La loi Gayssot et ses critiques de bonne foi
Ignorance de la nature du négationnisme
Gilles Karmasyn
1. Le négationnisme: un discours antisémite
La loi Gayssot, dans son acception commune, interdit, ou plutôt sanctionne, l’expression publique des discours négationnistes, à savoir les discours qui nient l’ampleur et la réalité du génocide des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale.
La loi Gayssot fait parfois l’objet de critiques qui ne distinguent pas le fond et la forme.
Plusieurs années de confrontation avec des personnes hostiles (pour de bonnes ou de mauvaises raisons) à la loi Gayssot, m’ont amené à constater que la plupart des reproches faits à cette loi ne résistaient pas à un examen minutieux.
Le négationnisme, en dehors du fait qu’il est un discours fondé sur des falsifications et des mensonges, un discours qualifié par Bernard Comte d’«anti-historique», est avant tout, un discours antisémite. Tous ceux qui l’ont étudié ont pu le constater. Le présent site web en donne de nombreux exemples. Outre le fait que l’écrasante majorité des négationnistes se situe à la droite la plus extrême, chez les racistes et les antisémites les plus virulents, chez des nazis et des néo-nazis fanatiques, la lecture systématique de la littérature négationniste, que l’auteur des présentes lignes a effectuée et effectue encore, démontre sans la moindre ambiguïté le caractère antisémite du négationnisme. Il s’agit d’un antisémitisme radical et pervers. Les négationnistes formulent plus ou moins implicitement des propositions, nécessaires à la «cohérence» de leur «thèse» qu’on peut résumer ainsi: tous les témoins juifs mentent. Les Juifs mentent pour de l’argent et à des fins de domination politique et économique mondiale. Les Juifs ont su organiser un mensonge à échelle mondiale, un complot afin de bailloner ou acheter les historiens du monde entier, voire des états. En 2020, Robert Faurisson déclarait très explicitement que la Shoah «était un mensonge juif».
Se trouvent associés, et dénoncés es-qualité, comme complices, les USA capitalistes et l’URSS communiste, tous au service du «sionisme», qui remplace dans une rhétorique modernisée le «judaïsme» fantasmé des antisémites de la seconde moitié du XIXe siècle et de la première moitié du XXe. Il s’agissait déjà d’y voir un complot diabolique de domination mondiale. À l’occasion, ces formulations substituent «sionistes» à Juifs afin de mieux coller à l’air du temps. Cela ne change évidemment rien à leur caractère antisémite.
Pour les négationnistes, les mesures nazies contre les Juifs étaient justifiées parce qu’un conflit aurait opposé «les Juifs» à Hitler, qui se serait simplement défendu. Le port de l’étoile jaune par des enfants de six ans se trouve justifié, les assassinats de femmes et d’enfants dans les opérations mobiles de tueries sont présentés comme un épisode légitime de la lutte anti-partisans, la ghettoïsation comme mesure nécessaire de lutte contre les épidémies (lors même que c’est cette ghettoïsation qui engendrait des épidémies!), la déportation également. Au final, c’est bien la rhétorique antisémite nazie qui est reprise et justifiée par le discours négationniste, puisque les négationnistes font, in fine, aux Juifs les mêmes reproches que les nazis. Nonobstant leurs protestations du contraire, cet antisémitisme perce notamment sans la moindre ambiguïté dans la prose et les relations des ténors du négationnisme comme Rassinier ou Faurisson.
Toute personne qui désirerait aborder la question de la loi Gayssot de bonne foi, doit d’abord passer par ce constat: le négationnisme est un discours antisémite, avant tout antisémite, intensément antisémite. S’il l’est le plus souvent implicitement, c’est dans l’objectif même de réhabiliter un antisémitisme explicite et de promouvoir les conditions de réalisation du type même d’événement qu’il nie.
Si le négationnisme est interdit d’expression publique (par le dispositif dissuasif de la sanction), c’est donc d’abord en tant que discours antisémite, en tant que discours de réhabilitation de l’antisémitisme, en tant que discours d’incitation à la haine. Pourtant il est rare de lire sous la plume de ceux qui critiquent la loi Gayssot, ce constat évident du caractère antisémite du discours négationniste, et que c’est bien en tant que tel qu’il est sanctionné.
Il faut rappeler que les négationnistes se sont, en France, exprimés librement, ou presque (ils furent l’objet de plaintes; voir plus bas) de 1948 à 1990. Cela a suffi pour comprendre que leurs propos ne relevaient que de l’incitation à la haine. Laquelle est justement interdite (pour être tout à fait exact, elle est sanctionnée).
[Ce que nous écrivons ici depuis 2002 a été formellement et très clairement exprimé par la Cour européenne des droits de l’homme en 2019, dans son Guide sur l’article 17 de la Convention européenne des droits de l’homme – Interdiction de l’abus de droit (Strasbourg: Editions du Conseil de l’Europe, 2019). On peut y lire: «La Cour et la Commission ont invariablement présumé que la négation de l’Holocauste incitait à la haine ou à l’intolérance. En particulier, en criminaliser la négation ne se justifie pas tant parce que l’Holocauste constitue un fait historique clairement établi que parce que, au vu du contexte historique dans les États en question, sa négation, même habillée en recherche historique impartiale, traduit invariablement une idéologie antidémocratique et antisémite» (section F, paragraphe 148)]
2. L’insuffisance de la législation anti-raciste
Cette question de la législation existante, fait parfois l’objet d’une première catégorie de critiques (cependant la moins répandue): la législation existante serait suffisante, c’est-à-dire suffisante pour poursuivre et faire condamner les négationnistes…
De quelle législation parlons nous? De la législation déjà existante interdisant l’expression publique des discours qui incitent à la haine. Je pars ici d’un premier postulat, à savoir que la nécessité de l’interdiction de tels discours ne saurait être remise en cause.
Dans le cas des discours négationnistes, les procès qui eurent lieu avant 1990 ont montré que les négationnistes avaient beau jeu de jouer sur la lettre des seules lois alors existant contre les discours d’incitation à la haine, pour prétendre que leurs discours n’étaient ni diffamatoires ni porteurs de haine. Des juges les ont parfois entendus, à fort mauvais escient. Certains juges se sont même permis un jugement appréciatif du «travail» de Faurisson, une véritable aberration lorsqu’on connaît un peu le caractère proprement frauduleux de sa méthode et de son discours (voir notamment https://phdn.org/negation/faurisson/). C’est bien l’illustration qu’un jugement sur la qualité d’un travail qui se présente frauduleusement, mais habilement, comme un travail historique, ne saurait être laissé à l’appréciation des juges, dont ce n’est pas le métier. Lorsque les négationnistes furent condamnés, ce fut souvent sur la forme plus que sur le fond, pour des débordements clairement antisémites. Ils apprirent à édulcorer la forme, en essayant de donner à leur propos l’aspect d’un discours scientifique, sans remettre en cause le fond: la négation radicale de la réalité du génocide, discours à la teneur radicalement antisémite. La situation devenait périlleuse pour le juge qui devait de plus en plus recourir à une interprétation des intentions de l’auteur négationniste, voire à une analyse historienne. Le délit de «tromperie délibérée» n’existe pas en droit français, et ce n’est pas sur cet aspect-là que pouvait se fonder une sanction du négationnisme.
La société se fonde sur une prise de responsabilité du législateur: il lui appartient d’identifier et de traiter un problème dès qu’un seuil a été franchi et que ce problème présente un danger pour la société. Si le négationnisme n’avait pas dépassé le stade du délire discuté dans leur coin par trois hurluberlus, il n’y aurait eu aucun besoin de légiférer. Mais il faut constater qu’à la fin des années 1980, un seuil dangereux avait été atteint. Le législateur en a pris acte et décidé que la société devait protéger ses membres. Il a décidé de décharger le juge de prises de position par rapport à la lettre de la loi (interdisant l’incitation à la haine et la diffamation), à l’histoire, et pris, enfin, acte du caractère antisémite du négationnisme.
C’est en tant que discours antisémite, qu’il est normal — je dirais naturel, dans notre société — que le négationnisme soit sanctionné.
La loi Gayssot sanctionne donc le discours négationniste en tant que discours d’incitation à la haine. La réalité intervient alors comme élément d’identification, de diagnostic du discours négationniste. Le droit impose de fixer un critère aussi objectif que possible d’identification du discours négationniste par la loi, afin d’éviter les abus. Ce critère, c’est la négation de la réalité du génocide telle que fixée par l’article 24bis de la loi sur la liberté de la presse de 1881 (c’est cet article que l’on désigne communément par «Loi Gayssot»). Il faut avoir à l’esprit que si la négation de la réalité et de l’ampleur du génocide constitue le fond du discours négationniste, pour la loi, cette négation constitue avant tout le critère permettant d’identifier un discours antisémite. Mais la loi ne fixe aucunement la réalité. En fait, la loi permet justement d’éviter au juge de se prononcer sur des points d’histoire (Voir à ce sujet: Michel Troper, «La loi Gayssot et la constitution», Annales, HSS, 54(6), novembre-décembre 1999).
Si on avait interdit la propagation des Protocoles des Sages de Sion, ce faux antisémite fabriqué par la police tsariste au début du siècle, peut-être aurait-on pu éviter bien des massacres (à ce sujet, voir: https://phdn.org/antisem/protocoles/). Remarquons d’ailleurs qu’aujourd’hui les Protocoles des Sages de Sion sont interdits de diffusion en France. Et ceux qui critiquent la loi Gayssot pour ce qu’elle fixerait la réalité devraient aussi critiquer l’interdiction des Protocoles qui serait aussi une fixation de la réalité: le fait qu’il n’existe pas de complot juif tel que décrit dans les Protocoles. Mais on sait bien quel mal ce faux a pu causer et il est clairement connu et reconnu pour ce qu’il est: un document antisémite, lors même que son strict contenu ne l’est pas forcément de façon explicite.
Sur le motif de la sanction de l’expression publique du négationnisme, il convient d’ajouter ceci: dans la mesure où il est largement admis, reconnu, établi que le négationnisme est un discours antisémite, il serait aberrant, sous prétexte que le négationnisme prétend être un discours historique (ce qui est faux), de ne pas le sanctionner ! Un discours d’incitation à la haine bénficierait en quelque sorte d’un passe-droit parce qu’il prétendrait s’incarner sous une forme «intouchable»? Il y aurait là, un véritable scandale, et une honte pour la justice et pour l’histoire comme entreprise de connaissance.
La nécessaire reconnaissance du caractère antisémite du discours négationniste entraîne celle de la nécessité de la sanction de son expression publique. La nécessité de disposer de modalités d’identification, à fin de poursuites et de sanctions judiciaires, rend indispensable que le législateur prenne, d’une façon ou d’une autre, acte de la réalité, et du fait que la négation de cette réalité est le critère permettant de reconnaître le discours négationniste. Mais il ne faut pas confondre ce moyen avec la fin: la sanction d’un discours antisémite.
3. La loi Gayssot promeut-elle une «vérité officielle»?
La principale critique adressée à la loi Gayssot consiste à affirmer qu’elle induirait une sorte de «vérité officielle», voire qu’elle présenterait une entrave à la recherche historique. Nous considérons ici la critique adressée par les personnes de bonne foi, c’est-à-dire celles qui ne critiquent pas la loi Gayssot par sympathie négationniste. Quant à elles, les critiques négationnistes, quelle qu’en soit la forme, se réduisent à une simple stratégie.
Nous devons d’abord faire cette constatation: les personnes de bonne foi ne prennent pas acte du caractère antisémite du discours négationniste et n’abordent jamais le fait qu’en tant que discours antisémite, il est normal que le négationnisme soit sanctionné. Pourtant, les critiques de bonne foi de la loi Gayssot devraient prendre position sur la nécessité de sanction d’un discours antisémite. Ils ne le font pas. Cela n’est pas tout à fait étonnant: contester la légitimité de l’interdition d’un discours antisémite irait le plus souvent à l’encontre même des valeurs défendues par ces critiques de bonne foi. D’autre part, une prise de conscience — et de parole — explicite admettant le caractère antisémite du discours négationniste et la nécessité de le sanctionner, en tant que discours antisémite, les contraindraient à proposer un autre critère d’identification du discours négationniste que celui choisi par la loi Gayssot. Il est plus que probable qu’ils s’apercevraient alors que n’importe quelle alternative au texte actuel tomberait aussi sous la critique dénonçant une «vérité officielle», selon la logique même qui préside à la critique du texte actuel. C’est un effet consubstantiel à la nature du négationnisme: tout critère permettant d’identifier ce discours prend nécessairement appui sur la réalité. C’est ce critère nécessaire qui s’impose naturellement au législateur.
La question à poser conjointement à celle du problème d’une «histoire officielle», est celle de la nécessité de la sanction d’un discours antisémite. Tous les critiques de bonne foi font malheureusement l’économie de cette question-là ou l’évacuent en prétendant que la législation disponible suffirait (voir plus haut à ce sujet). Cela leur permet d’échapper à une contradiction dans l’application de leurs propres valeurs, qu’ils ne pourraient résoudre que par un choix éventuellement difficile à assumer. Cette explication ne vaut pas excuse.
Posons malgré cela la question: la loi Gayssot induit-elle le risque de l’existence d’une «histoire officielle»? Risque-t-elle d’être une sorte d’entrave au travail de l’historien? La loi Gayssot, en interdisant l’expression publique du négationnisme, à savoir de la négation de la réalité et de l’ampleur du génocide des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, participe-t-elle d’une «histoire officielle»? La question a-t-elle un sens? J’affirme que non. Il n’y a pas un domaine de l’histoire qui fasse aujourd’hui l’objet d’une version «officielle», c’est-à-dire défendue par l’institution (mettons par l’état) de telle façon qu’elle étoufferait complètement des «thèses non-officielles», par voie d’intimidations physiques, sociales ou financières.
Le négationnisme n’est pas une autre «version de l’histoire». Il n’y a pas plusieurs «versions» de la réalité, en ce qui concerne le génocide et son ampleur. Il peut y avoir plusieurs «interprétations» de cette réalité. Mais il n’y a pas plusieurs réalités différentes qui constitueraient autant de «thèses».
La loi ne contraint pas plus les historiens à «conclure» à l’existence du génocide que les astronomes ne sont contraints à celle de la lune. La lune existe. Une tentative d’extermination des Juifs d’Europe a eu lieu, accomplie en grande partie.
La loi ne fixe pas la réalité. Elle prend acte de la réalité. De même que la notion de tapage nocturne (qui limite aussi certaines libertés…) prend implicitement acte de quelques réalités: la nuit, le sommeil. Les Anglo-saxons ont une notion proche: ils appellent cela «to take judicial notice». Cette notion juridique permet d’éviter de discuter du fait que le soleil se lève à l’est et se couche à l’ouest. Dans le cas du génocide, la réalité est accessible au sens commun: une politique d’assassinat systématique, l’ampleur globale du crime, les principales modalités de ce crime. Il ne faut pas confondre l’histoire, qui est l’élaboration de la connaissance et le récit de cette réalité, avec la réalité elle-même. La loi prend acte de la seconde. Elle ne fixe pas la première. Un dernier exemple: la législation anti-tabac (réglementation de la publicité, avertissements sur les paquets de cigarettes, zones non-fumeurs obligatoires, etc.) ne fixe pas le fait que le tabac nuit gravement à la santé: elle en prend acte. Il ne s’agit pas d’un arbitraire imposant un discours, mais de la prise en compte d’une réalité qui précède la loi et en est indépendante.
Répétons-nous: le fait du génocide relève de la réalité, une réalité qui existe en dehors de toute interprétation historienne. Le fait de l’extermination des Juifs par les Nazis, son ampleur, ses modalités, sont connus et établis de telle sorte que leur négation ne relève pas d’un discours historien, mais d’un discours a-historique, un discours «anti-historique», un discours tout simplement antisémite. Le fait est advenu quelle qu’en soit l’analyse historienne.
La loi Gayssot n’interdit nullement de revenir sur les explications et les interprétations de la destruction des Juifs d’Europe par les Nazis et leurs complices. D’ailleurs la vitalité de l’historiographie des politiques d’extermination nazies le prouve de façon claire.
Une constatation pragmatique s’impose: il n’y a pas d’historien (c’est-à-dire d’historien travaillant sur le génocide) qui soit gêné dans son travail par l’existence de la loi Gayssot, dans la mesure où cette loi et l’historien suivent un même chemin: celui de la réalité historique. N’importe quel historien travaille sur ce matériau factuel et donc ne peut être gêné par la loi Gayssot. Les dizaines d’ouvrages récents de dizaines d’historiens, de toutes nationalités, en sont la parfaite illustration.
La loi Gayssot n’interdit pas de revenir sur la connaissance du génocide, de l’affiner, de la réinterpréter, de la réviser, même si le fait et son ampleur sont patents, évidents, ultra-documentés. L’historiographie française de la Shoah donne un exemple particulièrement éclatant de cette possibilité permanente de révision, dans le sens noble, de cette connaissance. Dans les premières décennies de l’après-guerre, le nombre de Juifs de France victimes de la Shoah était communément évalué à cent-vingt mille. Ce sont les travaux de Serge Klarsfeld qui, dans les années 70, ont révisé à la baisse ce bilan. Serge Klarsfeld a démontré que le nombre de victimes de la Shoah en France s’élevait à quatre vingt mille personnes. Cette baisse de plus de 30% montre bien que les historiens font leur travail. Car, Klarsfeld a fait œuvre d’historien, avec sérieux, méthode et rigueur. L’approche honnête et rigoureuse des faits permet d’en affiner la connaissance. Le travail de Klarsfeld n’a évidemment rien à voir avec le négationnisme et jamais la loi Gayssot n’aurait interdit à Serge Klarsfeld d’effectuer sa révision du bilan des victimes de la Shoah en France. La loi Gayssot n’a aucune influence limitative sur la pratique historienne dès lors que les règles en sont respectées.
L’interdiction de l’expression publique ne signifie donc aucunement que la connaissance soit figée. Elle ne fixe pas non plus une connaissance «absolue». D’ailleurs, une telle connaissance, absolue, d’un événement est impossible quel que soit l’événement. La connaissance de la bataille de Verdun, la reconnaissance de sa réalité, n’implique pas que l’on connaisse sa durée à la seconde (la milliseconde?) près, ni que l’on détermine au centimètre carré près la surface du champ de bataille, ni qu’on en connaisse à la dizaine de milliers près le nombre de morts. Cela ne m’empêchera pas d’affirmer haut et fort que la bataille de Verdun est un événement patent, évident, ultra-documenté et qu’on connaît l’ordre de grandeur du nombre des victimes. De la même façon, le fait du génocide est patent, évident, ultra-documenté et l’ordre de grandeur du nombre de victimes connu sans ambiguïté.
On objectera alors qu’aucune loi ne prend acte de la réalité de la bataille de Verdun. Nous touchons là à la nécessité de la loi Gayssot: l’expression publique du négationnisme est sanctionnée tout simplement parce que le négationnisme est un discours antisémite, non parce qu’il nie une réalité.
Les historiens n’ont cessé de discuter interprétations et précisions sur de nombreux aspects qui ne relèvent ni de la réalité, ni de l’ampleur du génocide. Des interprétations structuralistes et intentionnalistes (aujourd’hui dépassées) se sont affrontées. La place de l’idéologie nazie, le degré d’imprégnation de la société allemande, la nature de l’antisémitisme allemand, les dates clefs des décisions ayant mené à une politique d’extermination, sont l’objet de l’attention et des débats des historiens. En France, la critique de la loi Gayssot n’est jamais venue des historiens qui travaillent effectivement sur le sujet. Et pour cause: ils savent parfaitement de quoi il en retourne. La loi Gayssot ne pose aucune entrave à leur travail.
4. La Loi Gayssot fait-elle dire l’histoire par le juge?
La loi Gayssot sanctionne l’expression publique d’un discours négationniste. Elle ne dit pas l’histoire, mais prend acte de la réalité — dont l’histoire fait son matériau — comme critère d’identification du discours négationniste.
Les critiques de bonne foi qui ne font pas cette distinction font une deuxième objection en contradiction avec la première: par la loi Gayssot, c’est le juge qui dirait l’histoire. Cette affirmation est encore plus erronée que la première. Le juge se prononce par rapport à la loi, et non par rapport à l’histoire ou à la réalité. La loi Gayssot permet justement au juge de ne pas dire l’histoire, de ne pas avoir à se prononcer sur la qualité historienne des discours qu’il a à juger.
Avant l’existence de la loi Gayssot, à plusieurs reprises, des juges eurent à se prononcer sur des points d’histoire. C’était une aberration. Le juge n’a pas à se mêler d’histoire. Et de fait, c’est ce que la loi Gayssot permet d’éviter (Voir https://phdn.org/negation/troper.html). Le juge n’a plus à se prononcer que sur le respect ou le non-respect de cette loi. Il établit non la réalité du génocide, mais le fait du discours niant cette réalité: la personne accusée a-t-elle a-t-elle oui ou non tenu publiquement un discours niant la réalité du génocide? Le juge ne se préoccupe pas du génocide mais du discours tenu. De même que dans le cadre de la loi anti-tabac il ne se prononcerait pas sur le caractère nocif du tabac, mais sur le respect ou non de l’obligation d’affichage de cette nocivité.
Un contre-exemple paradigmatique a été donné en 2000 en Grande-Bretagne, à l’occasion du procès de l’écrivain britannique David Irving, passé au négationnisme en 1988. Celui-ci avait porté plainte contre une historienne américaine, Deborah Lipstadt, qui avait produit un ouvrage sur le négationnisme et les négationnistes, très critique (et pour cause) à l’encontre d’Irving. (Sur Irving, voir: https://phdn.org/negation/irving/). L’enjeux du procès était de prouver que Deborah Lipstadt avait dit vrai en écrivant qu’Irving falsifiait la réalité.
La Grande-Bretagne n’est pas dotée d’une loi semblable à la loi Gayssot. Le procès vit Irving étaler ses thèses négationnistes et, pour le contrer, il a fallu recourir à des démonstrations historiennes. Le juge a quasiment eu à se prononcer sur des questions d’histoire. Cela a duré des semaines. Les journaux ont rendu compte du déroulement du procès d’une façon scandaleuse, faisant la publicité du pseudo argumentaire d’Irving, forcément «spectaculaire», et oubliant d’en démonter la mécanique mensongère. Irving a bien évidemment perdu son procès. La grande lucidité du juge ne lui a cependant pas permis d’éviter de se prononcer sur le terrain de l’histoire. Sa grande compétence, la durée très longue du procès, ont permis que des impairs soient évités. Mais le juge ne peut remplacer l’historien. Cela aurait pu se passer beaucoup plus mal.
Ce sont de telles situations que la loi Gayssot permet d’éviter en France.
En 2013, L’historien François Hartog, président de l’École des Hautes études en Sciences Sociales, titulaire de sa chaire d’Historiographie ancienne et moderne écrit (La chambre de veille, Flammarion):
«Le risque était que la loi vienne dire l’histoire: une histoire officielle […] Mais en réalité la loi Gayssot n’est pas exactement de ce type. Elle possède le grand avantage de dispenser le juge d’avoir à faire de l’histoire et, donc, de la dire. Ce que la loi réprime c’est l’expression publique du négationnisme. Le juge n’a donc pas à transformer le prétoire en atelier d’histoire, mais seulement à constater et à condamner l’expression publique de telles thèses. D’ailleurs, cette loi qui a maintenant plus de deux décennies, n’a pas eu d’effet négatif sur la recherche historique. »
La loi Gayssot est un outil indispensable et salutaire. Dans son principe, il est heureux qu’elle existe. Si tel n’était pas le cas, les lycées seraient saturés de tracts, et la presse extrémiste (de droite ou de gauche) serait constamment émaillée de propos négationnistes.
Il demeure que la rédaction de la loi peut être discutée. C’est une autre question que nous ne traiterons pas ici.
Dernier point avant poursuivre: certaines bonnes âmes s’effraient de la «censure» qu’instaurerait la loi Gayssot. Or la censure est une interdiction de publication a priori. Ce que n’est pas la loi Gayssot. Elle décourage certes la publication des propos négationnistes, par les sanctions encourues en cas de poursuites et de condamnation, mais si tel auteur ou telle maison d’édition décide de publier, rien ne l’en empêche. C’est seulement après coup, après publication qu’une plainte peut-être déposée. Il y aura alors jugement fondé en droit, les acteurs de la plublication bénéficiant de tous les droits de la défense et ayant toute possibilité de démontrer, le cas échéant, que leur texte ne tombe pas sous le coup de la loi. Ils ne sont aucunement soumis à un arbitraire mais doivent simplement assumer la responsabilité de leurs éventuels abus de la liberté d’expression. La loi Gayssot n’instaure pas une censure et les limites qu’elle impose à la liberté d’expression, non seulement ne sont pas exceptionnelles, mais ont été reconnues comme fondées et justifiées lors de plusieurs décisions d’instances européennes de protection des droits de l’homme.
5. Il n’y a pas de débat.
Bien que la majorité des critiques «de bonne foi» de la loi Gayssot ne fassent pas appel à ce genre d’arguments, on voit parfois fleurir l’argumentaire sur la nécessité d’un «débat», sur la nécessité du droit à se «forger une opinion». Une forme édulcorée de ces critiques fait parfois appel à une prétendue nécessité absolue du doute pour arriver à la connaissance.
Bien que la plupart du temps ces critiques soient émises par des thuriféraires des négationnistes qui sont parfaitement hypocrites, elles pourraient abuser un lecteur candide.
Il n’est pas nécessaire de douter de la réalité de la bataille de Verdun pour arriver à la conviction que la bataille de Verdun a bien eu lieu. Le doute ne saurait être érigé en instrument systématique de connaissance, surtout lorsque ce doute est consubstantiellement porteur d’un discours de haine et d’exclusion comme c’est le cas du négationnisme. Descartes met en garde contre une posture de doute absolu chez des «sceptiques» qui «ne doutent que pour douter et affectent d’être irrésolus» (Discours de la méthode, 1637, 10-18, 1951, p. 46). L’historien Marc Bloch a relevé que «le scepticisme de principe n’est pas une attitude intellectuelle plus estimable ni plus féconde que la crédulité avec laquelle il se combine aisément dans beaucoup d’esprits un peu simples» (Marc Bloch, Apologie pour l’histoire ou Métier d’historien, Armand Colin, 1974, p. 63-64). Le scepticisme radical n’est qu’un déguisement d’un dévoiement méthodologique, depuis longtemps disqualifié en histoire: l’hypercritique (voir à ce sujet Henri Irénée Marrou, De la connaissance historique, éd. du Seuil, 1975, p. 92-93 et 130-139).
Rien ne garantit que le sceptique radical, éventuellement de bonne foi, ne va pas basculer. Serge Thion, intelligence pointue, sociologue averti des sociétés de la péninsule indochinoise a basculé dans le négationnisme. Même si l’on ne peut être certain qu’il fût de bonne foi au départ…
De plus, il n’est pas possible de faire abstraction du fait que le négationnisme est un discours antisémite. Il est hors de question de laisser un discours antisémite s’épanouir librement pour la simple raison qu’il prétendrait être un discours historique, ce qu’il n’est pas.
Nous ne sommes pas sur le terrain des «opinions». Même la jurisprudence américaine (pourtant placée sous l’égide du tout puissant premier amendement) reconnaît que la présentation frauduleuse des faits ne relève pas de l’«opinion». La réalité du génocide ne relève pas d’une opinion que tout un chacun serait «en droit» de se forger à l’exposition de la «thèse» de son existence et de celle de son inexistence.
Il est ici nécessaire de faire quelques rappels sur la notion de «débat».
Le débat, tel que le réclament les négationnistes suppose (et c’est cela qui les intéresse) un public, implique une temporalité (quelques dizaines de minutes au plus) et des modalités (égalité des temps de parole) qui jouent toujours en faveur de l’intervenant à l’argumentaire le plus spectaculaire et le plus doué pour la rhétorique. Ce n’est pas forcément celui qui tient le discours le plus exact. On le sait au moins depuis Platon.
En fait, un débat qu’on voudrait sain, ne peut avoir lieu qu’entre personnes honnêtes qui utilisent la même méthodologie pour discuter de vérité. On ne saurait avoir le moindre échange public avec des individus qui cultivent systématiquement la mauvaise foi et le mensonge, comme les négationnistes. N’importe quelle personne sensée a pleinement conscience qu’aucun débat n’est possible avec un interlocuteur de mauvaise foi. Un tel interlocuteur multiplie les contre-vérités spectaculaires et les accumule: lors même que l’intervenant de bonne foi prend le temps de démonter un de ces mensonges, l’autre en a déjà aligné trois de plus. Ce genre de tonneau des Danaïdes ne peut être vidé dans un «débat».
De plus, et surtout, l’histoire ne se fait pas dans des «débats publics» (forme de discussion systématiquement réclamée par les négationnistes). Qu’il suffise ici de citer le paléontologue Stephen Jay Gould qui a entrepris, lui, de contrer les «créationnistes», ces illuminés qui prétendent que la terre a été créée il y a 7000 ans, selon des modalités rhétoriques très proches de celles des négationnistes.
«Le débat est une forme d’art. Il s’agit de sortir victorieux de la confrontation. Il ne s’agit pas de découvrir la vérité. Le débat relève d’un certain nombre de règles et de procédés qui n’ont absolument rien à voir avec l’établissement des faits […] Ils [les créationnistes] sont très bons à ce jeu-là. Je ne pense pas que je pourrais avoir le dessus dans un débat contre les créationnistes»
(Conférence donnée à Caltech en 1985, cité par Michael Shermer, Why People Believe Weird Things, W. H. Freeman and Company, New York, 1997, p. 153).
Le constat de Stephen Jay Gould est parfaitement transposable aux négationnistes. La réclamation par les négationnistes et leurs thuriféraires d’un «débat public» montre une seule chose: seule une tribune pour leur propagande les intéresse. Or, le métier d’historien ne se pratique pas sur une tribune, mais dans les archives, sur le terrain, dans les revues, par un travail de longue haleine.
Rappelons en outre que les Protocoles des Sages de Sion furent en leur temps amplement «débattus» et leur caractère antisémite et faux parfaitement démontré. Pourtant ils ne cessèrent d’être édités et de faire des dégâts considérables. Il aurait fallu les interdire tout simplement.
La réalité de l’extermination des Juifs n’est pas la conclusion des travaux des historiens, mais l’événement sur lequel ils travaillent, le point de départ de ce travail, leur matériau. Les historiens établissent comment, pourquoi, dans quel contexte cet événement a eu lieu, et permettent de mieux le connaître et le comprendre. Ils ne décident pas s’il a eu lieu ou non. La réalité des faits existe en dehors de leurs discours. Le discours négationniste ne constitue pas l’expression d’une «opinion». Il élabore un discours antisémite en falsifiant la réalité et l’histoire de cette réalité.
Le fait de parler d’«opinion» à propos du négationnisme semble suggérer (plus ou moins consciemment) que nous serions en présence d’une «thèse» comme une autre, d’une «autre version» de l’histoire. Ce n’est absolument pas le cas, pour les deux raisons déjà évoquées:
- Le génocide est un fait, pas une opinion.
- Par sa méthodologie, le discours négationniste ne relève absolument pas d’un discours historien et ne peut prétendre à se poser en «interlocuteur» de bonne foi. Il trahit toutes les règles de production de la connaissance historique. Il pratique l’hypercritique, le mensonge, la falsification, la citation hors contexte.
Or, il faut bien le reconnaître: un mensonge négationniste, s’il s’énonce en une phrase, en nécessite quarante pour la démonstration du mensonge. On en trouvera un exemple paradigmatique ici: https://phdn.org/negation/plaques4m.html.
Imaginons qu’une secte décide de promouvoir la double «thèse» suivante: le sida ne serait pas dû à un virus et le préservatif n’est pas une protection efficace contre le sida, qui en fin de compte n’est pas une maladie sexuellement transmissible. Autrement dit: le préservatif est inutile. Imaginez que le tout soit servi par une rhétorique pseudo-scientifique qui apparaisse crédible aux yeux du profane, et en appelle, évidemment, à la nécessité de «se forger une opinion».
Tant que ces imbéciles ne répandent pas leur discours, pas de problème. Mais le jour où le Monde fait sa première page sur le sujet, ainsi que le Parisien, qu’une revue prétendument médicale est distribuée par les NMPP, que des tracts sont distribués dans les lycées, la situation est-elle toujours la même? Le citoyen, le législateur ne doit-il pas intervenir avant que ne surgisse un problème de santé publique? Doit-il attendre que des adolescents se soient «forgés une opinion» au prix de leur vie?
6. Caractère pervers du négationnisme et nécessité de la loi Gayssot
Ce que la loi Gayssot prévient, c’est la diffusion des textes négationnistes sans aucun garde fou. Cela est nécessaire pour une raison simple que j’ai déjà exposée: le candide, tout honnête homme qu’il soit, n’est généralement pas outillé pour décortiquer les mensonges négationnistes. Les négationnistes connaissent bien l’histoire du génocide et son historiographie ainsi que la façon, souvent erronée, dont cette histoire est perçue par la mémoire collective. Ils jouent des erreurs de la perception collective et de l’ignorance, en réalité énorme, de la plupart des gens sur le génocide. Nombreux sont ceux qui ont l’impression de connaître cette histoire parce qu’il y est fait souvent allusion dans les médias. Mais cette impression de connaître est erronée, notamment parce que les grands médias donnent une image extrêmement simplifiée, lorsqu’elle n’est pas fausse, de l’histoire du génocide, et permet aux négationnistes de s’insérer dans les erreurs des représentations collectives. Si l’on vous dit qu’en 1991, le nombre officiel de morts d’Auschwitz est passé de 4 à 1 million, sans que le total de 6 millions soit révisé à la baisse en proportion, vous serez incapable de déceler la manipulation, à moins de connaître, non seulement l’histoire d’Auschwitz, mais aussi les historiographies communiste et occidentale d’Auschwitz (voir à ce sujet: https://phdn.org/negation/plaques4m.html). Qui connaît tout cela dans le grand public? Ainsi que je l’ai écrit, il suffit d’une phrase pour énoncer un mensonge négationniste. Il en faut quarante pour l’analyser et le réfuter. S’insinuant dans les lacunes naturelles de la connaissance du génocide par le plus grand nombre, le mensonge négationniste répand toute la charge antisémite de son discours. Un candide qui n’aurait pas le bagage historique, historiographique et philologique nécessaire à l’identification de la tromperie négationniste, peut se laisser empoisonner par celle-ci.
Quand on sait qu’un faux aussi grossier que les Protocoles des Sages de Sion a «convaincu» tant de personnes de sa validité lors même qu’il était analysé et réfuté, il est permis d’être ce que Karl Popper nomme un «épistémologue pessimiste»: la vérité ne triomphe pas nécessairement de par sa simple nature de vérité.
Les nombreuses analyses de mensonges négationnistes qui figurent sur le présent site web sont autant d’illustrations du caractère pervers et élaboré du discours négationniste. L’auteur a suffisamment travaillé sur ces mensonges pour constater que, si subtil que soit le mensonge négationniste, il y avait toujours mensonge, mais qu’il fallait, parfois, un travail de longue haleine pour le mettre au jour. Non seulement cette analyse n’est généralement pas possible en «temps réel» lorsque le mensonge négationniste est proféré, mais la nature même de la réfutation (honnête, donc élaborée et complexe) la rend moins immédiatement «intelligible» par le candide qui aurait la chance d’y avoir accès après avoir été exposé au mensonge.
Dans la mesure où le mensonge négationniste porte consubstanciellement en lui un discours violemment antisémite, la meilleure solution demeure donc d’éviter que le mensonge soit proféré publiquement en premier lieu.
Conclusion
Les bonnes âmes «libérales» qui méconnaissent la perversité du discours négationniste et critiquent la loi Gayssot en une posture confortable («pour la liberté d’expression», «contre la censure», «pour la liberté de recherche», «pour la liberté d’opinion», «contre les vérités officielles», etc.), sont naïves et surtout très mal informées. Elles s’aveuglent en refusant implicitement de prendre acte du caractère avant tout antisémite du négationnisme. La plupart n’ont tout simplement pas cherché à approfondir les motifs d’une nécessaire sanction et se laissent berner par un grossier tour de passe-passe négationniste: grimer un discours antisémite en discours historique, lors même que la méthode négationniste trahit de façon absolue toutes les règles de la pratique historienne et instaure en fait une anti-histoire.
Aux personnes de bonne foi qui critiquent la loi Gayssot, il convient de poser les questions suivantes qui s’enchaînent:
- Sont-elles favorables au principe (aujourd’hui en vigueur en France) de la sanction des discours d’incitation à la haine?
- Prennent-elles acte du caractère avant tout antisémite du discours négationniste?
- En cas de réponses positives aux deux premières questions (l’auteur imagine cependant difficilement que la réponse à la deuxième question ne soit pas positive), admettent-elles le bien-fondé du principe de la sanction de l’expression publique du discours négationniste, en tant que discours antisémite?
- En cas de réponse positive à cette troisième question (ici encore l’auteur imagine mal une réponse négative…), quelle alternative proposent-elles à la loi Gayssot?
Une critique de la loi Gayssot ne peut faire l’économie d’un travail d’information sur les ressorts, tous les ressorts, du discours négationniste. Ensuite, et ensuite seulement, la critique est envisageable, non plus «de bonne foi», mais informée et débarrassée de toute naïveté. Cette critique-là reste à faire. Je laisse le mot de la fin à Pierre-André Taguieff:
«L’honnêteté intellectuelle, dès lors qu’elle se fonde sur une insuffisante information, est le meilleur vecteur de la désinformation»
(Pierre-André Taguieff, «La stratégie culturelle de la “Nouvelle Droite” en France (1968-1983)», dans Robert Badinter (dir.), Vous avez dit Fascisme?, Arthaud/Montalba, 1984, p. 30).
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