois creusets incinérateurs (conformément au témoignage de Höss), fut livré à Auschwitz le 24 juin 1943 et se révéla, à l’inverse, fonctionnel (ibid., p. 80-81). En d’autres termes, c’est bel et bien au Krematorium IV que Höss ici fait allusion, et non au Krematorium III.

v. Les Polonais auraient donc eu tout intérêt à tenir la plume de Höss pour éviter que son récit ne contredise leur version, ce qui est pourtant le cas, illustration supplémentaire qu’à aucun moment, Höss n’a été contraint dans la rédaction de son récit.

vi. Nouvelle erreur de traduction ou de retranscription dans la version française, laquelle confond les Krematorien IV et V (p. 235-236): «Quant au crématoire IV, il a fallu arrêter son utilisation à plusieurs reprises parce que au bout d’un bref laps de temps — quatre à six semaines d’incinération — les fours ou les cheminées avaient brûlé. On incinérait généralement les gazés dans les fosses installées derrière le crématoire.» (p. 234-235) Il faut en fait lire «crématoire V». Comme exposé supra, l’activité du Krematorium IV cessa à compter du mois de mai 1943. Le Krematorium V, pour sa part, comprenait également huit creusets incinérateurs, mais connut plusieurs pannes, outre que l’extermination des Juifs de Hongrie excéda ses capacités, obligeant les SS à creuser à proximité des fosses en plein air pour se débarrasser des corps (Pressac, op. cit., p. 79-81 et 90).

vii. Les études pionnières de Gerald Reitlinger et Raul Hilberg fournissent cependant dès la fin des années 50 et le début des années 60 des bilans du même ordre de grandeur que celui de Rudolf Höss. L’historiographie est moins surévaluée que ne le prétend John C. Zimmerman. Voir
http://phdn.org/histgen/auschwitz/bilan-auschwitz.html

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